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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3631/2024

ATAS/816/2025 du 27.10.2025 ( LCA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3631/2024 ATAS/816/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 octobre 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______

représenté par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat

 

 

demandeur

 

contre

ZURICH COMPAGNIE D'ASSURANCES SA

 

défenderesse

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l'assuré) a été engagé dès le 21 janvier 2020 par B______ SA (ci-après : l'employeuse) en qualité d'ouvrier dans le montage et le démontage d'échafaudages. De ce fait, il était couvert par la police d'assurance perte de salaire maladie no 1______ conclue par son employeuse auprès de ZURICH COMPAGNIE D'ASSURANCE SA (ci‑après : l'assurance) et couvrant l'ensemble du personnel d'exploitation.

Conformément à la police no 1______, l'indemnité journalière correspondait à la variante B et s'élevait à 90% du gain du 31e jour au 750e jour. Les conditions générales d'assurance, édition 1/2015 (ci‑après : CGA), étaient applicables.

Selon les CGA, l'assurance payait l'indemnité journalière pour un ou plusieurs cas de maladie réunis pendant au maximum 720 jours sur une période de 900 jours consécutifs à compter du jour de maladie. L'indemnité journalière n'était pas versée pour plus de 720 jours pour le même cas de maladie. Lorsque le montant de l'indemnité journalière était réduit en raison de prestations de tiers, la durée des prestations était prolongée dans une mesure correspondant à la réduction (art. 8.6 let. b variante B). La réapparition d'une maladie (récidive) était considérée, eu égard au délai d'attente – pour autant que celui-ci ait été convenu par cas de maladie – comme un nouveau cas de maladie lorsque l'assuré n'avait pas été inapte au travail/gain pendant douze mois ininterrompus à cause de cette même maladie (art. 8.7 let. b variante B).

b. L'employeuse a également conclu avec l'assurance la police d'assurance perte de salaire maladie no 2______, couvrant le personnel administratif. L'indemnité journalière correspondait à la variante A et s'élevait à 90% du gain du 31e jour au 730e jour. Les CGA étaient applicables.

B. a. Du 13 mai au 2 octobre 2022, l'assuré, en état d'incapacité totale de travailler pour cause de maladie depuis le 13 avril 2022, a perçu des indemnités journalières de l'assurance de CHF 152.26 par jour, pour un total de CHF 21'778.-. Ce cas a été traité par l'assurance sous la police n1______ et le sinistre no 3______.

b. Conformément aux conclusions de l'IRM de la colonne lombaire et du bassin du 25 avril 2022, l'assuré souffrait d'une hernie discale L5-S1 postéro-latérale droite avec un fragment exclu migré vers le bas à l'origine d'un effet de masse marqué sur la racine S1 droite, ainsi que d'une petite pointe de hernie discale postéro‑médiane L4-L5 restant à distance des racines associée à un HIZ.

c. Il a subi une intervention le 13 mai 2022 en raison de sa hernie discale L5-S1 droite, soit une fenestration L5-S1 par la droite pour microdistectomie et séquestrectomie L5-S1.

d. Le 28 septembre 2022, au terme d'une IRM de la colonne cervicale, il a été conclu à une discopathie pluri-étagée de C3-C4 à C6-C7 avec réduction des espaces péri-médullaires antérieurs, modérée, une sténose foraminale uncarthrosique droit C3-C4, une sténose foraminale uncarthrosique à prédominance gauche C4-C5, une protrusion discale médiane paramédiane droite C5-C6 et une protrusion discale postéro-latérale droite avec ébauche d'hernie discale C6-C7.

e. Le rapport d'IRM de la colonne cervicale du 15 février 2023 concluait à une hernie discale postéro-latérale droite C6-C7 (surajoutée à un débord ostéophytique) légèrement migrée vers le bas arrivant au contact de la racine C8 droite, un status superposable de la petite hernie postéro-latérale droite C5-C6 restant à distance des racines et un rétrécissement foraminal en C3-C4 droit et C4‑C5 gauche.

f. Dès le 20 mars 2023, l'assuré s'est à nouveau retrouvé en état d'incapacité totale de travailler pour cause de maladie.

g. Le 30 mars 2023, l'assuré a subi une intervention en raison de sa hernie discale C6-C7 avec cervico brachialgies aigues D résistantes au traitement, soit une discectomie cervicale et arthroplastie C6-C7 (prothèse Baguera 6 large).

h. Le 13 avril 2023, l'employeuse a annoncé l'incapacité de travail à compter du 20 mars 2023 à l'assurance, en se référant à la police no 2______.

L'assurance a traité le sinistre sous ce numéro de police, sous le sinistre no 4______, et a versé au demandeur des indemnités journalières à compter du 19 mars 2023.

i. Le 21 novembre 2023, sur mandat d'expertise de l'assurance, le docteur C______, spécialiste en médecine physique et réadaptation, a retenu comme diagnostics avec influence sur la capacité de travail (1) des lombo-sciatalgies chroniques droites, de trajet S1 (M54.4) sur fibrose péri-radiculaire S1 droite et status post-fenestration L5-S1 avec microdiscectomie et séquestrectomie L5-S1 le 13 mai 2022 et (2) des cervicalgies chroniques (M54.2) sur status post‑discectomie et arthroplastie C6-C7 le 30 mars 2023. Il a conclu à une capacité de travail dans l'activité habituelle nulle et une pleine capacité de travail dans une activité adaptée avec rendement complet, sous réserve du respect des limitations fonctionnelles citées.

j. Le 27 novembre 2023, l'assurance a informé l'assuré de la fin des prestations au 29 février 2024, au vu de sa capacité de travail dans une activité adaptée.

k. Le 30 décembre 2023, l'assuré s'est opposé à la fin des prestations.

l. Le 9 février 2024, le docteur D______, médecin spécialiste en médecine interne générale, a demandé à l'assurance de revoir le dossier, la capacité de travail dans une activité adaptée lui semblant nulle. Le patient présentait d'importantes douleurs à l'étage cervical comme à l'étage lombaire, irradiant notamment dans les membres supérieurs, pour lequel divers avis neurochirurgicaux étaient en cours, de même qu'un suivi à la consultation de la douleur. Le patient avait par ailleurs été adressé chez le psychiatre de la consultation de la douleur, le handicap douloureux semblant également avoir des répercussions psychiatriques.

