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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3439/2024

ATAS/606/2025 du 18.08.2025 ( LAA ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3439/2024 ATAS/606/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 août 2025

Chambre 16

 

En la cause

A______

représentée par Me Mirolub VOUTOV, avocat

 

 

recourante

 

contre

SWICA ASSURANCES SA

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ a été engagée en tant qu’aide de cuisine au restaurant B______ en 2010. À ce titre, elle était assurée contre les risques d’accident auprès de SWICA ASSURANCES SA.

Le 25 juillet 2012, elle a été agressée physiquement par un collègue à son lieu de travail et a subi un traumatisme crânien occipital, ainsi qu’une lésion au niveau de l’épaule gauche, engendrant une incapacité de travail totale.

Les suites de l'accident ont été prises en charge par l'assureur.

b. Par décision du 7 octobre 2016, confirmée sur opposition le 21 mars 2017, l’assurance a notamment octroyé à l'assurée une indemnité pour atteinte à l’intégrité corporelle de 20% en lien avec l’événement du 25 juillet 2012, correspondant à CHF 25'200.-.

c. Par arrêt du 14 décembre 2017 (ATAS/1149/2017), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice a partiellement admis le recours de l'assurée contre la décision sur opposition du 21 mars 2017, réformant celle-ci sur certains points mais la confirmant quant à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité.

d. Par arrêt du 25 juillet 2018 (8C_103/2018 et 8C_131/2018), le Tribunal fédéral a rejeté le recours de l'assurée contre l'arrêt de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, après avoir écarté son grief concernant le taux d'atteinte à l'intégrité retenu par l'assurance, et a admis le recours de l'assurance à l'encontre du même arrêt, annulé celui-ci et confirmé la décision sur opposition du 14 décembre 2017.

B. a. Par courrier du 28 février 2024, l'assurée a sollicité auprès de l'assurance la révision de la décision du 21 mars 2017 en ce qui concernait l'atteinte à l'intégrité allouée sous la forme de prestation de capital, laquelle devait être revue à la hausse, pour compenser les graves atteintes à sa santé psychologique.

Lorsque l'assurance avait rendu sa décision, ses problèmes de santé psychologiques n'avaient pas encore atteint le stade de gravité maximal, qui avait abouti à une incapacité de travail totale, ainsi qu'à l'octroi d'une rente d'invalidité par l'OAI, ce qui était désormais le cas.

b. Par courrier du 10 septembre 2024, l'assurance a prié l'assurée d'adresser sa demande de révision au Tribunal fédéral.

Si elle estimait que les termes de sa décision sur opposition n'étaient pas corrects, c'était l'arrêt du Tribunal fédéral du 25 juillet 2018 qui l'avait confirmé qui devait être révisé.

C. a. Par acte du 14 octobre 2024, l'assurée a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre ce courrier, concluant à son annulation, au constat de son droit à une indemnité d'atteinte à l'intégrité de 50%, soit CHF 63'000.-, et à la condamnation de l'assurance aux dépens.

Elle avait informé l'assurance de faits nouveaux importants et produit des nouveaux moyens de preuve ne pouvant être produits auparavant, soit l'octroi d'une rente de l'assurance-invalidité intégrale, octroyée en raison des atteintes à sa santé psychologique survenues suite à l'incident du 25 juillet 2012. Si l'assurance avait eu connaissance des atteintes à la santé psychologique lors du prononcé de la décision du 25 mars 2017, elle aurait octroyé une indemnité pour atteinte à l'intégrité supérieure à celle octroyée. La décision sur opposition du 21 mars 2017 était demeurée inchangée concernant le montant alloué à titre d'indemnité pour atteinte à l'intégrité. Ni la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, ni le Tribunal fédéral n'avaient modifié le montant de l'indemnité, malgré ses recours. L'assurance aurait dû procéder à la révision de sa décision sur opposition.

b. Par réponse du 14 novembre 2024, l'assurance a conclu à l'irrecevabilité du recours.

Le courrier du 10 septembre 2024 ne constituait pas une décision contre laquelle un recours pouvait être formé.

C'était contre l'arrêt du Tribunal fédéral que la révision devait être dirigée et non contre la décision sur opposition, qui avait acquis l'autorité de la chose jugée.

L'assurée avait déjà eu connaissance du motif de révision le 17 août 2020, de sorte que le délai de 90 jours était échu lorsqu'elle avait formulé sa demande de révision. Même à admettre qu'elle avait eu connaissance du motif de révision que le 15 septembre 2023, date de la dernière pièce produite, la demande serait également tardive.

La rente de l'assurance-invalidité n'avait pas été accordée uniquement en raison des atteintes à la santé psychologique, mais aussi en raison de vertiges, probablement dus à la maladie de Ménière, un syndrome d'apnée sévère du sommeil, des douleurs encore importantes à l'épaule gauche, des diagnostics d'état de stress post-traumatique (agression en 2012) et d'épisode dépressif moyen à sévère et d'un AVC à la fin de l'année 2017. Des pièces produites par l'assurée, aucun médecin n'avait attesté qu'elle aurait droit à une atteinte à l'intégrité pour des troubles psychologiques. Les motifs sur lesquels elle se basait n'étaient pas nouveaux, puisqu'avant la notification de la décision sur opposition, elle était déjà suivie pour des troubles psychologiques.

c. Par réplique du 4 février 2025, l'assurée a persisté dans ses conclusions.

La réponse du 10 septembre 2024 s'apparentait à une décision d'irrecevabilité, dans la mesure où elle refusait d'entrer en matière sur la demande de révision, de sorte que le recours était recevable.

