Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/685/2025 du 16.09.2025 ( LAA ) , ADMIS
En droit
| rÉpublique et | canton de genÈve | |
| POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
| A/2456/2024 ATAS/685/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
| Arrêt du 16 septembre 2025 Chambre 2 | ||
En la cause
| A______
| recourant |
contre
| ASSURA-BASIS SA
| intimé |
A. a. Depuis 2017, A______ (ci-après : l'assuré, l'intéressé ou le recourant), né en 1974 et domicilié dans le canton de Genève, sans activité, était couvert contre les accidents dans le cadre de l’assurance obligatoire des soins, avec franchise de CHF 300.-, auprès d’ASSURA-BASIS SA (ci-après : l’assurance ou l’intimée).
b. Par déclaration d’accident signée le 24 octobre 2023, l’assuré a annoncé à l’assurance un accident dentaire survenu le 12 octobre 2023 à 16h45 à Genève. S’agissant des circonstances, dans le cadre d’une activité sportive, il avait mal accroché une barre d’haltères sur son support après les exercices avec cet engin, et, lorsqu’il avait voulu se relever, ladite barre, de 70 kg, était tombée sur son visage, lui cassant trois dents, puis sur son épaule, qui avait été légèrement touchée.
c. Dans des questionnaires remplis les 14 novembre et 14 décembre 2023, le docteur B______ (ci-après : le médecin-dentiste), médecin-dentiste exerçant à Genève, a relaté les mesures immédiatement prises, dont des examens clinique et radiographique, et a mentionné, sous « propositions pour un traitement définitif », « 3 facettes de reconstruction en céramique ».
Un « devis estimatif selon le tarif SUVA » (« reconstruction de trois dents endommagées suite à un accident, au moyen des facettes en céramique pressée ») y était annexé, pour l’incisive centrale supérieure de gauche (dent n° 21), l’incisive latérale supérieure de gauche (dent n° 22) et la canine supérieure de gauche (dent n° 23), le coût dudit traitement proposé étant estimé à CHF 4'440.20, montant qui a été ramené à CHF 4'328.55 selon un nouveau devis estimatif établi le 5 février 2024.
Étaient inclus dans cette somme totale les coûts en vue du traitement proposé, de CHF 2'570.90 selon les devis du laboratoire C______ du 15 novembre 2023, montant réduit à CHF 2'459.25 à teneur de nouveaux devis du 29 janvier 2024.
d. Par courriels des 23 et 28 février 2024, le médecin-dentiste a transmis à l’assurance le dernier devis du laboratoire C______ ainsi que les quatre radiographies prises le 13 octobre 2023 lors de la première consultation.
e. Par courrier du 1er mars 2024, l’assurance a informé le médecin-dentiste de son refus de prendre en charge le traitement prévu, soit la confection des facettes en céramique sur les dents nos 21, 22 et 23, seules les réparations en composite pouvant être indemnisées.
f. Par pli du 7 mars 2024, le médecin-dentiste a fait part de son désaccord à l’assurance.
g. Le 3 avril 2024, l’assurance a communiqué au médecin-dentiste un avis de sa médecin-dentiste conseil, la docteure D______, spécialiste en chirurgie orale, qui déconseillait une prise en charge de facettes 21 à 23, lesquelles ne respectaient pas les critères EAE, mais recommandait une « prise en charge de composites selon décision du [1er mars 2024] ». L’assurance a dès lors maintenu sa position exprimée dans son courrier du 1er mars 2024.
h. Par écrits des 12 et 14 avril 2024, l’intéressé a fait part à l’assurance de son désaccord quant à sa position et a sollicité le prononcé d’une décision formelle.
i. Par décision du 3 mai 2024, l’assurance a maintenu son refus de prise en charge d’une reconstruction dentaire par pose de facettes en céramique telle que proposée par le médecin-dentiste, faute d’être efficace, appropriée et économique (ci-après : critères EAE).
j. Le 28 mai 2024, l’assuré a formé opposition contre cette décision.
k. Par décision sur opposition rendue le 21 juin 2024, l’assurance a rejeté cette opposition et a confirmé sa décision – initiale – du 3 mai 2024.
