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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/2879/2021

ACJC/1352/2024 du 21.10.2024 sur JTBL/454/2023 ( OBL ) , RENVOYE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2879/2021 ACJC/1352/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 21 OCTOBRE 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 1er juin 2023, représentée par Me Pierre BANNA, avocat, rue Verdaine 15,
CP 3015, 1211 Genève,

 

et

 

PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA, sise route du Grand-
Lancy 6A, 1227 Les Acacias, intimée, représentée par Me Stéphane PENET, quai Gustave-Ador 2, CP 3021, 1211 Genève 3.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/454/2023 du 1er juin 2023, reçu par A______ SA le 9 juin 2023, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a, sur demande principale, condamné A______ SA à payer à PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA la somme de 34'394 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le 1er mai 2020 (ch. 1 du dispositif).

Statuant sur demande reconventionnelle de A______ SA, le Tribunal a débouté celle-ci de ses conclusions (ch. 2).

Statuant sur les deux demandes, le Tribunal a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et dit que la procédure était gratuite (ch.4).

B. a. Par acte déposé le 10 juillet 2023 à la Cour de justice, A______ SA forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut, sur demande principale, à ce que la Cour constate qu'elle doit à PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA la somme de 31'567 fr. 50 plus intérêts à 5% l'an dès le 1er mai 2020 à titre d'indemnité pour occupation illicite des mois d'avril et mai 2020.

Sur la demande reconventionnelle, elle conclut à ce que la Cour condamne PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA à lui payer 159'745 fr. 35 avec intérêts à 5% l'an dès le 15 mars 2016.

Toujours sur demande reconventionnelle, A______ SA conclut subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal pour complément d'instruction.

b. Dans sa réponse du 12 septembre 2023, PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA conclut à la confirmation du jugement entrepris.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.

d. Par courrier du 19 décembre 2023, la Cour a avisé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. PORTS FRANCS ET ENTREPOTS DE GENEVE SA (ci-après : PFEG SA) a pour but l'exploitation des dépôts francs sous douane et hors douane, des entrepôts et bâtiments qui lui sont liés, appartenant à l'ETAT DE GENEVE, à elle-même ou à des tiers, en pleine propriété, en droit de superficie ou sous toute autre forme.

b. Depuis plus de cinquante ans, PFEG SA loue à cette fin la parcelle n° 1______ de la commune Genève-Plainpalais, sise route des Jeunes 7 à Genève, sur laquelle est érigé le bâtiment dit "Grand Hangar".

Cette parcelle était à l'origine propriété de la FONDATION POUR LES TERRAINS INDUSTRIELS (ci-après : FTI) et l'ETAT DE GENEVE la louait à PFEG SA sur la base d'un droit de superficie qui lui avait été accordé par la FTI.

c. PFEG SA sous-louait les locaux du "Grand Hangar" à différentes entreprises. Elle facturait à celles-ci la partie du droit de superficie et de la taxe d'équipement proportionnellement à leur surface, en plus d'un loyer net qui restait en ses mains.

d. Dès 2003, A______ SA a pris en sous-location auprès de PFEG SA une surface totale de 1'647 m2 du "Grand Hangar".

Selon contrat du 19 octobre 2010, le sous-loyer était fixé à 189'405 fr. par année. Un droit de superficie FTI (8 fr. 50/m2/an) et une taxe d'équipement FTI (1 fr. 80/m2/an) devaient être payés en sus.

e. A______ SA s'acquittait d'un montant trimestriel de 51'592 fr. 30 (soit 206'369 fr. 20 par année et 17'197 fr. 30 par mois), composé de 47'351 fr. 25 (soit 189'405 fr. par année) à titre de "location", de 3'499 fr. 90 à titre de "droit superficie FTI" et de 741 fr. 15 à titre de "taxe équip. FTI".

f. Le 17 décembre 2010, la propriété de la parcelle 1______ est passée à L'ETAT DE GENEVE.

