Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2120/2024

ATAS/764/2025 du 13.10.2025 ( LAA ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2120/2024 ATAS/764/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 13 octobre 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______ SA

B______

 

recourante

appelé en cause

contre

C______ SA

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. B______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1980, travaille à plein temps en tant que socio-éducateur auprès des D______ depuis le 1er mars 2021. À ce titre, il est assuré contre le risque d'accident, professionnel ou non, auprès de C______ SA (ci-après : C______).

b. La déclaration d'accident du 14 juin 2023 indique que le 2 juin 2023, l'assuré s'est tordu la cheville droite lors d'un match de football, ayant nécessité un arrêt de travail dès le 5 juin 2023.

B. a. L'imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) de la cheville et du pied droits du 6 juin 2023 a révélé une contusion osseuse de la portion inférieure de la tête de l'astragale, une séquelle de lésion ostéochondrale proximale du cuboïde et une entorse du ligament calcanéo-cuboïdien.

b. Le 19 juin 2023, l'assuré a repris son emploi.

c. Dans un rapport du 29 août 2023, le docteur E______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a posé le diagnostic de status post-entorse sévère du Chopart à droite en juin 2023 et en 2016. L'examen clinique mettait en évidence un pied cavus, un affaissement de la voûte longitudinale à gauche, une tuméfaction au niveau de l'articulation Chopart du côté latéral à droite, un équin gastrocnémien d'environ 10° des genoux tendus, un tendon d'Achille sensible à la palpation des deux côtés, et une douleur à la palpation de l'interligne Chopart du côté latéral à droite.

d. La scintigraphie osseuse partielle avec complément tomoscintigraphique du 1er septembre 2023 a montré une hyperfixation intense intéressant les deux berges de la moitié dorsale de l'articulation calcanéo-cuboïdienne droite, suggérant des remaniements arthrosiques évolutifs, avec un aspect suggérant des remaniements arthrosiques préexistants, probablement décompensés par le traumatisme de juin, compte tenu de l'absence d'évolutivité manifeste sur l'IRM du 6 juin 2023. La présence d'une augmentation de la diffusion du traceur en phase précoce suggérait une composante inflammatoire.

e. Dans un rapport du 18 septembre 2023, le Dr E______ a retenu les diagnostics de conflit post-traumatique de l'articulation calcanéo-cuboïdienne par multiples fragments osseux intra-articulaires à droite, et de status post-entorse sévère du Chopart à droite à répétition (juin 2023 et 2016). Le médecin relevait que l'assuré était très algique au niveau du bord latéral du pied droit depuis la dernière entorse de juin. Celle-ci avait considérablement accentué la douleur qui persistait depuis une entorse de 2016. Il proposait un traitement chirurgical de l'articulation calcanéo-cuboïdienne avec résection des fragments osseux.

f. Le 26 septembre 2023, l'employeur a annoncé une rechute, survenue le 19 septembre 2023.

g. Dans un rapport du 5 octobre 2023, le docteur F______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin-conseil de C______, a considéré qu'à la suite de l'événement du 2 juin 2023, l'assuré avait eu une contusion osseuse de l'astragale du pied droit. Les divers examens radiologiques avaient montré des séquelles d'une lésion ostéochondrale du cuboïde. Il s'agissait d'une lésion ancienne avec des kystes sous-chondraux. Cette lésion n'avait pas été provoquée par l'événement de 2023. L'intervention chirurgicale proposée par son confrère avait comme but d'enlever des fragments osseux du cuboïde, séquelle d'un accident précédent. À la suite de l'événement du 2 juin 2023, le statu quo sine était atteint trois mois après celui-ci.

h. Dans un rapport du 24 octobre 2023, le Dr E______ a mentionné avoir procédé à une excision du fragment osseux post-fracture au niveau du rostre antérieur du calcanéum le 5 octobre 2023.

i. Par décision du 24 octobre 2023, C______ a refusé les prestations d'assurance à partir du 3 septembre 2023, en s'appuyant sur le rapport du 5 octobre 2023 qui concluait que les troubles actuels à la cheville droite n'étaient pas en relation de causalité naturelle avec l'événement du 2 juin 2023 mais étaient dus à une lésion ancienne. L'examen d'une obligation d'allouer des prestations incombait à l'assureur-accidents de l'époque (2016).

