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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2073/2024

ATAS/661/2025 du 27.08.2025 ( AVS ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2073/2024 ATAS/661/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 août 2025

Chambre 4

 

En la cause

A______ SÀRL,

représentée par Me Antoine BERTHOUD

 

 

recourante

contre

Agence MEROBA n. 111.3

 

 

intimée

 


 

EN FAIT

A. a. La société A______ SÀRL (ci-après : la société ou la recourante) a été inscrite au Registre du commerce de Genève le 3 mai 2012. Elle a pour but tous travaux d'étude, de calcul et de réalisation dans les domaines du chauffage, de la ventilation et des sanitaires. B______ (ci-après : l'associé gérant), né le ______ 1958, en est l’associé gérant unique depuis sa création, avec signature individuelle.

b. La société est affiliée auprès de MEROBA, Caisse de compensation de la Fédération Romande de Métiers du Bâtiment, Agence de Genève 111.3 (ci‑après : la caisse ou l’intimée) depuis le 28 novembre 2019.

B. a. La société a fait l’objet d’un contrôle AVS en date du 23 novembre 2023 portant sur les déclarations de salaires pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022.

b. Le 4 décembre 2023, la caisse a adressé à la société une décision de cotisations complémentaires de CHF 1'687.85, en raison de la prise en compte d’une part d'utilisation privée d’un véhicule de celle-ci en 2021 pour l'associé gérant. Il s’agissait d’un véhicule C______, qui avait fait l’objet d’un contrat de leasing du 29 mars 2017.

c. Le 15 janvier 2024, la société, représentée par un avocat, a formé opposition à cette décision, alléguant que l'associé gérant n'utilisait pas le véhicule C______ de la société à titre privé, dès lors que lui-même et son épouse disposaient déjà de deux véhicules privés, un de marque D______ et un de marque E______, dont la copie des cartes grises étaient jointes. Le véhicule C______ de la société était un 4x4 muni d'un crochet permettant l'attelage de remorques qui étaient utilisées dans le cadre de son activité, notamment pour la livraison de citernes, de groupes de ventilation, de chaudières et de sable. Ce véhicule restait stationné au dépôt et était conduit par le collaborateur de la société qui effectuait la livraison. Rien ne permettait de retenir qu’il était utilisé pour les déplacements privés de l'associé gérant.

d. Le 13 février 2024, la caisse a accusé réception de l'opposition de la société et requis la production du journal de bord détaillé du véhicule C______ pour la période de contrôle. En outre, elle a indiqué pouvoir soumettre l'opposition à l'administration fiscale (ci-après : l’AFC) pour analyse et décision, précisant qu’elle s'alignerait sur la décision de celle-ci.

e. Par courrier du 15 février 2024, la société a indiqué à la caisse que le véhicule C______ n'était utilisé que pour des déplacements professionnels et qu’aucun journal de bord n'avait été établi, ce qui n’était pas nécessaire puisque le véhicule n’était pas utilisé à des fins privées.

f. Par pli du 26 février 2024, la caisse a requis la production par la société de toutes les copies des factures et rapports d'entretien du véhicule à ce jour, ainsi que les grands livres de la société, avec le détail des comptes pour les années 2021 et 2022. Par ailleurs, elle attendait sa réponse quant à sa proposition de soumettre le cas à l’AFC.

g. Le 5 mars 2024, la société a indiqué à la caisse qu'il ne lui semblait pas opportun de solliciter l'avis de l’AFC, puisqu'il n'y avait pas d'usage à titre privé du véhicule C______. Elle lui a transmis les extraits des comptes concernés par le véhicule en 2021 et 2022, ainsi que la facture du dernier service effectué en 2021, en précisant que le leasing était parvenu à échéance en 2021 et le véhicule avait été repris en 2022 par l'associé gérant. Il n'y avait pas eu de service en 2022.

h. Par décision du 22 mai 2024, la caisse a rejeté l'opposition de la société et confirmé sa décision de reprise de cotisations pour l'utilisation privée d’un véhicule C______ par l'associé gérant. Malgré l'existence d’un crochet de remorquage, qui pouvait aussi être utilisé pour tracter une caravane ou un bateau, elle s'interrogeait sur la nécessité d'un tel véhicule pour tracter des machines ou transporter du sable. Un véhicule de classe inférieur, voire d'occasion, aurait pu tout aussi bien pu être utilisé pour ce faire. Vu le modèle et la classe de ce véhicule, proches du véhicule de luxe, il était raisonnable de considérer que ce dernier pouvait aussi être utilisé à titre privé. La caisse avait néanmoins admis sa potentielle utilisation à des fins professionnelles et n'avait repris que la part d'utilisation privée de véhicule professionnel, conformément aux règles et directives en vigueur. En revanche, dès lors que le véhicule avait été repris en 2022 par l'associé gérant, la reprise pour cette année-là n'avait pas lieu d'être.