B. a. Par acte du 19 juillet 2024, l’assuré a, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), interjeté recours contre cette décision sur opposition.
b. Par réponse du 27 septembre 2024, l’intimée a conclu au rejet du recours.
c. Par écriture du 29 octobre 2024 – transmise pour information à l’intimée –, le recourant a répliqué, considérant comme suspects les faits que la médecin-dentiste conseil susmentionnée ait été injoignable quand il avait cherché à prendre contact avec elle et qu’elle n’ait avancé aucun argument médical dans son avis du 1er avril 2024.
Était produite une lettre du 3 juin 2024 du médecin-dentiste demandant à un professeur de la Clinique universitaire de médecine dentaire (ci-après : CUMD) – de la faculté de médecine de l’Université de Genève – d’accepter le rôle de médiateur dans le litige opposant l’intéressé à l’assurance, de même qu’un écrit adressé le 16 août 2024 par le médecin-dentiste au recourant et développant les motifs de sa préférence pour la céramique, seul moyen selon lui de reconstruire ses dents endommagées « de manière pérenne, fiable et esthétique », la décision querellée « [causant] sans motif valable un préjudice à [l’assuré], au seul bénéfice illégitime de l’assureur ».
C. a. Les parties n’ont pas formulé d’observations dans le délai au 30 janvier 2025 octroyé par la lettre du 15 janvier 2025 de la chambre de céans pour faire valoir une éventuelle récusation à l’encontre de la désignation en qualité d’experte de la professeure – ordinaire – E______, directrice du département de réhabilitation oro-faciale et responsable de la division de prothèse fixe et biomatériaux, de la CUMD à Genève, et pour émettre d’éventuelles remarques au sujet des questions libellées dans le projet de mission d’expertise annexé.
b. Par ordonnance du 11 février 2025, la chambre des assurances sociales a ordonné une expertise judiciaire et l’a confiée à la Prof. E______.
En effet, l’avis de la Dre D______, qui n’avait pas exposé pour quels motifs concrets et précis le traitement proposé de manière motivée par le médecin-dentiste – facettes en céramique – ne respecterait pas les critères EAE, laissait subsister des doutes quant à la fiabilité et la pertinence de son appréciation, de sorte qu’il y a lieu de mettre en œuvre une expertise judiciaire.
c. En parallèle, à la demande de la chambre de céans, l’intimée a indiqué le 24 février 2025 à celle-ci que la Dre D______ travaillait pour le « cabinet dentaire » F______, sis à Lucerne, que l’assurance mandatait pour son préavis.
d. Dans leur rapport d’expertise du 16 avril 2025, faisant notamment suite à une évaluation clinique, à un entretien téléphonique avec le médecin-dentiste et à la prise de photographies, la Prof. E______ et le docteur G______, PD (NDR : post-doctorat), ont effectué un examen du cas selon les critères EAE et ont, à la question de savoir quel traitement (la reconstruction des trois dents facturées par la pose de facettes en céramique, la réparation par composite ou tout autre traitement envisageable) ils préconisaient sous l’angle des critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité (critères EAE), répondu que, compte tenu de la situation clinique actuelle de l’expertisé ainsi que de son occlusion, notamment les guidages latéraux et de protrusion, une restauration en céramique apparaissait comme l’option la plus appropriée pour garantir une stabilité à long terme.
e. Par écriture du 6 juin 2025, l’intimée a maintenu ses conclusions en rejet du recours.
Cette position était fondée sur un avis du 21 mai 2025 du docteur H______, spécialiste en chirurgie orale et maxillo-faciale, membre de la FMH, « médecin et médecin dentiste », et « médecin-conseil SSMC », transmis à l’assurance par F______. Selon ce spécialiste, les facettes en céramique ne remplissaient en aucun cas les critères EAE, « les avantages non existants ou hypothétiques ne [justifiant] pas leur réalisation ».
f. Par observations datées du 9 juillet 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions et griefs. Il ajoutait à la fin : « Le jour où le juge rendra sa décision, je souhaiterais être convoqué ».
g. Par lettre du 21 juillet 2025, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.
1.
1.1 Bien qu’il soit question en l’espèce de la prise en charge d’un accident, le litige relève de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal ‑ RS 832.10), dès lors qu’aucune assurance-accidents – au sens de la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20) – n’a à assumer la prise en charge requise (art. 1a al. 2 let. b LAMal ; cf. ATAS/664/2017 du 31 juillet 2017 consid. 2a).
1.2 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la LAMal.
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.3 À teneur de l'art. 1 LAMal, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-maladie, à moins que la LAMal ou la loi du 26 septembre 2014 sur la surveillance de l’assurance-maladie (LSAMal - RS 832.12) n'y dérogent expressément.