j. Dans un rapport non daté relatif à une consultation du 13 novembre 2023, le Dr E______ a indiqué que dans son précédent rapport du 19 (recte : 18) septembre 2023, il évoquait une persistance douloureuse depuis l'entorse de 2016, suggérant probablement des douleurs résiduelles dans la région du sinus du tarse, ce qui était fréquent après une entorse du Chopart. Des signes dégénératifs au niveau de l'articulation cuboïdo-calcanéenne étaient visibles sur l'IRM et le SPECT-CT du 1er septembre 2023. Il s'agissait de suites fréquentes d'une entorse du Chopart. Cependant, l'assuré n'avait quasiment plus aucune limitation au niveau de son pied entre 2016 et son dernier accident en juin 2023. Il avait pu reprendre toutes ses activités sportives et professionnelles sans limitation. La situation de son pied s'était donc totalement stabilisée. À la suite de son accident en juin 2023, l'assuré avait développé des douleurs limitantes nouvelles. Le bilan radiologique avait mis en évidence des arrachements osseux nouveaux au niveau du rostre antérieur du calcanéum. Ceux-ci n'étaient pas présents sur le bilan radiologique effectué en 2016. Au vu des douleurs en lien avec ces arrachements osseux, une indication chirurgicale avait été retenue. L'exploration pendant l'intervention avait d'ailleurs permis de confirmer la présence de ces fragments osseux qui avaient pu être retirés. La situation actuelle était donc une suite directe de l'accident de juin 2023 et le seul lien avec l'accident de 2016 était sa localisation au niveau du Chopart.

k. Par lettre reçue par C______ le 30 novembre 2023, l'assuré s'est opposé à la décision du 24 octobre 2023. Ses douleurs avaient commencé après l'accident du 2 juin 2023 et s'étaient intensifiées quelques semaines après. Il n'aurait pas pu vivre avec des fragments osseux dans son pied droit, supporter de telles douleurs pendant plus de sept ans (depuis 2016) et pratiquer régulièrement du sport.

l. Le 5 décembre 2023, C______ a adressé une copie de la décision litigieuse à A______SA (ci-après : B______), assureur-accidents de l'assuré lors de l'accident survenu en 2016.

m. Par courrier du 4 janvier 2024, B______ a formé opposition à la décision du 24 octobre 2023, en se prévalant du rapport du Dr E______ du 13 novembre 2023.

n. Sur demande de C______, le 11 avril 2024, B______ lui a transmis la copie du dossier de l'assuré.

o. Dans un rapport du 23 mai 2024, la docteure G______, spécialiste en médecine intensive ainsi qu'en médecine interne générale, et nouveau médecin-conseil de C______, a relevé que l'assuré avait présenté de multiples traumatismes du pied droit. Le 15 mai 2015, il avait souffert d'une entorse de la cheville droite en jouant au football, avec un diagnostic de fracture de talus et évolution secondaire sous forme d'arthrose symptomatique avec infiltration de l'articulation calcanéo-cuboïdienne en mars 2016, sept mois avant le traumatisme du 18 octobre 2016. Lors de ce dernier accident sur la voie publique (scooter), l'assuré avait été victime d'un polytraumatisme, avec notamment, s'agissant du pied droit, une contusion, voire une entorse, qui ne semblait pas sévère et avait nécessité de la physiothérapie uniquement. La médecin-conseil concluait à un antécédent de fracture du talus en mai 2015, apparemment déjà symptomatique dès le premier trimestre 2016 avec une première infiltration en mars 2016 au niveau de l'articulation calcanéo-cuboïdienne. L'IRM du 6 juin 2023 mettait en évidence une atteinte séquellaire avec lésion ostéochondrale et une atteinte ostéo‑ligamentaire peu sévère (respectivement contusion osseuse et entorse du ligament calcanéo-cuboïdien). L'événement du 2 juin 2023 avait transitoirement aggravé une atteinte préexistante pour une durée de deux à trois mois, soit, au plus tard, le 2 septembre 2023. La persistance des plaintes au-delà de cette date était à attribuer à l'atteinte dégénérative post-traumatique préexistante, qui n'était pas à la charge de l'assureur-accidents actuel. L'« excision fragment osseux post-fracture au niveau du rostre antérieur du calcanéum » dont faisait état le Dr E______ dans son rapport du 13 novembre 2023 concernait les suites du traumatisme de 2015, puisqu'en 2016 et 2023, l'assuré avait présenté des entorses et non des fractures osseuses.

p. Par décision du 24 mai 2024, C______ a rejeté les deux oppositions, au motif que l'appréciation de la Dre G______ reposait sur un dossier médical complet et était bien motivée.