C. a. Par acte du 20 juin 2024, la société, sous la plume de son avocat, a interjeté recours, par devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci‑après : chambre de céans) contre cette décision, concluant, sous suite de dépens, à son annulation. L'intimée présumait un usage privé du véhicule litigieux en se fondant sur la classe inférieure des véhicules personnels de l'associé gérant et de son épouse. Ces derniers avaient un meilleur usage dans leur vie quotidienne de véhicules d'un gabarit maniable. La D______ conduite par l'associé gérant était une voiture idéale pour les déplacements quotidiens et les loisirs. Il n'y avait pas lieu de présumer, comme l'avait fait l'intimée, qu’il y avait eu un usage privé du véhicule C______ sur une seule base comparative. La recourante ignorait ce qui justifiait les suppositions de l’intimée sur l’usage du crochet de remorquage, car aucune question ne lui avait été posée à ce sujet. L’associé gérant n’avait ni caravane, ni bateau. Seules des remorques à usage professionnel étaient tractées par le véhicule C______. Suggérer que l'achat d'un véhicule d'occasion aurait dû être favorisé, comme l'avait fait l'intimée, revenait à s'immiscer de manière contraire à la liberté économique dans la gestion de la société. Il n'existait aucune preuve d'un usage privé d'un véhicule, qui restait parqué au dépôt lorsqu'il n'était pas utilisé pour des livraisons.

b. Le 19 juillet 2024, l’intimée a conclu au rejet du recours. Elle estimait que les caractéristiques de confort et de puissance du véhicule dépassaient celles que l'on pouvait raisonnablement reconnaître comme nécessaires à l'exercice dans la profession des métiers techniques du bâtiment. La recourante ne donnait aucune indication précise quant aux dates d'utilisation et le kilométrage réalisé dans l'activité professionnelle. Seul le montant de CHF 141.80 avait été dépensé pour l'essence au cours de l'année 2021, ce qui démontrait une utilisation quasi inexistante du véhicule. Aucune preuve n'avait été apportée concernant les employés qui auraient utilisé ledit véhicule, ni pour quels chantiers, ni à quelle fréquence. L'épouse de l'associé gérant avait indiqué au réviseur de l'intimée que le véhicule C______ était utilisé par son mari, raison pour laquelle la reprise avait été appliquée sur le salaire de ce dernier. Bien que l'associé gérant disposait déjà de deux véhicules immatriculés à son nom, il avait repris personnellement le véhicule C______ en cause à son nom dès 2022, ce qui démontrait qu'il pouvait très bien utiliser ce véhicule en plus des deux autres.

c. Par réplique du 19 août 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions, soulignant que le véhicule litigieux n'atteignait pas le seuil des véhicules de luxe. La plupart des camionnettes existant sur le marché ne permettaient pas de tracter les lourdes charges qui devaient être transportées pour les besoins de son activité. Les entreprises utilisaient souvent, pour de telles charges, des camions, qui étaient bien plus couteux à l'achat et en frais d'exploitation que le véhicule C______. Celui-ci était assez puissant pour utiliser des remorques de capacités différentes, de sorte que son usage répondait non seulement à des raisons pratiques, mais aussi économiques, les coûts liés à une remorque étant extrêmement faibles. Le fait que l'associé gérant n'avait pas comptabilisé dans les comptes de la société toutes ses factures d’essence démontrait qu'il ne cherchait pas à optimiser les contributions publiques. Enfin, la reprise du véhicule par l’associé gérant ne démontrait pas un usage privé de celui-ci en 2021.

d. Interpellée par la chambre de céans à propos de la situation fiscale du véhicule C______ en 2021, la recourante a produit, le 8 octobre 2024, sa déclaration fiscale et son bordereau 2021, précisant qu'aucun échange à propos dudit véhicule n'était intervenu avec les autorités fiscales.

e. Par détermination du 28 novembre 2024, l'intimée a relevé que les documents produits par la recourante ne permettaient pas d'établir s'il fallait retenir une utilisation exclusivement professionnelle du véhicule litigieux. Elle a requis la soumission du cas à l’AFC. Subsidiairement, elle a indiqué que le véhicule en cause avait été pris en leasing en 2017 et que sa valeur s'élevait à CHF 95'000.-. Dans les métiers de la construction, lorsque des charges lourdes devaient être tractées, il était d'usage de recourir à des véhicules du type « pick-up » comme par exemple les modèles Amarok (Volkswagen), D-Max (Isuzu) ou encore Hilux (Toyota), dont les prix de véhicules neufs variaient entre CHF 50'000.- et CHF 70'000.-. Le prix de ces véhicules était bien inférieur au véhicule C______ litigieux et ceux-ci étaient nettement plus appropriés à un usage professionnel (charge utile, pare-chocs et carénage robuste permettant de protéger la carrosserie sur des terrains difficiles ou en cas de remorquage).