PFEG SA a cependant continué de payer la rente de droit de superficie et la taxe d'équipement à FTI, qui gérait la parcelle sur le plan administratif pour le compte de L'ETAT DE GENEVE.

g. Le droit de superficie constitué par FTI en faveur de l'ETAT DE GENEVE a été radié le 10 octobre 2013, sur demande du second.

La rente de droit de superficie et la taxe d'équipement n'étaient dès lors plus dues à la FTI par l'ETAT DE GENEVE dès le 1er décembre 2013.

h. Selon un contrat conclu entre l'ETAT DE GENEVE et PFEG SA portant sur la période du 1er octobre 2013 au 31 décembre 2019, le loyer annuel s'élevait à 167'040 fr. Ce montant était équivalent à ce que PFEG SA versait auparavant pour le "Grand Hangar" à titre de rentes de droit de superficie et de taxes d'équipement dues à FTI.

i. La B______ est devenue propriétaire de la parcelle 1______ le 1er janvier 2014.

C'est ainsi à celle-ci que PFEG SA a versé le loyer annuel de 167'040 fr., depuis cette date.

j. Le bail liant la B______ à PFEG SA a été résilié pour son échéance contractuelle du 31 décembre 2019, par avis du 12 mai 2014.

k. Par jugement du 17 novembre 2016, le Tribunal a rejeté la requête en prolongation de bail déposée par PFEG SA.

l. Par pli du 10 janvier 2017, PFEG SA a informé A______ SA de ce que le propriétaire du "Grand Hangar" avait prévu de récupérer son bâtiment pour le détruire à partir de janvier 2020 et réaliser de nouvelles constructions, son bail prenant fin au 31 décembre 2019.

m. Par courriel adressé le 20 octobre 2017 à la B______, ayant appris que celle-ci était la nouvelle propriétaire, C______, administrateur président de A______ SA s'est enquis de la possibilité d'une éventuelle prolongation du bail.

n. La B______ a confirmé à A______ SA qu'elle était propriétaire de la parcelle 1______ depuis le 1er décembre 2013 par courrier du 22 novembre 2017. Le bail principal avait été résilié pour le 31 décembre 2019, car le "Grand Hangar" ferait l'objet d'une transformation dès cette date.

o. Par courrier du 9 mars 2020, A______ SA a sollicité de PFEG SA de lui indiquer les motifs pour lesquels les rentes de droit de superficie FTI et la taxe d'équipement FTI, représentant un montant annuel de 16'964 fr. 10, avaient continué à lui être facturées depuis le 17 décembre 2010.

p. Par courriel du 9 avril 2020, PFEG SA a répondu que le montant du loyer principal n'avait pas été modifié en 2014; il était versé à la B______ en tant que loyer en lieu et place des rentes de droit de superficie et de la taxe d'équipement versées précédemment à la FTI.

q. Par courrier du 28 mai 2020, la sous-locataire a déclaré restituer les locaux à la B______.

r. Une procédure en évacuation sur demande de la B______ étant en cours par-devant le Tribunal, A______ SA a été condamnée à l'évacuation de la parcelle n° 1______ par jugement du 3 juillet 2020.

s. Par requête déposée le 12 février 2021 devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, déclarée non conciliée à l'audience de la Commission du 12 avril 2021 et portée devant le Tribunal le 12 mai 2021, PFEG SA a conclu au paiement par A______ SA de 34'394 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le 1er mai 2020 à titre d'indemnités pour occupation illicite pour les mois d'avril et mai 2020 et de 249 fr. 85, plus intérêts à 5% l'an dès le 11 juin 2020 à titre d'un changement de cylindre et de deux clés manquantes.

t. Par écriture datée du 30 juillet 2021, reçue au Tribunal le 3 août 2021, A______ SA a conclu au déboutement de PFEG SA et a formé une demande reconventionnelle en paiement de 159'745 fr. 35, plus intérêts à 5% l'an dès le 15 mars 2016 (date moyenne). Ce montant était réclamé à titre de remboursement des montants de 16'964 fr. par année versés à PFEG SA pour le droit de superficie et la taxe d'équipement, alors que PFEG SA n'avait plus à payer ces taxes dès le 1er janvier 2011. Dès cette date, le loyer annuel des locaux litigieux devait être fixé à 189'405 fr.

u. PFEG SA a conclu au déboutement de A______ SA de ses conclusions reconventionnelles.