C. a. Par acte du 24 juin 2024, B______ a interjeté recours contre cette décision sur opposition auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, en concluant, sous suite de frais et dépens, principalement, à sa réformation en ce sens que C______ soit condamnée à prendre en charge les prestations de l'assuré au-delà du 2 septembre 2023, subsidiairement, à son annulation et à la mise en œuvre d'une expertise judiciaire, et subsidiairement, au renvoi de la cause à C______ pour instruction complémentaire sous la forme d'une expertise et nouvelle décision.

La Dre G______ n'était pas spécialisée en chirurgie orthopédique et il ne ressortait pas du dossier de C______ qu'elle aurait eu accès aux imageries médicales. À l'inverse, son médecin-conseil, le docteur H______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, avait établi son appréciation du 18 juin 2024 (qu'elle a produite) en pleine connaissance du dossier médical. Celui-ci y exposait de manière convaincante les raisons pour lesquelles il considérait que l'événement du 2 juin 2023 avait entraîné une aggravation déterminante d'un état pathologique antérieur et que, en conséquence, les lésions de l'assuré au-delà du 2 septembre 2023 étaient en lien de causalité naturelle avec l'accident du 2 juin 2023. Subsidiairement, l'appréciation du Dr H______ était de nature à mettre en doute les appréciations des médecins-conseils de C______, de sorte que cette dernière était tenue de mettre en place une expertise médicale externe en chirurgie orthopédique.

B______ a également joint à son écriture le dossier de l'assuré portant sur les accidents des 15 mai 2015 et 18 octobre 2016.

b. Par réponse du 16 août 2024, C______ a conclu au rejet du recours, en s'appuyant sur le rapport du 11 août 2024 de son médecin-conseil, le docteur I______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, qu'elle a versé au dossier. Son précédent médecin-conseil, le Dr F______, avait pris connaissance des imageries de 2023 pour rendre son rapport. Sa seconde médecin-conseil, la Dre G______, avait également pris connaissance des pièces transmises par B______ et confirmé la prise de position du Dr F______.

c. Par ordonnance du 22 novembre 2024, la chambre de céans a appelé en cause l'assuré et lui a imparti un délai pour se déterminer.

d. Par réplique du 18 décembre 2024, B______ a persisté dans ses conclusions, rapport du Dr H______ du 19 septembre 2024 à l'appui.

e. Par écriture du 13 février 2025, l'assuré a allégué avoir été en bonne santé avant son accident du 2 juin 2023. Depuis 2016, il n'avait jamais rencontré la moindre difficulté physique et pratiquait régulièrement des activités sportives exigeantes, notamment le football et la boxe. Dans ces circonstances, il ne comprenait pas comment ses séquelles seraient liées à l’ancien accident. Les examens médicaux réalisés après son accident (de juin 2023) avaient révélé la présence de fragments osseux dans son pied qui auraient nécessairement entravé ses performances sportives s'ils avaient existé auparavant. C______ avait ralenti son rétablissement en suspendant le paiement de plusieurs traitements, dont les séances de physiothérapie post-opératoires, alors qu'elle était tenue d'assurer le remboursement des soins jusqu'à la fin de la procédure en cas de litige sur la prise en charge d'un accident.