Le 14 mai 2024, le service des permis de circulation avait informé l’intimée que la recourante détenait quatre véhicules, dont un modèle F______, qui paraissait bien plus approprié au transport de charges lourdes et à un usage strictement professionnel que le véhicule en cause. À ce jour, après la reprise à titre privé du véhicule C______ par l'associé gérant, trois véhicules utilitaires restaient immatriculés au nom de la recourante, dont un véhicule G______ immatriculé en février 2022, alors que le seul salarié actif sur les chantiers avait vu ses rapports de travail se terminer à fin 2022. En outre, il ressortait du dossier que le véhicule litigieux avait atteint 48'140 km en quatre ans et demi, soit une moyenne de 11'000 km par année, ce qui paraissait démesuré pour une utilisation uniquement professionnelle pour le transport de charges lourdes, étant relevé qu'en général, le matériel lourd était directement livré sur les chantiers, de sorte qu'il était illusoire que la recourante ait dû transporter quotidiennement des charges nécessitant un remorquage.

f. Sur demande de la chambre de céans, la recourante a, par pli du 6 janvier 2025, indiqué que l'associé gérant était l'unique conducteur du véhicule litigieux, car il était le seul à disposer du permis d'utilisation d'une remorque et, en fonction de la charge globale, du permis poids lourds.

g. Interrogée par la chambre de céans sur la question du véhicule C______ litigieux, l'AFC a répondu, le 24 février 2025 qu’aucune reprise n’avait été faite pour la société concernant la part privée du véhicule en cause, ni concernant l’associé gérant. En revanche, une déduction de 3/5 des charges liées à l’utilisation professionnelle d’un véhicule avait été effectuée dans la taxation 2021 de l’associé gérant en lien avec l’entreprise à raison individuelle de l’associé gérant. L’AFC n’était pas en mesure de déterminer s’il s’agissait du véhicule en cause.

h. La recourante a indiqué le 10 mars 2025 que le véhicule détenu par l’entreprise à raison individuelle de l’associé gérant n’était pas celui qui faisait l’objet de la présente procédure. Elle estimait que des mesures d’instruction complémentaires étaient superflues vu le montant en jeu relativement peu important et persistait dans ses conclusions.

Elle a produit un permis de circulation établi le 10 décembre 2014 au nom de l’associé gérant pour un véhicule C______.

i. Le 19 mars 2025, l’intimée a fait valoir que lors du contrôle AVS à la fin de l’année 2023, elle n’avait pas connaissance de l’existence d’un autre véhicule utilisé par l’associé gérant pour son activité professionnelle. Pour cette raison, elle avait repris une part pour l’utilisation prévue du véhicule C______ objet du litige, en appliquant la méthode forfaitaire de la part privée (Info TVA 08, Parts privées, chiffre 1.5.2), soit 0.8% par mois de la valeur hors taxes du véhicule. Ce calcul était applicable lorsqu’une personne ne disposait que d’un seul véhicule. Ainsi, le salaire repris dans ce cadre s’élevait à CHF 9’516.- pour un total de cotisations de CHF 1’687.85.

Les nouveaux éléments ressortant de la réponse de l’AFC du 24 février 2025, à savoir que l’associé gérant possédait plusieurs entreprises et qu’il utiliserait potentiellement plusieurs véhicules immatriculés au nom de ses différentes sociétés, étaient susceptibles d’avoir une incidence sur le montant des cotisations dues. L’intimée sollicitait en conséquence de la chambre de céans qu’il soit ordonné à l’associé gérant de produire la liste exhaustive des entreprises qu’il détenait ou gérait en 2021, la liste des véhicules possédés par ces entreprises ainsi que ceux détenus à titre personnel en 2021 et l’ensembles des pièces comptables et fiscales permettant de déterminer avec précision les cotisations dues sur la part privée calculée selon la méthode des coûts complets en cas de véhicule en leasing. Une fois ces documents produits, l’intimée se déterminerait sur les pièces nouvellement produites et, le cas échéant, recalculait et la part privée du véhicule litigieux selon la méthode des coûts complets conformément aux dispositions fiscales et sociales en vigueur.

La pratique fiscale prévoyait que si un salarié détenait des participations dans la société qui l’employait et qu’il possédait également une voiture privée, une part privée devait tout de même être dissociée pour le véhicule d’entreprise. Il n’était possible de renoncer à la comptabilisation d’une part privée que s’il était prouvé que le véhicule d’entreprise était utilisé exclusivement à des fins professionnelles. Si plusieurs véhicules (par personne) figuraient dans la comptabilité de l’entreprise, il fallait retrancher une part privée adéquate pour le premier véhicule. Pour tout véhicule supplémentaire, la part privée était égale à 100% des coûts comptabilisés (Taxinfo du canton de Berne).

En effet, le ch. 1.5.3 de l’Info TVA 08 Parts privées précisait que si une entreprise mettait plusieurs véhicules à la disposition de l’un de ses employés, la nécessité entrepreneuriale devait être prouvée. Cette preuve pouvait être apportée au moyen d’un livre de bord ou d’autres documents probants. À défaut d’une telle preuve, l’AFC considérait ces véhicules comme des biens de location que l’entreprise mettait à la disposition de l’employé à des fins privées. Il importait peu à cet égard que les véhicules soient immatriculés individuellement ou avec des plaques interchangeables.

La part éventuelle de l’utilisation de ces véhicules à des fins professionnelles devait être prouvée à l’aide de moyens appropriés (en règle générale un livre de bord) et pouvait être prise en compte dans la détermination du loyer calculé.