m. Le 28 février 2024, l'assuré a à nouveau demandé la réévaluation de son cas, les douleurs chroniques qu'il endurait l'empêchant de travailler, même dans des activités non physiques.

n. Le 5 avril 2024, le docteur E______, médecin-conseil de l'assurance, a conclu que les contestations de début 2024 des médecins traitants, soit celle de la docteure F______, médecin spécialiste en médecine interne générale, du 24 janvier 2024, et celle du Dr D______ du 9 février 2024, n'étaient que faiblement argumentées et pas documentées par l'envoi des rapports de consultation spécialisée et qu'il n'y avait a priori pas de raison de douter de la validité de l'expertise, proposant le maintien de la décision avec les réserves invoquées par l'expert, sous réserve que le médecin traitant ou son remplaçant n'arrivent pas à fournir à l'assurance des rapports de consultations spécialisées qui permettraient de retenir un nouvel élément.

o. Le 2 mai 2024, l'assurance a maintenu la fin des prestations au 29 février 2024, conformément à la proposition du Dr E______, qui avait conclu le 5 avril 2024 que les contestations de début 2024 des médecins traitants n'étaient que faiblement argumentées et pas documentées par l'envoi des rapports de consultation spécialisée.

p. Le 16 juillet 2024, l'assuré, soit pour lui l’ASSUAS, a demandé une copie de son dossier, se référant au sinistre no 4______.

C. a. Par acte du 31 octobre 2024, l'assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'une demande à l'encontre de l'assurance, concluant à la condamnation de cette dernière au paiement de CHF 4'720.- plus intérêts à 5% dès le 31 mars 2024, CHF 4'567.80 plus intérêts à 5% dès le 30 avril 2024, CHF 4'720.05 plus intérêt à 5% dès le 31 mai 2024, CHF 4'567.80 plus intérêts à 5% dès le 30 juin 2024, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 juillet 2024, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 août 2024, CHF 4'567.80 plus intérêts à 5% dès le 30 septembre 2024, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 octobre 2024, CHF 4'567.80 plus intérêts à 5% dès le 30 novembre 2024, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 décembre 2024, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 janvier 2025, CHF 4'263.30 plus intérêts à 5% dès le 28 février 2025, CHF 4'720.05 plus intérêts à 5% dès le 31 mars 2025 et CHF 1'065.80 plus intérêts à 5% dès le 30 avril 2025, sous suite de frais et dépens.

En mettant un terme aux indemnités journalières, l'assurance avait contrevenu à ses obligations contractuelles en niant à tort toute incapacité de travail. Il était en incapacité de travail pour des cervicalgies et des lombosciatalgies. Ces douleurs avaient par ailleurs provoqué un trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère, avec syndrome somatique invalidant (F33.22). Sa demande en paiement des indemnités journalières du 1er mars 2024 au 30 avril 2025, soit 403 jours ou CHF 61'361.-, en y ajoutant les intérêts moratoires, était fondée.

L'expertise ne prenait pas en compte toutes les atteintes et limitations et minimisait son état de santé.

L'assuré a notamment versé à la procédure un rapport du docteur G______, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, du 19 juin 2024 retenant le diagnostic de trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère avec syndrome somatique, et une capacité de travail nulle dans toute activité depuis mai 2024.

b. Par réponse du 17 décembre 2024, l'assurance a conclu au rejet de la demande, dans la mesure de sa recevabilité, sous suite de frais et dépens. Elle a par ailleurs requis l'édition du dossier de l'assurance-invalidité de l'assuré en mains de l'office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI).

La question de l'exigibilité ne se posait que pour la période du 1er mars au 7 mai 2024, jour de la pose du diagnostic psychiatrique et de la détermination de l'incapacité de travail pour ces motifs. À cette date, l'assuré était toujours sous contrat de travail. Il était couvert pour cette nouvelle incapacité de travail. L'assurance aurait déjà repris la gestion dossier si le demandeur lui avait fait part du nouveau diagnostic. L'incapacité de travail du 13 mai au 2 octobre 2022, 143 jours pendant lesquels le demandeur avait perçu des indemnités journalières, était due à des problèmes de dorsalgies. L'incapacité de travail dès le 20 mars 2023 était également due à des problèmes de dorsalgies, ainsi que de cervicalgies. Il ne s'agissait pas d'une récidive mais du même sinistre, de sorte que les prestations accordées en 2022 devaient être imputées des 720 jours. La nouvelle incapacité de travail depuis le 7 mai 2024 était due aux diagnostics de cervicalgies, lombalgies et trouble dépressif. Il s'agissait d'une incapacité de travail également due aux lombalgies et qui devait être traitée comme suite du cas de 2022 et 2023. Il restait 260 jours d'indemnités à disposition (720 jours – 143 jours – 317 jours [du 19 avril 2023 au 29 février 2024]) et le demandeur pourrait prétendre à CHF 39'587.60. Toutefois, en l'absence d'annonce du diagnostic supplémentaire, elle avait été empêchée de gérer le dossier et déterminer si, à quel taux et pendant quelle période, il avait présenté une incapacité de travail continue. La créance n'était ni prouvée, ni déterminable et encore moins exigible.

c. Par réplique du 2 mars 2025, l'assuré a persisté dans ses conclusions et a sollicité la production du rapport de la Dre F______ du 24 janvier 2024.

Il avait toujours transmis les documents en sa possession à l'assurance, qui était au courant des atteintes somatiques et psychiatriques.

Dans le dossier médico-administratif transmis à ASSUAS, l'assurance n'avait jamais produit de documents concernant l'atteinte indemnisée en 2022. Ce faisant, elle avait adopté un comportement contradictoire en ne portant pas à la connaissance du demandeur toutes les pièces requises. Ce comportement ne méritait pas de protection juridique. Il s'agissait d'un venire contra factum proprium qui constituait un abus de droit. Il ne devait pas être tenu compte de l'incapacité de travail indemnisée du 13 mai au 2 octobre 2022.

L'assurance avait maintenu son refus de prester malgré ses contestations et ne respectait ainsi pas la maxime inquisitoire sociale.