L'assuré a joint une photographie de son pied (droit).

f. Par duplique du 13 février 2025, C______ a maintenu sa position, en se basant sur le rapport du Dr I______ du 9 février 2025 qu'elle a joint à son écriture.

g. Dans sa détermination du 26 mai 2025, B______ a persisté dans ses conclusions, en se fondant sur l'appréciation du Dr H______ du 27 février 2025 qu'elle a annexé à son écriture. La photographie produite par l'assuré mettait en évidence un hématome sur le côté de l'arrière-pied, attestant de l'existence de lésions structurelles récentes à la suite de l'événement du 2 juin 2023.

h. Dans ses observations du 13 juin 2025, C______ a également persisté dans ses conclusions, en se référant aux rapports du Dr I______ (déjà au dossier). La photographie produite par l'assuré n'était pas datée.

i. Copie de cette écriture a été transmise à B______ et à l'assuré pour information.

 

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la LAA ne déroge expressément à la LPGA. La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Selon l'art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours.

1.3 Conformément à l’art. 49 al. 4 LPGA, l'assureur qui rend une décision touchant l'obligation d'un autre assureur d'allouer des prestations est tenu de lui en communiquer un exemplaire. Cet autre assureur dispose des mêmes voies de droit que l'assuré.

Les termes « touchant l'obligation d'un autre assureur » sont assimilables à l'intérêt digne d'être protégé (à l'annulation ou la modification de la décision attaquée) au sens de l'art. 59 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_121/2019 du 29 mai 2020 consid. 3.2).

Aux termes de l’art. 59 LPGA, quiconque est touché par la décision ou la décision sur opposition et a un intérêt digne d’être protégé à ce qu’elle soit annulée ou modifiée a qualité pour recourir. La jurisprudence considère comme intérêt digne de protection, au sens de cette disposition, tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l’annulation de la décision attaquée que peut faire valoir une personne atteinte par cette décision. L’intérêt digne de protection consiste ainsi en l’utilité pratique que l’admission du recours apporterait au recourant ou, en d’autres termes, dans le fait d’éviter un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait (ATF 121 II 174 consid. 2b ; 120 V 39 consid. 2b). L’intérêt doit être direct et concret ; en particulier, la personne doit se trouver dans un rapport suffisamment étroit avec la décision, tel n’étant pas le cas de celui qui n’est atteint que de manière indirecte ou médiate (ATF 125 V 342 consid. 4a).

La jurisprudence reconnaît le droit de l'assureur-accidents de recourir contre la décision d'un autre assureur-accidents déclinant son obligation de prester, puisqu'il pourrait être appelé à octroyer des prestations à la place de ce dernier (arrêts du Tribunal fédéral 8C_694/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.3.1 ; 8C_606/2007 du 27 août 2008 consid. 9.2).

1.4 En l'espèce, la décision litigieuse nie à l'assuré, domicilié dans le canton de Genève, tout droit aux prestations de l'assurance‑accidents de la part de C______ au-delà du 2 septembre 2023. Partant, la chambre de céans est compétente à raison de la matière et du lieu pour juger du cas d'espèce.

Par ailleurs, il n'est pas contesté que l'assureur-accidents LAA de l'appelé en cause lors des accidents dont il a été victime en 2015 et 2016 était B______. Cette dernière est également touchée par la décision litigieuse, dès lors que C______ refuse la prise en charge de l'accident survenu le 2 juin 2023 au-delà du 2 septembre 2023, au motif que les troubles persistants à la cheville droite de l'assuré sont les séquelles d'un accident précédent qu'elle n'assurait pas. B______, qui pourrait donc être tenue de prester, a la qualité pour recourir.

Pour le surplus, le recours du 24 juin 2024 contre la décision litigieuse du 24 mai 2024 a été interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai de 30 jours (art. 60 al. 1 LPGA) prévus par la loi.

Au vu de ce qui précède, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le point de savoir si les troubles persistants à la cheville droite de l'assuré au-delà du 2 septembre 2023 sont à la charge de C______, singulièrement il s'agit de déterminer si lesdits troubles sont en lien de causalité avec l'accident du 2 juin 2023.

3.             3.1 Le 1er janvier 2017, est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident du 2 juin 2023 est survenu après cette date, le droit aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2 a contrario). Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

3.2 Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA).

3.3 La responsabilité de l'assureur-accidents s'étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l'événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

3.3.1 L'exigence afférente au rapport de causalité naturelle est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans l'événement dommageable de caractère accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière (ATF 148 V 356 consid. 3 ; 148 V 138 consid. 5.1.1 ; 142 V 435 consid. 1). Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé ; il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le seul fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident. Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n. U 341 p. 408 consid. 3b).

