Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3534/2024

ATAS/696/2025 du 16.09.2025 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3534/2024 ATAS/696/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 16 septembre 2025

Chambre 8

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née le ______ 1972, a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (OAI) le 3 décembre 2013.

b. Selon le rapport du 24 avril 2014 de la docteure B______, spécialiste FMH en psychiatrie, il était retenu un trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère sans symptômes psychotiques.

c. Dans leur rapport du 18 juin 2015, la docteure C______, spécialiste FMH en neurologie, et Madame D______, neuropsychologue, ont relevé que l'examen neuropsychologique avait mis en évidence que l'assurée présentait des difficultés à de nombreux niveaux dans les domaines mnésiques et exécutifs ainsi qu'un très fort ralentissement dans la plupart des activités. Ce profil ne correspondait pas à ce qui était observable dans une atteinte neurologique. L'assurée présentait une forte dépression et des angoisses. Elle prenait des anxiolitiques et des antidépresseurs. Ces éléments étaient susceptibles de provoquer des difficultés de concentration et un ralentissement.

d. L'assurée a été soumise à un examen psychiatrique auprès du service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : le SMR) par la docteure E______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. Il ressortait du rapport du 5 décembre 2016 que l'assurée présentait un épisode dépressif moyen avec syndrome somatique en rémission complète. Elle disposait dès lors d'une pleine capacité de travail depuis le 17 août 2016.

e. Par décision du 12 avril 2018, l’assurée a été mise au bénéfice d’une rente d’invalidité entière du 1er octobre 2014 au 30 novembre 2016.

f. Par arrêt du 9 juillet 2019, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la Cour de céans) a admis le recours de l’assurée, en ce sens que le droit à une rente entière d’invalidité devait être maintenu au-delà du 30 novembre 2016.

g. Par arrêt du 24 août 2020, le Tribunal fédéral a admis le recours interjeté par l’OAI, annulé l’arrêt du 9 juillet 2019 et confirmé la décision du 12 avril 2018.

B. a. En date du 25 septembre 2020, l’assurée a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l’OAI.

b. Par projet de décision du 19 novembre 2020, l’OAI a refusé d’entrer en matière.

c. Par courrier du 16 décembre 2020, l’assurée a fait valoir qu’il appartenait à l’OAI d’instruire son dossier. Elle avait désormais une atteinte au genou, sa nouvelle demande n’était donc pas liée à l’ancienne procédure. Elle avait déposé une nouvelle demande suite à l’échec de son opération et surtout en raison d’un récent accident qui avait conduit à une fracture et une fissure de sa jambe gauche, ce qui avait sévèrement réduit ses capacités de marche. Elle produisait les documents médicaux suivants :

- L’imagerie par résonance magnétique (IRM) du genou gauche du 27 mars 2019 a mis en évidence :

« Épanchement intra-articulaire ;

Kyste synovial plurilobé au niveau de l’insertion proximale du jumeau interne ;

Chondropathie rotulienne et surtout condylienne interne avec lésions ostéochondrales (grade IV) ;

Dégénérescence mucoïde de la corne postérieure du ménisque interne avec déchirure partielle au niveau de sa racine (grade II) ;

Pas de lésion méniscale externe ;

Dégénérescence mucoïde du ligament croisé antérieur ;

Tendinopathie rotulienne distale ;

Anomalie de signal au niveau de la diaphyse distale du fémur, hypo-intense en T1, hyperintense en suppression de la graisse traduisant des zones de non- maturation de la moelle osseuse ».

-  Il ressortait du rapport d’IRM lombaire du 6 mai 2019 que l’assurée avait des discopathies étagées avec protrusions discales herniaires D12-L1 paramédianes droites, L2-L3, L3-L4 et L4-L5 à extension foraminale bilatérale sans franc conflit disco-ostéo-radiculaire visible.

-  L’IRM de la cheville gauche du 14 mai 2019 a mis en évidence une très discrète sclérose débutante du dôme astragalien postéro-médial, sans lésion cartilagineuse visible, sans composante oedémateuse, sans perte des sphéricités articulaires ainsi qu’un minime renflement du fascia plantaire à son insertion sur l’épine calcanéenne inférieure, modérément oedématisée.

-  Selon le rapport opératoire du 29 mai 2019, l’assurée avait été opérée du genou gauche.

-  Dans son rapport du 3 juin 2019, la docteure F______, spécialiste FMH en angiologie, a relevé que le bilan veineux des membres inférieurs montrait la présence d’une thrombose veineuse profonde poplitéo-distale gauche secondaire à l’intervention chirurgicale récente, ainsi qu’à une mobilisation réduite et à l’absence de thromboprophylaxie.

Dans son rapport du 28 juin 2019, la Dre F______ a retenu que le bilan veineux des membres inférieurs montrait une évolution favorable de la thrombose veineuse profonde poplitéo-distale gauche. Il était important de poursuivre le traitement anticoagulant pour la durée totale prévue de trois mois et le port de la compression élastique.

