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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4050/2024

ATAS/728/2025 du 29.09.2025 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4050/2024 ATAS/728/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 septembre 2025

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

 

recourant

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), est père de quatre enfants, dont B______, née en ______ 2008.

b. Le 3 novembre 2020, le service dentaire scolaire (ci-après : SDS) a établi pour la fille de l’intéressé un devis portant sur des soins orthodontiques pour un montant de CHF 12'661.90, avec une marge de plus ou moins 10%. Compte tenu d’un taux de réduction de 80% sur ce montant au vu du revenu déterminant unifié de l’intéressé, les honoraires étaient estimés à CHF 4'128.95 conformément au barème prévu à l’art. 19 al. 2 du règlement d'application de la loi sur l'enfance et la jeunesse (REJ - J 6 01.01).

B. a. L’intéressé a déposé une demande de prestations complémentaires auprès du Service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) le 22 août 2022.

b. Le 24 juillet 2023, l’intéressé a soumis le devis du SDS au SPC, que ce dernier a annoncé accepter dans son intégralité par courrier du 20 septembre 2023, dans les limites du montant maximum de remboursement des frais pour maladie et sous réserve d’un droit aux prestations.

c. Par décision du 26 septembre 2023, le SPC a remboursé CHF 2'195.10 à l’intéressé, correspondant aux traitements prodigués par le SDS en date des 26 mars 2021, 29 juin 2021, 21 septembre 2021, 12 novembre 2021, 14 et 16 février 2022, 20 juin 2022, 11 octobre 2022, 15 décembre 2022 et 7 mars 2023.

Par la suite, le SPC a encore rendu des décisions le 20 décembre 2023 et le 19 mars 2024, prenant respectivement en charge les honoraires du SDS de CHF 44.35 pour le traitement du 25 septembre 2023 et de CHF 169.45 pour le traitement du 7 décembre 2023. Cette seconde décision a par la suite été modifiée par décision du 20 août 2024, dans laquelle le SPC a retenu qu’un montant de CHF 100.15 sur les CHF 169.45 facturés n’était pas à sa charge.

d. Le 28 décembre 2023, le centre dentaire de Lancy (ci-après : CDL) a adressé à l’intéressé une estimation d’honoraires pour des soins devant être prodigués à sa fille par le docteur C______, orthodontiste, portant sur un montant de CHF 3'200.-.

e. Le 27 février 2024, le SDS a adressé à l’intéressé une note d’honoraires de CHF 388.15, prise en charge par décision du SPC du 15 mai 2024.

f. Le 8 mars 2024, le CDL a adressé à l’intéressé une estimation d’honoraires s’élevant à CHF 4'600.- pour les soins à prodiguer à la fille de l’intéressé par la docteure D______, orthodontiste.

g. Le 7 mai 2024, le CDL a adressé à l’intéressé une facture d’honoraires de CHF 676.40 pour les soins de la Dre D______.

h. Le 16 mai 2024, le SPC s’est adressé au CDL au sujet du devis d’orthodontie du 8 mars 2024 de la Dre D______. Le dossier soumis pour analyse étant incomplet, il l’a invité à remplir le formulaire relatif au devis d’orthodontie, nécessaire pour statuer sur sa prise en charge.

À la même date, il a également invité le CDL à remplir le formulaire de prise en charge en lien avec le devis du Dr C______.

i. Le 5 juin 2024, la Dre D______ a précisé sur le formulaire de prise en charge du SPC que le traitement ne correspondait à aucun des critères d’acceptation qui y étaient énumérés. Elle a précisé qu’il s’agissait d’un traitement dispensé depuis plusieurs années par le SDS à la fille de l’intéressé, laquelle portait un appareillage fixe bimaxillaire. L’intéressé souhaitait terminer le traitement – dont la durée restante était estimée de 9 à 12 mois – auprès du CDL.

j.  Le 9 août 2024, le SPC a informé l’intéressé que la prise en charge du devis du 8 mars 2024 était refusée. Il a mentionné que la voie de l’opposition était ouverte contre cette « décision ».