En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consécutivement à un accident, le devoir de l'assurance-accidents d'allouer des prestations cesse si l'accident ne constitue pas la cause naturelle (et adéquate) du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui existerait même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il s'est manifesté à l'occasion de l'accident ou a été aggravé par ce dernier (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) sur le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.2).

3.3.2 Le droit à des prestations suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 356 consid. 3 ; 129 V 177 consid. 3.2 et la référence).

En présence d’une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose guère, car l’assureur répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l’expérience médicale (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb et les références).

3.4 Les prestations d'assurance sont également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives (art. 11 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 - OLAA ; RS 832.202). Selon la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu'elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c'est la même atteinte qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu'une atteinte apparemment guérie produit, au cours d'un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 137 consid. 3a ; 118 V 293 consid. 2c et les références).

Les rechutes et suites tardives se rattachent donc par définition à un événement accidentel effectif. Corrélativement, elles ne peuvent faire naître une obligation de l'assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s'il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l'intéressé et l'atteinte à la santé causée à l'époque par l'accident assuré (ATF 118 V 296 consid. 2c et les références ; RAMA 2006 n. U 570 p. 74 consid. 1.5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral U.80/05 du 18 novembre 2005 consid.1.1).

Il incombe à l'assuré d'établir, au degré de vraisemblance prépondérante, l'existence d'un rapport de causalité naturelle entre la nouvelle atteinte et l'accident. À cet égard, la jurisprudence considère que plus le temps écoulé entre l'accident et la manifestation de l'affection est long, et plus les exigences quant à la preuve, au degré de la vraisemblance prépondérante, du rapport de causalité naturelle doivent être sévères (arrêt du Tribunal fédéral 8C_302/2023 du 16 novembre 2023 consid. 6.1 et les références).  

3.5 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères : s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références).

Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n. U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

3.6 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I.751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

4.             4.1 En l'espèce, C______ a mis un terme à la prise en charge de l'accident du 2 juin 2023 avec effet au 2 septembre 2023, motif pris que les troubles persistants à la cheville droite de l'assuré n'étaient plus en relation avec cet accident, mais étaient les séquelles d'un précédent accident, couvert par B______.

Pour ce faire, C______ s'est appuyée sur les avis de ses médecins-conseils des 5 octobre 2023, 23 mai 2024, 11 août 2024 et 9 février 2025.

Pour sa part, B______ considère que lesdits troubles sont imputables en partie à l'accident du 2 septembre 2023, en se fondant également sur les rapports de son médecin-conseil des 18 juin 2024, 19 septembre 2024 et 27 février 2025.

Il convient dès lors d'examiner la valeur probante de ces rapports médicaux.

Les rapports des Drs F______ et G______, médecins-conseils de C______, des 5 octobre 2023 et 23 mai 2024 peuvent d'emblée être écartés, car ils ne reposent pas sur l'étude complète des pièces médicales du dossier, en particulier des imageries réalisées en juin 2015 et en janvier 2016 au niveau de la cheville et du pied droits de l'assuré, à la suite du premier accident.