1.4 Interjeté dans la forme et le délai – de trente jours – prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA ainsi que 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Comme déjà indiqué dans l’ordonnance d’expertise susmentionnée, les conclusions et motifs de l’acte de recours, très sommaires, permettent de comprendre que le recourant conclut à l’annulation de la décision sur opposition litigieuse et à la prise en charge du traitement – pose des facettes en céramique – proposé par le médecin-dentiste.
2. S’agissant de l’objet du litige, il n’est pas contesté – ni contestable – que le dommage dentaire survenu le 12 octobre 2023 a été causé par un accident au sens de l’art. 4 LPGA.
Seule est litigieuse la question de savoir si l’intimée est fondée ou non à refuser la prise en charge d’une reconstruction dentaire par la pose de facettes en céramique telle que proposée par le médecin-dentiste, et à lui préférer une réparation en composite, sous l’angle de la question de savoir si une telle opération est efficace, appropriée et économique (« critères EAE »).
3.
3.1 Aux termes de l’art. 1a al. 2 let. b LAMal, l’assurance-maladie sociale alloue des prestations en cas d’accident (art. 4 LPGA), dans la mesure où aucune assurance-accidents n’en assume la prise en charge.
Selon l’art. 24 LAMal, l’assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des prestations définies aux art. 25 à 31 LAMal en tenant compte des conditions des art. 32 à 34 LAMal (al. 1). Les prestations prises en charge sont rattachées à la date ou à la période de traitement (al. 2).
En vertu de l’art. 25 al. 1 LAMal – intitulé « prestations générales en cas de maladie » –, l’assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une maladie et ses séquelles.
L’art. 28 LAMal dispose qu’en cas d’accident au sens de l’art. 1 (recte : 1a) al. 2 let. b de ladite loi, l’assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des mêmes prestations qu’en cas de maladie.
Conformément à l’art. 31 LAMal – intitulé « soins dentaires » –, l’assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des soins dentaires : s’ils sont occasionnés par une maladie grave et non évitable du système de la mastication (let. a), ou s’ils sont occasionnés par une autre maladie grave ou ses séquelles (let. b), ou s’ils sont nécessaires pour traiter une maladie grave ou ses séquelles (let. c ; al. 1). Elle prend aussi en charge les coûts du traitement de lésions du système de la mastication causées par un accident selon l’art. 1 (recte : 1a) al. 2 let. b de la loi (al. 2).
3.2 Pour ce qui est des « conditions et étendue de la prise en charge des coûts » (section 2), l’art. 32 LAMal prévoit que les prestations mentionnées aux art. 25 à 31 LAMal doivent être efficaces, appropriées et économiques. L’efficacité doit être démontrée selon des méthodes scientifiques (al. 1). L’efficacité, l’adéquation et le caractère économique des prestations sont réexaminés périodiquement (al. 2).
3.2.1 En particulier, selon l’art. 56 LAMal – au titre « caractère économique des prestations » –, le fournisseur de prestations doit limiter ses prestations à la mesure exigée par l’intérêt de l’assuré et le but du traitement (al. 1). La rémunération des prestations qui dépassent cette limite peut être refusée (al. 2, 1ère phr.).
À teneur de l’art. 33 let. d de ordonnance sur l'assurance-maladie du 27 juin 1995 (OAMal - RS 832.102), le Département fédéral de l’intérieur (ci-après : DFI) désigne, après avoir consulté la commission compétente, les mesures de prévention visées à l’art. 26 LAMal, les prestations en cas de maternité visées à l’art. 29 al. 2 let. a et c LAMal et les soins dentaires visés à l’art. 31 al. 1 LAMal.
Toutefois, ni le chapitre 5 de l’ordonnance du DFI sur les prestations dans l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie du 29 septembre 1995 (ordonnance sur les prestations de l’assurance des soins, OPAS - RS 832.112.31) consacré aux « soins dentaires » (art. 17 à 19b) ni les annexes de cette ordonnance ne traitent la question des soins dentaires dus à un accident, ni ne contiennent de précisions ici pertinentes au sujet de traitements qui seraient ou non efficaces, appropriés et économiques.