Ainsi, si l’associé gérant disposait de plusieurs véhicules, en l’occurrence sous diverses raisons sociales, il était présumé que les véhicules supplémentaires étaient utilisés exclusivement à titre privé. Dans ce cas, la base de calcul devait être déterminée selon la méthode des coûts complets. Faute de journal de bord, aucune utilisation exclusivement professionnelle (nécessité entrepreneuriale, de l’associé gérant ne pouvait être démontrée et, dès lors, aucune déduction ne pouvait être appliquée.

j. Le 3 avril 2025, l’intimée a constaté, suite à réception de l’écriture de la partie recourante du 10 mars 2025, que l’associé gérant disposait bel et bien, en 2021, d’un premier véhicule utilisé à titre professionnel et privé, soit le véhicule C______. Cela corroborait son écriture du 19 mars 2025. Contrairement à ce qu’avançait la recourante, le fait que l’AFC n’avait pas repris de part privée pour le véhicule d’entreprise en l’espèce ne signifiait pas pour autant que cette dernière n’était pas due, surtout si le véhicule n’avait jamais été déclaré. En effet, l’AFC n’avait généralement pas de connaissance du détail des véhicules des entreprises, cette information ne figurant pas de façon détaillée dans les déclarations fiscales. Seuls les comptes annuels (bilan et compte de résultat non détaillés) y étaient en principe annexés. Ainsi, faute d’informations précises, l’AFC ne pouvait pas systématiquement déterminer s’il y avait lieu ou non de reprendre une part pour l’utilisation privée de véhicules d’entreprise. L’intimée ne niait pas que le véhicule en question avait pu être utilisé à des fins professionnelles, mais elle maintenait simplement que ce dernier, vu son type et sa classe, pouvait aussi être utilisé à titre privé et que, faute de justification probante de son utilisation exclusivement professionnelle, conformément à la législation applicable, une part pour cette utilisation privée devait être décomptée.

Enfin, si des mesures d’instruction complémentaires s’avéraient nécessaires, il serait absurde de ne pas les entamer pour l’unique raison que le montant en jeu était peu important. Il était essentiel de déterminer si une part privée devait être retenue pour le véhicule litigieux, car cela correspondait à un élément de rémunération au titre de salaire déterminant en conformité avec la législation fiscale et sociale applicable. L’application du calcul de la part privée selon la méthode des coûts complets aboutissait un montant plus important que celui repris initialement.

k. Le 10 avril 2025, la recourante a fait valoir que l’attitude de l’intimée était contradictoire. Dans son écriture du 28 novembre 2024, elle avait demandé que l’objet du litige soit soumis à l’AFC et avait sollicité une suspension de la procédure jusqu’à connaissance de la décision de cette dernière quant à l’utilisation retenue du véhicule litigieux. C’était très certainement à la suite de cette requête que la chambre avait interpelé l’AFC le 24 janvier 2025. Manifestement contrariée de la réponse, l’intimée soutenait aujourd’hui que l’AFC ne disposait en règle générale pas de tous les éléments nécessaires pour déterminer s’il y avait lieu ou non de reprendre une part privée. Elle tentait ainsi de jeter le doute sur un élément de preuve qu’elle avait elle-même sollicité. La Cour devait apprécier cette attitude en se souvenant que l’intimée supportait le fardeau de la preuve.

Les parties à la procédure étaient la société et non l’associé-gérant à titre personnel. Les mesures d’instruction sollicitée allaient très largement au-delà de la compétence de l’intimée, qui se limitait aux cotisations paritaires dues par la recourante. Seul l’usage d’un seul véhicule détenu par cette dernière était en cause en l’espèce et l’absence de son usage privé par l’associé gérant était renforcée par la communication de l’AFC du 24 février 2025. L’associé gérant ne pouvait manifestement pas utiliser à des fins privées plusieurs véhicules simultanément. La recourante avait produit les cartes grises des deux véhicules immatriculés à son nom, qui étaient utilisés par lui-même et son épouse. Il avait été taxé à titre complémentaire pour l’usage privé d’un véhicule figurant dans la comptabilité de son entreprise individuelle. Il n’y avait dès lors pas le moindre indice que le véhicule litigieux serait également utilisé à titre privé par l’associé gérant, qui n’en avait manifestement pas besoin. La recourante maintenait ses conclusions et invitait la Cour à ne pas suivre les mesures supplémentaires d’instruction sollicitée par l’intimée.

l. Lors d’une audience du 2 juillet 2025 devant la chambre de céans :

-          l’associé gérant a déclaré : « J’exploite l’entreprise seul. Actuellement, j’ai plus ou moins arrêté, mais comme j’ai encore des contrats de garanties, je continue mon activité pour assurer ces garanties. La société est actuellement moribonde. Je pense que c’est depuis que j’ai eu 65 ans. J’ai actuellement 67 ans. J’avais deux employés depuis la création jusqu’à 2021 et 2022, sauf erreur. Actuellement, je n’ai plus d’employés. J’étais associé gérant de la société. Je faisais les rendez-vous de chantiers, je livrais la marchandise (climatiseurs qui peuvent faire deux ou trois tonnes, des chaudières qui peuvent faire jusqu’à dix tonnes, qui sont assemblées sur place, des citernes de 2000 l, de l’isolation, du sable). J’avais une secrétaire qui assurait le secrétariat. L’employé coordonnait sur les chantiers les équipes qu’on envoyait. C’étaient des sous-traitants. Je prenais l’ensemble des travaux à faire et je prenais des équipes pour faire les travaux spécifiques. L’employé, parfois avec l’aide d’un autre chauffagiste ou d’un temporaire, s’occupait de la partie chauffage, il était chauffagiste et installait les systèmes de chauffage. Il contrôlait également un petit peu l’installation générale, notamment la ventilation, afin que tout se fasse dans les normes. Il ne faisait pas les livraisons, je le confirme malgré la formulation de l’opposition. L’employé n’avait qu’une camionnette et prenait ses outils. On a des grands dépôts et on livre le matériel au compte-goutte en fonction de l’avancement des travaux.