k. L’intéressé ayant signalé le 19 août 2024 sa volonté d’obtenir un entretien pour faire part de son opposition au refus du devis d’orthodontie, le SPC l’a invité le 16 septembre 2024, à faire part de ses arguments oralement. Selon le procès-verbal d’opposition, l’intéressé a déclaré que le traitement au SDS était trop long, de sorte qu’il avait souhaité le terminer au CDL. Le traitement proposé par ce centre était sensiblement identique, et il ne comprenait pas les raisons du refus du SPC.

l. Par décision du 7 novembre 2024, le SPC a refusé de participer aux frais dentaires de CHF 223.10 du 19 juin 2024 et de CHF 223.10 du 3 juillet 2024, correspondant apparemment à des honoraires facturés par le CDL.

m. Par décision du 21 novembre 2024, le SPC a rejeté l’opposition de l’intéressé à sa décision du 9 août 2024, au motif que les soins faisant l’objet du devis du 8 mars 2024 ne remplissaient pas les critères justifiant la prise en charge des frais d’orthodontie, comme l’avait indiqué la Dre D______. Si celle-ci devait finalement considérer que le traitement entrait dans les critères d’acceptation du SPC, il lui appartiendrait de remplir un nouveau formulaire et de préciser dans quelle mesure elle poursuivait le traitement ayant fait l’objet du devis initial du SDS, son nouveau devis étant plus élevé que cette estimation déjà remboursée en partie par le SPC.

n. Dans un courrier reçu le 25 novembre 2024 par le SPC, la Dre D______ a exposé que lorsqu’elle avait rempli le formulaire de prise en charge, elle ignorait qu’un devis avait déjà été accepté par le SPC dans le passé. Dès lors que le traitement de la fille de l’intéressé avait à ce stade déjà bien progressé, il ne rentrait plus dans les critères de prise en charge du SPC. Depuis la décision de refus du SPC, l’intéressé ne bénéficiait plus de remboursement, alors que le montant correspondant au devis du SDS accepté n’avait pas encore été intégralement payé. Elle a invité le SPC à réévaluer sa décision en accordant la prise en charge des soins orthodontiques acceptée dans le devis initial.

C. a. Le 30 novembre 2024, l’intéressé a interjeté recours contre la décision du SPC du 21 novembre 2024 auprès de la chambre de céans. Il a précisé qu’il avait décidé de poursuivre le traitement auprès du CDL plutôt qu’au SDS en raison de sa proximité géographique. Le devis de CHF 4'600.- était la suite du traitement débuté en 2020, et il avait obtenu l’accord préalable de l’intimé avant de débuter ce traitement.

b. Le 1er décembre 2024, le recourant a déclaré à l’intimé qu’il s’opposait à la décision du 7 novembre 2024. Dès lors qu’il s’agissait du même état de fait que celui faisant l’objet de la décision du 21 novembre, il invitait l’intimé à attendre l’arrêt à intervenir à la suite de son recours du 30 novembre 2024.

c. Le 20 décembre 2024, l’intimé a requis de son médecin-dentiste conseil, la docteure E______, qu’elle analyse si le devis de la Dre D______ correspondait aux critères de prise en charge des traitements. Celle-ci s’est déterminée par courrier du 13 janvier 2025, rappelant qu’elle n’était pas encore médecin-dentiste conseil de l’intimé en 2023. Cependant, après avoir vu le dossier dentaire de la fille du recourant, elle pouvait garantir que celle-ci ne remplissait aucun des critères d’acceptation pour la prise en charge du traitement orthodontique. Dans ces conditions, elle disait « ne pas pouvoir rentrer en matière pour ce litige » et invitait l’intimé à prendre contact avec le médecin-dentiste conseil qui avait accepté ce devis à l’époque.

d. Dans sa réponse du 23 janvier 2025, l’intimé a conclu au rejet du recours. Il s’est référé au courrier de la Dre E______, qu’il a produit. Il précisé que le devis initial du SDS avait été validé sans avoir été soumis à son médecin-dentiste conseil. Partant, la prise en charge des factures de ce service était favorable au recourant, car l’intimé aurait refusé d’entrer en matière s’il avait sollicité l’avis de son médecin-dentiste conseil à l’époque, comme il était censé le faire selon les dispositions réglementaires. Les factures du CDL ne correspondaient pas à un devis validé par l’intimé, dès lors que la fille du recourant ne remplissait pas les conditions d’acceptation pour une prise en charge. Partant, le refus de les rembourser était fondé.