Ceci étant dit, dans son rapport du 18 juin 2024, le Dr H______, médecin-conseil de B______, expose que le premier accident du 15 mai 2015 a entraîné une entorse de l'articulation de Chopart du pied droit. Il existait une contusion du talus due à la compression médiale, et l'articulation calcanéo-cuboïdienne avait subi une distraction avec lésion osseuse à l'extrémité du processus calcanéen antérieur et lésion ostéochondrale dorsomédiale au niveau de l'os cuboïde proximal. Une arthrose focale s'était par ailleurs développée au niveau morphologique dans cette articulation (p. 6). Le Dr H______ ajoute que le second accident du 18 octobre 2016 n'a causé que de légères atteintes des membres inférieurs sous forme de simples contusions, sans influence visible sur l'arrière-pied droit de l'assuré (p. 8). Quant au troisième accident du 2 juin 2023 (ici litigieux), il a provoqué un traumatisme d'inversion. Lors de la première consultation médicale, un hématome était visible sur la face externe de l'arrière-pied, attestant de lésions structurelles récentes. L'IRM de la cheville et du pied droits du 6 juin 2023 montrait des signes de lésions structurelles aiguës, dont des lésions osseuses au niveau du processus calcanéen antérieur. Près de trois mois après l'événement, le 29 août 2023, le Dr E______ (orthopédiste traitant) constatait la persistance d'une « tuméfaction au niveau de l'articulation Chopart côté latéral à droite », soit un résidu du traumatisme du 2 juin 2023. Le SPECT-CT du 1er septembre 2023 confirmait des restes de blessures antérieures, mais également des lésions osseuses récentes au niveau du processus calcanéen antérieur (p. 6-7). L'opération du 5 octobre 2023 avait permis d'enlever des fragments osseux du processus calcanéen antérieur, qui étaient, du moins en partie, de nature récente. Dans sa prise de position du 13 novembre 2023, le Dr E______ faisait d'ailleurs état d'arrachements osseux nouveaux au niveau du rostre antérieur du calcanéum. Le Dr H______ en a inféré que cette intervention chirurgicale était, au degré de la vraisemblance prépondérante, au moins partiellement liée à l'événement du 2 juin 2023 (p. 7-8).

De son côté, le Dr I______, médecin-conseil de C______, indique que la seule « lésion » de l'appareil capsulo-ligamentaire dans l'articulation calcanéo‑cuboïdienne après l'accident de 2023 était un gonflement du ligament calcanéo-cuboïdien, avec une lésion antérieure notable et une modification dégénérative de celui-ci. Il existait par ailleurs un œdème osseux dans l'articulation sous-talienne voisine. L'IRM et le SPECT-CT de 2023 ne révélaient ni œdème osseux, ni atteinte de l'appareil capsulo-ligamentaire dans l'articulation calcanéo-cuboïdienne, mais un fragment éclaté du processus antérieur du calcanéus, qui était un fragment osseux corticalisé, non récent (rapport du 11 août 2024 p. 7). Un fragment osseux fraîchement éclaté présenterait au moins un œdème osseux ou un hématome de fracture ainsi que le dessin correspondant des tissus mous, ce qui n'était pas le cas en l'occurrence. Le Dr I______ en concluait que l'éclatement récent au niveau du rostre antérieur correspondait à une complication secondaire d'une lésion antérieure apparue après l'événement de 2015 (p. 8).

Le Dr H______ réplique en relevant tout d'abord que les formulations du Dr I______ semblent parfois confuses et difficilement compréhensibles (rapport du 19 septembre 2024 p. 3). Il reproche à son confrère d'avoir fait fi des résultats cliniques après l'événement du 2 juin 2023, mis en évidence le 5 juin 2023 et documentés dans un rapport médical du 7 octobre 2023 selon lequel l'assuré présentait un « hématome partie latérale du talon, dl [douleur] palpation ligament collatéral + calcanéum +5e méta ». La présence d'un hématome visible permettait de constater que l'assuré avait dû subir le 2 juin 2023, au degré de la vraisemblance prépondérante, une lésion structurelle de son pied droit. Or, le Dr I______ n'abordait pas ce point. Le Dr H______ reproche également à son confrère de s'être basé exclusivement sur les rapports des radiologues et non pas sur les imageries actuelles de l'arrière-pied droit de l'assuré. Ce faisant, celui‑ci n'avait pas procédé à sa propre interprétation des images (p. 5). Le Dr H______ ajoute qu'un « hématome partie latérale du talon » ne peut pas être dû exclusivement à un « gonflement du ligament [calcanéo-cuboïdien] ». L'IRM du 6 juin 2023 faisait d'ailleurs apparaître en plus d'une « tuméfaction du ligament calcanéo-cuboïdien latéral et dorsal », un « œdème de la portion inférieure de la tête de l'astragale », qui ne constituait nullement « un élément post-contusionnel ». De plus, l'imagerie avait révélé un « œdème sous-cutané du cou du pied » qui correspondait bien à l'hématome sus-décrit. Le Dr I______ minimisait l'événement du 2 juin 2023 en occultant l'état clinique du 5 juin 2023 et en relayant de manière incomplète les résultats de l'IRM du 6 juin 2023 (p. 6).