Le véhicule C______ était utilisé pour les livraisons. Il vaut moins de CHF 100'000.-. C’est un 4x4 et il a de la puissance. J’ai des remorques de plusieurs tailles. Cela me coûtait moins cher que d’acheter un camion et je pouvais prendre plus de poids, sans avoir besoin de payer des plaques de camion qui coûtent plus chers. Il y a également la redevance sur les poids lourds (RPLP) qui doit être payée par les camions et pas par les voitures. J’ai le permis camion que je n’ai jamais utilisé. La société avait d’autres véhicules, deux camionnettes à mon souvenir. Je pense qu’on en a plus qu’une. Elles étaient utilisées par notre employé et par les temporaires. Je ne les utilisais pas. Pour les rendez-vous de chantiers, j’utilisais le véhicule C______, car je faisais également les livraisons de matériel avec la remorque. Il y a en général un rendez-vous par semaine avec tous les corps d’état, soit avec les patrons des entreprises qui sont impliquées sur les chantiers. J’utilisais plutôt rarement le véhicule C______ sans remorque. Si je devais aller sur un chantier sans remorque, j’utilisais un autre véhicule C______, qui est immatriculé sous (ma) société en nom. Pour ce véhicule, j’ai toujours déduit une partie, car je l’utilisais également pour rentrer chez moi, mais jamais plus, car on a des scooters, ce qui est plus pratique à Genève. Si je dois aller à Nyon pour des raisons privées, je prenais la C______ de ma société en nom, car elle est plus confortable et elle est devant chez moi alors que la C______ de la recourante restait au dépôt. J’ai encore une D______ et une E______. La D______ c’est mon épouse qui l’utilise, elle l’avait avant le mariage et nous l’avons immatriculée à mon nom. La E______, on l’utilise tous les deux car c’est une petite voiture. Cela dépend de notre destination et de nos besoins. Pour les vacances nous avons un camping-car que l’on prend des fois et qui n’est sur aucune des sociétés. Si on descend dans le sud, nous utilisons la C______ de la société en nom. Je n’ai jamais eu de compte essence et je payais sur mon argent propre. J’utilisais beaucoup le véhicule et pas seulement sur Genève, car nous avions des chantiers à Nyon, à Préverenges, vers Lausanne. C’étaient des gros chantiers. Parfois on faisait deux ou quatre trajets dans la journée. Il me parait cohérent qu’on ait fait 11'000 km par année. On est même allé en Valais.

Le véhicule F______ est une petite camionnette avec un pont ouvert à l’arrière. C’est un petit moteur, il n’a pas de boule pour mettre une remorque et c’est un vieux véhicule. On l’utilisait pour livrer sur Genève dans les petites rues.

Sur questions (du représentant de l’intimée), je confirme que je suis associé gérant de la recourante ; j’ai une société en raison individuelle depuis janvier 1981 qui s’occupe de carrelage, en 2021 c’était mon activité principale. Elle emploie dix personnes et moi je m’occupais de l’administratif et des plannings. Mes enfants travaillaient déjà dans l’entreprise en 2021, c’étaient eux qui s’en occupaient principalement à ce moment-là. Par la suite, ils ont créé leur propre société. La société en nom propre est moribonde actuellement. Pour la société H______ SA, j’étais administrateur. La personne qui la gérait m’a volé et a été condamné pour cela. Je n’ai pas passé de temps à travailler pour cette entreprise pour laquelle j’étais simplement administrateur. Je n’ai pas utilisé le véhicule C______ en cause dans la procédure pour d’autres sociétés que la recourante. C’est moi qui achetait le matériel à livrer. Une chaudière peut coûter de 300 à CHF 50'000.-. Je revendais aux clients le matériel avec le travail effectué et il pouvait y avoir CHF 150'000.- de marchandises et CHF 150'000.- de travaux. La marchandise n’est pas stockée, elle est livrée au fur et à mesure des travaux. »

-          Le conseil de la société a indiqué que lors de la rédaction de l’opposition, il avait peut-être utilisé un terme malheureux en parlant de « collaborateur » (pour désigner la personne qui conduisait le véhicule en cause), ce terme n’était toutefois pas faux, mais imprécis.

-          Le représentant de l’intimée a constaté qu’il y avait CHF 109'000.- de marchandises achetées et peu de choses de plus de CHF 15'000.-. Il avait de la peine à valider que le véhicule en cause n’ait été utilisé qu’à des fins professionnelle sur la base des chiffres disponibles. Il a encore déclaré que : « Lors du contrôle, j’ai rencontré une femme dans les bureaux de la société qui s’occupait du secrétariat, il me semble que c’est I______, je lui ai demandé de quel type de véhicule il s’agissait car j’ai constaté que les frais à ce sujet étaient importants. Elle m’a présenté les documents relatifs à la C______ en cause, elle m’a dit que c’était son beau-père qui l’utilisait, elle a cité le nom de (l’associé gérant). Elle est beaucoup plus jeune que ce dernier. J’ai interprété la situation en pensant qu’elle était (sa) belle-fille (…) J’ai demandé également à la secrétaire de la société si le véhicule était utilisé également à titre privé, elle a dit qu’elle ne le savait pas, je parle de mémoire, et je lui ai demandé s’il y avait un journal justifiant l’usage du véhicule, ce qui est nécessaire quand il y a un usage tant professionnel que privé. Elle a répondu que non.

