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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/129/2025

ATAS/746/2025 du 06.10.2025 ( LAMAL ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/129/2025 ATAS/746/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 octobre 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

B______ AG

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Entre 2017 et 2020, A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1966, était assuré pour l'assurance-maladie obligatoire auprès de B______ AG (ci-après : l'assurance).

b. Le 11 février 2020, l'assurance a déposé une plainte pénale dans le canton de Bâle-Ville à l'encontre de l'assuré, chiffrant son dommage à CHF 32'050.70 de prestations indues.

L'assuré avait présenté une ordonnance médicale à plusieurs pharmacies et demandé l'impression de la facture. Sur ce, il avait pris en photo ou emporté la facture et, sous prétexte d'avoir à retirer de l'argent, avait quitté la pharmacie sans régler la facture. Par la suite, il avait envoyé la facture à l'assurance pour remboursement, que cette dernière avait effectué en vertu de l'assurance obligatoire des soins. Ce procédé lui avait permis de générer un remboursement de prestations de la part de l'assurance dans 17 cas énumérés pour un total de CHF 26'173.20.

Par ailleurs, il avait remis plusieurs fois certaines factures à l'assurance et ainsi obtenu un remboursement multiple de la part de cette dernière, ceci à 17 reprises selon la liste énumérée pour un total de CHF 5'877.50.

À l'appui de sa plainte pénale, elle a produit les factures et décomptes de prestations concernés.

Les autorités bâloises ont transmis cette plainte au Ministère public genevois pour fixation du for le 10 février 2020 et, par ordonnance d'acceptation du for du 2 avril 2020, ce dernier a repris la procédure.

c. Le 26 novembre 2020, le Ministère public a ordonné la suspension de l'instruction de la procédure pénale, dans l'attente d'une décision définitive et exécutoire dans la procédure d'appel contre le jugement du Tribunal de police dans la procédure P/1______/10 reconnaissant l'assuré coupable d'abus de confiance, d'escroquerie par métier et de faux dans les titres en raison d'agissements pour partie similaires à ceux décrits dans la plainte pénale de l'assurance.

L'instruction de la procédure a été reprise le 6 mai 2021.

d. Le 5 janvier 2021, l'assurance a complété sa plainte pénale en transmettant au Ministère public cinq autres factures soumises par l'assuré à une autre assurance, vraisemblablement aussi liées à l'affaire, demandant leur prise en compte dans la procédure pénale.

e. Par ordonnance pénale du 9 décembre 2021 dans la procédure P/2______/2020, le Ministère public a déclaré l'assuré coupable d'escroquerie par métier et de faux dans les titres, l'a condamné à une peine privative de liberté de 180 jours, peine complémentaire à celle prononcée le 3 novembre 2020 par le Tribunal de police, et a renvoyé l'assurance à agir par la voie civile pour faire valoir ses éventuelles prétentions civiles.

Il était reproché à l'assuré d'avoir, à Genève, entre 2017 et 2019, falsifié des justificatifs de remboursement et factures de pharmacies qui avaient été établis par divers médecins et pharmacies. Il lui était également reproché d'avoir, à Genève, entre 2017 et 2019, transmis à l'assurance divers justificatifs de remboursement qu'il avait préalablement falsifiés et divers tickets émis par des pharmacies genevoises portant sur l'acquisition de médicaments prescrits par des médecins genevois, alors même que la transaction portant sur l'achat dudit médicament avait été annulée, à sa demande. Il lui était également reproché d'avoir astucieusement induit en erreur l'assurance en ayant menti s'agissant des prestations dont il aurait prétendument bénéficié, lui faisant ainsi indûment verser un montant total de CHF 32'050.-, après déduction de la franchise (CHF 300.-) et de la participation aux coûts (10%). Il lui était finalement reproché d'avoir, à Genève, entre 2017 et 2019, transmis à une autre assurance cinq factures préalablement falsifiées, de sorte à obtenir un remboursement indu desdites factures, induisant ainsi astucieusement en erreur ladite assurance en la déterminant à lui verser un montant total de CHF 14'672.- en guise de remboursement de ses frais médicaux et se procurant de facto un enrichissement illégitime.

