Décisions | Chambre des baux et loyers
ACJC/1124/2024 du 11.09.2024 sur JTBL/1116/2023 ( OBL ) , IRRECEVABLE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/18259/2022 ACJC/1124/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des baux et loyers DU MERCREDI 11 SEPTEMBRE2024 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 20 décembre 2023,
et
FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL, sise ______, intimée, représentée par C______.
A. Par jugement JTBL/1116/2023 du 20 décembre 2023, expédié pour notification aux parties le même jour, le Tribunal des baux et loyers a déclaré recevable la demande formée par A______ (ch. 1), l'a rejetée (ch. 2), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3), et dit que la procédure était gratuite (ch. 3).
En substance, le Tribunal a retenu que la requête était tardive sous l'angle de l'augmentation de loyer notifiée le 28 août 2018, que A______ n'avait pour le surplus pas de droit à l'attribution d'un logement et à l'installation de portes automatiques à l'entrée de l'immeuble, et qu'elle n'établissait pas avoir reçu des "menaces de résiliations de bail".
B. Par acte du 31 janvier 2024, A______ a formé recours contre le jugement précité, qualifié de "honteux" et "humiliant" pour la société et pour elle-même. Elle n'a pas pris de conclusions. Elle a détaillé diverses plaintes relatives à l'état de l'appartement qu'elle occupe, requis des explications relatives à une augmentation de loyer et demandé l'intervention d'une "autre entreprise" pour réaliser des travaux. Elle a sollicité une convocation.
Elle a en outre produit des pièces nouvelles.
La FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL a conclu à l'irrecevabilité de l'appel, subsidiairement au rejet de celui-ci.
A______ n'a pas déposé de réplique, se limitant à faire parvenir à la Cour copie d'un courrier adressé à une date indéterminée à un destinataire non spécifié.
La FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL a déclaré qu'elle contestait la réplique de A______, et persisté dans ses conclusions.
Par avis du 17 mai 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
C. Il résulte de la procédure les faits pertinents suivants:
a. Le 7 avril 2016, la FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL a remis à bail aux époux D______ et A______ un appartement de 4,5 pièces au cinquième étage de l'immeuble sis no. ______ rue 1______ à E______ [GE]. Le loyer mensuel a été fixé à 1'001 fr. et l'acompte provisionnel de chauffage et d'eau chaude à 180 fr.
b. Du 1er mai 2017 au 31 décembre 2018, le loyer annuel a été fixé à 3'624 fr., puis porté, dès cette dernière date, à 17'640 fr. (soit 1'470 fr. par mois), selon avis de majoration de loyer du 28 août 2018.
c. Par jugement du Tribunal de première instance du 17 novembre 2017, le divorce des époux A______/D______ a été prononcé et la jouissance du domicile conjugal notamment attribuée à A______, les deux époux demeurant titulaires du bail.
d. Le 23 septembre 2022, A______ a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d'une requête dirigée contre [la régie] "C______", au sujet d'un appartement de 4,5 pièces sis au 5ème étage de l'immeuble situé no. ______ rue 1______ à E______. Elle a rempli la rubrique "objet du litige et conclusions" de la formule de requête préimprimée de la façon suivante: "Depuis octobre 2017 mon loyer a augmenté de 380 chf – 1'743 chf. Je n'ai jamais été informée par courrier, j'ai contesté – pas de réponse à ce jour. J'ai un avenant de contrat […]. Je réclame la différence de loyer reçue à tort C______. Egalement je demande une baisse de loyer suite travaux".
Après que la Commission de conciliation avait apparemment déterminé, sur la base des pièces (notamment le bail à loyer) déposées par A______ que la régie C______ était la mandataire de la propriétaire de l'immeuble sis no. ______ rue 1______ à E______, soit la FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL, une autorisation de procéder a été délivrée à A______ le 30 janvier 2023.
Cette dernière a porté la cause devant le Tribunal, qui a reçu la requête précitée le 1er mars 2023.
Par ordonnance du 7 mars 2023, le Tribunal a, en application de l'art. 132 al. 1 CPC, imparti un délai à A______ pour préciser ses conclusions en réduction de loyer, sous peine d'irrecevabilité de la demande.