-          I______ a déclaré : « Je reconnais (le réviseur). Il est venu faire un contrôle AVS auprès de la société et il est resté à peu près une matinée. Je travaillais à l’époque pour la société en tant que secrétaire depuis 10 ans environ. Il m’a demandé ce qu’on avait comme véhicules et je lui ai donné la liste et il m’a demandé si on en utilisait à des fins privées, et je suis sûre de lui avoir répondu « non » et pas « je ne sais pas ». Il ne m’a pas demandé quels étaient mes liens avec (l’associé gérant). Au quotidien j’utilise mon scooter, mais également le véhicule D______ principalement. Je conduis assez rarement. Pour les vacances, on part soit avec la D______ soit avec la C______. (Mon époux) a racheté le véhicule C______ qui était à la société recourante et on l’utilise de temps en temps à des fins privées. Il a vendu depuis 2-3 ans le véhicule C______ qui était en nom propre (…). Avant le rachat, on n’utilisait pas le véhicule C______ de la recourante à des fins privées.

Sur question du (conseil de la recourante), je précise que le véhicule C______ immatriculé à la société en nom était utilisé à des fins privées par mon mari jusqu’à sa vente. Le véhicule C______ de la recourante était stationné au dépôt à Meyrin. Nous sommes domiciliés à L______. L’autre véhicule C______ était stationné également à Meyrin. Ce dernier était déclaré en part privée, raison pour laquelle mon mari l’utilisait. Nous avons deux places de parc devant chez nous et nous y mettons nos scooters, la D______ et la E______. Nous avons deux garages et deux places de parc devant la maison. »

m. Le 7 juillet 2025, l’intimée a indiqué à la chambre de céans qu’après vérification dans la comptabilité 2021, elle n’avait pas trouvé de factures de la recourante adressées à des clients en Valais, ni à un garage Ferrari dans les comptes Débiteurs et Ventes de 2021, en lien avec les livraisons de marchandises évoquées en audience par le représentant de la recourante. Comme pour la valeur des marchandises achetées, elle constatait que le chiffre d’affaires 2021 était relativement modeste. Elle déplorait enfin l’absence de bulletins de livraison qui auraient pu corroborer les livraisons évoquées et l’utilisation exclusivement professionnelle du véhicule.

n. Le 30 juillet 2025, la recourante a relevé que l’intimée avait relevé que le véhicule litigieux avait été acquis en mars 2017 et que celui-ci avait parcouru 48’140 km au 20 novembre 2021. Les extraits de la comptabilité produits ne concernaient que l’exercice 2021 alors que le véhicule avait été utilisé pendant plusieurs années. Elle produisait une facture relative à un chantier sur Nyon, dont le montant justifiait l’importance des travaux effectués et corroborait pleinement les faits qu’elle alléguait. Cette facture prouvait par ailleurs que l’adresse du destinataire des factures ne correspondait pas toujours au lieu d’exécution des travaux.

La facture précitée a été établie le 16 juillet 2018 par la recourante et adressée à un bureau d’études et d’architecture situé à M______. Elle concernait un garage à la route N______ à Nyon et portait sur des travaux de chauffage et ventilation, selon contrat du 22 septembre 2017, comprenant :

-      production de chaleur par chaudière à gaz à condensation ;

-      chauffage ateliers avec panneaux rayonnants au plafond ;

-      chauffage show-room au moyen de chauffage de sol à basse température ;

-      batterie de ventilation ;

-      pompe à chaleur ;

-      traitement de l’eau ;

-      installation solaire très thermique.

Pour un total de CHF 448'430.-.

o. La cause a été gardée à juger le 4 août 2025.

 

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s’appliquent, aux art. 1 à 97 LAVS, moins que la loi n’y déroge expressément.

1.3 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

La décision litigieuse a été régulièrement notifiée à la recourante le
23 mai 2024.

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA), le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le bien-fondé des cotisations complémentaires de CHF 1'687.85 facturées à la recourante pour tenir compte d’une part d'utilisation privée par l'associé gérant du véhicule C______ en 2021.

3.              

3.1 Selon l'art. 1a al. 1 let. a LAVS, sont obligatoirement assurés conformément à la présente loi les personnes physiques domiciliées en Suisse qui exercent une activité professionnelle indépendante.

Selon l'art. 3 al. phr. 1 LAVS, les assurés sont tenus de payer des cotisations tant qu'ils exercent une activité lucrative. Selon l'al. 2 de cette même disposition, ne sont pas tenus de payer des cotisations les enfants qui exercent une activité lucrative jusqu'au 31 décembre de l'année où ils ont accompli leur 17e année (let. a) et les membres de la famille travaillant dans l'entreprise familiale, s'ils ne touchent aucun salaire en espèces, jusqu'au 31 décembre de l'année au cours de laquelle ils ont accompli leur 20e année (let. d).