L'OAI avait reconnu une incapacité de travail totale dès mars 2024, de sorte que l'assurance devait continuer de prester au-delà de février 2024.

L'assuré a notamment versé à la procédure les notes de suite de la docteure H______, cheffe de clinique au sein de l'unité de psychiatrie de liaison des Hôpitaux universitaires de Genève, du 13 mars 2024, retenant comme « impression clinique » un épisode dépressif d'intensité moyenne.

d. Par décompte du 10 mars 2025, l'assurance a octroyé à l'assuré des indemnités journalières de CHF 152.26 du 13 mars au 27 novembre 2024, soit CHF 39'587.60.

e. Par duplique du 13 mars 2025, l'assurance a retiré son offre de preuve par expertise formulée en relation avec certains allégués de sa réponse et a à nouveau conclu au rejet intégral de la demande, dans la mesure de sa recevabilité, sous suite de frais et dépens.

Elle n'avait pris connaissance du diagnostic psychiatrique posé le 7 mai 2024 dans le rapport du Dr G______ qu'au moment de la réception de la demande, le 1er novembre 2024, et des notes de suivi du 13 mars 2024 de la Dre H______ qu'avec l'envoi de la réplique, le 5 mars 2025. La créance n'était pas exigible au moment de la demande et, au vu du paiement du 10 mars 2025, elle n'existait plus ni n'était prouvée par la suite.

L'allégation de défaut de production du dossier était tardive et il ne devait pas en être tenu compte. ASSUAS avait demandé le dossier no 4______, lequel avait été transmis. En raison de l'ouverture du dossier sous la mauvaise police, le dossier de 2022 n'était pas visible et avait été découvert uniquement au moment de l'ouverture du litige judiciaire. L'assuré avait connaissance du sinistre pour lequel il avait perçu des prestations et aurait pu le porter à la connaissance de son représentant.

f. Le 7 avril 2025, l'assuré a persisté dans ses conclusions, sous imputation du montant versé par l'assurance en mars 2025, et a maintenu sa demande de production du rapport de la Dre F______ du 24 janvier 2024.

L'assurance ne pouvait se prévaloir de l'absence d'exigibilité de la créance, vu son absence d'information et de collaboration avec le défendeur (recte : demandeur).

g. Les 19 juin et 2 octobre 2025, l'assuré a versé des pièces complémentaires à la procédure.

h. Lors de l'audience du 6 octobre 2025, l’assuré a maintenu sa demande de production du rapport de la Dre F______ du 24 janvier 2024 et a sollicité, le cas échéant, la conduite d'une expertise. Il a persisté dans ses conclusions, sous imputation du montant de CHF 39'587.80 (recte : CHF 39'587.60) versé en cours de procédure par l'assurance. Il a précisé que sa demande ne portait plus que sur les indemnités journalières du 28 novembre 2024 au 4 avril 2025, avec intérêts, sur les intérêts sur les indemnités journalières versées en cours de procédure et sur les dépens.

L'assurance a maintenu sa demande d'interrogatoire des parties, de témoignage du Dr C______, de conduite d'une expertise et d'édition du dossier de l'assuré auprès de l'OAI. Elle a persisté dans ses écritures et conclusions et conclu à la mise des frais et dépens à charge du demandeur.

Les parties ont indiqué ne pas souhaiter de plaidoiries finales, auxquelles elles ont convenu, le cas échéant, de procéder par écrit.

i. Le 9 octobre 2025, les parties ont été informées que, eu égard à leur souhait de renoncer aux plaidoiries finales, la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 7 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l’assurance-maladie sociale prévue par la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), relevant de la loi fédérale sur le contrat d'assurance du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d’assurance, LCA - RS 221.229.1).

Selon les CGA, le contrat est régi par la LCA (art. 10).

La compétence de la chambre de céans à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 L'art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors) qui a été abrogée au 1er janvier 2011 par l’entrée en vigueur du CPC, auquel il convient désormais de se référer. Selon l'art. 31 CPC, le tribunal du domicile ou du siège du défendeur ou celui du lieu où la prestation caractéristique doit être exécutée est compétent pour statuer sur les actions découlant d’un contrat. Sauf disposition contraire de la loi, les parties peuvent convenir d’un for pour le règlement d’un différend présent ou à venir résultant d’un rapport de droit déterminé. Sauf disposition conventionnelle contraire, l’action ne peut être intentée que devant le for élu (art. 17 al. 1 CPC). La convention doit être passée en la forme écrite ou par tout autre moyen permettant d’en établir la preuve par un texte (art. 17 al. 2 CPC). Aux termes de l’art. 18 CPC, sauf disposition contraire de la loi, le tribunal saisi est compétent lorsque le défendeur procède sans faire de réserve sur la compétence.

En l’occurrence, l’art. 27 CGA prévoit que, pour tout litige découlant du contrat, le preneur d'assurance, l'assuré ou l'ayant droit aux prestations peut choisir comme for Zurich en tant que siège principal de l'assurance, le lieu de la succursale de l'assurance en relation matérielle avec le contrat, le domicile ou le siège social, en Suisse ou au Liechtenstein, à l'exclusion de tout pays étranger, du preneur d'assurance, de l'assuré ou de l'ayant droit (let. a), l'assuré pouvant en outre choisir pour for son lieu de travail habituel (let. b).

L'employeuse ayant son siège et l'assuré étant domicilié à Genève, la chambre de céans est également compétente à raison du lieu pour connaître de la présente demande.

1.3 Selon la jurisprudence, les litiges que les cantons ont décidé de soumettre à une instance cantonale unique selon l'art. 7 CPC ne sont pas soumis à la procédure de conciliation préalable de l'art. 197 CPC (ATF 138 III 558 consid. 4.5 et 4.6 ; ATAS/889/2024 du 15 novembre 2024 consid. 1.3). Cette jurisprudence a été codifiée au 1er janvier 2025, l'art. 198 let. f CPC (applicable également aux procédures en cours lors de son entrée en vigueur ; art. 407f CPC) prévoyant désormais expressément que la procédure de conciliation n'a pas lieu dans les litiges qui sont de la compétence d'une instance cantonale unique en vertu de l'art. 7 CPC. Le présent litige relevant des art. 7 CPC et 134 al. 1 let. c LOJ, il n'était pas soumis à conciliation.