- Selon l’IRM du 18 juin 2020, l’assurée présentait une gonarthrose fémoro-tibiale médiale modérée avec une chondropathie de grade IV étendue du condyle fémoral médial et de grade III du plateau tibial médial, des altérations dégénératives du ménisque médial. En fémoro-patellaire, il y avait des érosions cartilagineuses de grade IV sur les deux berges prédominant sur le versant patellaire sans épanchement articulaire significatif.

d. Dans son rapport du 18 mai 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, a indiqué que l’assurée présentait une douleur au compartiment interne du genou gauche à la charge et à la marche. La marche sans cannes était impossible. Elle était en incapacité totale de travail depuis 2019 dans son activité habituelle de vendeuse en position debout. Il mentionnait que, selon le résultat d’une éventuelle chirurgie, une capacité de travail pourrait être de 50% dans une activité adaptée.

e. Dans son rapport du 20 avril 2022, le docteur H______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a développé qu’une prothèse totale du genou avait été proposée. L’incapacité totale de travail dans l’activité habituelle était totale depuis le 29 mai 2019. Une activité sédentaire était théoriquement déjà possible.

f. Selon le rapport du Dr G______ du 5 mai 2022, l’état de santé de l’assurée s’était péjoré en raison des douleurs. Elle était limitée notamment s’agissant de la marche, des escaliers, de la position assise prolongée, de la position statique et accroupie. Il concluait à une totale incapacité de travail.

g. L’assurée a bénéficié d'une pose de prothèse totale du genou gauche le 13 décembre 2022, opération effectuée par le docteur I______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur.

h. Dans son rapport du 9 mai 2023, le Dr I______ a mentionné que les douleurs étaient en amélioration. Il retenait que l’assurée pouvait travailler dans une activité adaptée.

i. Dans son rapport de consultation du 14 juin 2023, le Dr I______ a noté que l'évolution était globalement favorable. Cliniquement, la cicatrice était calme. Le genou était sec, mobile et stable.

j. Dans son rapport du 4 septembre 2023 basé sur les consultations des 3 mai et 13 juin 2023, le Dr G______ a répondu qu’a priori l’assurée disposait d’une capacité de travail dans une activité adaptée, le taux devait être évalué fin 2023, à un an de la pose de la prothèse.

k. Le dossier de l’assurée a été soumis au SMR. Par avis du 3 octobre 2023, le docteur J______, spécialiste FMH en gynécologie et obstétrique, a retenu une incapacité totale de travail à compter du 29 mai 2020 et une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée dès le 14 juin 2023.

l. Par avis du 8 décembre 2023, le service de réadaptation a fixé le degré d’invalidité à 0% en 2023, respectivement à 10% en 2024. Par ailleurs, compte tenu de la situation de l’assurée, son parcours professionnel et des gains réalisés, il a retenu que des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées.

m. Le 8 janvier 2024, l’OAI a notifié à l’assurée un projet de décision. Celui-ci impliquait l’octroi d’une rente entière d’invalidité du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023 et le refus de mesures professionnelles.

n. Par courrier du 7 février 2024, l’assurée a contesté le projet. Elle relevait que l’appréciation médicale de l’OAI était contredite par les spécialistes qui la suivaient. Elle poursuivait notamment les séances de physiothérapie. Elle était en incapacité de travail depuis onze ans. Elle demandait des explications notamment quant à l’analyse et aux conclusions de son dossier. Elle sollicitait le réexamen de son dossier. Elle joignait des certificats médicaux des Drs B______, H______ et G______, lesquels attestaient d’une incapacité totale de travail.

o. Par rapport du 7 février 2024, la Dre B______ a expliqué suivre l’assurée depuis le 30 janvier 2014. Son état de santé s’était nettement aggravé depuis le mois de juin 2020 suite à son accident du 15 juin 2020. L’assurée avait des douleurs insupportables à la nuque irradiant aux épaules, aux bras, au dos et aux hanches. Elle avait également mal aux chevilles et aux pieds, des raideurs articulaires le matin, ainsi que des crises d’angoisse et des attaques de panique. Elle se sentait physiquement limitée lors de ses déplacements et de ses mouvements. Sur le plan psychique, il était retenu un trouble dépressif sévère, un trouble panique et des phobies. L’assurée se sentait notamment étouffée ayant l’impression de s’évanouir dans des lieux fermés, elle parlait toute seule, elle souffrait de troubles cognitifs, elle présentait notamment une thymie triste, une asthénie, une anhédonie et une baisse de l’élan vital. Elle avait également des vertiges. Il était retenu une totale incapacité de travail en raison de ses atteintes physiques et psychiques.

p. Une expertise a été organisée au sein de SWISS EXPERTISES MÉDICALES SÀRL. Dans le rapport d’expertise du 24 juillet 2024, le professeur K______, spécialiste FMH en neurologie, et les docteurs L______, spécialiste FMH en médecine interne générale, M______, spécialiste FMH en rhumatologie, et N______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont retenu que sur les plans de médecine interne, neurologique et psychiatrique, la capacité de travail de l’assurée était entière dans toute activité. Sur le plan rhumatologique, la capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle depuis le 29 mai 2020 et totale dans une activité adaptée à partir du 14 juin 2023.

Sur le plan neurologique, l’examen était normal.

Sur le plan psychiatrique, le Dr N______ considérait que le dossier mentionnait une prise en charge par la Dre B______ depuis le 31 janvier 2024. Il était noté que l’assurée s’était levée à plusieurs reprises pendant l’examen, passant une bonne partie de celui-ci debout, et qu’elle était démonstrative. Il avait été procédé à une mesure des taux sériques de la sertaline et de la trimipramine. Le taux de sertaline était dans la zone thérapeutique recommandée alors que la trimipramine était infra-thérapeutique quant au traitement d'éventuels épisodes dépressifs. L’expert ne retenait pas d’épisode dépressif. Il n’y avait pas de limitation uniforme des activités dans tous les domaines de l’existence. Il n’y avait pas de psychopathologie incapacitante. L’expert mentionnait que l’assurée vivait dans un appartement au 2ème étage sans ascenseur.