Elle a notamment allégué que, suite à l'extinction du droit de superficie, les montants valant rente de superficie et taxe d'équipement avaient été remplacés dans le bail principal par un montant équivalent, libellé « loyer ».

PFEG SA a excipé de la prescription des prétentions formulées par A______ SA.

v. A l'audience du 1er mars 2022, D______, membre de la direction de PFEG SA, a déclaré que les loyers à charge des entreprises sous-locataires de surfaces dans le "Grand Hangar" se situaient dans une fourchette basse par rapport au marché. Les contrats de celles-ci n'avaient pas été modifiés après la radiation du droit de superficie; les montants à leur charge étaient restés les mêmes. PFEG SA était chargée de l'entretien et de la réparation des surfaces.

A sa connaissance, les sous-locataires n'avaient pas été informés en 2010 que la FTI avait vendu la parcelle à l'Etat de Genève, ni que la B______ était devenue propriétaire en 2013.

C______ a déclaré avoir rendu l'ensemble des clés des locaux litigieux. Pour lui, PFEG SA, avec laquelle il avait signé le bail en 2003, était la propriétaire de ces locaux. Il avait appris que tel n'était pas le cas lorsqu'il avait consulté son avocat en août 2019 afin de demander une prolongation de son bail. Il s'était alors demandé pourquoi il avait dû continuer à payer des "taxes FTI".

w. E______, juriste auprès de la B______, entendu en qualité de témoin lors de l'audience du 12 avril 2022, a déclaré qu'aucune prétention n'avait été émise par la bailleresse principale en lien avec des clés manquantes, vu qu'une autorisation de démolition était en force. Il a également indiqué, qu'à sa connaissance, la B______ n'avait pas versé de taxe à la FTI depuis qu'elle était propriétaire de la parcelle et que la FTI n'avait plus rien à voir avec cette parcelle depuis lors, sous réserve de son développement futur.

Le témoin F______, juriste auprès de la FTI qui n'avait pas connaissance du dossier concernant le « Grand Hangar », a déclaré que les taxes d'aménagement et d'équipement ainsi que le loyer constituaient les rentes de superficie. A partir du moment où il n'y avait plus de droit de superficie, il n'y avait plus de rentes.

x. Dans leurs plaidoiries finales, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

PFEG SA a admis que le sous-loyer à charge de A______ SA n'aurait pas dû être libellé sur trois postes. Les deux parties intitulées « droit de superficie » et « taxe d'équipement » correspondaient en réalité au loyer principal versé à la B______, au prorata de la surface occupée par la sous-locataire. L'autre partie représentait sa marge, l'entretien des locaux, l'amortissement des investissements et des frais divers.

y. A______ SA a contesté la prescription de sa prétention en restitution de la part du loyer désignée comme « droit de superficie » et « taxe d'équipement ».

z. Le Tribunal a retenu que A______ SA n'avait pas établi s'être acquittée des indemnités pour occupation illicite relatives aux mois d'avril et de mai 2020.

Le montant des indemnités devait être déterminé par « le sort réservé à la demande reconventionnelle, visant à la suppression d'une partie du loyer versé précédemment par la sous-locataire ».