Le Dr H______ souligne que le processus calcanéen antérieur ne comportait pas seulement « un fragment éclaté », mais qu'il en existait un grand nombre. Cela ressortait du rapport relatif à l'examen SPECT-CT du 1er septembre 2023 qui mentionnait des « petits fragments osseux ». Certes, ce rapport faisait état de fragments « corticalisés », ce qui était vrai pour certains d'entre eux, mais pas pour au moins l'un d'entre eux (p. 6) qui présentait l'aspect typique d'une fracture par avulsion. Le Dr H______ explique que dans le cas d'une fracture par avulsion, presque toujours proche de l'articulation, il s'agit, de par son mécanisme, d'une lésion par distraction et, de facto, plutôt de l'arrachement osseux d'un ligament que d'une fracture osseuse « typique » due à des forces de flexion ou de compression importantes. C'est pourquoi, dans de nombreux cas, seul un léger œdème de la moelle osseuse est visible et les modifications sont plutôt visibles dans les parties molles, comme c'était le cas chez l'assuré (p. 8).

Le Dr H______ ajoute que le rapport radiologique (du 1er septembre 2023) attestait la présence de « remaniements arthrosiques préexistants, probablement décompensés par le traumatisme de juin », ainsi qu'une « composante inflammatoire ». Le Dr H______ en a tiré la conclusion que des résidus de l'événement du 2 juin 2023 étaient encore détectables par imagerie près de trois mois plus tard. L'affirmation du Dr I______, selon laquelle l'imagerie ne révélait « ni œdème osseux, ni atteinte importante de l'appareil capsulo‑ligamentaire dans l'articulation [calcanéo-cuboïdienne] » était en contradiction avec la documentation disponible. L'IRM du 6 juin 2023 montrait une « tuméfaction du ligament calcanéo-cuboïdien latéral et dorsale », les termes « tuméfaction » et « œdème » étant largement synonymes. De plus, un « œdème de la portion inférieure de la tête de l'astragale » et « un œdème sous-cutané du cou du pied » étaient observables (p. 6).

En définitive, selon le Dr H______, l'arrière-pied droit de l'assuré présentait certes des altérations chroniques préexistantes, qui avaient toutefois été aggravées de manière déterminante par des lésions structurelles récentes objectivables survenues lors de l'événement du 2 juin 2023, nécessitant le traitement chirurgical du 5 octobre 2023 (p. 7 et 9).

Prenant à nouveau position, le Dr I______ répond en substance que les imageries ne permettent pas d'attester la présence d'un fragment d'os fracturé récent (rapport du 9 février 2025 p. 6-7), en ajoutant qu'une évaluation radiologique serait nécessaire, car ni le Dr H______ ni lui-même ne sont des radiologues (p. 7).

Enfin, dans son rapport du 27 février 2025, le Dr H______ maintient sa position.

Compte tenu de ces éléments, il est à ce stade impossible à la chambre de céans de trancher entre les opinions contradictoires des deux médecins-conseils précités.

4.2 Dans ces circonstances, en l'absence d'expertise confiée par C______ à un médecin externe spécialisé en chirurgie orthopédique, il se justifie de lui renvoyer le dossier pour qu'elle mette en œuvre une telle mesure, afin de départager ces deux médecins-conseils. L'expert mandaté devra s'adjoindre le concours d'un radiologue, comme l'a du reste suggéré le Dr I______.

5.             Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision du 24 mai 2024 annulée et la cause renvoyée à C______ pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

6.             6.1 Selon la réglementation légale et la jurisprudence, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause devant une juridiction de première instance n’ont pas droit à une indemnité de dépens, sauf en cas de recours téméraire ou interjeté à la légère par l’assuré ou lorsque, en raison de la complexité du litige, on ne saurait attendre d’une caisse qu’elle se passe des services d’un avocat indépendant (ATF 126 V 143 consid. 4).

En l'espèce, il ne sera pas alloué de dépens à B______, qui a agi sans l'assistance d'un avocat.

6.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 24 mai 2024.

4.        Renvoie la cause à C______ pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le