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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/849/2025

ATAS/747/2025 du 06.10.2025 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/849/2025 ATAS/747/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 octobre 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______

représentée par Me Per PROD'HOM, avocat

 

 

recourante

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. En 2022, A______ (ci-après : l'assurée), mariée, était affiliée en tant que personne sans activité lucrative auprès de la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION (ci‑après : la caisse).

b. Par courrier du 2 septembre 2024, l'assurée a demandé à la caisse de bien vouloir recalculer le montant des cotisations AVS en se basant sur la taxation du 28 août 2024 et de tenir compte des cotisations retenues sur son salaire 2022 de CHF 898.-, conformément au certificat de salaire de B______ SA (ci-après : l'employeuse) annexé.

c. Le 25 octobre 2024, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a transmis à la caisse une communication fiscale concernant l'assurée en relation avec l'année 2022.

L'estimation datait du 6 septembre 2024, concernait l'assiette de l'impôt fédéral direct et constituait une rectification. Le revenu de rentes s'élevait à CHF 28'616.-et le patrimoine assujetti à cotisations se montait à CHF 7'477'874.-. Dans les remarques était indiqué « Ajout de la surestimation immobilière de CHF 2'713'426.- ».

d. Le 7 novembre 2024, l'office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) a informé l'assurée que, lors de la communication de la fortune aux caisses de compensation, les autorités fiscales devaient tenir compte des valeurs de répartition intercantonales. Le montant de la fortune déterminante communiqué devait donc correspondre à cette valeur corrigée de la répartition intercantonale, y compris pour les biens immobiliers sis dans le canton dont était issu la taxation fiscale cantonale. La somme de CHF 1'202.25 avait été imputée de ses cotisations 2022 après qu'il eut été tenu compte de ses salaires se montant à CHF 11'342.-.

e. Par décision définitive pour l'année 2022 du même jour, remplaçant une précédente décision du 27 mai 2024, l'OCAS a fixé les cotisations dues à CHF 11'370.- (CHF 12'031.- [cotisations AVS/AI/APG] + CHF 541.- [frais d'administration de 5%] – CHF 1'202.25 [déduction des cotisations provenant du revenu, caisse externe]), sur la base d'un revenu sous forme de rente 2022 de CHF 678'560.- (CHF 33'928 x 20) et d'une fortune nette au 31 décembre 2022 de CHF 3'738'837.-, la fortune déterminante se montant à CHF 4'417'497.-.

Par une deuxième décision du même jour, l'OCAS a fixé le total des intérêts moratoires sur cotisations personnelles compensatoires 2022 à CHF 120.65.-, lesquels s'ajoutaient à la facture des cotisations dues.

Toujours le même jour, l'OCAS a fait parvenir à l'assurée la facture finale pour ses cotisations personnelles du 1er janvier au 31 décembre 2022, dont il résultait un total en faveur de cette dernière de CHF 1'267.80 (montant dû de CHF 11'490.85 [soit CHF 11'370.20 de cotisations + CHF 120.65 d'intérêts] – paiement de CHF 12'758.65).

B. a. Le 25 novembre 2024, l'assurée a élevé opposition à l'encontre de ces décisions, demandant à l'OCAS de recalculer le montant de ses cotisations AVS en se basant sur la taxation des autorités fiscales, tant pour les revenus sous forme de rentes que pour la fortune déterminante, sa part à prendre en considération s'élevant à CHF 2'440'123.- (CHF 4'880'246.-/2).

Le total de CHF 4'880'246.- correspondait aux revenus sous forme de rentes de CHF 11'208.- (CHF 8'686.- + CHF 28'032.- + CHF 1'003.- + CHF 2'297.-), multipliés par 20, soit CHF 51'226.-, auxquels s'ajoutaient les actifs bruts de CHF 7'116.013.- et dont étaient déduites les dettes de CHF 2'235'767.-.

Il n'y avait pas d'élément hors canton et donc pas de surestimation pour l'impôt fédéral direct. Les valeurs de répartition intercantonale n'avaient pour but que la répartition des actifs et non pas l'augmentation de la base imposable des contribuables.