3.2.2 Une prestation est efficace au sens de l'art. 32 al. 1 LAMal, lorsqu'elle est démontrée selon des méthodes scientifiques et que l’on peut objectivement en attendre le résultat thérapeutique visé par le traitement de la maladie (ATF 139 V 135 consid. 4.4.1 et les références citées), à savoir la suppression la plus complète possible de l'atteinte à la santé somatique ou psychique (ATF 130 V 532 consid. 2.2 ; 128 V 159 consid. 5c/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_912/2010 du 31 octobre 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATF 128 V 165 consid. 5c/aa ; RAMA 2000 n° KV 132 p. 281 consid. 2b).
La question du caractère approprié d’une prestation s'apprécie en fonction du bénéfice diagnostique ou thérapeutique dans le cas particulier, en tenant compte des risques qui y sont liés au regard du but thérapeutique (ATF 127 V 138 consid. 5). L'adéquation d'une mesure s'examine sur la base de critères médicaux. L'examen consiste à évaluer, en se fondant sur une analyse prospective de la situation, la somme des effets positifs de la mesure envisagée et de la comparer avec les effets positifs de mesures alternatives ou par rapport à la solution consistant à renoncer à toute mesure ; est appropriée la mesure qui présente, compte tenu des risques existants, le meilleur bilan diagnostique ou thérapeutique. La réponse à cette question se confond normalement avec celle de l'indication médicale ; lorsque l'indication médicale est clairement établie, il convient d'admettre que l'exigence du caractère approprié de la mesure est réalisée (ATF 139 V 135 consid. 4.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_685/2012 du 6 mars 2013 consid. 4.4.2 et les références citées ; ATF 125 V 95 consid. 4a ; RAMA 2000 n° KV 132 p. 282 consid. 2c).
Quant à l'exigence du caractère économique d’une prestation – toujours selon l'art. 32 al. 1 LAMal –, elle ressort également de l'art. 56 al. 1 LAMal, selon lequel le fournisseur de prestations doit limiter ses prestations à la mesure exigée par l'intérêt de l'assuré et le but du traitement. Comme le Tribunal fédéral l'a déjà relevé à propos de l'art. 23 de l'ancienne loi sur l'assurance‑maladie (LAMA, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1995), dont le contenu était analogue, les caisses sont en droit de refuser la prise en charge de mesures thérapeutiques inutiles ou de mesures qui auraient pu être remplacées par d'autres, moins onéreuses ; elles y sont d'ailleurs obligées, dès lors qu'elles sont tenues de veiller au respect du principe de l'économie du traitement. Ce principe ne concerne pas uniquement les relations entre caisses et fournisseurs de soins. Il est également opposable à l'assuré, qui n'a aucun droit au remboursement d'un traitement non économique (ATF 127 V 43 consid. 2b ; 125 V 95 consid. 2b et la jurisprudence citée ; François-Xavier DESCHENAUX, Le précepte de l'économie du traitement dans l'assurance-maladie sociale, en particulier en ce qui concerne le médecin, in : Mélanges pour le 75ème anniversaire du TFA, Berne 1992, p. 537). Le critère de l'économicité concerne le rapport entre les coûts et le bénéfice de la mesure, lorsque dans le cas concret différentes formes et/ou méthodes de traitement efficaces et appropriées entrent en ligne de compte pour combattre une maladie (ATF 127 V 138 consid. 5 ; RAMA 2004 n° KV 272 p. 111 consid. 3.1.2).
Ainsi, si, d'un point de vue médical, il n'y a pas de différences importantes entre deux méthodes de traitement alternatives, en ce sens que, du point de vue de l'adéquation par rapport au résultat thérapeutique recherché, elles sont équivalentes, il faut en principe choisir la méthode de traitement la plus avantageuse et donc la plus économique (ATF 127 V 138 consid. 5). En d’autres termes, si plusieurs traitements sont envisageables, il y a lieu de procéder à une balance entre coûts et bénéfices du traitement ; si l’un d’entre eux permet d’arriver au but recherché en étant sensiblement meilleur marché que les autres, l’assuré n’a pas droit au remboursement des frais du traitement le plus onéreux (ATF 124 V 196 consid. 3 ; RAMA 1998 n° K 988 p. 1 ; François‑Xavier DESCHENAUX, op. cit., p. 536).
3.3 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).
3.3.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).
3.3.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).
Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee). En outre, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2021 du 24 février 2022 consid. 3.4).
Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n'est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L'importance de l'examen personnel de l'assuré par l'expert n'est reléguée au second plan que lorsqu'il s'agit, pour l'essentiel, de porter un jugement sur des éléments d'ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s'avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d'un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).
Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 143 V 269 consid. 6.2.3.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).
En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).
3.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).
4.
4.1 En l’espèce, le médecin-dentiste – traitant – du recourant, le Dr B______, propose, dès les premiers questionnaires remplis les 14 novembre et 14 décembre 2023, comme traitement définitif pour les dents fracturées nos 21, 22 et 23, une reconstruction dentaire par pose de facettes en céramique, pour CHF 4'328.55 au total selon le nouveau « devis estimatif selon le tarif SUVA » établi le 5 février 2024 et incluant les coûts devisés par le laboratoire C______.
L’intimée ayant manifesté le 1er mars 2024 son intention de ne prendre en charge que les réparations en composite, le médecin-dentiste lui fait part de son désaccord le 7 mars 2024, estimant que « le matériau composite ne présente aucune des qualités de dureté et de ténacité nécessaire dans le cas d’espèce pour la restauration pérenne et esthétique des trois dents fracturées de [l’assuré] ». Il a invité alors l’assurance à solliciter l’avis d’« une personne qualifiée, à savoir au bénéfice d’une formation au moins équivalente à la [sienne], un doctorat d’université reconnu en Suisse en la discipline concernée ».
Le 3 avril 2024, l’assurance communique au médecin-dentiste un avis d’une médecin-dentiste conseil, la Dre D______, spécialiste en chirurgie orale. Celle-ci considère ce qui suit : « Les photographies (anonymisées) (NDR : radiographies) ont été montrées à plusieurs praticiens qui sont tous unanimes de l’avis, qu’il est tout à fait possible d’obtenir un bon résultat esthétique et de qualité par des composites. Et ces praticiens disposent largement d’une formation universitaire. Je suis aussi de l’avis qu’une reconstruction par facettes est un sur-traitement (overtreatment) et ne respecte pas les critères EAE » (NDR : d’efficacité, d’adéquation et d’économicité). Elle en conclut que des facettes 21 à 23 ne respectent pas les critères EAE, mais recommande une « prise en charge de composites selon décision du [1er mars 2024] ».
C’est en particulier sur cette base que l’assurance maintient depuis lors, en particulier dans sa décision – initiale – du 3 mai 2024 puis dans sa décision sur opposition rendue le 21 juin 2024 (attaquée), sa position exprimée dans son courrier du 1er mars 2024.
Au stade de la procédure de recours, par écrit adressé le 16 août 2024 au recourant, le médecin-dentiste développe les motifs de sa préférence pour la céramique, seul moyen selon lui de reconstruire les dents endommagées du patient « de manière pérenne, fiable et esthétique ». D’après lui, concernant l’avis de la Dre D______, « il ne s’agit évidemment pas d’une expertise, mais d’un simple avis, dépourvu de toute argumentation et considération technique ou médicale, de la part d’une professionnelle qu’on ne peut joindre car ne figurent ni son adresse postale ou de courriel, ni son adresse téléphonique ». Le médecin-dentiste étaye ensuite ainsi son point de vue : « Avant de subir les suites de l’accident du 12 octobre 2023, la denture était dans une situation parfaite. Nulle carie, nulle obturation, abrasion ou lésion. Un engrènement et une occlusion sans aucun défaut. [À la ligne] […] Il n’est donc pas possible d’exciper de l’état de la denture ou de l’âge de l’assuré pour exiger un traitement ‘économique ». Puis il expose les motifs pour lesquels « il n’est pas possible de prétendre que les mesures décidées par l’assureur sont équivalentes au traitement [qu’il a] proposé ». En effet, selon lui, concernant les composites dentaires, « l’hydrolyse des liaisons établies entre les charges et la matrice entraînent la décohésion des phases organique et minérale, entraînant le vieillissement prématuré de la résine composite. Ce mécanisme est aussi la cause de l’érosion qui se manifeste avec le temps. [À la ligne] Les composites ont un module de Young relativement peu élevé, et donc une médiocre résistance à la flexion. Cette caractéristique procure une certaine résilience, qui peut être favorable pour reconstruire une dent postérieure, mais exige des pièces plus épaisses. La rigidité peut être améliorée par le renforcement par des fibres, mais ce procédé ne peut guère être utilisé pour des incisives, compte tenu de leur faible épaisseur. [À la ligne] Cette faible rigidité a pour conséquence que les reconstructions en composite sur les incisives, vu leur faible épaisseur, produit des contraintes localement inégales sur le joint du collage périphérique. La fatigue mécanique du joint de collage cause sa dégradation progressive et à terme la perte de la reconstruction. [À la ligne] La dureté des composites est bien inférieure à celle de l’émail, et ils ont donc une faible résistance au poinçonnement. Leur ténacité s’en ressent et les expose à des fractures cohésives ». En revanche, pour ce qui est des céramiques, qui ont « une structure totalement différente, composées d’oxydes de métaux cuits au four », « les pièces en matière céramique possèdent une excellente résistance mécanique, une grande dureté et une résistance élevée à l’usure. [À la ligne] Elles sont insensibles à la corrosion dans le milieu buccal. [À la ligne] Le caractère bio‑compatible des céramiques dentaires est remarquable. [À la ligne] L’excellente rigidité des pièces en céramique leur permet de distribuer les forces de la mastication sur la totalité du joint de collage périphérique et donc de limiter la fatigue de ce joint, l’intégralité de ce joint étant garante de la pérennité de la restauration. [À la ligne] Quant à l’aspect esthétique, une reconstruction en céramique est sans comparaison avec les composites. En particulier, pour les incisives, pour la translucidité du bord incisif et le dégradé des teintes entre les diverses parties de la dent ». À la fin de son écrit, le médecin-dentiste conclut que la décision querellée « cause sans motif valable un préjudice à [l’assuré], au seul bénéfice illégitime de l’assureur ».
Dans leur rapport d’expertise – judiciaire – du 16 avril 2025, faisant notamment suite à une évaluation clinique, à un entretien téléphonique avec le médecin‑dentiste et à la prise de photographies, la Prof. E______ et le Dr G______, PD (NDR : post-doctorat), de la CUMD, effectuent un examen du cas selon les critères EAE. D’après ces experts, le médecin-dentiste a réalisé des mesures diagnostiques conformément aux règles de l’art et a proposé l’option thérapeutique qu’il a jugée la plus approprié compte tenu de la situation clinique. Selon les experts, l’objectif d’un traitement dans ce type de situation est de restaurer la substance dentaire perdue à la suite de l’accident, tout en assurant une intégration fonctionnelle, biologique et esthétique dans la dentition naturelle du patient, la solution choisie devant être durable, c’est-à-dire tenir plusieurs années (avec la précision que la durabilité dépend du risque fonctionnel, qui est propre à chaque patient et est influencé par plusieurs facteurs). Concernant les critères EAE, la pose de facettes en céramique et la réparation en composite peuvent être considérées comme efficaces et appropriées de manière générale pour la reconstruction de ce type de défaut ; toutefois, dans le cas présent, étant donné la localisation des lésions dans une zone défavorable sur le plan occlusal (contacts entre les mâchoires) et les exigences esthétiques élevées (zone antérieure), la réparation en composite peut s’avérer moins efficace à long terme et – implicitement – moins appropriée, l’occlusion spécifique de l’expertisé pouvant compromettre la stabilité d’une réparation en composite. Sous l’angle du critère de l’économicité, une réparation en composite représente une option plus économique, avec un coût initial total estimé entre CHF 1'200.- et CHF 1'500.-, mais sa durabilité pourrait être limitée en raison de l’occlusion du patient, ce qui pourrait entraîner des retouches ou reprises plus fréquentes et donc des coûts plus élevés à long terme, alors que la pose de facettes en céramique, plus coûteuse initialement (autour de CHF 5'000.-), offre une durabilité supérieure. En réponse à la question de savoir quel traitement (la reconstruction des trois dents facturées par la pose de facettes en céramique, la réparation en composite ou tout autre traitement envisageable) ils préconisent sous l’angle des critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité (critères EAE), les experts relèvent que les deux matériaux présentent des propriétés mécaniques distinctes avec chacun des avantages et des inconvénients (meilleure résistance mécanique, moindre usure et qualités esthétiques plus stables pour la céramique, mais avec une préparation dentaire à un coût plus élevé, tandis que le composite permet une restauration additive sans altérer la dent tout en étant plus économique du fait de l’absence de laboratoire). Une « étude contrôlée randomisée » a montré une performance significativement supérieure des facettes en céramique par rapport au matériau composite en termes de survie et de qualité. En conclusion, compte tenu de la situation clinique actuelle de l’expertisé ainsi que de son occlusion, notamment les guidages latéraux et de protrusion, une restauration en céramique apparaît comme l’option la plus appropriée pour garantir une stabilité à long terme. Sont ensuite ajoutées d’« autres observations ou suggestions utiles », aux termes desquelles un examen minutieux de l’occlusion doit être effectué, quel que soit le traitement retenu, et, au regard des circonstances particulières révélées par l’évaluation clinique, « une intrusion orthodontique (idéalement) ou un léger meulage sélectif (solution plus simple) [devraient être envisagés] dans le cadre de la planification du traitement ».