Aux termes de l'art. 8 al. 1 phr. 1 LAVS, une cotisation de 7.8% est perçue sur le revenu provenant d'une activité indépendante.

Selon l'art. 9 al. 3 LAVS, le revenu provenant d'une activité indépendante et le capital propre engagé dans l'entreprise sont déterminés par les autorités fiscales cantonales et communiqués aux caisses de compensation.

Selon l’art. 5 al. 2 LAVS, le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s’ils représentent un élément important de la rémunération du travail.

Font partie de ce salaire déterminant, par définition, toutes les sommes touchées par le salarié, si leur versement est économiquement lié au contrat de travail ; peu importe, à ce propos, que les rapports de service soient maintenus ou aient été résiliés, que les prestations soient versées en vertu d'une obligation ou à titre bénévole. On considère donc comme revenu d'une activité salariée, soumis à cotisations, non seulement les rétributions versées pour un travail effectué, mais en principe toute indemnité ou prestation ayant une relation quelconque avec les rapports de service, dans la mesure où ces prestations ne sont pas franches de cotisations en vertu de prescriptions légales expressément formulées (ATF 131 V 446 consid. 1.1, 128 V 180 consid. 3c, 126 V 222 consid. 4a, 124 V 101 consid. 2 et la jurisprudence citée). 

L’art. 7 du règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants, du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) énumère divers éléments du salaire déterminant pour le calcul des cotisations, notamment les prestations en nature ayant un caractère régulier (let. f).

Selon l’art. 13 RAVS, la valeur de tout revenu en nature d'un autre genre sera estimée par la caisse de compensation dans chaque cas et selon les circonstances.

L’office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) a édicté des Directives sur le salaire déterminant dans l’AVS, AI et APG (ci-après : DSD) qui précisent les éléments entrant en ligne de compte dans le salaire déterminant. Selon le ch. 2078 DSD, dans sa version valable depuis le 1er janvier 2019, est considéré comme revenu en nature d’un autre genre, la remise d’une voiture de société à des fins privées. Les caisses de compensation évaluent l’utilisation à des fins privées de la voiture de société de manière identique à celle applicable à l'impôt fédéral direct (DSD n° 2079). Le ch. 2079 DSD, dans sa version valable jusqu'au 31 décembre 2021, renvoyait aux ch. 21 et suivants du guide d’établissement du certificat de salaire et de l’attestation de rentes publié par la Conférence suisse des impôts et l’Administration fédérale des contributions.

Le guide d’établissement de certificat de salaire et de l’attestation de rentes (Guide) établit des critères pour déterminer la part privée à la voiture de service. Il mentionne que si l’employeur prend à sa charge la totalité des frais, l’employé ne réglant que les frais de carburant pour ses longs trajets privés le week-end ou durant les vacances, il déclarera 0.8% par mois du prix d’achat du véhicule (hors taxe sur la valeur ajoutée), mais au moins CHF 150.- par mois (Guide n° 21). Il est spécifié qu’aucune déclaration ne doit être faite si l’employé n’a le droit d’utiliser le véhicule de service que pour ses trajets domicile – lieu de travail, à l’exclusion de tout autre usage privé (Guide n° 24).

Selon l'art. 23 RAVS, pour établir le revenu déterminant, les autorités fiscales cantonales se fondent sur la taxation passée en force de l'impôt fédéral direct. Elles tirent le capital propre engagé dans l'entreprise de la taxation passée en force de l'impôt cantonal adaptée aux valeurs de répartition intercantonales (al. 1). En l'absence d'une taxation passée en force de l'impôt fédéral direct, les données fiscales déterminantes sont tirées de la taxation passée en force de l'impôt cantonal sur le revenu ou, à défaut, de la déclaration vérifiée relative à l'impôt fédéral direct (al. 2). Si l'autorité fiscale procède à une taxation fiscale consécutive à une procédure en soustraction d'impôts, les al. 1 et 2 sont applicables par analogie (al. 3). Les caisses de compensation sont liées par les données des autorités fiscales cantonales (al. 4). Si les autorités fiscales cantonales ne peuvent pas communiquer le revenu, les caisses de compensation estimeront le revenu déterminant pour fixer les cotisations et le capital propre engagé dans l'entreprise sur la base des données dont elles disposent. Les personnes tenues de payer des cotisations doivent renseigner les caisses de compensation et, sur demande, produire toutes les pièces utiles (al. 5).

Selon l'art. 27 RAVS, pour toutes les personnes exerçant une activité indépendante qui leur sont affiliées, les caisses de compensation demandent aux autorités fiscales cantonales de leur communiquer les indications nécessaires au calcul des cotisations. L'OFAS édicte des directives sur les indications requises et la procédure de communication (al. 1). Les autorités fiscales cantonales transmettront les indications au fur et à mesure aux caisses de compensation pour chaque année fiscale (al. 2).