Le Tribunal fédéral n'avait que rejeté le recours sur le point faisant l'objet de la demande de révision, de sorte que c'était l'assurance qui avait pris la décision, dont le contenu et le dispositif étaient demeurés inchangés, étaient manifestement erronés et dont la rectification revêtait une importance notable. L'assurance était compétente pour la révision. Si cette dernière s'estimait incompétente, elle aurait dû appliquer le principe de la transmission à l'autorité compétente.

d. Par duplique du 25 février 2025, l'assurance a maintenu ses conclusions et son argumentation, la demande de révision n'ayant pas été déposée dans le délai de 90 jours. et les documents produits n'étaient pas susceptibles de donner droit à l'assurée à une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50% au lieu de celle de 20% octroyée.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             L'intimée conteste que l'acte attaqué puisse être qualifié de décision.

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA et 2 LPGA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

L’assureur examine d’office s’il est compétent (art. 35 al. 1 LPGA). L’assureur qui se tient pour compétent le constate dans une décision si une partie conteste sa compétence (art. 35 al. 2 LPGA). L’assureur qui se tient pour incompétent rend une décision d’irrecevabilité si une partie prétend qu’il est compétent (art. 35 al. 3 LPGA). Tous les organes de mise en œuvre des assurances sociales ont l’obligation d’accepter les demandes, requêtes ou autres documents qui leur parviennent par erreur. Ils en enregistrent la date de réception et les transmettent à l’organe compétent (art. 30 LPGA).

L’assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l’intéressé n’est pas d’accord (art. 49 al. 1 LPGA). Les décisions indiquent les voies de droit. Elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties. La notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé (art. 49 al. 3 LPGA).

Les prestations, créances et injonctions qui ne sont pas visées à l’art. 49 al. 1 peuvent être traitées selon une procédure simplifiée (art. 51 al. 1 LPGA). L’intéressé peut exiger qu’une décision soit rendue (art. 51 al. 2 LPGA).

Les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d’opposition auprès de l’assureur qui les a rendues, à l’exception des décisions d’ordonnancement de la procédure (art. 52 al. 1 LPGA).

Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours (art. 56 al. 1 LPGA). Le recours peut aussi être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition (art. 56 al. 2 LPGA).

2.2 S'agissant de l'art. 35 LPGA, de la même manière que lorsqu'il s'estime compétent, l'assureur qui s'estime incompétent n'a pas l'obligation de constater son incompétence dans une décision formelle. En revanche, il doit le faire si une partie (au sens de l'art. 34 LPGA) prétend qu'il est compétent (Anne-Sylvie DUPONT in Anne-Sylvie DUPONT/Margit MOSER-SZELESS [éd.], Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 23 ad art. 35). Si, manifestement, l'acte est parvenu à l'assureur par erreur, ce dernier n'a pas besoin de rendre une décision d'incompétence, mais doit en revanche transmettre le dossier à l'organe compétent. Si, en revanche, l'assuré s'est volontairement adressé à lui, en toute conscience, l'assureur doit statuer conformément à l'art. 35 al. 3 LPGA. Durant la procédure de l'art. 35 LPGA, l'assureur doit surseoir à transmettre le dossier à l'organe qu'il estime, lui, compétent (Anne-Sylvie DUPONT in Anne-Sylvie DUPONT/Margit MOSER‑SZELESS [éd.], op. cit., n. 24 ad art. 35).

2.3 En matière d’assurance-accidents, la procédure simplifiée, réservée par l'art. 51 LPGA concerne les prestations, créances ou injonctions « non importantes » ou avec lesquelles l’intéressé est d’accord (art. 49 al. 1 LPGA a contrario ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 2009, p. 643, n. 4).

Peuvent être qualifiées de non importantes, les prestations d’un montant de quelques centaines de francs ainsi que celles qui concernent des prestations périodiques (Ueli KIESER, op. cit. p. 613 n. 15 et les références).

La loi ne règle pas la situation dans laquelle un assureur a rendu, en procédure informelle (art. 51 LPGA), une décision matérielle qui, aux termes de l’art. 49 al. 1 LPGA, aurait dû faire l’objet d’une décision formelle (ATF 134 V 145 consid. 5.1). En pareil cas, selon la jurisprudence, l'art. 51 al. 2 LPGA s'applique par analogie et l'assuré est en droit de demander à l'assureur la décision formelle qui ne lui a pas été adressée (ATF 134 V145 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_332/2008 consid. 2).

2.4 Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision (en principe sur opposition). Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, si aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1 ; 125 V 414 consid. 1a ; 119 Ib 36 consid. 1b ; arrêt du Tribunal fédéral K 126/06 du 15 juillet 2007 consid. 3.1).

2.5 En l'espèce, la recourante conteste le courrier du 10 septembre 2024 de l'intimée, dans lequel celle-ci indique s'estimer incompétente pour connaître de la demande de révision formulée le 28 février 2024 et la prie de s'adresser au Tribunal fédéral.

Ce courrier, qui n'est pas désigné comme une décision et ne contient pas les voies de droit, ne constitue pas une décision formelle, de sorte que si la recourante estimait l'intimée compétente pour connaître de sa demande de révision, il lui revenait de s'adresser à cette dernière pour obtenir une décision formelle sujette à opposition conformément à l'art. 35 al. 3 LPGA.

Partant, la prise de position de l’intimée n'ayant fait l'objet d'aucune décision, initiale ou sur opposition, le recours sera déclaré irrecevable et le dossier sera transmis à l'intimée pour qu'elle statue par le biais d'une décision formelle sujette à opposition sur sa compétence pour connaître de la demande de révision du 28 février 2024, et, le cas échéant, procède conformément à l'art. 30 LPGA.

3.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Transmet le dossier à l'intimée pour décision.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Justine BALZLI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le