Sur le plan rhumatologique, le Dr M______ a retenu comme diagnostics avec effet sur la capacité de travail une lombalgie sur discopathie étagée et un status de prothèse totale du genou gauche. Les diagnostics de fibromyalgie et de syndrome de déconditionnement léger étaient jugés sans répercussion. Ledit expert préconisait de confier l’assurée au centre de la douleur pour une prise en charge multimodale avec apprentissage de l’hypnose, autohypnose, méditation en pleine conscience, tens, acupuncture, mésothérapie ainsi qu’éventuellement des perfusions de lidocaïne et kétamine. Il fixait les limitations fonctionnelles suivantes : éviter la marche prolongée ou sur terrains accidentés, le port de charges de plus de 5 ou 10 kg à répétition, les positions penchées en avant ou en porte-à-faux du dos, monter et descendre les escaliers à répétition, le travail en hauteur sur échelle ou escabeau et la position agenouillée. Il fallait privilégier une activité de type sédentaire avec possibilité d’alterner les positions.

q. Par décision du 26 septembre 2024, l’OAI a octroyé à l’assurée une rente entière d'invalidité du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023 et refusé les mesures professionnelles.

r. Par décision du même jour adressé à l’époux de l’assurée, le montant de la rente d’invalidité de ce dernier avait été revu, ce qui conduisait à une demande de restitution de CHF 6'811.-, étant précisé que la somme avait directement été déduite du rétroactif dû à l’assurée.

C. a. Par acte du 24 octobre 2024, l’assurée a interjeté recours contre la décision du 26 septembre 2024 auprès de la Cour de céans, concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente illimitée dans le temps. Elle contestait disposer d’une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée, le calcul du degré d’invalidité et le refus de mesures professionnelles. Dans son recours, elle sollicitait également l’annulation de la décision prononçant la compensation de la rente de son mari, ce dernier étant décédé depuis.

b. Malgré les délais accordés, la recourante n’a pas complété son recours.

c. Par acte du 27 février 2025, l’OAI a conclu au rejet du recours en s’appuyant sur les conclusions de l’expertise pluridisciplinaire. En complément, l’OAI produisait la réponse du 25 février 2025 de la caisse cantonale genevoise de compensation. Cette dernière rappelait que la recourante avait été mise au bénéfice d’une rente entière d’invalidité du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023. Au 1er mai 2021, l’époux de la recourante, décédé le 7 juillet 2024, percevait déjà une rente d’invalidité. Il en résultait que, suite à l’octroi d’une rente à la recourante, un plafonnement des rentes avait dû être effectué. Le montant de CHF 6'811.- était par conséquent correct et la dette revenait à ses héritiers. Compte tenu de la connexité entre les deux rentes, la caisse avait compensé le montant à restituer avec le montant rétroactif dû à la recourante. Elle concluait dès lors également au rejet du recours.

d. Malgré le délai accordé, la recourante n’a pas répliqué.

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Lorsque le délai échoit un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, son terme est reporté au premier jour ouvrable qui suit (art. 38 al. 3 LPGA et 17 al. 3 LPA).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.              

2.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

2.2 En l’occurrence, la décision est postérieure au 1er janvier 2022. Cependant, un éventuel droit à une rente d’invalidité naîtrait au plus tôt en mars 2021, soit six mois après le dépôt de la demande du 25 septembre 2020 (cf. art. 29 al. 1 LAI), de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

3.             Le litige porte sur le droit de la recourante à l’octroi d’une rente d'invalidité au-delà du 30 septembre 2023 et à des mesures professionnelles.

4.              

4.1 En vertu des art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI, est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident.

4.2 Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles.

4.3 Aux termes de l'art. 6 LPGA, est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l'aptitude de l'assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d'activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité.

4.4 Conformément à l'art. 4 LAI, l'invalidité (art. 8 LPGA) peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (al. 1). L'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération (al. 2).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L'atteinte à la santé n'est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

4.5 En vertu de l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d'au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c).

4.6 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

4.7 Selon l’art. 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29, al. 1, LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré.

4.8 Conformément à l’art. 88a al. RAI, si la capacité de gain ou la capacité d’accomplir les travaux habituels de l’assuré s’améliore ou que son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d’aide découlant de son invalidité s’atténue, ce changement n’est déterminant pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu’à partir du moment où on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre

5.              

5.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165 consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

5.2 La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique suppose la présence d'un diagnostic émanent d'un expert (psychiatre) et s'appuyant selon les règles de l'art sur les critères d'un système de classification reconnu, telle la classification internationale des maladies (ci-après : CIM) ou le DSM-IV (Diagnostic and Statistical Manual) (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

5.2.1 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références). Cette procédure d’administration des preuves est notamment applicable à la fibromyalgie (cf. ATF 132 V 65 consid. 4.1).