e. Dans son écriture du 8 février 2025, le recourant a conclu à l’annulation de la décision de l’intimé et à la prise en charge des frais orthodontiques de sa fille. Il a derechef soutenu que le devis de CHF 4'600.- du CDL n’était que la continuation du premier devis accepté le 20 septembre 2023. Le recourant n’avait pas à subir de préjudice car l’intimé s’était trompé à l’époque en admettant la prise en charge de ce traitement. Le nouveau devis du CDL et l’ancien devis étaient plus ou moins identiques, et le traitement orthodontique était dans sa phase finale.

f. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à l’intimé le 7 mars 2025.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).

2.             Le litige, tel que circonscrit par la décision dont est recours, porte sur la prise en charge du devis de CHF 4'600.- pour les soins orthodontiques proposés par la Dre D______.

3.             La LPC prévoit à son art. 3 al. 1 let. b que les prestations complémentaires se composent notamment du remboursement des frais de maladie et d’invalidité.

3.1 Jusqu’au 31 décembre 2007, le remboursement des frais de maladie était réglé au plan fédéral dans l’ordonnance relative au remboursement des frais de maladie et des frais résultant de l’invalidité en matière de prestations complémentaires du 29 décembre 1997 édictée par le Département fédéral de l’intérieur (DFI) (OMPC). Celle-ci a été abrogée le 1er janvier 2008 avec l’entrée en vigueur de la réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT), et le financement des frais de maladie est désormais du ressort des cantons, en application de l’art. 16 LPC.

L’art. 8 aOMPC prévoyait en matière de frais de traitement dentaire que ces frais étaient remboursés dans la mesure où il s’agissait d’un traitement simple, économique et adéquat. L’al. 3 était réservé (al. 1). Si le coût d’un traitement dentaire (frais de laboratoire inclus) risquait, selon toute vraisemblance, de dépasser CHF 3'000.-, un devis devait être adressé à l’organe d’exécution en matière de prestations complémentaires avant le début du traitement. CHF 3000.- au plus étaient remboursés si un traitement d’un coût supérieur à ce montant avait été effectué sans approbation préalable du devis (al. 3).

Le Tribunal fédéral a interprété l’art. 8 al. 3 aOMPC comme une prescription d’ordre, et non comme une disposition limitant le droit aux prestations. Si le remboursement n’était requis qu’après que les soins avaient été prodigués, il y avait lieu de partir de la présomption réfragable qu’un traitement simple, économique et adéquat n’aurait pas coûté plus de CHF 3'000.-. L’intéressé pouvait toutefois amener la preuve du contraire, et un traitement simple, économique et approprié excédant ce montant, même effectué sans devis préalablement soumis, devait être pris en charge dans son intégralité – dans les limites du cadre légal – par les prestations complémentaires (ATF 131 V 263 consid. 5.3).

3.2 Selon la jurisprudence rendue sous l’empire de l’ancien droit, la LPC permet en principe la prise en charge de tous les traitements dentaires, incluant des mesures visant le traitement de maladies générales, à condition qu'il s'agisse de traitements simples, économiques et adéquats (ATF 130 V 185 consid. 4.3.6). En ce qui concerne en particulier l’économie du traitement au sens de la loi sur l’assurance-maladie, si plusieurs traitements sont envisageables, il y a lieu de procéder à une pondération entre coûts et bénéfices du traitement. Si l'un d'entre eux permet d'arriver au but recherché (soit en matière de soins dentaires le rétablissement de la fonction masticatoire) en étant sensiblement meilleur marché que les autres, l'intéressé n'a pas droit au remboursement des frais du traitement le plus onéreux (ATF 124 V 196 consid. 3). Le Tribunal fédéral a appliqué les mêmes principes au remboursement de traitements dentaires par les prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral P 22/02 du 5 août 2002 consid. 2).