Par acte du 24 mars 2023, A______ a allégué qu'elle n'avait plus d'eau chaude "depuis les travaux", que le parquet était abîmé, que les murs étaient humides et présentaient des champignons et moisissures, que les stores étaient déchirés, et qu'il y avait des mégots de cigarettes sur le balcon provenant des ouvriers. Elle a demandé "pourquoi [s]on loyer a[vait] augmenté", alors qu'elle avait un "avenant de contrat", et a requis l'attribution d'un "logement neuf rue 1______ no. ______ en cours de construction".
Par acte spontané du 10 mai 2023, A______ a demandé, outre les explications relatives à l'augmentation de loyer alléguée et diverses mesures générales, "la condamnation de l'Hospice général" à lui restituer la différence de son loyer depuis 2017 avec des dommages-intérêts pour tort moral.
A l'audience du Tribunal du 23 mai 2023, A______ a conclu à une réduction de loyer mensuel à 482 fr., à la restitution des montants "payés en trop" depuis 2017, à l'attribution d'un logement neuf au dernier étage de l'immeuble sis no. ______ rue 1______, et à l'installation de portes automatiques à l'entrée de l'immeuble. Elle a déclaré qu'elle bénéficiait de prestations de l'Hospice général. Elle a demandé que la régie cesse de lui adresser des "courriers menaçants".
Par réponse du 23 juin 2023, la FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL a conclu, à la forme, à l'irrecevabilité de la demande, au fond, au rejet de celle-ci.
Elle s'est prévalue de ce que la demande aurait été introduite tardivement au Tribunal (soit le 24 mars 2023 alors que l'autorisation de procéder avait été délivrée le 30 janvier 2023), qu'elle avait été formée par A______ seule alors que D______ était colocataire, qu'elle ne comportait pas de conclusions, qu'elle était dirigée contre un tiers, que la Commission de conciliation avait modifié sans droit la partie citée dans la requête de telle sorte que l'autorisation de procéder n'était pas valable, que, s'agissant de la réduction de loyer requise, la procédure prévue à l'art. 270a CO n'avait pas été respectée, que les autres conclusions, outre leur nouveauté, ne reposaient sur rien. Elle a relevé que le loyer était acquitté par l'Hospice général.
Elle a notamment produit une ordonnance rendue par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du 31 janvier 2022 instituant, sur mesures provisionnelles, une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______.
A______ a encore fait parvenir deux courriers au Tribunal, réitérant sa demande d'attribution de logement et de restitution de trop perçu de loyer.
A l'audience du Tribunal du 26 septembre 2023, A______ a requis l'audition du directeur de l'Hospice général et celle du Conseiller d'Etat F______, ainsi qu'une inspection locale. La FONDATION DE LA COMMUNE DE B______ POUR LE LOGEMENT SOCIAL s'est opposée aux réquisitions d'offres de preuves précitées. Sur quoi, les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions, puis la cause a été gardée à juger.
1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).
La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC ; Jeandin in Commentaire Romand du Code de procédure civile, 2e éd., 2019, N 13 ad art. 308 CPC ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).
En l'occurrence, pour autant que les prétentions de l'appelante soient intelligibles, la valeur litigieuse paraît excéder 10'000 fr. (différence de loyers entre 380 fr. et 1'743 fr. depuis 2017), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.
Le délai d'appel a été respecté (art. 311 al. 1 CPC).
1.2. En vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Ainsi, si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêts du Tribunal fédéral 4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1, 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2).
1.3 En l'occurrence, l'acte d'appel ne comporte ni conclusions, ni critique du jugement du Tribunal. En particulier, le raisonnement des premiers juges, qui ont retenu la tardiveté de la requête, n'est pas remis en cause.
Il s'ensuit que l'appel n'est pas recevable.
2. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).
* * * * *
La Chambre des baux et loyers :
Déclare irrecevable l'appel interjeté le 31 janvier 2024 par A______ contre le jugement JTBL/1116/2023 rendu le 20 décembre 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/18259/2022.
Dit que la procédure est gratuite.
Siégeant :
Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Jean-Philippe ANTHONIOZ, Monsieur
Damien TOURNAIRE, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.
|
|
|
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2