1.4 Pour le reste, la demande respecte les conditions formelles prescrites par les art. 130 et 244 CPC, ainsi que les autres conditions de recevabilité prévues par l'art. 59 CPC. Elle est donc recevable.

2.             S'agissant de l'objet du litige, il convient de constater que le demandeur a restreint ses conclusions conformément à l'art. 227 al. 3 CPC, à la suite du versement des indemnités journalières du 13 mars au 27 novembre 2024 par la défenderesse, conformément au décompte du 10 mars 2025. Le litige ne porte désormais plus que sur le versement des indemnités journalières du 28 novembre 2024 au 4 avril 2025 et des intérêts à 5% sur les indemnités journalières du 13 mars 2024 au 4 avril 2025, comme l'a confirmé le demandeur lors de l'audience du 6 octobre 2025.

3.             Les parties ont chacune sollicité des actes d'instruction.

3.1 Aux termes de l’art. 150 CPC, la preuve a pour objet les faits pertinents et contestés (al. 1). La preuve peut également porter sur l'usage, les usages locaux et, dans les litiges patrimoniaux, le droit étranger (al. 2).

3.2 En vertu de l'art. 150 al. 1 CPC, seules doivent être prouvées les allégations qui sont expressément contestées. Une telle contestation doit être suffisamment précise pour atteindre son but, c'est-à-dire permettre à la partie adverse de comprendre quels allégués il lui incombe de prouver. Le degré de précision d'une allégation influe sur le degré de motivation que doit revêtir sa contestation. Plus les affirmations d'une partie sont détaillées, plus élevées sont les exigences quant à la précision de leur contestation. Une réfutation en bloc ne suffit pas. Le fardeau de la contestation ne saurait toutefois entraîner un renversement du fardeau de la preuve (arrêt du Tribunal fédéral 4A_42/2017 du 29 janvier 2018 consid. 3.2.2 et les références).

En vertu de l’art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), la partie qui n’a pas la charge de la preuve a le droit d’apporter une contre-preuve. Elle cherchera ainsi à démontrer des circonstances propres à faire naître chez le juge des doutes sérieux sur l’exactitude des allégations formant l’objet de la preuve principale. Pour que la contre-preuve aboutisse, il suffit que la preuve principale soit ébranlée, de sorte que les allégations principales n’apparaissent plus comme les plus vraisemblables (ATF 130 III 321 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2018 du 23 mai 2019 consid. 3.1).

3.3 Le droit à la preuve est une composante du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution (Cst. - RS 101) ; il se déduit également de l'art. 8 CC et trouve désormais une consécration expresse à l'art. 152 CPC. Il implique que toute partie a le droit, pour établir un fait pertinent contesté, de faire administrer les moyens de preuves adéquats, pour autant qu'ils aient été proposés régulièrement et en temps utile selon la loi de procédure applicable. Les art. 8 CC et 152 CPC ne régissent pas l'appréciation des preuves et ne disent pas quelles mesures probatoires doivent être ordonnées, ni ne dictent au juge comment forger sa conviction. En outre, le droit à la preuve n'interdit pas au juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis d'acquérir une conviction et qu'à l'issue d'une appréciation anticipée des moyens de preuves qui lui sont encore proposés, il a la certitude que ceux-ci ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (arrêt du Tribunal fédéral 4A_42/2017 du 29 janvier 2018 consid. 3.2 et les références).

3.4 En l'espèce, lors de l'audience du 6 octobre 2025, le demandeur a maintenu sa demande de production d'un rapport médical et a sollicité, le cas échéant, une expertise, tandis que la défenderesse a persisté à demander l'interrogatoire des parties, le témoignage d'un médecin, la conduite d'une expertise et l'apport du dossier de l'assurance-invalidité du demandeur.

Néanmoins, les demandes d'instructions des parties portent sur le volet médical du dossier et ne sont plus pertinentes au regard de l'objet du litige restreint résultant des conclusions du recourant réduites le 7 avril 2025 et précisées lors de l'audience de la chambre de céans du 6 octobre 2025, soit, d'une part, l'épuisement ou non du droit aux prestations au 27 novembre 2024 et la poursuite ou non du versement des indemnités journalières jusqu'au 4 avril 2025, ainsi que, d'autre part, le droit au versement d'intérêts à 5% sur les indemnités journalières du 13 mars au 27 novembre 2024 et, si elles sont dues, sur les indemnités journalières du 28 novembre au 4 avril 2025.

La chambre de céans étant en possession d'un dossier complet lui permettant de trancher ces questions, et donc le litige, en toute connaissance de cause, il ne sera pas donné suite aux différentes offres de preuve de parties.

4.             Sur le plan matériel, la LCA a fait l’objet d’une révision entrée en vigueur le 1er janvier 2022 (modification du 19 juin 2020 ; RO 2020 4969 ; RO 2021 357).

4.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle qui était en vigueur lors de réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

Selon la disposition transitoire relative à cette modification, seules les prescriptions en matière de forme (let. a) et le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b LCA (let. b) s’appliquent aux contrats qui ont été conclus avant l’entrée en vigueur de cette modification. S’agissant des autres dispositions de la LCA, elles s’appliquent uniquement aux nouveaux contrats (Message concernant la révision de la loi fédérale sur le contrat d’assurance, FF 2017 4812).

4.2 En l'occurrence, le contrat d'assurance a été conclu avant le 1er janvier 2022 et l’objet du litige ne porte ni sur des prescriptions en matière de forme, ni sur le droit de résiliation au sens des art. 35a et 35b LCA, de sorte que les dispositions de la LCA applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

5.             Le demandeur conclut au versement des indemnités journalières du 28 novembre 2024 au 4 avril 2025, affirmant que la défenderesse commettrait un abus de droit de par son comportement contradictoire en considérant qu'il aurait épuisé son droit aux indemnités journalières en raison de l'incapacité indemnisée du 13 mai au 2 octobre 2022, alors qu'elle n'aurait pas porté à sa connaissance toutes les pièces requises lors de la communication de son dossier médico-administratif.

