Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/459/2025 du 17.06.2025 ( CHOMAG ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/10/2025 ATAS/459/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 17 juin 2025 Chambre 10 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
| intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1965, a exercé diverses activités bénévoles, avant de travailler comme animatrice parascolaire, puis patrouilleuse scolaire. En dernier lieu, elle a été employée en tant qu’aide de cuisine dans une crèche du 5 septembre 2023 au 30 avril 2024.
b. L’assurée s’est inscrite auprès de l’OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
(ci-après : OCE) le 10 juillet 2024, indiquant chercher un emploi à 50%. Un
délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur dès le 15 juillet 2024. Le contrat d’objectifs de recherches d’emploi du 7 août 2024 mentionnait qu’elle recherchait une activité en tant qu’animatrice communautaire, aide-cuisinière et casserolière.
c. Selon ses formulaires de recherches personnelles, elle a notamment postulé à des fonctions d’animatrice sociale ou scolaire, de vendeuse de kiosque, d’aide de cuisine, de plongeuse, de nettoyeuse, d’intendante, d’employée de cuisine.
d. Par décision du 13 août 2024, l’assurée a été suspendue dans son droit à l’indemnité pour une durée de deux jours pour avoir remis tardivement ses recherches d’emploi du mois de juillet 2024.
e. Le 13 septembre 2024, l’office régional placement (ci-après : ORP) a demandé à l’assurée d’envoyer son dossier de candidature à la Direction générale de l’enseignement secondaire (ci-après : l’employeur) pour le poste d’« employée de cuisine (auxiliaire) » à 20%, pour une durée limitée jusqu’au 31 juin 2025, avec une entrée en fonction immédiate. Les tâches liées au service de restauration comprenaient la mise en place et la distribution des repas, la participation à la production, à la finition et au conditionnement des repas, la préparation et le rangement des denrées alimentaires, du matériel et de l’équipement, le nettoyage et l’entretien des locaux, du matériel et de l’équipement, le transport et la manutention des marchandises, le lavage de la vaisselle et des ustensiles de cuisine, la réalisation des travaux de circuit du linge, l’accueil, le conseil et le service aux clients, la participation à diverses tâches demandées par la hiérarchie.
f. Le 15 octobre 2025, B______, administratrice auprès de l’employeur, a informé l’OCE que l’assurée convoitait un poste à un taux plus élevé. Suite à leur entretien téléphonique, l’intéressée avait préféré ne pas se rendre à l’entretien et renoncer à ce poste, prévu sur une journée de travail par semaine.
g. Par courrier du 23 octobre 2024, l’OCE a octroyé un délai à l’assurée pour justifier son refus d’un travail convenable.
h. Le 30 octobre 2024, l’assurée a fait valoir qu’elle avait appris, lors de sa conversation avec B______, que les tâches principales consisteraient uniquement en du nettoyage, alors que l’offre initiale mentionnait des activités variées et valorisantes. Compte tenu de cet écart significatif, elle avait décliné le poste proposé. En outre, un poste limité à une journée isolée par semaine ne correspondait pas à ses attentes et à ses besoins en termes de stabilité professionnelle et d’engagement dans un poste valorisant.
B. a. Par décision du 31 octobre 2024, l’OCE a prononcé une suspension de 37 jours dans l’exercice du droit à l’indemnité de l’assurée, au motif qu’elle s’était privée d’un emploi convenable qui lui aurait permis de diminuer le dommage à l’assurance-chômage, commettant ainsi une faute grave. La durée de la sanction avait été augmentée afin de tenir compte de son précédent manquement.
b. Par courriel du 7 novembre 2024, B______ a indiqué à l’OCE que l’assurée l’avait contactée suite à la décision précitée. Elle a ajouté que l’intéressée voulait travailler « sur la semaine et non seulement les lundis ».
c. En date du 21 novembre 2024, l’assurée a formé opposition à l’encontre de la décision de suspension. Elle n’avait pas refusé l’emploi assigné en raison du taux d’activité proposé, mais en raison de la nature du poste et du planning proposé. Un contrat à 20% ne la dérangeait pas si le temps était bien réparti dans la semaine, afin de pouvoir s’investir de manière régulière.
Elle a notamment produit des courriels relatifs à sa candidature à un poste d’employée de cuisine.
d. Le 26 novembre 2024, l’assurée a informé l’OCE qu’elle avait signé un contrat de travail.
Elle a joint ledit contrat signé le 25 novembre 2024 pour une durée limitée du
28 novembre au 20 décembre 2024, à raison de 12 heures par semaines, réparties sur quatre matinées.
e. Par décision sur opposition du 5 décembre 2024, l’OCE a confirmé sa décision du 31 octobre 2024, maintenant que l’assurée ne s’était pas présentée à l’entretien auprès de l’employeur et avait laissé échapper une possibilité d’emploi convenable et concrète d’une durée de plus de six mois, qui proposait une entrée en fonction immédiate et lui aurait permis de limiter le dommage dès le mois de septembre 2024. S’agissant de la durée de la sanction, il a rappelé qu’il s’agissait du second manquement.