Le délai de prescription relatif d'un an prévu par l'ancien article 67 al.1 CO avait commencé à courir au plus tard le 22 novembre 2017, date à laquelle la sous-locataire devait savoir que la B______ était la propriétaire du bâtiment, de sorte que l'action de A______ SA était prescrite et que, partant, elle devait être déboutée de ses conclusions.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC; Jeandin, Commentaire Romand, Code de procédure civile 2ème éd., 2019, n. 13 ad art. 308 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

En l'espèce, eu égard aux montants dont le paiement est requis, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. Le Tribunal s'est fondé sur la prescription, en particulier le délai relatif d'un an de l'ancien art. 67 CO pour rejeter les prétentions reconventionnelles, et accorder à l'intimée l'entier du loyer payé par l'appelante au titre d'occupation illicite, alors que cette dernière faisait valoir qu'une partie des éléments du loyer étaient indus.

L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir ainsi violé les art. 8 CC et 67 CO. En premier lieu, elle soutient qu'il appartenait à l'intimée, en sa qualité de sous-bailleresse, de démontrer la connaissance du droit par la sous-locataire en faisant un parallèle avec ce qui a été développé par la jurisprudence s'agissant de la prétention en constatation de la nullité du loyer initial pour défaut de formule officielle.

En second lieu, l'appelante soutient que la prescription ne pouvait commencer à courir qu'en juillet 2019 et non pas en novembre 2017, comme retenu par le Tribunal.

2.1 Dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral a dû se prononcer sur la question du respect du délai de prescription relatif de l'action en restitution des parts de loyer versées indûment (ATF 140 III 583 consid. 3.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_254/2016 du 10 juillet 2017 consid. 3.1.3.1; 4A_517/2014 du 2 février 2015 consid. 4.1.2). Il a précisé que le créancier a connaissance de son droit de répétition - et le délai de prescription relatif d'un an commence à courir (art. 67 al. 1 aCO) - lorsqu'il connaît suffisamment d'éléments pour fonder et motiver son action en justice, laquelle n'a pas besoin d'être chiffrée (art. 85 CPC). Cela suppose qu'il ait connaissance de la mesure approximative de l'atteinte à son patrimoine, de l'absence de cause du déplacement de patrimoine et de la personne de l'enrichi. Est déterminant le moment de la connaissance effective de sa prétention, et non celui où il aurait pu connaître son droit en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances (ATF 146 III 82; 129 III 503 consid. 3.4; 109 II 433 consid. 2).

Dans un autre arrêt, le Tribunal fédéral a considéré qu'il y a prise de connaissance déclenchant le délai lorsque le créancier a un tel degré de certitude quant à la prétention d'enrichissement que l'on peut dire de bonne foi que le créancier n'a désormais plus de raison ou de possibilité de procéder à des clarifications supplémentaires et que, d'autre part, il dispose de suffisamment de documents pour intenter une action, de sorte que l'on peut raisonnablement attendre de lui qu'il le fasse (ATF 127 III 421 consid. 4b ; 82 II 411 consid. 9a ; 63 II 252 consid. 3). La certitude du droit à l'enrichissement présuppose la connaissance de l'étendue approximative de la perte de patrimoine, de l'absence de motif du déplacement de patrimoine et de la personne de l'enrichi (ATF 105 II 92 consid. 3a; ATF 82 II 411 consid. 9b ; 63 II 252 consid. 3). Contrairement à la règle prévue à l'art. 26 CO pour l'erreur, il ne s'agit pas de savoir à quel moment la personne lésée aurait pu reconnaître le droit à l'enrichissement en faisant preuve de l'attention à laquelle on peut s'attendre au vu des circonstances, mais on se base sur la connaissance effective du droit (ATF 109 II 433 consid. 2).

Le 1er janvier 2020 sont entrées en vigueur les dispositions révisées du droit de la prescription.