3.3 Aux termes de l’art. 14 LPC dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2008, les cantons remboursent aux bénéficiaires d’une prestation complémentaire annuelle les frais de traitement dentaire de l’année civile en cours, s’ils sont dûment établis (al. 1 let. a). Les cantons précisent quels frais peuvent être remboursés en vertu de l’al. 1. Ils peuvent limiter le remboursement aux dépenses nécessaires dans les limites d’une fourniture économique et adéquate des prestations (al. 2).

4.             L'art. 2 al. 1 let. c de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité (LPFC - J 4 20) délègue au Conseil d'État la compétence de déterminer les frais de maladie et d'invalidité qui peuvent être remboursés, en application de l'art. 14 al. 1 et 2 LPC, qui répondent aux règles suivantes : les montants maximaux remboursés correspondent aux montants figurant à l'art. 14 al. 3 LPC (ch. 1), et les remboursements sont limités aux dépenses nécessaires dans le cadre d'une fourniture économique et adéquate des prestations (ch. 2).

Le Conseil d'État a fait usage de la compétence que lui confère l'art. 2 al. 1 let. c LPFC en édictant le règlement relatif au remboursement des frais de maladie et des frais résultant de l'invalidité en matière de prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité (RFMPC – J 4 20.04).

4.1 Dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 mai 2024, l’art. 10 RFMPC prévoyait ce qui suit. Les frais de traitement dentaire sont remboursés par le service dans la mesure où il s’agit d’un traitement simple, économique et adéquat. Les alinéas 2 à 6 sont réservés (al. 1). Les honoraires des prestations dentaires et des travaux de technique dentaire sont remboursés par le service sur la base du catalogue de prestations reconnu par les assurances AA/AM/AI et à une valeur du point fixée à CHF 1.-. Les frais de traitement dentaire qui ne sont pas pris en charge par le service ne peuvent être répercutés sur le bénéficiaire des prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (al. 2). Si le coût d’un traitement dentaire (frais de laboratoire de technique dentaire inclus) dépasse CHF 1'500.-, un devis doit être adressé au service avant le début du traitement (al. 3). Si le coût d’un traitement dentaire s’est élevé à plus de CHF 1'500.- sans approbation préalable du devis, le montant maximal du remboursement se limite en principe à ce montant. Il peut exceptionnellement dépasser ce montant si le bénéficiaire démontre a posteriori que le remboursement sollicité correspond à un traitement simple, économique et adéquat (al. 4). Les devis et factures à présenter doivent être conformes aux prescriptions de l’alinéa 2 (al. 5). Les frais inhérents à l’établissement du devis sont imputés au montant destiné au remboursement des frais de maladie et d’invalidité (al. 6).      

On précisera encore que jusqu’au 31 décembre 2023, la valeur du point était fixée à 85 centimes à l’art. 10 al. 2 RFMPC.

4.2 L’art. 10 RFMPC dans sa teneur en vigueur depuis le 1er juin 2024 dispose que les frais de traitement dentaire et les frais d'orthodontie au sens de l'alinéa 4 sont remboursés par le service dans la mesure où il s’agit d’un traitement simple, économique et adéquat. L'alinéa 7 est réservé (al. 1). Les honoraires des prestations dentaires et des travaux de technique dentaire sont remboursés par le service conformément au référentiel des prestations dentaires admises pour le paiement des frais et à une valeur du point fixée à CHF 1.-. Les frais de traitement dentaire qui ne sont pas pris en charge par le service ne peuvent être répercutés sur la personne bénéficiaire de prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (al. 2). Les frais de traitement dentaire font l'objet d'une procédure d'estimation et de remboursement fixée par directive départementale. Si ces frais (frais de laboratoire de technique dentaire inclus) dépassent un montant de CHF 1'500.-, ils font l'objet d'un devis qui est soumis, par le biais de l'application informatique Medident, à une ou un médecin-dentiste conseil, dont les déterminations fondent les décisions du service. Lorsque ces frais sont inférieurs à la limite précitée, le service statue en principe seul (al. 3). Les frais de traitement orthodontique sont remboursés, après validation par la ou le médecin-dentiste conseil, exclusivement pour des personnes mineures et uniquement pour la part non prise en charge par l'assurance-maladie et par l'assurance-invalidité (al. 4). Dès l'approbation par le service ou par la ou le médecin-dentiste conseil, les traitements dentaires doivent être initiés dans un délai de 3 mois (al. 5). Les coûts admis en application du présent article sont remboursés uniquement sur la base d'une facture validée (al. 6). Exceptionnellement, des traitements débutés avant l'issue de la procédure d'estimation mentionnée à l'alinéa 3 peuvent faire l'objet d'une prise en charge totale ou partielle, si la ou le médecin-dentiste conseil donne son autorisation a posteriori (al. 7). Les frais inhérents à l'établissement du devis sont imputés au montant destiné au remboursement des frais de maladie et d'invalidité (al. 8).