Selon l’avis du 21 mai 2025 du Dr H______, spécialiste en chirurgie orale et maxillo-faciale, membre de la FMH, « médecin et médecin dentiste », et « médecin-conseil SSMC », transmis à l’assurance par F______ – et sur lequel elle se fonde pour maintenir ses conclusions en rejet du recours –, les réponses des experts E______ et G______ sont dépourvues de précision et ne reposent pas sur des documents scientifiques. Notamment, d’après ledit médecin-dentiste conseil, les – sept – documents scientifiques cités dans l’« annexe » de son avis – et produits, sauf la n° 3, avec ce dernier – prouvent qu’« avec les composites directs on peut obtenir des résultats esthétiques absolument favorables », mais il n’est pas facile de réaliser ce type de travail. Par ailleurs, des facettes en céramique ne peuvent pas être réparées et, en cas de fractures de celles-ci (ce qui arrive fréquemment selon son expérience de médecin-dentiste conseil), les coûts sont très élevés, ce à quoi s’ajoutent des conflits juridiques. L’« étude contrôlée randomisée » à laquelle se réfèrent les deux experts judiciaires ne repose pas sur la présence de suffisamment de participants et ne peut pas être considérée comme d’un niveau scientifique. Enfin, la proposition de traitement orthodontique faite par les experts n’est pas compatible avec le critère d’économicité, alors que « les meulages sélectifs font partie de tout ajustement et contrôle après reconstruction dentaire et sont habituels ». En conclusion, les facettes en céramique, « traitement invasif avec destruction de matière saine, création d’un bord le long de la gencive, difficile à réparer, coûteux », ne remplissent en aucun cas les critères EAE, « les avantages non existants ou hypothétiques ne [justifiant] pas leur réalisation ». Les composites ne sont pas concernés par les désavantages des facettes en céramique, ils sont moins difficiles à réparer ou remplacer, et leur longévité est considérable (estimée de 10 à 15 ans). De l’avis du Dr H______, « le seul désavantage des composites directs est que c’est difficile à réaliser pour le médecin-dentiste. Raison pour laquelle il existe des spécialistes ».
4.2 Cela étant, les appréciations des Drs D______ et H______, médecins-dentistes conseils de l’intimée, ne sont pas de nature à mettre en doute les constatations, appréciations et conclusions des experts – judiciaires – E______ et G______, pour les motifs qui suivent.
4.2.1 Le rapport d’expertise judiciaire établi par ceux-ci fait notamment suite à une évaluation clinique, à un entretien téléphonique avec le médecin-dentiste et à la prise de photographies, donc sur des examens complets, et il repose sur un examen approfondi du cas, et ses appréciations et conclusions – qui concordent globalement avec celles du médecin-dentiste B______ – sont claires et bien motivées.
Le fait que ces experts, qui exercent au sein d’une clinique universitaire au fait de la recherche médicale dentaire, ne citent explicitement qu’un seul article ou ouvrage de littérature médicale ne signifie pas que leurs conclusions ne seraient pas fondées sur des bases scientifiques solides, la valeur probante d’une expertise ne dépendant en outre pas de la citation de références scientifiques.
4.2.2 L’avis de la médecin-conseil D______ ne repose que sur la référence à des avis unanimes de praticiens, dont on ignore tout, auxquels elle aurait montré les photographies (anonymisées) prises par le médecin-dentiste, ce qui est très insuffisant pour se voir reconnaître la moindre valeur probante.
4.2.3 Quant à l’avis du médecin-dentiste conseil H______, il est certes motivé.
Toutefois, il ne fait pas suite à un examen clinique et il se contente pour l’essentiel de considérer les facettes en céramiques comme dans tous les cas incompatibles avec les critères EAE, sans énoncer précisément pourquoi un tel traitement serait non indiqué dans le cas particulier du recourant.