Selon l'article 49 al. 1 Titre Final CC, lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus long que l'ancien droit, le nouveau droit s'applique dès lors que la prescription n'est pas échue en vertu de l'ancien droit. En particulier, tous les délais d'un an de l'article 60 al. 1 CO ou 67 al. 1 CO qui courent encore au 1er janvier 2020 seront prolongés de deux ans supplémentaires. Tout délai de prescription déjà échu avant l'entrée en vigueur du nouveau droit ne renaît pas au 1er janvier 2020 (pichonnaz/werro), Le nouveau droit de la prescription : quelques aspects saillants de la réforme, in : Colloque du droit de la responsabilité civile 2019, Fribourg, 2019, p. 31).

2.2 Le Tribunal a fait partir le délai de prescription relatif au plus tard à la date à laquelle la B______ a confirmé à l'appelante être la propriétaire de la parcelle, soit le 22 novembre 2017.

Le délai relatif commence à courir lorsque le créancier connaît suffisamment d'éléments pour fonder et motiver son action en justice; est déterminant le moment de la connaissance effective de sa prétention et non celui où il aurait pu connaître son droit en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances.

Dans le cas d'espèce, il ressort de la procédure et en particulier des auditions des témoins et des parties, que la qualité de sous-bailleresse de l'intimée n'a pas été indiquée à l'appelante. Ce n'est qu'à réception du courrier du 10 janvier 2017 que l'appelante a été informée que l'intimée n'était pas la propriétaire du « Grand Hangar ». Cette information ne permettait toutefois pas encore à l'appelante de se faire une idée précise de la prétention d'enrichissement.

Certes, dès 2010, les droits et taxes litigieux ont été mentionnés distinctement dans le contrat de sous-location. L'intimée n'a toutefois pas établi avoir dûment informé l'appelante à ce sujet.

Les représentants de la FTI et de la B______, entendus comme témoins, n'ont pas été en mesure d'indiquer les raisons pour lesquelles les éléments précités avaient continué à être perçus par la FTI, alors que l'Etat de Genève était devenu propriétaire de la parcelle.

Compte tenu de la complexité de la situation et des recherches qui étaient nécessaires à déterminer les changements successifs de propriétaire de la parcelle - sachant qu'initialement l'appelante n'était pas informée de sa qualité de sous-locataire - il ne peut pas être retenu que la sous-locataire était en mesure de fonder et motiver sa prétention en 2017, sur la base de la simple connaissance de l'identité du propriétaire de la parcelle.

Le concours d'un avocat a été nécessaire à la compréhension de la situation.

Ainsi, ce n'est qu'en juillet 2019 (date non contestée) que l'appelante a disposé de suffisamment d'éléments. C'est à cette date au plus tôt que le délai de prescription a commencé à courir.

La prescription n'étant pas échue à l'entrée en vigueur du nouveau droit sur la prescription, c'est le nouveau délai relatif de trois ans qui est applicable en l'espèce.

C'est donc à tort que le Tribunal a considéré que les prétentions reconventionnelles de l'appelante étaient prescrites.

Eu égard aux considérations qui précèdent, le jugement entrepris sera annulé.

Le Tribunal n'ayant examiné ni la qualification juridique des montants perçus au titre de rente de superficie et taxe d'équipement, ni les prétentions reconventionnelles de l'appelante, un renvoi aux premiers juges s'impose, afin de respecter le principe du double degré de juridiction.

La cause sera ainsi renvoyée au Tribunal pour qu'il statue dans le sens des considérants qui précèdent (art. 318 al. 1 let. c ch. 1 CPC).

3.                  A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 10 juillet 2023 par A______ SA contre le jugement JTBL/454/2023 rendu le 1er juin 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/2879/2021.

Au fond :

Annule le jugement entrepris.

Renvoie la cause au Tribunal des baux et loyers pour qu'il statue dans le sens des considérants.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Mesdames Pauline ERARD et
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur Serge PATEK, Madame
Sibel UZUN, juges assesseurs; Madame Victoria PALAZZETTI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.