Elle a annexé à son opposition sa taxation fiscale rectificative du 28 août 2024.

b. Par courriel du 31 janvier 2025, l'OCAS a informé l'AFC-GE des éléments soulevés par l'assurée dans son opposition et lui a demandé de lui confirmer les montants communiqués pour l'année 2022, à savoir une fortune de CHF 7'477'874.- et un revenu sous forme de rente de CHF 28'616.-, ainsi que de lui indiquer si une éventuelle réclamation avait été déposée auprès d'elle pour 2022.

c. Par courriel du 3 février 2025, l'AFC-GE a transmis à l'OCAS le détail des chiffres communiqués.

Les revenus correspondaient à la rente viagère de l'époux de l'assurée de CHF 21'716.- (CHF 8'686.- ICC = 40%), à la rente AVS de ce dernier et de l'enfant de CHF 28'032.- et CHF 11'208.-, aux allocations familiales de CHF 3'600.-, aux autres prestations et indemnités de CHF 1'003.- et aux autres rentes de CHF 2'297.-. La fortune comprenait CHF 723'700.- de fortune mobilière, CHF 185'096.- de valeur de rachat d'assurances-vie et vieillesse, CHF 6'029'836.- de fortune immobilière à Genève, CHF 2'713'426 de surestimation immobilière, CHF 61'583.- de fortune immobilière au Pérou, dont étaient déduites des dettes de CHF 2'216'316.- et CHF 19'451.-. La fortune nette était de CHF 7'477'874.-.

d. Par décision du 11 février 2025, la caisse a rejeté l'opposition et confirmé sa décision de cotisations personnelles du 7 novembre 2024 concernant l'année 2022.

Pour l'année 2022, l'AFC-GE avait communiqué une fortune de CHF 7'477'874.- et un revenu sous forme de rente de CHF 28'616.- correspondant à la rente viagère de l'époux de l'assurée (CHF 27'716.-), aux allocations familiales (CHF 3'600.-), aux autres prestations et indemnités (CHF 1'003.-) ainsi qu'aux autres rentes (CHF 2'297.-). Ces renseignements, entrés en force et confirmés par l'AFC-GE, la liaient. Au montant de CHF 28'616.- communiqué à titre de revenus sous forme de rente, elle avait ajouté la rente AVS perçue par l'époux de l'assurée, ainsi que la rente complémentaire enfant, soit un montant de CHF 39'240.-, ce qui aboutissait au total de CHF 67'856.-. L'assurée étant mariée, elle avait, pour le calcul des cotisations, divisé la fortune et les revenus sous forme de rente par deux. Les montants de fortune et de revenus sous forme de rente se chiffraient bien à CHF 3'738'937.- (CHF 7'477'937.-/2) et CHF 33'928.- (CHF 67'856.-/2). La déduction sociale sur la fortune et l'abattement immobilier étaient des déductions fiscales qui n'étaient pas prises en compte pour la fortune taxable à l'AVS. Les autorités fiscales tenaient compte des valeurs de répartition intercantonales pour les immeubles, y compris pour les immeubles dans le canton de domicile de l'assurée.

C. a. Par acte du 11 mars 2025, l'assurée a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant à son annulation et au renvoi du dossier à l'OCAS pour nouvelle détermination des cotisations AVS 2022 sur la base de la fortune taxable retenue par l'AFC-GE en tenant également compte d'une déduction pour les cotisations AVS déjà payées.

L'OCAS s'était basé sur des informations erronées. Il avait inclus des éléments de fortune fictifs, qui ressortaient d'une taxation provisoire du 24 mars 2024 et non pas des éléments de fortunes finaux ressortant des bordereaux de taxation 2022 du 28 août 2024, en force. Conformément à ces derniers, la fortune, avant déductions fiscales et divers abattements prévus par les législations fiscales non déductibles en matière d'AVS, était de CHF 4'480'246.- au 31 décembre 2022. Les revenus sous forme de rente de CHF 28'616.- n'étaient pas contestés. La fortune déterminante était donc de CHF 2'240'123.- (CHF 4'480'246.-/2).