5.2.2 L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

5.2.3 Ainsi, selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

Il y a lieu de se fonder sur une grille d'analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

I.     Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2). Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.  Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles ; consid. 4.3.2)

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

II.  Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement ; consid. 4.4)

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

5.2.4 Il est notamment relevé que même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d’un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

5.2.5 Le Tribunal fédéral a récemment rappelé qu’en principe, seul un trouble psychique grave peut avoir un caractère invalidant. Un trouble dépressif de degré léger à moyen, sans interférence notable avec des comorbidités psychiatriques, ne peut généralement pas être défini comme une maladie mentale grave. S'il existe en outre un potentiel thérapeutique significatif, le caractère durable de l'atteinte à la santé est notamment remis en question. Dans ce cas, il doit exister des motifs importants pour que l'on puisse néanmoins conclure à une maladie invalidante. Si, dans une telle constellation, les spécialistes en psychiatrie attestent sans explication concluante (éventuellement ensuite d'une demande) une diminution considérable de la capacité de travail malgré l'absence de trouble psychique grave, l'assurance ou le tribunal sont fondés à nier la portée juridique de l'évaluation médico-psychiatrique de l'impact (ATF 148 V 49 consid. 6.2.2 et les références).

6.              

6.1 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents qu'un médecin, éventuellement d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

6.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

6.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

6.4 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

7.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 135 V 39 consid. 6.1 ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

8.

8.1 En l’espèce, la recourante conteste disposer d’une pleine capacité de travail dans une activité adaptée. L’intimé quant à lui s’appuie sur le rapport d’expertise pour maintenir sa position.

8.2 Il sied dès lors d’examiner les rapports médicaux au dossier, en particulier le rapport d’expertise de SWISS EXPERTISES MÉDICALES SÀRL.

S’agissant de la valeur probante du rapport d'expertise, l’on doit relever qu’il répond, sur le plan formel, aux exigences posées par la jurisprudence pour qu'on puisse lui accorder une pleine valeur probante. L’expertise pluridisciplinaire a été conduite par des médecins spécialisés dans chaque domaine concerné, en vue d'établir une synthèse des différentes pathologies de l'expertisé, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier. Les experts ont personnellement examiné la recourante préalablement à l'établissement de leur rapport d'expertise, et ils ont consigné les renseignements anamnestiques pertinents, recueilli les plaintes de l'assurée et résumé leurs propres constatations. Ils ont en outre énoncé les diagnostics retenus et répondu aux questions posées. Leurs conclusions sont claires et motivées.

S’agissant du volet psychiatrique, l’expert, le Dr N______, commet une erreur en retenant que le suivi de la Dre B______ n’a commencé que dès le 31 janvier 2024 en lieu et place de 2014. Le Dr N______ ne rejoint pas l’appréciation de la Dre B______, psychiatre de la recourante. À ce stade, il sied de relever que, dans le cadre de la première demande de la recourante, les rapports de la Dre B______ faisant état d’une totale incapacité de travail ont été écartés par le Tribunal fédéral au profit des conclusions de l’examen psychiatrique du SMR qui concluait à une rémission et à une pleine capacité de travail.

Il sera également souligné qu’avant la contestation du projet de décision, la recourante n’avait fait valoir que ses atteintes physiques pour justifier sa nouvelle demande de prestations.

Hormis l’erreur quant au début du suivi spécialisé, force est de constater que le Dr N______ détaille les raisons qui le font nier une pathologie psychiatrique incapacitante. Il indique notamment que les limitations ne sont pas uniformes dans tous les domaines de la vie, la recourante pratiquant ponctuellement la marche, rendant visite à ses enfants, se déplaçant en transports publics et parvenant à partir en vacances.

En ce qui concerne le volet rhumatologique, le Dr M______ a également dûment motivé son analyse et ses conclusions, lesquelles rejoignent en substance les avis des médecins de la recourante.

En effet, dans son rapport de consultation du 14 juin 2023, le Dr I______ note que l’évolution est globalement favorable, la recourante étant d’ailleurs satisfaite du résultat post-opératoire. Il indiquait que, cliniquement, le genou était sec, mobile et stable. Dans son rapport du son rapport du 9 mai 2023, le Dr I______ mentionnait que les douleurs étaient en amélioration et que l’assurée pouvait travailler dans une activité adaptée.

Dans son rapport du 4 septembre 2023 suite au contrôle du 13 juin 2023, le Dr G______ notait que les limitations étaient les suivantes : marche prolongée, escaliers, marche sur terrain irrégulier et déplacement avec port de charges. Il mentionnait qu’a priori la recourante pouvait exercer une activité adaptée dont le taux serait à évaluer d’ici fin 2023, soit un an après la pose de la prothèse.

Les médecins de la recourante attestent dès lors que courant juin 2023, l’état de santé de la recourante s’était amélioré et permettait une reprise d’activité adaptée. Le Dr M______ développe par ailleurs pourquoi il a estimé que la reprise pouvait se faire à 100%.

Reste cependant une incohérence quant à la date du début de l’incapacité de travail qui découle manifestement d’une erreur d’année.

En effet, c’est le 29 mai 2019 que la recourante a été opérée la première fois de son genou gauche, intervention qui s’est compliquée par une thrombose. Aucun événement n’a eu lieu le 29 mai 2020. Par conséquent, il sera retenu que la date du début de l’incapacité remonte au 29 mai 2019 en lieu et place de 2020, étant précisé que les spécialistes suivant la recourante sur le plan physique datent également son incapacité de travail à 2019.

Les experts en médecine interne et en neurologie ont également motivé leurs analyse et conclusions.

Hormis l’erreur d’année quant au début de l’incapacité de travail, il apparaît que les éléments au dossier ont bien été pris en compte par les experts et qu’ils ne permettent en tout état de cause pas de remettre en cause l’expertise.