5.1 Les assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale au sens de la LAMal sont soumises au droit privé, plus particulièrement à la LCA (ATF 124 III 44 consid. 1a/aa). Comme l'art. 100 al. 1 LCA renvoie à la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (CO, Code des obligations - RS 220) pour tout ce qu'elle ne règle pas elle-même, la jurisprudence en matière de contrats est applicable. D'après celle-ci, les conditions générales font partie intégrante du contrat. Les dispositions contractuelles préformulées sont en principe interprétées selon les mêmes règles que les clauses contractuelles rédigées individuellement (ATF 133 III 675 consid. 3.3 ; 122 III 118 consid. 2a ; 117 II 609 consid. 6c).

La LCA ne comporte pas de dispositions particulières à l'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie ou d'accident, de sorte qu'en principe, le droit aux prestations se détermine exclusivement d'après la convention des parties (ATF 133 III 185 consid. 2). Le droit aux prestations d'assurances se détermine donc sur la base des dispositions contractuelles liant l'assuré et l'assureur, en particulier des conditions générales ou spéciales d'assurance (arrêt du Tribunal fédéral 5C.263/2000 du 6 mars 2001 consid. 4a).

5.2 À teneur de l'art. 2 al. 2 CC, l'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi. Cette règle permet au juge de corriger les effets de la loi dans certains cas où l'exercice d'un droit allégué créerait une injustice manifeste. Le juge apprécie la question au regard des circonstances concrètes. Les cas typiques en sont l'absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique de façon contraire à son but, la disproportion manifeste des intérêts en présence, l'exercice d'un droit sans ménagement ou l'attitude contradictoire. L'abus de droit doit être admis restrictivement, comme l'exprime l'adjectif « manifeste » utilisé dans le texte légal (ATF 143 III 279 consid. 3.1 ; 135 III 162 consid. 3.3.1 et les arrêts cités).

La règle prohibant l'abus de droit autorise certes le juge à corriger les effets de la loi dans certains cas où l'exercice d'un droit allégué créerait une injustice manifeste. Cependant, son application doit demeurer restrictive et se concilier avec la finalité, telle que le législateur l'a voulue, de la norme matérielle applicable au cas concret (ATF 107 Ia 206 consid. 3b et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 4C.33/2006 du 29 mars 2006 consid. 4.2).

5.3 En l'espèce, conformément à la police d’assurance, les indemnités journalières de 90% du gain sont versées du 31e jour au 750e jour et, selon les CGA, l'assurance paie l'indemnité journalière pour un ou plusieurs cas de maladie réunis pendant au maximum 720 jours sur une période de 900 jours consécutifs à compter du jour de maladie. L'indemnité journalière n'est pas versée pour plus de 720 jours pour le même cas de maladie (art. 8.6 let. b variante B).

En l'occurrence, la défenderesse a alloué au demandeur des indemnités journalières du 13 mai au 2 octobre 2022, soit 143 jours, puis du 19 avril 2023 au 29 février 2024, soit 317 jours et, finalement du 13 mars au 27 novembre 2024, soit 260 jours, soit un total de 720 jours.

Le demandeur affirme toutefois que les indemnités journalières versées du 13 mai au 2 octobre 2022 ne devraient pas être prises en compte en raison d'un comportement contradictoire de la défenderesse, qui, lors de la remise de son dossier à la suite de la demande de son mandataire du 16 juillet 2024, n'aurait pas inclus les éléments concernant le versement des indemnités journalières du 13 mai au 2 octobre 2022.

Cependant, quand bien même l'assurance reconnaît avoir transmis au mandataire du recourant le dossier no 4______, ce qui implique que les éléments concernant les indemnités journalières versées en 2022 n'ont pas été communiqués, la défenderesse ne s'est pas engagée à verser des indemnités journalières au-delà du 27 novembre 2024 et n'a à aucun moment indiqué au demandeur qu'il aurait droit à des indemnités journalières au-delà de cette date. Par ailleurs, le demandeur a lui-même perçu les indemnités journalières du 13 mai au 2 octobre 2022, de sorte que même si les éléments relatifs à cette incapacité de travail ne lui ont pas été communiqués après la demande de son mandataire du 16 juillet 2024, il en avait lui-même connaissance.

Dans ces circonstances, le demandeur ne peut se prévaloir d'un comportement contradictoire de la défenderesse et de l'interdiction de l'abus de droit pour obtenir la non-prise en compte des indemnités journalières versées en 2022 et c'est à juste titre que cette dernière a refusé le versement des indemnités journalières après le 27 novembre 2024.

La prétention en versement des indemnités journalières du 27 novembre 2024 au 4 avril 2025, avec intérêts, sera partant rejetée.

6.             Le demandeur conclut au versement d'intérêts à 5% l'an sur les indemnités journalières versées en cours de procédure, soit du 13 mars au 27 novembre 2024.

6.1 Le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier (art. 102 al. 1 CO en lien avec l'art. 100 al. 1 LCA). L'intérêt moratoire de 5% l'an (art. 104 al. 1 CO) est dû à partir du jour suivant celui où le débiteur a reçu l'interpellation, ou, en cas d'ouverture d'une action en justice, dès le lendemain du jour où la demande en justice a été notifiée au débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 5C.177/2005 du 25 février 2006 consid 6.1). Toutefois, lorsque l'assureur refuse définitivement, à tort, d'allouer des prestations, on admet, par analogie avec l'art. 108 ch. 1 CO, qu'une interpellation n'est pas nécessaire ; l'exigibilité et la demeure sont alors immédiatement réalisées (arrêt du Tribunal fédéral 4A_16/2017 du 8 mai 2017 consid. 3.1).

Un débiteur peut valablement être interpellé avant même l'exigibilité de la créance (ATF 103 II 102 consid. 1a). La demeure ne déploie toutefois ses effets qu'avec l'exigibilité de la créance (ATAS/304/2023 du 3 mai 2023 consid. 11.1 et la référence).

6.2 Selon l'art. 41 LCA, la créance qui résulte du contrat est échue quatre semaines après le moment où l'assureur a reçu les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention (al. 1). Est nulle la clause portant que la prétention n’est échue qu’après avoir été reconnue par l’entreprise d’assurance ou constatée par un jugement définitif (al. 2).