Au cours de l'année 2022, elle avait également exercé une activité lucrative correspondant à un emploi de moins de 50%. En lien avec cette activité, son employeur avait déduit un montant de cotisations AVS de CHF 898.-. Elle demandait que ce montant soit déduit de la facture finale correspondant à l'année 2022, point sur lequel la décision sur opposition ne se prononçait pas.

À l'appui de son recours, elle a notamment versé à la procédure la répartition intercantonale établie par l'AFC-GE le 22 mars 2024.

b. Par réponse du 8 avril 2025, la caisse a conclu au rejet du recours.

Le montant de fortune pris en considération ressortait de la communication fiscale du 6 septembre 2024 transmise à la caisse le 25 octobre 2024. Ce montant, qui liait la caisse, avait par la suite été confirmé par l'AFC-GE par courriel du 3 février 2025. La caisse devait prendre en compte les valeurs de répartitions intercantonales y compris pour les immeubles situés dans le domicile de l'assuré, de sorte que l'exemption de la surestimation ne pouvait pas être prise en considération comme au niveau fiscal. Aucun élément ne venait démontrer une erreur manifeste dans les montants transmis, de sorte qu'il ne revenait pas à la caisse de procéder à une nouvelle taxation.

Le point relatif à la prise en compte des cotisations versées en lien avec l'activité lucrative exercée par l'assurée n'avait pas été soulevé lors de l'opposition du 9 décembre 2024. En tout état de cause, la décision de cotisations personnelles du 7 novembre 2024 avait pris en compte la déduction des cotisations AVS payées par le biais de son activité réalisée auprès de l'employeuse, soit une déduction de CHF 1'202.25.

c. L'assurée n'a pas répliqué dans le délai au 12 mars 2025 imparti à cet effet.

 

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s'appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n'y déroge expressément. Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de la fixation des cotisations de la recourante comme personne sans activité lucrative pour l'année 2022.

3.             La recourante conteste la fortune nette au 31 décembre 2022 retenue par l'intimée.

3.1 Les assurés n’exerçant aucune activité lucrative paient une cotisation selon leur condition sociale. La cotisation minimale est de CHF 413.-, la cotisation maximale correspond à 50 fois la cotisation minimale. Les assurés qui exercent une activité lucrative et qui paient moins de CHF 413.- pendant une année civile, y compris la part d’un éventuel employeur, sont considérés comme des personnes sans activité lucrative. Le Conseil fédéral peut majorer ce montant selon la condition sociale de l’assuré pour les personnes qui n’exercent pas durablement une activité lucrative à plein temps (art. 10 al. 1 LAVS, dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022). Les personnes suivantes paient la cotisation minimale : les étudiants sans activité lucrative, jusqu’au 31 décembre de l’année où ils atteignent l’âge de 25 ans (let. a), les personnes sans activité lucrative qui touchent un revenu minimum ou d’autres prestations de l’aide sociale publique (let. b) ; les personnes sans activité lucrative qui sont assistées financièrement par des tiers (let. c ; art. 10 al. 2 LAVS). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions plus détaillées sur le cercle des personnes considérées comme n’exerçant pas d’activité lucrative ainsi que sur le calcul des cotisations. Il peut prévoir qu’à la demande de l’assuré, les cotisations sur le revenu du travail sont imputées sur les cotisations dont il est redevable au titre de personne sans activité lucrative (art. 10 al. 3 LAVS).