S’agissant des limitations, elles prennent en compte les atteintes incapacitantes admises, soit celles du genou et du dos, et sont dès lors cohérentes avec l’analyse des experts, la recourante n’apportant par ailleurs aucun élément permettant de les remettre en cause.

L’évaluation consensuelle des experts est conforme aux résultats auxquels chaque expert est parvenu dans son champ de spécialité. Leur avis commun est clairement motivé et apparait probant aux yeux de la chambre de céans.

La Cour de céans retiendra dès lors une incapacité totale de travail dès le 29 mai 2019, date du début du délai de carence, et une capacité totale de travail dans une activité adaptée à compter du 14 juin 2023.

9.

9.1 La recourante conteste également le calcul du degré d’invalidité, l’intimé persistant dans sa position se basant sur les salaires statistiques.

9.2 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

9.3 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente ; des exceptions ne peuvent être admises que si elles sont établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références).

Toutefois, lorsque la perte de l'emploi est due à des motifs étrangers à l'invalidité, le salaire doit être établi sur la base de valeurs moyennes. Autrement dit, dans un tel cas, n'est pas déterminant pour la fixation du revenu hypothétique de la personne valide le salaire que la personne assurée réaliserait actuellement auprès de son ancien employeur, mais bien plutôt celui qu'elle réaliserait si elle n'était pas devenue invalide. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un tel cas d'exception se présente par exemple lorsque le poste de travail que l'assuré occupait avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment de l'évaluation de l'invalidité, lorsqu'il n'aurait pas pu conserver son poste en raison des difficultés économiques, en cas de faillite ou de restructuration de l'entreprise (arrêt du Tribunal fédéral 8C_746/2023 du 7 juin 2024 consid. 4.3 et les références).

Tel sera le cas également lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide ; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles (arrêts du Tribunal fédéral I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

9.4 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table TA1 de l’ESS, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa), étant précisé que, depuis l'ESS 2012, il y a lieu d'appliquer le tableau TA1_skill_ level (ATF 142 V 178). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1).

La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

9.4.1 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 ; 134 V 322 consid. 5.2 et les références). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

Cette évaluation ressortit en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6 ; 123 V 150 consid. 2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

Selon la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (arrêt 8C_823/2023 du 8 juillet 2024), nonobstant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2022 de l'art. 26bis al. 3 RAI, la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral antérieurement au 1er janvier 2022 concernant les critères justifiant un abattement sur le salaire d'invalide issu des statistiques demeure applicable.

Un abattement sur le revenu d’invalide n’est en principe pas appliqué pour des personnes assurées dont la dernière activité impliquait des travaux physiquement contraignants et qui, après la survenance d’une atteinte à la santé, ne peuvent exercer plus qu’un travail légèrement ou moyennement contraignant, mais sans limitation de l’horaire de travail ni baisse de rendement, parce que le salaire statistique retenu dans leur cas est tiré d’un tableau de l’ESS correspondant à un faible niveau d’exigence englobant un grand nombre de tâches légères ou moyennement lourdes et que la personne assurée n’a pas à subir de ce seul fait une diminution de son revenu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2017 du 7 août 2017 consid. 4.2.2 et références citées).

9.5 On rappellera que l'invalidité consiste en une diminution des possibilités de gain sur le marché équilibré du travail si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé et si elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (cf. art. 7 al. 1 et 8 al. 1 LPGA). La notion de marché équilibré du travail est une notion théorique et abstraite qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l'assurance-chômage et ceux qui relèvent de l'assurance-invalidité. Elle implique, d'une part, un certain équilibre entre l'offre et la demande de main d'oeuvre et, d'autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu'il offre un éventail d'emplois diversifiés, tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu'au niveau des sollicitations physiques (ATF 110 V 273 consid. 4b p. 276 ; arrêt I 350/89 du 30 avril 1991 consid. 3b, in RCC 1991 p. 329). Il n'y a donc pas lieu d'examiner la question de savoir si l’assuré peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail sur un marché où les places de travail disponibles correspondent à l'offre de main d'oeuvre (arrêt I 198/97 du 7 juillet 1998 consid. 3b et les références, in VSI 1998 p. 293). On ne saurait certes se fonder sur des possibilités de travail irréalistes, c'est-à-dire envisager une activité qui ne pourrait être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existerait pratiquement pas sur le marché général du travail ou que son exercice supposerait de la part de l'employeur des concessions irréalistes (cf. arrêts 9C_984/2008 du 4 mai 2008 consid. 6.2 ; I 350/89 du 30 avril 1991 consid. 3b, in RCC 1991 p. 329 ; I 329/88 du 25 janvier 1989 consid. 4a, in RCC 1989 p. 328).

9.6 Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_801/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.6).

9.7 Dans sa décision, l’intimé s’est basé sur l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) tant pour le revenu sans qu’avec invalidité.

Il ressort de la détermination du degré d’invalidité que l’intimé a calculé le salaire sans invalidité sur la base des ESS 2020 (TA1_Tirage skill level, femme, Total, pour 41.7 heures, niveau 1, indexé à 2023, soit un salaire annuel de CHF 54’222.).

La recourante a exercé plusieurs types d’emplois avant d’être au chômage, puis sans activité professionnelle pendant de nombreuses années au moment du début de l’incapacité de travail, la manière de procéder de l’OAI correspond dès lors aux principes jurisprudentiels précités.