5.             Les conditions de prise en charge des traitements dentaires en vertu de la législation genevoise correspondent à celles prévues dans l’ancienne OMPC s’agissant des exigences de simplicité, d’économicité et d’adéquation.

5.1 En ce qui concerne la concrétisation de ces exigences, on peut citer par exemple la réglementation adoptée par le canton de Bâle-Ville dans son ordonnance sur le remboursement des frais de maladie et de handicap en matière de prestations complémentaires (VBK – RS BS 832.720), qui détermine si un traitement correspond à ces critères en fonction des recommandations de traitement de l’association des médecins-dentistes cantonaux de Suisse (AMDCS). Le Tribunal fédéral a considéré que ce renvoi réglementaire à ces recommandations relevait d’une ligne directive pour l’interprétation de ces notions, ce qui ne prêtait pas le flanc à la critique. Dans ce cadre, il a souligné que sous l’empire de l’aOMPC, l’office fédéral des assurances sociales avait déjà établi certaines directives avec le concours de la société suisse des médecins-dentistes (SSO), lesquelles figuraient au chiffre 5038 et à l’annexe IV des directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (DPC) au 1er janvier 2007 et spécifiaient certains traitements à privilégier ou à refuser (arrêt du Tribunal fédéral 9C_576/2013 du 15 avril 2014 consid. 3.3.2 et 3.3.4). Le canton de Fribourg a lui aussi prévu la prise en charge des traitements dentaires simples, économiques et adéquats (art. 10 de l’ordonnance relative au remboursement des frais de maladie et d'invalidité en matière de prestations complémentaires [OMPCF – RS FR 841.3.21). La jurisprudence cantonale a considéré que la définition de ces critères devait s’opérer en application des recommandations de l’AMDCS (arrêt de la cour des assurances sociales du canton de Fribourg 608 2025 1 du 16 avril 2025 consid. 3.1). La doctrine qualifie ces recommandations d’outil important tant pour les dentistes que pour les organes d’exécution des prestations complémentaires (Uwe KOCH, Nicht gedeckte Zahnarztkosten – Wer bezahlt? Ergänzungs- und Sozialhilfeleistungen, in Der Zahnarztpatient - sozialversicherungsrechtliche und sozialhilferechtliche Fragen, Luzerner Beiträge zur Rechtswissenschaft, 2008, p. 131).

La recommandation F de l’AMDCS porte sur l’orthodontie jusqu’à 18 ans. Elle peut être consultée à l’adresse suivante : https://dev.kantonszahnaerzte.ch/wp-content/uploads/2021/03/VKZS_F_Kieferorthopaedie_Zahnstellungskorrekturen-FR-final.pdf.

5.2 Si la législation genevoise ne se réfère pas expressément aux recommandations de l’AMDCS pour définir les traitements simples, économiques et adéquats, le formulaire de devis d’orthodontie que doivent faire remplir les bénéficiaires de prestations complémentaires (qui peut être consulté sous https://www.ge.ch/document/devis-orthodontie-beneficiaires-pc-avs/ai) établit toutefois la liste des anomalies justifiant la prise en charge du traitement par les prestations complémentaires. Force est de constater que ces anomalies se recoupent très largement avec celles rendant un traitement nécessaire selon l’AMDCS : on citera parmi d’autres l’overjet, l’overbite, la suppraclusie ou l’agénésie d’une dent importante.

Compte tenu de ces éléments, on peut admettre que les critères appliqués par l’intimé pour admettre ou refuser la prise en charge des soins dentaires concrétisent de manière appropriée la notion de traitement simple, économique et adéquat.