3.2 Conformément à l’art. 28 al. 1 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101), dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022, les cotisations des personnes sans activité lucrative, pour lesquelles la cotisation minimale de CHF 413.- par année (art. 10 al. 2 LAVS) n’est pas prévue, sont déterminées sur la base de leur fortune et du revenu qu’elles tirent des rentes. Les rentes versées en application des art. 36 et 39 de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20) ne font pas partie du revenu sous forme de rente. Les cotisations se calculent comme suit : pour une fortune ou un revenu annuel acquis sous forme de rente multiplié par 20 se situant entre CHF 300'000.- et CHF 1'649'999.-, la cotisation annuelle s’élève à CHF 435.-, auxquels s’ajoute un supplément de CHF 87.- par tranche supplémentaire de CHF 50'000.- ; pour une fortune ou un revenu annuel acquis sous forme de rente multiplié par 20 se situant entre CHF 1'750'000.- et CHF 8'449'999.-, la cotisation annuelle s’élève à CHF 2'958.-, auxquels s’ajoute un supplément de CHF 130.50 par tranche supplémentaire de CHF 50'000.- ; pour une fortune ou un revenu annuel acquis sous forme de rente multiplié par 20 se situant entre à CHF 8'550'000.- et plus, la cotisation annuelle s’élève à CHF 20'650.-.

Si une personne n’exerçant aucune activité lucrative dispose à la fois d’une fortune et d’un revenu sous forme de rente, le montant de la rente annuelle multiplié par 20 est ajouté à la fortune (art. 28 al. 2 RAVS). Pour calculer la cotisation, on arrondit la fortune aux CHF 50'000.- inférieurs, compte tenu du revenu annuel acquis sous forme de rente multiplié par 20 (art. 28 al. 3 RAVS). Si une personne mariée doit payer des cotisations comme personne sans activité lucrative, ses cotisations sont déterminées sur la base de la moitié de la fortune et du revenu sous forme de rente du couple (art. 28 al. 4 1re phr. RAVS). Le Tribunal fédéral a admis la légalité et la constitutionnalité de l’art. 28 RAVS (ATF 143 V 254 consid. 6).

Les personnes qui n’exercent pas durablement une activité lucrative à plein temps acquittent les cotisations comme des personnes sans activité lucrative, lorsque, pour une année civile, les cotisations qu’elles paient sur le revenu d’un travail, ajoutées à celles dues par leur employeur, n’atteignent pas la moitié de la cotisation due selon l’art. 28 RAVS. Leurs cotisations payées sur le revenu d’un travail doivent dans tous les cas atteindre le montant de la cotisation minimale selon l’art. 28 RAVS (art. 28bis al.1 RAVS).

3.3 Pour établir la fortune déterminante, les autorités fiscales cantonales se fondent sur la taxation passée en force de l’impôt cantonal. Elles tiennent compte des valeurs de répartitions intercantonales (art. 29 al. 3 RAVS). Les caisses de compensation sont liées par les données des autorités fiscales cantonales (art. 23 al. 4 RAVS, également applicable à la taxation des personnes sans activité lucrative par renvoi de l’art. 29 al. 7 RAVS).

3.4 L'impôt sur la fortune des personnes physiques a pour objet l'ensemble de la fortune nette (art. 13 al. 1 LHID) qui se détermine selon les règles d'évaluation prévues à l'art. 14 LHID. Selon l'art. 14 al. 1 LHID, la fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée, sous réserve des exceptions énumérées de manière exhaustive à l'art. 14 al. 2 et 3 LHID. Par principe de la valeur vénale au sens de l'art. 14 LHID, il faut entendre la valeur attribuée à un objet sur le marché des échanges économiques, lors d'un achat ou d'une vente dans des conditions normales, qu'un tiers serait prêt à payer (ATF 148 I 210 consid. 4.4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_606/2024 du 28 février 2025 consid. 4.1 ; 9C_670/2022 du 19 avril 2023 consid. 3.1.3 et les références).

La LHID ne prescrit pas au législateur cantonal de méthode d'évaluation précise pour déterminer la valeur vénale au sens de l'art. 14 LHID. Les cantons disposent donc en la matière d'une marge de manœuvre importante pour élaborer et appliquer leur réglementation, aussi bien dans le choix de la méthode de calcul applicable que pour déterminer, vu le caractère potestatif de l'art. 14 al. 1 2phr. LHID, dans quelle mesure le rendement doit être pris en considération dans l'estimation (ATF 148 I 210 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_606/2024 du 28 février 2025 consid. 4.1 ; 2C_66/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.2 et les références).