Pour le salaire avec invalidité, il a également été fixé d’après les ESS 2020 (TA1_Tirage skill level, femme, Total, pour 41.7 heures, niveau 1, indexé à 2023, étant précisé qu’aucun abattement n’a été retenu pour 2023, ce qui apparaît conforme à la jurisprudence, eu égard au nombre significatif d’emplois auxquels la recourante peut prétendre, malgré ses limitations, comme cela a été développé à juste titre par le service de la réadaptation de l’intimé.

Ainsi, après comparaison des revenus avec et sans invalidité, c’est à juste titre que l’intimé a considéré la perte de gain comme nulle en 2023.

La prise en compte d’un abattement de 10% pour l’année 2024 découle des modifications légales entrées en vigueur au 1er janvier 2024.

À ce stade, il sied de relever que le calcul du degré d’invalidité aurait dû s’effectuer sur la base des ESS 2022. Toutefois, les revenus avec invalidité et sans invalidité ayant été calculés sur la même base, le résultat serait identique.

Le calcul effectué est donc conforme à la jurisprudence en la matière et doit donc être confirmé, étant rappelé que l'intimé n’était pas tenu d’examiner quelle activité concrète était adaptée aux restrictions de la recourante.

10.

10.1 La recourante s’opposant également au refus de mesures professionnelles, ce grief sera également examiné.

10.2 Selon l’art. 17 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée (al. 1). La rééducation dans la même profession est assimilée au reclassement (al. 2). Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui en ont besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou pour améliorer sensiblement leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI).

Une perte de gain de 20% environ ouvre en principe droit à une mesure de reclassement dans une nouvelle profession (ATF 124 V 108 consid. 2b et les arrêts cités).

10.3 En l'espèce, le degré d’invalidité de la recourante n’atteint pas le seuil donnant droit à une mesure de reclassement. Compte tenu des limitations fonctionnelles retenues, il faut admettre qu’il existe un nombre suffisamment large d’activités légères sur le marché du travail que la recourante peut assumer malgré ses limitations fonctionnelles et sans formation complémentaire.

C'est donc à juste titre que les mesures professionnelles ont été refusées.

11. Compte tenu de ce qui précède, la Cour de céans modifiera la décision, en ce sens que le début du versement de la rente entière d’invalidité doit être fixé au 1er mars 2021, en lieu et place du 1er mai 2021.

En effet, comme développé précédemment, le début du délai de carence doit être fixé au 29 mai 2019, il est donc arrivé à échéance le 1er mai 2020. Toutefois, compte tenu du dépôt de la demande au 25 septembre 2020, la rente ne peut être versée qu’à compter du 1er mars 2021, soit six mois après.

La fin du droit à la rente a été à juste titre fixée au 30 septembre 2023, soit trois mois après l’amélioration admise à compter du 14 juin 2023.

12.

12.1 Enfin, la recourante fait valoir que l'intimé n'était pas en droit de compenser les rentes versées à son défunt époux avec celles qui lui étaient dues.

12.2 À teneur de l'art. 37 al. 1bis LAI, si les deux conjoints ont droit à une rente, l'art. 35 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (RS 831.10 - LAVS) est applicable par analogie. Selon l'art. 35 al. 1 LAVS, la somme des deux rentes pour un couple s'élève au plus à 150% du montant maximum de la rente de vieillesse si les deux conjoints ont droit à une rente de vieillesse ou si un conjoint a droit à une rente de vieillesse et l'autre à une rente de l'assurance-invalidité.

12.3 Selon la doctrine et la jurisprudence, la compensation de créances réciproques constitue un principe juridique général, ancré en droit privé aux art. 120 ss de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). En droit des assurances sociales plus particulièrement, certaines lois spéciales règlent la compensation des créances (par exemple les art. 20 al. 2 LAVS [ATF 115 V 341 consid. 2b], 50 LAI et 50 LAA). En l'absence d'une réglementation particulière, le principe de la compensation des créances de droit public est admis comme règle générale. Dans ce cas, les dispositions du CO qui en fixent les conditions sont applicables par analogie (ATF 130 V 505 consid. 2 et 3). La situation décrite ci-dessus n'a pas été modifiée par l'entrée en vigueur de la LPGA (ATF 130 V 505 consid. 2.1).

12.4 Conformément à l'art. 20 al. 2 let. a LAVS, peuvent être compensées avec des prestations échues, notamment, les créances découlant de ladite loi et de la LAI. Cette disposition est applicable dans le domaine de l'assurance-invalidité en vertu de l'art. 50 al. 2 LAI.

12.5 Selon la pratique administrative, les prestations versées à tort à l'un des conjoints ne peuvent être compensées avec des prestations échues revenant à l'autre conjoint. Une exception est possible s'il existe un lien étroit, sous l'angle du droit des assurances sociales, entre les prestations revenant à chacun des époux. Cette condition est réalisée, par exemple, lorsqu'à la suite de la réalisation du deuxième risque assuré, la rente du premier conjoint doit être diminuée en raison du plafonnement ou lorsque les deux rentes des conjoints doivent être à nouveau plafonnées en raison d'une modification des bases de calcul (OFAS, Directives concernant les rentes de l’assurance vieillesse, survivants et invalidité fédérale (DR), état au 1er janvier 2024, ch. 10201).