L'assuré avait partiellement reconnu les faits reprochés. Il avait admis ne pas avoir payé les médicaments qui lui avaient été remis contre factures, payables dans le délai imparti, et reconnaissait avoir néanmoins envoyé lesdites factures à l'assurance pour remboursement. Il contestait avoir présenté des ordonnances à plusieurs reprises. Ces dénégations n'emportaient pas conviction eu égard aux pièces fournies par l'assurance lésée, desquelles il ressortait que l'assuré s'était effectivement fait rembourser à plusieurs reprises la même prestation. Il s'était ainsi fait rembourser la facture initiale en produisant le justificatif de remboursement, puis s'était également fait rembourser la même facture majorée pour les mêmes prestations.

Les faits reprochés étaient établis.

B. a. Par décision du 18 février 2020, l'assurance a ordonné la restitution des prestations indûment touchées de CHF 32'050.70, reprenant la motivation de sa plainte pénale.

b. Par courriel du 5 octobre 2020, l'assuré a proposé à l'assurance de lui verser CHF 27'000.- et de signer une reconnaissance de dette pour le solde d'environ CHF 5'000.-, avec échelonnement sur 60 mensualités, contre le retrait de la plainte pénale.

c. Par courriel du 9 octobre 2020, l'assurance a informé l'assuré qu'un retrait de la plainte pénale n'était pas possible, s'agissant d'une infraction poursuivie d'office, qu'il lui devait la somme de CHF 32'050.70, qu'il pouvait lui soumettre une proposition de remboursement et qu'elle serait ouverte à un paiement échelonné.

Elle lui avait envoyé le 18 février 2020 une décision de remboursement, qui lui avait cependant été retournée. Elle l'enverrait donc à nouveau par courrier.

d. Par retour de courriel du jour même, l'assuré a maintenu sa volonté de trouver un arrangement, proposant de verser CHF 28'000.- au retrait de la plainte pénale, suivi de 48 mensualités de CHF 84.39.

e. Par courriel du 15 octobre 2020, l'assurance a maintenu son refus de retirer sa plainte pénale.

f. Le 2 novembre 2020, l'assuré, déclarant se trouver dans une situation économique extrêmement difficile, a indiqué être d'accord, à bien plaire et sans reconnaissance de droit, de rembourser une partie et/ou la globalité des montants réclamés dans le cadre d'un accord global incluant, le cas échéant, le retrait de la plainte pénale.

g. Le 5 novembre 2020, l'assurance a communiqué à l'assuré ses coordonnées bancaires pour le remboursement de CHF 32'050.70 et l'a informé que le retrait de la plainte pénale n'était définitivement pas possible.

C. a. Le 19 novembre 2020, l'assuré a annoncé entendre former opposition contre la décision de remboursement du 18 février 2020, dans la mesure où seule une partie négligeable des médicaments commandés n'avaient pas été réglés par ses soins.

b. Le jour même, l'assurance a confirmé l'impossibilité de retirer la plainte pénale et a prié l'assuré de motiver sa contestation de sa décision de remboursement du 18 février 2020 dans les 30 jours, faute de quoi elle n'entrerait pas en matière.

c. Le 21 décembre 2020, l'assuré a contesté l'intégralité des faits reprochés et a indiqué que la majorité des médicaments commandés avait effectivement été utilisée, car il souffrait de diverses maladies pouvant être justifiées par certificats médicaux, conformément aux cinq certificats médicaux transmis le lendemain.

d. Le 23 décembre 2020, l'assurance a informé l'assuré avoir suspendu la procédure d'opposition dans l'attente de l'issue de la procédure pénale.

e. Par décision du 25 novembre 2024, l'assurance a rejeté l'opposition et confirmé la décision de remboursement du 18 février 2020.