Pour éviter une discrimination des contribuables qui sont assujettis à la souveraineté fiscale de plusieurs cantons (ce principe de non-discrimination découle de l’art. 127 al. 3 Cst. ; Daniel DE VRIES REILINGH, La double imposition intercantonale, 2e éd., 2013, p. 132 ss et les références, p. 24 s.), il est nécessaire d’établir la fortune nette globale de chaque contribuable (art. 13 al. 1 LHID), en prenant en compte l’ensemble des dettes de celui-ci. Cela nécessite de procéder à une répartition de ces différentes dettes entre les cantons concernés ; la solution adoptée à cet égard par la jurisprudence consiste à retenir une répartition proportionnelle des dettes, sur la base des actifs bruts localisés (Daniel DE VRIES REILINGH, op. cit., p. 132 ss et les références). Cette répartition suppose ainsi au préalable une évaluation des actifs en question et notamment des actifs immobiliers. Or, ni la jurisprudence du Tribunal fédéral, ni l’art. 14 LHID ne prescrivent une méthode d’évaluation uniforme à cet égard.

Dans un contexte de répartition intercantonale, sachant que les immeubles sont estimés selon des règles différentes dans chaque canton, il est nécessaire de déterminer une valeur de référence uniforme afin d'assurer une répartition correcte et une imposition adéquate. La Conférence suisse des impôts (ci-après : CSI) a ainsi émis une circulaire précisant les valeurs de répartition intercantonales, établies sur la base des résultats d’une enquête nationale comparant les gains de la vente de biens immobiliers aux valeurs fiscales cantonales respectives. Il s'agit de la circulaire no 22 de la CSI relative aux règles concernant l’estimation des immeubles en vue des répartitions intercantonales des impôts dès la période de taxation 2002 (facteurs de répartition) du 22 mars 2018 (ci‑après : la circulaire ; disponible sur https://www.ge.ch/document/circulaire-ndeg22-csi-estimation-immeubles-dans-repartition-intercantonale-impots consulté le 25 septembre 2025).

Selon la circulaire, d’après la jurisprudence du Tribunal Fédéral, tous les actifs doivent être évalués, au niveau intercantonal, selon des règles cohérentes par tous les cantons concernés, au moins pour la répartition des intérêts passifs. Étant donné que les immeubles sont estimés de manière différente dans les cantons, il faut déterminer une valeur de référence uniforme pour des raisons de répartition correcte et d’imposition adéquate. Les facteurs de répartition sont utilisés à cette fin. D’après les résultats d’une enquête nationale, les gains de la vente de biens immobiliers sont comparés aux valeurs fiscales cantonales respectives, les valeurs de répartitions intercantonales étant ensuite calculées sur cette base (ch. 1). À partir de la période fiscale 2002 jusqu’à 2018, les valeurs de répartition ont été déterminées sur la base de 70% de la valeur de référence (canton avec la médiane la plus basse) pour les immeubles non-agricoles. À partir de la période fiscale 2019, la valeur de répartition est calculée à partir de 100% de la valeur de référence. Certes, cela augmente les valeurs de répartition, mais le rapport entre les cantons reste, pour l’essentiel, inchangé. La valeur prise en compte pour la répartition représente en règle générale un pourcentage de la valeur fiscale cantonale. Pour Genève, pour un immeuble non-agricole dès 2020, le pourcentage est fixé à 145%.

En somme, la circulaire vient suppléer l’absence d’harmonisation sur la question de l’évaluation des immeubles. Si elle émane d’une association de droit privé, la jurisprudence du Tribunal fédéral a considéré néanmoins qu’elle doit être assimilée à une ordonnance administrative édictée par une autorité fiscale publique et il en a déduit qu’elle peut être appliquée à juste titre lors des répartitions intercantonales (arrêts du Tribunal fédéral 2C_415/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2.4 ; 2C_393/2008 du 19 novembre 2008 in RDAF 2009 II 446 consid. 3).