Dans un arrêt du 13 octobre 2004 (ATF 130 V 505), le Tribunal fédéral a admis la légalité de l’ancien ch. 10908 de la directive précitée. Il a précisé que la compensation en droit public, donc en droit des assurances sociales, est subordonnée à la condition que deux personnes soient, réciproquement, créancières et débitrices l'une de l'autre, selon l'art. 120 CO. Cette règle n'est cependant pas absolue. Il a toujours été admis, en effet, que l'art. 20 LAVS y déroge dans une certaine mesure pour prendre en compte les particularités relatives aux assurances sociales en ce qui concerne précisément cette condition de la réciprocité des sujets de droit posée par l'art. 120 al. 1 CO. La possibilité de compenser s'écarte de l'art. 120 al. 1 CO quand les créances opposées en compensation se trouvent en relation étroite, du point de vue de la technique d'assurance ou du point de vue juridique : dans ces situations, il n'est pas nécessaire que l'administré ou l'assuré soit en même temps créancier et débiteur de l'administration (consid. 2.4). Le Tribunal fédéral a également rappelé qu'une telle relation étroite a été admise entre la créance en restitution d'une rente d'invalidité assortie de rentes complémentaires à l'encontre de l'un des conjoints opposée en compensation à des arrérages de rentes d'invalidité versés à l'autre conjoint. Selon le Tribunal fédéral, les prestations versées en premier à l'un des conjoints (le mari) ne sont pas indues tant et aussi longtemps qu'un deuxième cas d'assurance n'est pas survenu en la personne de l'autre conjoint (la femme) ; elles le sont en revanche devenues automatiquement lors de la réalisation de la deuxième éventualité assurée. Les créances en restitution à l'égard du mari sont dès lors indissociablement liées aux prestations allouées à son épouse. Le Tribunal fédéral a encore précisé que sous l'angle économique, les rentes allouées à l'époux ont le même but que les rentes accordées ensuite à l'épouse avec effet rétroactif, à savoir procurer au couple, en tant qu'entité économique, un revenu de remplacement destiné à couvrir les besoins vitaux de la famille. Les rentes versées ultérieurement à l'autre conjoint prenaient, pour une part, la place des prestations versées précédemment en trop à l'autre conjoint, de sorte qu'il existe, de ce point de vue également, un rapport nécessaire de connexité entre les prestations revenant au couple. L'interdépendance des rentes individuelles des époux est également mise en évidence par les effets du plafonnement des rentes prévu par l'art. 35 LAVS, ce plafonnement s'expliquant, aux yeux du législateur, par le fait que le couple représente en soi une unité économique, dont les besoins financiers sont censés être inférieurs à ceux de deux personnes vivant seules (arrêt du Tribunal fédéral 9C_682/2010 du 29 avril 2011 consid. 1.2). Le Tribunal fédéral a encore confirmé sa position en expliquant que le droit de l'épouse à une rente d'invalidité implique nécessairement une modification des prestations accordées précédemment à son époux (rente d'invalidité et rente complémentaire pour conjoint). Une telle interdépendance entre la part de rente d'invalidité versée en trop à l'un des conjoints et la rente d'invalidité allouée rétroactivement à l'autre conjoint est inhérente au système de calcul des rentes de l'assurance-vieillesse et survivants/assurance-invalidité en cas de réalisation d'un deuxième cas d'assurance chez un couple marié. La survenance du second cas d'assurance en la personne du conjoint qui ne bénéficiait jusqu'alors pas d'une rente déclenche la mise en oeuvre du « splitting » prévu dans les trois éventualités énumérées aux let. a à c de l'art. 29quinquies al. 3 LAVS (ATF 137 V 175 consid. 2.2.1).

12.5.1 Une des conditions de la compensation est qu'elle ne peut porter atteinte au minimum vital de l'assuré, calculé selon les règles du droit des poursuites (ATF 138 V 402 consid. 4.2 ; ATF 138 V 235 consid. 7.2 ; ATF 136 V 286 consid. 6.1 ; ATF 131 V 249 consid. 1.2). En cas de versement rétroactif de prestations périodiques, la limite de compensation relative au minimum vital doit être examinée pour la même période, soit pour l'espace de temps dans lequel le versement rétroactif des prestations est destiné (ATF 138 V 402 consid. 4.2 et 4.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_804/2017 du 9 octobre 2018 consid. 3.1). Toutefois, en cas de paiements rétroactifs de rentes pour des périodes antérieures, le maintien du minimum vital ne doit pas être pris en compte comme limite de compensation lorsque la rente allouée à titre rétroactif remplace simplement une rente accordée pour une période antérieure et que les deux s'excluent mutuellement (ATF 138 V 402).

12.5.2 Sur le plan procédural, au regard de l'art. 25 LPGA et de la jurisprudence y relative, la procédure de restitution de prestations implique trois étapes, en principe distinctes : une première décision sur le caractère indu des prestations, soit sur le point de savoir si les conditions d'une reconsidération de la décision par laquelle celles-ci étaient allouées sont réalisées; une seconde décision sur la restitution en tant que telle des prestations, qui comprend en particulier l'examen des effets rétroactifs ou non de la correction à opérer en raison du caractère indu des prestations, à la lumière de l'art. 25 al. 1, 1ère phrase LPGA et des dispositions particulières et, le cas échéant, une troisième décision sur la remise de l'obligation de restituer au sens de l'art. 25 al. 1, 2ème phrase LPGA (cf. art. 3 et 4 OPGA ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_678/2011 du 4 janvier 2012 consid. 5.2 et les références citées). La décision sur la restitution en tant que telle est susceptible d'être rendue en même temps que la décision sur le caractère indu des prestations (ATAS/375/2020 du 14 mai 2020 consid. 6c).