Les faits avaient été, pour une partie, admis par l'assuré dans le cadre de la procédure pénale et, pour l'autre partie, suffisamment prouvés par l'assurance au vu des pièces apportées au cours de la procédure pénale sous forme des factures et tickets de pharmacies, ainsi que de preuves de paiement. Selon l'ordonnance pénale, l'operandus morandi consistait à falsifier des justificatifs de remboursement qui avaient été établis par divers médecins et pharmacies et il était évident que l'assuré suivait un traitement médical. L'obligation de restitution était établie.

Si l'assuré n'avait pas encore déposé de demande de remise, il convenait déjà de constater un comportement dolosif excluant en soi la bonne foi, d'autant plus qu'il ne s'agissait pas de la première condamnation de ce genre de l'assuré.

D. a. Par acte du 13 janvier 2025, l'assuré a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant principalement à son annulation et subsidiairement à l'injonction à l'assurance de lui accorder une remise de dette.

Il suivait, depuis 2011, des traitements pour des troubles neuropsychiatriques nécessitant la prise de médicaments. Il avait effectivement utilisé les médicaments qui lui avaient été délivrés sur ordonnance. À aucun moment, il n'avait déclaré ne pas avoir besoin de ces médicaments et ne pas les avoir utilisés. Aucun élément ne permettait à l'assurance de considérer que c'étaient toutes les factures qui lui avaient été envoyées qui n'avaient pas été payées par lui-même. S'il avait admis devant le Ministère public avoir envoyé certaines factures qu'il n'avait pas lui-même payées, il n'avait en revanche jamais admis n'avoir payé aucune facture. Il se trouvait dans une situation dans laquelle, selon la loi, le remboursement n'était pas exigible. Ses dépenses, de CHF 45'570.- (CHF 20'670.- pour ses besoins vitaux, CHF 18'900.- pour les frais de loyers, CHF 8'000.- de dépense supplémentaire pour une personne seule), étaient supérieures à ses revenus, de CHF 35'022.- (rente de l'assurance-invalidité de CHF 21'948.- par année, allocation de logement de CHF 2'370.- par année, prestations complémentaires familiales de CHF 10'704.-). Le remboursement des prestations perçues de bonne foi n'était pas exigible.

b. Par réponse du 28 février 2025, l'assurance a conclu au rejet du recours.

L'assuré avait admis lui devoir la somme de CHF 32'050.70, étant donné qu'il aurait été prêt au remboursement sous condition de retrait de la plainte. Au vu de la condamnation pénale de l'assuré, qui n'était manifestement pas de bonne foi, les conditions de la remise n'étaient pas réalisées.

c. L'assuré n'a pas répliqué dans le délai au 2 avril 2025, prolongé au 5 mai 2025, imparti à cet effet.

 

EN DROIT

 

1.             1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

Sa compétence à raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 LAMal, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-maladie, à moins que la loi n'y déroge expressément. En vertu de l'art. 58 LPGA, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours (al. 1). Si l’assuré ou une autre partie sont domiciliés à l’étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse ; si aucun de ces domiciles ne peut être déterminé, le tribunal des assurances compétent est celui du canton où l’organe d’exécution a son siège (al. 2).

En l'occurrence, sur son acte de recours, le recourant a indiqué une adresse à Palerme, en Italie. Toutefois, il ressort du dossier que le recourant était auparavant en dernier lieu domicilié en Suisse à Genève (11, boulevard Saint-Georges).

La chambre de céans est partant également compétente à raison du lieu.

1.3 Interjeté dans la forme et le délai de trente jours prévus par la loi (art. 56 ss LPGA et 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), le recours est recevable.

2.             Il convient préalablement d'examiner l'objet du litige.

2.1 En procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent en principe être examinés et jugés que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l’objet de la contestation qui peut être déféré en justice par la voie d'un recours. Le juge n'entre donc pas en matière, sauf exception, sur des conclusions qui vont au-delà de l’objet de la contestation (ATF 134 V 418 consid. 5.2.1 et les références).