3.5 Toute taxation fiscale est présumée conforme à la réalité ; cette présomption ne peut être infirmée que par des faits. Dès lors que les caisses de compensation sont liées par les données fiscales, et que le juge des assurances sociales examine, en principe, uniquement la décision de la caisse quant à sa légalité, le juge ne saurait s'écarter des décisions de taxation entrées en force que si celles-ci contiennent des erreurs manifestes et dûment prouvées, qu'il est possible de rectifier d'emblée, ou s'il s'impose de tenir compte d'éléments de fait sans pertinence en matière fiscale mais déterminants sur le plan des assurances sociales. De simples doutes sur l'exactitude d'une taxation fiscale ne suffisent pas. La détermination du revenu est en effet une tâche qui incombe aux autorités fiscales, et il n'appartient pas au juge des assurances sociales de procéder lui‑même à une taxation. L'assuré n'exerçant aucune activité lucrative doit donc faire valoir ses droits en matière de taxation – avec les effets que celle-ci peut avoir sur le calcul des cotisations sociales – en premier lieu dans la procédure judiciaire fiscale. Le principe selon lequel l'assuré doit faire valoir ses droits dans la procédure judiciaire fiscale connaît toutefois une exception, lorsque le montant de l'impôt fixé dans la décision de taxation est peu élevé et que l'absence d'une valeur litigieuse suffisante enlève tout motif d'entamer une procédure fiscale. Dans ce cas de figure, un examen autonome des facteurs d'imposition sur lesquels se fonde la décision de cotisations attaquée reste possible. Cette exception doit valoir à plus forte raison dans le cas où il résulte de la taxation qu'aucun impôt n'est dû, puisque le contribuable n'a alors aucune possibilité, faute de lésion, d'emprunter la voie du recours fiscal (arrêt du Tribunal fédéral 9C_441/2015 du 19 février 2016 consid. 6.4 et 6.5).

Les communications fiscales sont également contraignantes lorsque les taxations entrées en force auraient probablement été corrigées si elles avaient été attaquées à temps par les voies de recours de droit fiscal (ATF 110 V 369).

3.6 En l'espèce, l'intimée a retenu comme fortune brute au 31 décembre 2022 CHF 3'738'937.-, correspondant à la moitié du patrimoine assujetti à cotisations de CHF 7'477'874.- communiqué par les autorités fiscales le 25 octobre 2024. La recourante conteste la prise en compte de ce dernier montant, affirmant que c'est celui de CHF 4'480'246.- qui devrait être pris en considération comme fortune au 31 décembre 2022, correspondant au montant de la fortune nette totale avant déduction sociale sur la fortune et abattement selon le rectificatif de répartition intercantonale pour les impôts cantonaux et communaux 2022 du 28 août 2024.

Il ressort de la communication du 25 octobre 2014 que l'AFC-GE a ajouté, dans le patrimoine assujetti à cotisation, une surestimation immobilière de CHF 2'713'426.-, laquelle figurait en tant que « Total surestimation IFD » dans la répartition intercantonale initiale établie par les autorités fiscales le 22 mars 2024, mais ne figurait plus dans la répartition intercantonale rectificative du 28 août 2024.

Or, il ressort de la communication fiscale et du détail de la fortune communiquée par les autorités fiscales le 3 février 2024 que, contrairement à ce qu'affirme la recourante, ces dernières ne se sont pas basées de manière erronée sur la répartition intercommunale initiale du 22 mars 2024. En effet, au-delà du fait que la communication fiscale a été émise le 15 octobre 2024 et est donc postérieure aux bordereaux rectificatifs du 28 août 2024, les éléments pris en considération pour aboutir au total de CHF 7'477'874.- sont ceux figurant dans la répartition intercantonale rectificative du 28 août 2024, puisque les montants des dettes hypothécaires pris en compte sont ceux figurant dans ce dernier, de CHF 2'216'316.- pour les dettes hypothécaires liées aux biens immobiliers genevois et CHF 19'451.- pour les dettes hypothécaires liées à la fortune mobilière péruvienne, lesquels diffèrent des montants pris en compte dans la répartition intercantonale initiale du 22 mars 2024, qui retenait respectivement CHF 2'221'682.- et CHF 14'085.-.