Au demeurant, il n’est nullement démontré au plan scientifique que les facettes en céramique ne pourraient pas correspondre à un traitement efficace, approprié et économique suivant les circonstances particulières de chaque cas. À cet égard, la Société suisse des médecins-dentistes (SSO), dans son document « Restauration au moyen d'obturations » accessible sur Internet (« https://www.sso.ch/fr/obturations-dentaires » ; cf. aussi le document « Médecine dentaire restauratrice » sous « https://www.sso.ch/sites/default/files/2021-10/20210629_QLL_restaurative-zahnmedizin_FR.pdf »), considère notamment ce qui suit sous le point consacré aux « résines (composites) » : « La réponse à la question de savoir quel matériau d’obturation et quel type de restauration sont les meilleurs ne peut être donnée qu’au cas par cas. D’une manière générale, on peut toutefois dire que les composites sont aujourd’hui le premier choix, en particulier pour les défauts de moindre importance dans la région des dents antérieures et des dents postérieures. Pour les défauts importants dans la région postérieure, une restauration à l’aide d’inlays en céramique, d’overlays et d’une couronne peut constituer une alternative sûre à long terme. Dans la région des dents antérieures, une couronne ou des facettes en céramique (en anglais : veneers) peuvent être plus appropriées » ; puis : « Grâce aux progrès réalisés ces dernières années, les composites se prêtent à la réalisation d’un grand nombre de restaurations dentaires de faible ampleur dans les régions antérieure et postérieure. Aux avantages des bonnes propriétés esthétiques s’ajoute le fait que l’application des composites ne nécessite pratiquement pas de retrait de tissus dentaires durs sains et que les obturations en composite se réparent même après plusieurs années. Moyennant une bonne hygiène bucco-dentaire, les obturations restent belles plus longtemps » ; ensuite, sous le point « céramique » : « La céramique dentaire est aujourd’hui de plus en plus utilisée pour la fabrication de prothèses dentaires esthétiques. Ce matériau ressemble visuellement à la substance dentaire naturelle, car elle présente une grande translucidité et une couleur semblable à celle des dents. Les autres avantages de la céramique sont sa résistance supérieure à celle des composites et sa bonne biocompatibilité. La céramique est chimiquement inerte, elle ne réagit donc pas ou très peu. Ses domaines d’application actuels sont les inlays, les onlays, les couronnes partielles, les facettes dentaires en cas de changement de teinte ou de problèmes de forme, les couronnes et les ponts ». Ainsi, dans la pratique de médecine dentaire actuelle, le choix entre les composites et la céramique est évalué selon les circonstances particulières et concrètes de chaque cas.
Pour le reste, il n’y a pas lieu de se prononcer ici sur la proposition de traitement orthodontique faite par les experts E______ et G______, qui ne fait pas partie de l’objet du présent litige. Il est néanmoins relevé que la justification d’un meulage sélectif est admise par le médecin-dentiste conseil H______.
4.2.4 En définitive, il n’y a aucune raison de s’écarter de la conclusion des experts E______ et G______ selon laquelle, compte tenu de la situation clinique actuelle de l’expertisé ainsi que de son occlusion, subsidiairement d’aspects esthétiques, une restauration en céramique apparaît comme l’option la plus appropriée pour garantir une stabilité à long terme.
5. Vu ce qui précède, le recours sera admis, la décision sur opposition querellée sera annulée, et il sera dit que le recourant a droit à la prise en charge par l’intimée des coûts du traitement de ses dents nos 21, 22 et 23 par la pose de facettes en céramique tel que proposé par le médecin-dentiste B______.
Il est précisé que les lois de procédure ici applicables ne prescrivent pas de prononcé de l’arrêt en présence des parties.
6. Le recourant, qui obtient gain de cause, n'est pas représenté par un mandataire et n’a pas allégué des frais particulièrement importants pour défendre ses droits dans le cadre de la présente procédure, de sorte qu'aucune indemnité ne lui sera accordée à titre de participation à des frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet.
3. Annule la décision sur opposition rendue le 21 juin 2024 par l’intimée.
4. Dit que le recourant a droit à la prise en charge par l’intimée des coûts du traitement de ses dents n° 21, 22 et 23 par la pose de facettes en céramique tel que proposé par le médecin-dentiste B______.
5. Dit que la procédure est gratuite.
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
| La greffière
Christine RAVIER |
| Le président
Blaise PAGAN |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le