12.5.3 L'extinction de la créance en restitution par voie de compensation ne peut intervenir, aux conditions requises, qu'une fois qu'il a été statué définitivement sur la restitution et sur une éventuelle demande de remise de l'obligation de restituer. L'opposition et le recours formés contre une décision en matière de restitution ont un effet suspensif. Une compensation immédiate ferait perdre à l'assuré la possibilité de contester la restitution et, le cas échéant, de demander une remise de l'obligation de restituer. Une remise de l'obligation de restituer n'entre toutefois pas en considération dans la mesure où cette obligation peut être éteinte par compensation avec des prestations d'autres assurances sociales, soit lorsque des prestations déjà versées sont remplacées par d'autres prestations, dues à un autre titre, et que la compensation intervient entre ces prestations conformément au principe de concordance temporelle. Dans cette éventualité, la fortune de l'intéressé astreint à l'obligation de restituer ne subit aucun changement qui le mettrait dans une situation difficile, de sorte que la question de la remise n'a pas à être examinée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_804/2017 du 9 octobre 2018 consid. 3.2 et 3.3 et les références citées ; cf. également ATF 138 V 402 consid. 4.4 et ATF 130 V 505 consid. 2.9).

12.6 Il résulte des pièces versées au dossier que la recourante, mariée, s’est vu accorder une rente du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023. Or, au 1er mai 2021, son époux bénéficiait déjà d’une rente d’invalidité. Les deux époux ayant droit à une rente, c'est ainsi à juste titre que l'intimé a procédé, d'office, à l'ouverture de la procédure dite de « splitting », à savoir le partage des revenus acquis par les époux durant le mariage, et ce jusqu'au 31 décembre précédant la réalisation du risque assuré pour la recourante, et leur attribution par moitié à chacun (conformément à l'art. 29quinquies al. 3 let. a et al. 4 let. a LAVS, auquel renvoie l'art. 36 al. 2 LAI) et a réduit les rentes conformément à la limite du plafonnement de l’art. 35 al. LAVS. Le nouveau calcul a abouti à une rente d'invalidité d'un montant moindre à ce qui avait été effectivement alloué à l’époux de la recourante du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023.

12.7 Il s'ensuit que le droit de la recourante à une rente d'invalidité à compter du 1er mai 2021, date qui devra être revue conformément aux développements précités, établi par décision du 26 septembre 2024, constitue un fait nouveau, important, qui justifie la révision procédurale des décisions de rente au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA. Par ailleurs, la décision de restitution litigieuse, rendue à la même date que la décision octroyant une rente d'invalidité à la recourante, et portant sur la restitution de prestations dès le 1er mai 2021, respecte les délais de péremption de l'art. 25 al. 2 LPGA (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 98/04 du 13 octobre 2004 consid. 3 et la référence citée).

12.8 En l'occurrence, l'intimé a, dans le cadre de sa décision de restitution du montant de CHF 6'811.-, à titre de prestations versées en trop du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023, requis la compensation immédiate de cette somme avec une partie du rétroactif des rentes revenant à la recourante à compter du 1er mai 2021.

Au vu de la jurisprudence, il y a lieu d'admettre que la créance en restitution à l'égard du désormais défunt époux de la recourante est indissociablement liée aux prestations allouées à cette dernière. En effet, la rente due à la recourante à compter du 1er mai 2021 a entraîné une réduction des prestations versées précédemment à son défunt époux compte tenu du plafonnement. Ces prestations n'étaient pas indues tant et aussi longtemps qu'un deuxième cas d'assurance n'était pas survenu en la personne de la recourante. Au vu du lien étroit existant entre la créance en restitution de l'intimé à l'égard de l’époux de la recourante et les prestations lui revenant, l'intimé était en droit de procéder à la compensation de sa créance en restitution avec une partie du rétroactif qui lui était dû. Par ailleurs, c'est à juste titre que l'intimé a requis une compensation immédiate, sans attendre une éventuelle demande de remise de l'obligation de restituer et sans examiner la question du maintien du minimum vital comme limite de compensation. En effet, dès lors qu'une partie des rentes versées à l’époux de la recourante du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023 est devenue indue en raison des prestations rétroactives dues, pour la même période, à la recourante, et que les deux s'excluaient mutuellement, une remise de l'obligation de restituer ainsi que le maintien du minimum vital n'entraient pas en considération. Admettre le contraire conduirait à un cumul injustifié de prestations (cf. ATF 138 V 402 consid. 4.5 et ATF 130 V 505 consid. 2.9).

12.9 Partant, la restitution de CHF 6’811.-, dans son principe et sa quotité, doit être confirmée, étant encore relevé que la recourante ne conteste ni les bases de calculs de sa rente d'invalidité à compter du 1er mai 2021, ni le montant des prestations déjà versé pour la période courant dès cette date jusqu'au 30 septembre 2023.

L'intimé était ainsi en droit de procéder à la compensation immédiate de sa créance en restitution de CHF 6’811.- à titre de prestations versées indûment du 1er mai 2021 au 30 septembre 2023.

13. Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la recourante ayant droit à une rente limitée dans le temps du 1er mars 2021 au 30 septembre 2023.

Non représentée, la recourante n’a pas droit à des dépens.

L’intimé sera condamné au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al.1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet très partiellement.

3.        Modifie la décision du 26 septembre 2024, en ce sens que la recourante a droit à une rente entière d’invalidité du 1er mars 2021 au 30 septembre 2023.

4.        Renvoie la cause à l’OAI pour calcul des prestations dues.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’OAI.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Marie-Josée COSTA

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le