Les autorités fiscales ont toutefois quand même pris en considération une surestimation immobilière de CHF 2'713'426.-, alors que la surestimation IFD de CHF 2'713'424.- ne figurait plus dans la répartition intercantonale finale du 28 août 2024. Cependant, il ressort de la répartition intercantonale initiale que, tout en comptabilisant la surestimation, elle comportait une exemption de celle-ci. Ainsi, c'est non seulement la surestimation qui a disparu dans la répartition intercantonale, mais également l'exemption, de sorte que la fortune mondiale totale, déterminante pour le taux d'imposition, n'a en définitive pas changé, la suppression de la surestimation et de l'exemption conduisant dès lors à une opération blanche pour la taxation.

Cependant et indépendamment de ces suppressions, pour le calcul des cotisations, l'art. 29 al. 3 RAVS prescrit la prise en compte des valeurs de répartitions intercantonales. Or, la surestimation intégrée par l'AFC-GE dans la fortune communiquée à l'intimée permet de porter la valeur fiscale genevoise à la valeur de répartition intercantonale, par application du pourcentage de 145% conformément à la circulaire (immeubles occupés par le propriétaire de CHF 599'030.- + immeubles locatifs ou loués de CHF 5'430'806.-, soit CHF 6'029'836.- x 45%, ce qui conduit à une surestimation de CHF 2'713'426.-), et conduit ainsi à l'adaptation de la valeur fiscale genevoise à une valeur cohérente par rapport à toute la Suisse, ce qui apparaît être le but poursuivi par l'art. 29 al. 3 RAVS lorsqu'il préconise la prise en compte des valeurs de répartitions intercantonales.

Au vu de ce qui précède, la communication fiscale du 25 octobre 2024 n'apparaît pas entachée d'une erreur manifeste et dûment prouvée, les autorités fiscales apparaissant au contraire avoir correctement communiqué le montant de la répartition intercantonale conformément à l'art. 29 al. 3 RAVS, la surestimation devant être prise en compte pour obtenir la valeur de répartition même si elle ne figurait plus dans la répartition intercantonale rectificative. C'est partant à juste titre que l'intimée ne s'est pas écartée de la communication fiscale qui la liait et a pris en considération une fortune des époux de CHF 7'477'874.-, à diviser par deux pour le calcul des prestations, comme elle l'a fait. Le grief sera par conséquent écarté.

4.             La recourante demande par ailleurs la prise en compte d'un montant de cotisations de CHF 898.- déjà payé en lien avec une activité lucrative correspondant à un emploi de moins de 50%.

4.1 Si l’assuré est assujetti au même régime que les personnes sans activité lucrative, l’art. 30 est applicable (art. 28bis al. 2 RAVS). Les assurés considérés comme personnes sans activité lucrative pour une année civile donnée, peuvent demander que les cotisations versées pour l’année en question sur le revenu d’une activité lucrative soient imputées sur celles qu’ils doivent acquitter comme personnes sans activité lucrative (art. 30 al. 1 LAVS). Les assurés sans activité lucrative qui demandent l’imputation doivent apporter à la caisse de compensation à laquelle ils sont affiliés comme personnes sans activité lucrative la preuve que des cotisations ont été versées sur le produit d’une activité lucrative (art. 30 al. 2 LAVS).

4.2 En l'espèce, l'intimée a indiqué dans sa réponse avoir déjà déduit les cotisations AVS de CHF 1'202.25 payées par le biais de son activité auprès de B______ SA, ce qui apparaît effectivement dans la décision définitive pour l'année 2022 concernant les cotisations de personnes sans activité lucrative du 7 novembre 2024.

La recourante demandant la déduction des cotisations pour son activité auprès de l'employeuse conformément à son certificat de salaire versé à la procédure, il apparaît donc que celles-ci avaient déjà été prises en compte pour fixer le total des cotisations dû de CHF 11'370.20.

Le grief sera par conséquent écarté.

5.             Dans ces circonstances, la décision sur opposition de l'intimée est conforme au droit et le recours à son encontre, mal fondé, sera rejeté.

6.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H LPA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le