6.             À teneur de l'art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale suisse (Cst. – RS 101), les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Cela implique notamment qu'ils s'abstiennent d'adopter un comportement contradictoire ou abusif (ATF 136 I 254 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_294/2023 du 13 février 2024 consid. 3.1). Ainsi, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 143 V 341 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_271/2022 du 11 novembre 2022 consid. 3.2.3).

En application de ce principe, il a notamment été admis que si l'assurance obligatoire des soins prend en charge sans réserve sur une période prolongée des médicaments dont l'utilisation n'est pas (ou plus) efficace, adéquate et économique, elle reste tenue de prendre en charge cette prestation dans les limites du principe de la protection de la bonne foi, soit dans le cas d’espèce jusqu’à la date à laquelle elle a rendu une décision niant son obligation de prise en charge en invoquant un « abus massif d’opiacés ». Par ailleurs, un délai de transition doit être accordé pour l'adaptation au changement de pratique désormais correct de l'assurance-maladie (ATF 143 V 95 consid. 3.7).

7.             Selon l’avis de la Dre E______, le devis du CDL du 8 mars 2024 ne porte pas sur des soins répondant aux critères d’acceptation des traitements d’orthodontie appliqués par l’intimé. La Dre D______ ne le conteste du reste pas. Le recourant ne fait pas non plus valoir que ces soins relèvent d’un traitement simple, économique et adéquat.

Par ailleurs, il convient de souligner que la décision litigieuse ne revient pas sur la prise en charge du devis du SDS du 3 novembre 2020, bien que l’intimé l’ait acceptée de manière erronée, si l’on se réfère à l’appréciation de la Dre E______ du 13 janvier 2025 – que le courrier de la Dre D______ du 25 novembre 2024 tend à corroborer.

Cependant, contrairement à ce qu’il semble soutenir, le recourant ne saurait inférer de l’approbation du devis du SDS un droit à la prise en charge du nouveau devis du CDL. Il ne peut en particulier pas invoquer la protection de la bonne foi, dès lors que l’accord que l’intimé lui a signifié le 20 septembre 2023 portait sur le devis spécifique du SDS, et en particulier sur le montant plafonné à CHF 4'128.95 plus 10% au maximum qui y était mentionné. Par cet accord, l’intimé n’a aucunement admis la prise en charge de soins orthodontiques indépendamment de leur coût. Ainsi, même si les soins énumérés dans le devis du 8 mars 2024 étaient les mêmes que ceux faisant l’objet de l’estimation d’honoraires du 3 novembre 2020, le recourant ne pourrait prétendre à leur prise en charge. En effet, la soumission du devis de la Dre D______ doit en réalité être assimilée à une nouvelle demande – notamment eu égard à l’augmentation substantielle du montant en cause –, dont le bien-fondé doit être examiné en fonction des critères de simplicité, d’économicité et d’adéquation. Or, ceux-ci ne sont pas remplis, comme on l’a vu.

Le recourant ne peut pas non plus se voir rembourser les honoraires correspondant à la partie du traitement qui n’a pas été dispensée par le SDS, même si le montant dont la prise en charge a été approuvée par courrier du 20 septembre 2023 n’est pas épuisé. Certes, le droit à la substitution de la prestation s’applique également en matière de prise en charge de soins dentaires par les prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2010 du 7 avril 2010 consid. 4.7). La substitution ne s'applique toutefois que lorsque deux prestations différentes mais interchangeables quant à leurs fonctions entrent en considération. Les conditions d’un droit à la substitution supposent ainsi non seulement un droit (légal) à une prestation à la prestation sujette à substitution, mais également que les prestations soient fonctionnellement équivalentes tant dans les circonstances actuelles que celles auxquelles il faut s'attendre à plus long terme (ATF 131 V 107 consid. 3.2.3). Dans la mesure où il n’y avait pas de droit au sens légal du terme aux soins prodigués par le SDS, puisqu’il ne s’agissait pas d’un traitement simple, économique et adéquat, on ne saurait considérer que le recourant peut y substituer le traitement du CDL à la partie non encore remboursée du devis du 3 novembre 2020.

La décision de l’intimé est ainsi conforme au droit en tant qu’elle refuse la prise en charge du devis de la Dre D______.

8.             Le recours est rejeté.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario et art. 89H al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le