Les caisses de compensation, sans être liées par la communication fiscale, doivent examiner au regard du droit de l'AVS qui est tenu de payer des cotisations pour des revenus dont l'autorité fiscale a fait état. Toutefois, les caisses de compensation doivent en général se fier aux communications des autorités fiscales pour la qualification du revenu et ne procéder à leurs propres investigations que lorsqu'il y a des doutes sérieux quant à leur exactitude (ATF 134 V 250 consid. 3.3 p. 253 s. et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_162/2014 du 31 juillet 2014, consid. 3.1).

Le Tribunal fédéral a précisé s'agissant de la fixation des cotisations AVS/AI/APG en cas d'activité indépendante ; ensuite de la modification de la LAVS entrée en vigueur le 1er janvier 2012 (art. 9 al. 3 et 4 LAVS, art. 23 al. 4 et art. 27 al. 1 RAVS), que le revenu provenant de l'exercice d'une activité indépendante communiqué par l'autorité fiscale à la caisse de compensation doit être considéré, du point de vue du droit des cotisations, comme du revenu net et être majoré pour être amené à 100% pour le calcul des cotisations AVS/AI/APG. Il y a lieu de s'écarter de ce principe, lorsque la communication de l'autorité fiscale atteste de façon claire, expresse et dénuée de réserve qu'il n'a été procédé à aucune déduction de cotisations (ATF 139 V 537 538, consid. 5.5. et 6).

3.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Le principe inquisitoire, qui régit la procédure dans le domaine de l'assurance sociale (cf. art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA), exclut que la charge de l'apport de la preuve ("Beweisführungslast") incombe aux parties, puisqu'il revient à l'administration, respectivement au juge, de réunir les preuves pour établir les faits pertinents. Dans le procès en matière d'assurances sociales, les parties ne supportent en règle générale le fardeau de la preuve que dans la mesure où la partie qui voulait déduire des droits de faits qui n'ont pas pu être prouvés en supporte l'échec. Cette règle de preuve ne s'applique toutefois que s'il n'est pas possible, dans les limites du principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 128 V 218 consid. 6; ATF 117 V 261 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_632/2012 du 10 janvier 2013 consid. 6.2.1).

4.             En l’espèce, la chambre de céans constate que l’AFC a indiqué le 24 février 2025 qu’elle n’avait pas considéré que le véhicule C______ de la recourante était utilisé à des fins privées en 2021.

Les caisses de compensation doivent en général se fier aux communications des autorités fiscales pour la qualification du revenu et ne procéder à leurs propres investigations que lorsqu'il y a des doutes sérieux quant à leur exactitude (ATF 134 V 250 consid. 3.3 p. 253 s. et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_162/2014 du 31 juillet 2014, consid. 3.1).

Dans la décision querellée, l’intimée a estimé que le véhicule C______ en cause était partiellement utilisé à des fins privées, sur la base de considérations générales sur le modèle et la classe de ce véhicule, qui était selon elle proche d’un véhicule de luxe, concluant qu’il était dès lors raisonnable de considérer que ce dernier pouvait aussi être utilisé à titre privé, au moins partiellement.

Si l’on peut admettre que l’administration pouvait avoir un doute sur l’usage du véhicule C______, vu le modèle et la classe de ce véhicule, ce doute ne suffisait pas à fonder la décision de l’intimée, qui ne reposait pas sur une instruction suffisante des faits.

L’instruction complémentaire du cas par la chambre de céans n’a pas permis d’établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le véhicule en cause aurait été utilisé à des fins privées par l’associé gérant en 2021.

En effet, lors de l’audience devant la chambre de céans, l’associé gérant a confirmé qu’il était le seul à utiliser le véhicule C______ de la société pour les activités de celle-ci, et il donné des détails sur son travail, les raisons pour lesquelles il avait choisi ce type de véhicule et les motifs pour lesquels il ne l’utilisait pas à titre privé.

Ses déclarations sont convaincantes et elles permettent d’écarter les spéculations du réviseur de l’intimée sur l’usage privé qui aurait été fait du véhicule en cause. Les déclarations de son épouse, bien que d’une valeur probante relative vu leurs liens, confirment globalement les déclarations de l’associé gérant.

Le fait que le recourant ait déclaré à l’AFC une utilisation partiellement privée du véhicule C______ de son entreprise à raison individuelle tend à confirmer le fait qu’il n’utilisait pas celui-ci à titre privé. En effet, on ne voit pas pourquoi il aurait déclaré un tel usage pour sa société en nom propre et pas pour son activité pour la recourante. Il apparaît en outre crédible qu’il n’avait pas besoin d’utiliser le véhicule C______ de la recourante, car il utilisait déjà à titre privé le véhicule C______ de son entreprise à raison individuelle et qu’il avait encore deux autres véhicules privés immatriculés à son nom.

4.1 En conclusion, la chambre de céans retient qu’il ne peut être retenu au degré de la vraisemblance prépondérante que l’associé gérant a fait un usage privé du véhicule C______ de la recourante en 2021, de sorte qu’il ne se justifiait pas de facturer à cette dernière des cotisations complémentaires à ce titre, et la décision sur opposition du 22 mai 2024 doit en conséquence être annulée.

La recourante obtenant gain de cause et étant assistée d’un conseil, elle a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 2'500.- et mis à la charge de l’intimé (art. 61 let. g LPGA).

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision sur opposition du 22 mai 2024.

4.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 2'500.-, à la charge de l’intimée.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le