La procédure juridictionnelle administrative peut toutefois être étendue pour des motifs d'économie de procédure à une question en état d'être jugée qui excède l’objet de la contestation, c'est-à-dire le rapport juridique visé par la décision, lorsque cette question est si étroitement liée à l’objet initial du litige que l'on peut parler d'un état de fait commun et à la condition que l'administration se soit exprimée à son sujet dans un acte de procédure au moins. Les conditions auxquelles un élargissement du procès au-delà de l’objet de la contestation est admissible sont donc les suivantes : la question (excédant l’objet de la contestation) doit être en état d'être jugée ; il doit exister un état de fait commun entre cette question et l’objet initial du litige ; l'administration doit s'être prononcée à son sujet dans un acte de procédure au moins ; le rapport juridique externe à l’objet de la contestation ne doit pas avoir fait l’objet d'une décision passée en force de chose jugée (ATF 130 V 501 consid. 1.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_678/2019 du 22 avril 2020 consid. 4.4.1 et les références).

2.2 En l'espèce, la décision litigieuse ordonne la restitution du montant de CHF 32'050.70, correspondant aux prestations perçues indûment selon l'intimée. Le litige porte dès lors exclusivement sur la conformité au droit de cette demande de restitution.

Ainsi et même si la décision attaquée aborde la question de la bonne foi, indiquant d'ores et déjà que celle-ci devra être niée en cas d'éventuelle demande de remise, la question d'une telle remise, qui doit faire l'objet d'une demande auprès de l'intimée, puis d'une décision et, le cas échéant, d'une décision sur opposition avant tout recours devant la chambre de céans, est exorbitante au présent litige et ne sera ici pas examinée.

Les conclusions subsidiaires du recourant tendant à l'octroi d'une remise seront par conséquent déclarée irrecevables.

3.             Le recourant conteste la restitution de CHF 32'050.70 ordonnée par l'intimée.

3.1 Selon l'art. 25 al. 1 1re phr. LPGA, en relation avec l'art. 2 al. 1 let. a de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA ; RS 830.11), les prestations indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers. L’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision (art. 3 al. 1 OPGA).

L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

À cet égard, la jurisprudence constante distingue la révision d'une décision entrée en force formelle, à laquelle l'administration est tenue de procéder lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 129 V 200 consid. 1.1 ; 127 V 466 consid. 2c et les références), de la reconsidération d'une décision formellement passée en force de chose décidée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à laquelle l'administration peut procéder pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Ainsi, par le biais d'une reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence). L'obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’est pas liée à une violation de l'obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s'agit simplement de rétablir l'ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).

3.2 Selon l'art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l'assuré ou l'assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Cela vaut aussi lorsque les prestations ont été accordées sans avoir fait l'objet d'une décision formelle mais que leur versement a acquis force de chose décidée (ATF 130 V 380 consid. 2.1 ; 129 V 110 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_793/2023 du 5 décembre 2024 consid. 4.4 et la référence). 

3.3 Aux termes de l'art. 25 al. 2 LPGA, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant.

Depuis le 1er janvier 2021, le délai de péremption relatif a été porté à trois ans (art. 25 al. 2 LPGA). L’application du nouveau délai de péremption aux créances déjà nées et devenues exigibles sous l’empire de l’ancien droit est admise, dans la mesure où la péremption était déjà prévue sous l’ancien droit et que les créances ne sont pas encore périmées au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit (ATF 134 V 353 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_540/2014 du 5 janvier 2015 consid. 3.1). Si, au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, le délai de péremption relatif ou absolu en vertu de l’ancien art. 25 al. 2 LPGA a déjà expiré et que la créance est déjà périmée, celle‑ci reste périmée.

L’action pénale se prescrit par quinze ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 97 al. 1 let. b du code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0). L'escroquerie par métier est passible d'une peine privative de liberté de six mois à dix ans (art. 146 ch 2 CP) et les faux dans les titres d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 251 ch. 1 CP).