En cas de sinistre, l’ayant droit doit, aussitôt qu’il a eu connaissance du sinistre et du droit qui découle en sa faveur de l’assurance, en donner avis à l’entreprise d’assurance. Le contrat peut prévoir que cet avis sera donné par écrit (art. 38 al. 1 LCA). Si par sa faute, l’ayant droit contrevient à cette obligation, l’entreprise d’assurance a le droit de réduire l’indemnité à la somme qu’elle comporterait si la déclaration avait été faite à temps (art. 38 al. 2 LCA). L’entreprise d’assurance n’est pas liée par le contrat, si l’ayant droit a omis de faire immédiatement sa déclaration dans l’intention d’empêcher l’entreprise d’assurance de constater en temps utile les circonstances du sinistre (art. 38 al. 3 LCA).

Sur la demande de l’entreprise d’assurance, l’ayant droit doit lui fournir tout renseignement sur les faits à sa connaissance qui peuvent servir à déterminer les circonstances dans lesquelles le sinistre s’est produit ou à fixer les conséquences du sinistre (art. 39 al. 1 LCA). Il peut être convenu que l’ayant droit devra produire des pièces déterminées, notamment des certificats médicaux, à condition qu’il lui soit possible de se les procurer sans grands frais (let. a) ; que, sous peine d’être déchu de son droit aux prestations de l’assurance, l’ayant droit devra faire les communications prévues à l’art. 39 al. 1 et à l’art. 39 al. 2 ch. 1 LCA dans un délai déterminé suffisant. Ce délai court du jour où l’entreprise d’assurance a mis par écrit l’ayant droit en demeure de faire ces communications, en lui rappelant les conséquences de la demeure (let. b ; art. 39 al. 2 LCA).

6.3 Les « renseignements » au sens de l'art. 41 LCA visent des questions de fait, qui doivent permettre à l'assureur de se convaincre du bien-fondé de la prétention de l'assuré (cf. l'intitulé de l'art. 39 LCA). Ils correspondent aux devoirs de déclaration et de renseignement institués par les art. 38 et 39 LCA (ATF 129 III 510 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 4A_58/2019 du 13 janvier 2020 consid. 4.1 ; 4A_489/2017 du 26 mars 2018 consid. 4.3 ; 4A_122/2014 du 16 décembre 2014 consid. 3.5). Le délai de délibération de quatre semaines laissé à l'assureur ne court pas tant que l'ayant droit n'a pas suffisamment fondé sa prétention ; tel est par exemple le cas lorsque, dans l'assurance contre les accidents, l'état de santé véritable de l'ayant droit n'est pas éclairci parce que ce dernier empêche le travail des médecins (arrêt du Tribunal fédéral 4A_307/2008 du 27 novembre 2008 consid. 6.3.1). Cela étant, lorsque l'assureur conteste à tort son obligation, la créance devient exigible dès ce moment, le délai de réflexion de quatre semaines prévu par l'art. 41 LCA étant privé de sens (arrêt du Tribunal fédéral 4A_122/2014 du 16 décembre 2014 consid. 3.5).

L'écoulement du délai de quatre semaines prévu à l'art. 41 LCA ne suffit pas à considérer que le jour d'exécution est expiré, en l’absence de convention des parties, si bien qu’une interpellation est nécessaire (Marcel SÜSSKIND in Pascal GROLIMUND/Leander D. LOACKER/Anton SCHNYDER [éd.], Basler Kommentar, Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag [VVG], 2e éd., 2023, n. 31 s. ad art. 41 LCA).

Du moment que l’exigibilité de la prestation d’assurance dépend des renseignements qui doivent être fournis à l’assureur, celui-ci est tenu, selon les règles de la bonne foi, de demander les éclaircissements nécessaires dans un délai convenable, faute de quoi il ne peut se prévaloir de l’art. 41 al. 1 LCA à l’égard de l’ayant droit. De même, si l’insuffisance des renseignements est imputable à l’assureur, en raison par exemple d’instructions erronées données à l’ayant droit, l’assureur ne saurait s’en prévaloir pour repousser l’exigibilité de la prétention. L’assureur doit donc avoir un comportement actif dès l’annonce du sinistre ; il ne peut se limiter à intégrer dans ses CGA un devoir de renseigner à charge de l’ayant droit. Il a ainsi été jugé, en matière d’assurance perte de gain en cas de maladie, que l’assureur aurait dû requérir d’emblée de l’assurée qu’elle se soumette à un test neuropsychologique s’il estimait celui-ci important. À défaut, l’assureur ne pouvait être suivi lorsqu’il prétendait que ce n’était qu’après avoir pris connaissance des résultats de ce test, à la suite de l’expertise judiciaire, qu’il avait pu se convaincre du bien-fondé de la prétention de l’assurée (Emilie CONTI MOREL in Vincent BRULHART/Ghislaine FRÉSARD-FELLY/Olivier SUBILIA [éd.], Commentaire romand, Loi sur le contrat d'assurance, 2022, n. 15 ad art. 41 et les références citées).

6.4 En l'espèce, la défenderesse affirme que le demandeur ne lui aurait annoncé le sinistre qu'au moment de sa demande en paiement, que la créance n'aurait dès lors pas été exigible au moment de la demande, qu'elle a eu connaissance du rapport du Dr G______ du 7 mai 2024 avec le recours et des notes de suivi du 13 mars 2024 de la Dre H______ avec la réplique et qu'au vu du paiement en mars 2025, la créance n'existait plus.

Il ressort néanmoins du dossier que, le 9 février 2024, le Dr D______ avait annoncé à la défenderesse que le demandeur avait été adressé chez le psychiatre de la consultation de la douleur, le handicap douloureux semblant également avoir des répercussions psychiatriques, douleurs dont le demandeur a ensuite fait état dans son courrier du 28 février 2024 en demandant la réévaluation de son cas. Par ailleurs, le 5 avril 2024, le médecin-conseil de la défenderesse a proposé le maintien de la décision avec les réserves invoquées par l'expert, mais ceci sous réserve que le médecin traitant ou son médecin remplaçant n'arrivent pas à fournir à l'assurance des rapports de consultations spécialisées qui permettraient de retenir un nouvel élément. Par cette dernière réserve, le médecin-conseil de l'assurance recommandait la demande de tels rapports, recommandation que la défenderesse n'a pas suivie, puisqu'elle a, le 2 mai 2024, maintenu la fin des prestations au 29 février 2024 sans formuler de demande aux médecins du demandeur ou à ce dernier.

Ces éléments démontrent que le volet psychiatrique a été annoncé à la défenderesse dès sa survenance, et non uniquement au moment de la demande en paiement comme elle l'affirme, et que, en dépit de l'avis de son médecin-conseil, elle n'a pas formulé de demande conformément à l'art. 39 al. 1 LCA, étant relevé qu'au moment où elle a maintenu son refus de poursuivre les prestations à fin février 2024, des éléments relatifs au volet psychiatrique étaient disponibles, au vu des notes de la Dre H______ du 13 mars 2024.

Au vu de ce qui précède et du fait que la défenderesse a reconnu le droit aux prestations du demandeur pour les atteintes au niveau psychiatrique dans le cadre de la présente procédure, il doit être retenu qu'elle a contesté à tort son obligation le 2 mai 2024, de sorte que la créance est devenue exigible dès ce moment, la demeure ayant été immédiatement réalisée, sans interpellation.

Par ailleurs, pour ce qui est des indemnités journalières postérieures à cette date, dans la mesure où le demandeur conclut au versement d'intérêts à compter du dernier jour de chaque mois et que la défenderesse ne s'y est pas opposée, puisqu'elle ne s'est à aucun moment prononcée sur cette question, il convient d'admettre ces dates comme dies a quo des intérêts moratoires des créances postérieures au 2 mai 2024.

Les intérêts seront dus jusqu'au 10 mars 2025, date à laquelle la défenderesse a indiqué avoir effectué le versement du montant total dû selon le décompte du même jour, sans que cela ne soit contesté par le demandeur.

Par conséquent, les intérêts suivants sont dus :

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 7'765.26 (CHF 2'892.94 [indemnités journalières du 13 au 31 mars 2024] + CHF 4'567.80 [indemnités journalières d'avril 2024] + CHF 304.52 [indemnités journalières des 1er et 2 mai 2024]) du 2 mai 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 332.18 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'415.54 (CHF 4'720.06 – CHF 304.52 correspondant aux indemnités journalières du 3 au 31 mai 2024) du 31 mai 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 171.72 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'567.80 (indemnités journalières de juin 2024) du 30 juin 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 158.60 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'720.06 (indemnités journalières de juillet 2024) du 31 juillet 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 144.22 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'720.06 (indemnités journalières d'août 2024) du 31 août 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 124.56 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'567.80 (indemnités journalières de septembre 2024) du 30 septembre 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 101.51 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'720.06 (indemnités journalières d'octobre 2024) du 31 octobre 2024 au 10 mars 2025, soit CHF 85.22 ;

-          intérêts à 5% sur la somme de CHF 4'111.02 (indemnités journalières du 1er au 27 novembre 2024) du 30 novembre 2024 au 10 mars 2025, soit 57.10.

Le total des intérêts dus est donc de CHF 1'175.11, arrondis à CHF 1'175.10.

Au vu de ce qui précède, la prétention en paiement des intérêts à 5% l'an sur les indemnités journalières du 13 mars 2024 au 27 novembre 2024 sera admise et la défenderesse sera condamnée au paiement de CHF 1'175.10 au titre desdits intérêts.

7.             Dans ces circonstances, la demande en paiement sera partiellement admise et la défenderesse sera condamnée au paiement de CHF 1'175.10 au titre d'intérêts sur les indemnités journalières pour la période du 13 mars au 27 novembre 2024. La demande sera rejetée pour le surplus.

8.             8.1 Le demandeur et la défenderesse concluent à l'octroi de dépens.

8.1.1 L'art. 95 al. 3 CPC prévoit que les dépens – inclus dans les frais selon l’alinéa premier de cette disposition – comprennent les débours nécessaires (let. a), le défraiement d'un représentant professionnel (let. b), lorsqu'une partie n'a pas de représentant professionnel, une indemnité équitable pour les démarches effectuées, dans les cas où cela se justifie (let. c). Le droit à une indemnité pour frais d'avocat découle ainsi du droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 4C_1/2011 du 3 mai 2011 consid. 6.2).

Les cantons sont compétents pour fixer le tarif des frais comprenant les dépens (art. 96 CPC). Le tribunal fixe les dépens selon le tarif. Les parties peuvent produire une note de frais (art. 105 al. 2 CPC, renvoyant pour le tarif à l'art. 96 CPC).

Les frais sont mis à la charge de la partie succombante. La partie succombante est le demandeur lorsque le tribunal n’entre pas en matière et en cas de désistement d’action ; elle est le défendeur en cas d’acquiescement (art. 106 al. 1 CPC). Lorsqu’aucune des parties n’obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC).

Le tribunal peut s’écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation lorsque le demandeur obtient gain de cause sur le principe de ses conclusions mais non sur leur montant, celui-ci étant tributaire de l’appréciation du tribunal ou difficile à chiffrer (let. a), une partie a intenté le procès de bonne foi (let. b), le litige relève du droit de la famille (let. c), le litige relève d’un partenariat enregistré (let. d), la procédure est devenue sans objet et la loi n’en dispose pas autrement (let. e), des circonstances particulières rendent la répartition en fonction du sort de la cause inéquitable (let. f ; art. 107 CPC).

Les frais causés inutilement sont mis à la charge de la personne qui les a engendrés (art. 108 CPC).

Selon la jurisprudence (ATF 139 III 334 consid. 4.3), en vertu du principe de disposition, des dépens ne peuvent être alloués que si l'ayant droit en a expressément demandé.

La valeur du litige est déterminée par les conclusions. Les intérêts et les frais de la procédure en cours ou d’une éventuelle publication de la décision et, le cas échéant, la valeur résultant des conclusions subsidiaires ne sont pas pris en compte (art. 91 al. 1 CPC).

8.1.2 Le législateur genevois a notamment prévu que dans les contestations portant sur des affaires pécuniaires, le défraiement d'un représentant professionnel est, en règle générale, proportionnel à la valeur litigieuse. Il est fixé, dans les limites figurant dans un règlement du Conseil d'État, d'après l'importance de la cause, ses difficultés, l'ampleur du travail et le temps employé (art. 20 al. 1 de la loi d'application du code civil suisse et d’autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 - LaCC - E 1 05).