Les délais de l'art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 133 V 579 consid. 4 ; 128 V 10 consid. 1). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision (ATF 119 V 431 consid. 3c), le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (ATF 138 V 74 consid. 5.2 et les références). En tant qu’il s’agit de délais de péremption, l’administration est déchue de son droit si elle n’a pas agi dans les délais requis (ATF 134 V 353 consid. 3.1 et les références).

3.4 Lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA). Les autorités administratives et les juridictions administratives saisies d’une question préjudicielle sont toutefois liées par les décisions de l’organe compétent qui l’ont résolue avec force de chose jugée (art. 14 al. 2 LPA).

3.5 En l'espèce, la révision de la décision en la forme d'une demande de restitution repose sur la découverte de faits nouveaux anciens et importants, soit le fait que les prestations allouées l'ont été sur la base d'infractions pénales, de sorte que les conditions d'une révision selon l'art. 53 al. 1 LPGA sont réalisées.

Le recourant affirme néanmoins avoir effectivement utilisé les médicaments délivrés sur ordonnance, étant sous traitement pour des troubles neuropsychiatriques, n'avoir jamais déclaré ne pas avoir besoin de ces médicaments et ne pas les avoir utilisés ainsi que n'avoir jamais admis n'avoir payé aucune facture. Il soutient en outre qu'aucun élément ne permettait à l'intimée de considérer que c'étaient toutes les factures qu'il n'avait pas payées. Il conteste ainsi avoir touché les prestations dont la restitution est demandée indûment ainsi que l'étendue de l'obligation de restituer.

Toutefois, le recourant a été condamné par ordonnance pénale du 9 décembre 2021 pour escroquerie par métier et faux dans les titres. Cette ordonnance retient que les faits reprochés – qui incluent le fait d'avoir astucieusement induit en erreur l'intimée en ayant menti s'agissant des prestations dont il aurait prétendument bénéficié, lui faisant ainsi indûment verser un montant total de CHF 32'050.70 – sont établis et sont constitutifs de ces deux infractions. Or, cette ordonnance pénale est entrée en force et lie la chambre de céans.

La perception de prestations indues d'un montant de CHF 32'050.70 est ainsi établie.

Au demeurant, il sera relevé que le recourant n'apporte aucun élément dans la présente procédure permettant de remettre en cause cette conclusion. Il se contente en effet d'alléguer avoir effectivement utilisé les médicaments délivrés sur ordonnance, sans indiquer précisément quelles factures seraient concernées par son allégation, ni n'y apporter aucune substance, les certificats médicaux versés à la procédure d'opposition ne lui étant à cet égard d'aucun secours, ceci alors que, d'une part, il a admis ne pas avoir payé les médicaments et avoir néanmoins envoyé les factures à l'intimée pour remboursement dans le cadre de la procédure pénale et que, d'autre part, l'intimée a produit les factures et les décomptes de prestations concernés par l'obligation de restitution.

Finalement, s'agissant de la péremption, lorsqu'elle a eu connaissance des faits, l'intimée a porté plainte, le 11 février 2020, et elle a ensuite dans la foulée demandé la restitution des prestations, le 18 février 2020, de sorte qu'elle a agi dans le délai de péremption relatif d'un an. Par ailleurs, la demande de restitution porte sur des prestations relatives à des factures médicales datant de décembre 2016 à décembre 2018 et ont été versées selon des décomptes de prestations émis de janvier 2017 à avril 2019, de sorte qu'au moment du prononcé de la décision de remboursement le 18 février 2020, le délai de prescription de l'action pénale de quinze ans n'était pas échu.

Par conséquent, c'est à juste titre que l'intimée a confirmé sur opposition sa demande de restitution de CHF 32'050.70.

4.             Dans ces circonstances, la décision sur opposition de l'intimée est conforme au droit et le recours à son encontre, mal fondé, sera rejeté.

5.             La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Rejette le recours dans la mesure de sa recevabilité.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le