Selon l’art. 23 al. 1 LaCC, lorsqu'il y a une disproportion manifeste entre la valeur litigieuse et l'intérêt des parties au procès ou entre le taux applicable selon la LaCC et le travail effectif de l'avocat, la juridiction peut fixer un défraiement inférieur ou supérieur aux taux minimums et maximums prévus. Lorsque le procès ne se termine pas par une décision au fond mais en particulier par un retrait du recours, un désistement, une transaction ou une décision d'irrecevabilité, le défraiement peut être réduit en conséquence (art. 23 al. 2 LaCC).

Les débours nécessaires sont estimés, sauf éléments contraires, à 3% du défraiement et s'ajoutent à celui-ci (art. 25 LaCC).

La juridiction fixe les dépens d'après le dossier en chiffres ronds incluant la taxe sur la valeur ajoutée. La décision est motivée (art. 26 al. 1 LaCC). Un état de frais peut être déposé (art. 26 al. 2 LaCC). La fixation des dépens est sans effet sur les rapports contractuels entre l’avocat et son client (art. 26 al. 3 LaCC).

À teneur de l’art. 22 al. 3 let. b LaCC, il n’est pas alloué de dépens à la charge de l’assuré, dans les causes portant sur les assurances complémentaires à l’assurance‑maladie obligatoire prévue par la LAMal, y compris celles servies par les entreprises d’assurance soumises à la loi fédérale sur la surveillance des entreprises d’assurance du 17 décembre 2004 (loi sur la surveillance des assurances, LSA - RS 961.01).

8.1.3 Le règlement cité à l’art. 20 LaCC est le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010 (RTFMC - E 1 05.10), lequel détermine notamment le tarif des dépens, applicable aux affaires civiles contentieuses (art. 1 RTFMC). Le RTFMC rappelle, à son art. 84, le principe de l’art. 20 al. 1 LaCC, à savoir que le défraiement d'un représentant professionnel est, en règle générale, proportionnel à la valeur litigieuse. Il est fixé d'après l'importance de la cause, ses difficultés, l'ampleur du travail et le temps employé. L'art. 85 al. 1 RTFMC prévoit un tarif servant de base pour le défraiement dans les affaires pécuniaires. Sans préjudice de l'art. 23 LaCC, le défraiement peut s'en écarter de plus ou moins 10% pour tenir compte des éléments rappelés à l'art. 84 RTFMC. Lorsque la valeur litigieuse se situe au-delà de CHF 40'000.- et jusqu'à CHF 80'000.-, le défraiement est de CHF 6'100.- plus 9% de la valeur litigieuse dépassant CHF 40'000.-.

8.1.4 En l’espèce, la défenderesse a conclu à l’octroi de dépens. Cependant, conformément aux dispositions précitées, des dépens ne peuvent pas être mis à la charge du demandeur.

Le demandeur a également conclu à l’octroi de dépens.

En l'occurrence, il convient préalablement de constater que, contrairement à ce qu'affirme la défenderesse, le demandeur n'a pas causé de frais inutilement. En effet, cette dernière a failli à l'art. 39 al. 1 LCA par son refus du 2 mai 2024 opposé sans demander de rapports de spécialistes pour les affections psychiques du demandeur et de manière qui s'est révélée injustifiée. Par ailleurs, même si elle a versé une partie des indemnités journalières sollicitées en cours de procédure, la défenderesse n'a pas versé les intérêts requis par le demandeur. Il ne se justifie par conséquent pas de laisser les frais à la charge de ce dernier.

La valeur litigieuse telle que définie par les conclusions initiales du demandeur et à l'exclusion des intérêts s’élevait à CHF 61'360.60, ce qui correspond à un défraiement de CHF 8'022.45 (CHF 6'100.- + CHF 1'922.45 [correspondant à 9% de CHF 21'360.60]). Une réduction du défraiement se justifie cependant en l'espèce. En effet, la défenderesse a accordé au demandeur une grande partie des indemnités journalières initialement demandées et le demandeur a en conséquence restreint ses conclusions. Par ailleurs, même si la procédure n'était en tant que telle pas inutile et même si l'art. 39 al. 1 LCA ne prévoit pas de devoir de transmettre spontanément les rapports médicaux, il aurait été souhaitable que le demandeur, assisté de son mandataire, transmette les rapports sur le plan psychiatrique à la défenderesse avant toute procédure judiciaire, d'autant plus au vu de la prise de position de la défenderesse du 2 mai 2024 reposant notamment sur l'absence de rapports de consultation spécialisée. Ces éléments justifient une réduction du défraiement de moitié, portant celui-ci à CHF 4'011.20.

Il convient d'ajouter au défraiement la TVA de 8.1% (art. 25 al. 1 et 115 al. 1 de la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée du 12 juin 2009 - LTVA - RS 641.20), soit CHF 324.90, et les débours de 3%, soit CHF 120.35, de sorte que le montant total s’élève à CHF 4'456.45.

Ce montant devant être réparti selon le sort de la cause, il convient de constater que le demandeur a obtenu gain de cause, par l'octroi des indemnités journalières par l'assurance, assimilable à un acquiescement partiel, pour environ 65% de la valeur litigieuse initiale de ses conclusions, plus les intérêts sur lesdites indemnités journalières. Il se justifie par conséquent de lui allouer des dépens de 70% de ce montant, soit un montant de CHF 3'119.50.

8.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 114 let. e CPC; art. 22 al. 3 let. b LaCC.).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande, telle que restreinte par le demandeur dans son écriture du 7 avril 2025 et lors de l'audience du 6 octobre 2025, recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Ordonne le versement d'intérêts à 5% sur les indemnités journalières du 13 mars 2024 au 27 novembre 2024 de CHF 39'587.60 versées en cours de procédure, pour les périodes arrêtées dans les considérants, pour un total de CHF 1'175.10.

4.        Rejette la demande, telle que restreinte par le demandeur dans son écriture du 7 avril 2025 et lors de l'audience du 6 octobre 2025, pour le surplus.

5.        Condamne la défenderesse à verser au demandeur une indemnité de CHF 3'119.50 au titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14), sans égard à sa valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le