C. a. Par acte du 2 janvier 2025, l’assurée a interjeté recours contre cette décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), concluant à l’annulation de la sanction en vertu de sa bonne foi. Elle a sollicité l’audition de B______, laquelle l’avait contactée le 14 octobre 2024 et lui avait indiqué, lors d’une conversation téléphonique, que le travail se déroulerait uniquement les lundis, pour une durée de 8 heures consécutives, que les tâches seraient limitées au nettoyage et que le poste serait temporaire. Elle ne lui avait pas proposé d’entretien, mais lui avait demandé de prendre une décision immédiate pour ne pas faire perdre de temps à l’employeur. Étant donné que certaines informations fournies verbalement étaient imprécises et en contradiction avec celles détaillées dans le document officiel de l’assignation, elle avait été dissuadée d’y donner suite. Ces informations, décourageantes, avaient directement influencé sa volonté, alors que l’entretien téléphonique aurait dû avoir pour but de susciter son intérêt et de convenir d’un rendez-vous. Sous pression, elle n’avait pas eu l’occasion d’en discuter avec son conseiller. Elle ne comprenait pas non plus pour quelle raison sa première sanction, qui relevait d’un manquement administratif, était corrélée à la seconde, étant relevé que les deux incidents étaient distincts par leur nature et leurs circonstances. La décision litigieuse ne tenait pas compte du fait que le poste d’une durée de 8 heures consécutives était limité au lundi et aux tâches de nettoyage. Les emplois de plongeuse et d’employée de maison auxquels elle avait postulé étaient directement liés à son domaine professionnel et ne pouvaient pas être comparés à celui proposé, sans polyvalence ni continuité. En outre, elle n’avait été contactée que le
14 octobre 2024, et non pas en septembre comme mentionné dans la décision du
5 décembre 2024. Elle recherchait un emploi stable, avec des horaires réguliers et adaptés, étant précisé que son organisme ne disposait plus de la même endurance qu’auparavant et qu’elle ne pouvait pas travailler durant 8 heures de suite. Elle aurait prochainement un rendez-vous pour un poste d’employée de cuisine. Elle contestait ainsi toute faute ou négligence grave, reprochait à B______ de lui avoir communiqué des informations imprécises, peu claires et contradictoires ne correspondant pas à la description du poste, et d’avoir exigé une réponse immédiate, ce qui violait le principe de la bonne foi. Enfin, elle s’est étonnée du caractère rétroactif de la sanction au 17 septembre 2024, alors que la proposition d’emploi datait du 14 octobre 2024. Elle a également sollicité la remise.
Elle a produit le contrat et un certificat de travail relatifs à son engagement du
28 novembre au 20 décembre 2024.
b. Dans sa réponse du 3 février 2025, l’intimé a conclu au rejet du recours. Les éléments avancés par la recourante ne pouvaient être retenus pour considérer que le poste proposé n’était pas convenable. L’intéressée avait refusé l’emploi assigné pour des raisons de convenance personnelle, ce qu’elle ne contestait au demeurant pas. S’agissant de la durée de la suspension, la sanction de 34 jours tenait compte du minimum du barème pour le manquement reproché, du fait que le poste assigné était un contrat de durée déterminée jusqu’au 30 juin 2025, et que trois jours avaient été ajoutés en raison de la première pénalité. Le dernier délai pour présenter la candidature à l’employeur étant le 16 septembre 2024, le lendemain avait été retenu comme point de départ pour la suspension du droit à l’indemnité. Enfin, la remise devrait être sollicitée ultérieurement, après l’entrée en force de la décision.
c. Par réplique du 24 février 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions. Elle n’avait pas décliné l’emploi pour des raisons de convenance personnelle, mais car l’offre publiée, qui laissait entendre une implication polyvalente, ne correspondait pas aux tâches réelles limitées au nettoyage, ce qui l’avait profondément déçue. Elle reconnaissait son erreur, mais il était essentiel de tenir compte du caractère trompeur de l’annonce. Elle avait sollicité l’assignation pour le poste temporaire occupé entre novembre et décembre 2024, qui lui avait permis d’obtenir un contrat à durée indéterminée sur appel en janvier 2025, et récemment un poste fixe à 22%. Elle sollicitait que la chambre de céans tienne compte de ce nouvel élément.
Elle a transmis des échanges de courriels avec son conseiller en placement, dans lesquels elle a demandé à postuler à plusieurs emplois, ainsi que sa lettre d’engagement à compter du 6 janvier 2025 et son contrat de travail débutant le
1er mars 2025.
d. Le 21 mars 2025, l’intimé a indiqué à la chambre de céans ne pas avoir de remarques à formuler.
e. Cette écriture a été transmise à la recourante le 25 mars 2025.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982
(LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA).
2. Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit de la recourante à l’indemnité de chômage, durant 37 jours, en raison du fait qu’elle a refusé un emploi convenable.
3. Conformément à l’art. 8 al. 1 LACI, l’assuré a droit à l’indemnité de chômage : s’il est sans emploi ou partiellement sans emploi (art. 10 ; let. a) ; s’il a subi une perte de travail à prendre en considération (art. 11 ; let. b) ; s’il est domicilié en Suisse (art. 12 ; let. c) ; s’il a achevé sa scolarité obligatoire, qu’il n’a pas encore atteint l’âge donnant droit à une rente AVS et ne touche pas de rente de vieillesse de l’AVS (let. d, dans sa teneur en vigueur en 2023) ; s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré (art. 13 et 14 ; let. e) ; s’il est apte au placement (art. 15 ; let. f), et s’il satisfait aux exigences du contrôle
(art. 17 ; let. g).
Selon l’art. 17 al. 1 LACI, l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis (al. 1). L’assuré est tenu d’accepter tout travail convenable qui lui est proposé (al. 3, 1ère phrase).
À teneur de l’art. 16 LACI, en règle générale, l’assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage (al. 1). N’est notamment pas réputé convenable et, par conséquent, est exclu de l’obligation d’être accepté, tout travail qui procure à l’assuré une rémunération qui est inférieure à 70% du gain assuré, sauf si l’assuré touche des indemnités compensatoires conformément à l’art. 24 (gain intermédiaire) ; l’office régional de placement peut exceptionnellement, avec l’approbation de la commission tripartite, déclarer convenable un travail dont la rémunération est inférieure à 70% du gain assuré (al. 2 let. i).
3.1 Les conditions de l’art. 8 al. 1 LACI sont cumulatives (ATF 124 V 215
consid. 2). Elles sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), ainsi que - dans les limites d’admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 et les références citées) - par les instructions édictées par le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) en sa qualité d’autorité de surveillance de l’assurance-chômage chargée d’assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l’indemnité de chômage (ci-après : Bulletin LACI IC).
La condition de satisfaire aux exigences du contrôle, posée par l’art. 8 al. 1
let. g LACI, renvoie aux devoirs de l’assuré et prescriptions de contrôle prévus par l’art. 17 LACI. Les al. 1 à 3 de cette disposition-ci imposent aux chômeurs des devoirs matériels, qui concernent la recherche et l’acceptation d’un emploi, la participation aux mesures de marché du travail et aux séances et entretiens obligatoires, ainsi que des devoirs formels, qui ont pour objet l’inscription au chômage et la revendication régulière des prestations au moyen de formules officielles (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014 [ci-après : Commentaire], n. 1 ad art. 17 LACI).
3.2 En règle générale, l’assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage à l’assurance (art. 16 al. 1 LACI). Si la liberté de choix de l’activité professionnelle est garantie par l’art. 27 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), elle est toutefois restreinte en situation individuelle de chômage.
L’art. 16 al. 2 LACI vise essentiellement à permettre aux assurés de refuser les postes qui exigent des aptitudes physiques, mentales et professionnelles supérieures à celles qu'ils possèdent. Cette disposition ne protège pas les assurés qui refuseraient des emplois qui exigent moins de qualifications que celles dont ils peuvent se prévaloir. Les emplois ne peuvent pas être sélectionnés en fonction du standing désiré par l'assuré (Boris RUBIN, Commentaire, n. 25 ad art. 16 et les références). On peut par exemple exiger d’une ex-tenancière de restaurant au bénéfice d’un certificat de cafetier-restaurateur qu’elle travaille comme auxiliaire de gastronomie et effectue une part des tâches de nettoyage (arrêt du Tribunal fédéral C 407/00 du 16 octobre 2001 consid. 3a).
Les assurés ne peuvent espérer réaliser toutes leurs aspirations professionnelles. Ils doivent accepter immédiatement tout emploi convenable, faute de quoi leur droit à l’indemnité est suspendu (Boris RUBIN, Commentaire, n. 2 ad art. 16 et les références). Pour être réputé convenable, un travail doit tenir « raisonnablement » compte des aptitudes des assurés. Ce critère fait référence au principe de proportionnalité. On ne peut exiger d’un assuré qu’il accepte, dans les premières semaines de chômage, un exploit qui ne tient pas compte de ses aptitudes et de son expérience. Par contre, dès que la durée de chômage se prolonge, sa flexibilité devra augmenter (Boris RUBIN, Commentaire n. 26
ad art. 16 et les références).
À noter encore dans ce contexte que le simple fait que la proposition d’emploi ne corresponde pas aux qualifications ou aux vœux professionnels d'un assuré n'autorise pas encore celui-ci à refuser ou à faire échouer cette occasion de
travail ; renoncer à un tel poste de transition, que l'assuré pourrait changer en temps opportun contre un autre convenant mieux, n'est pas un motif propre à justifier la suppression d'une sanction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_950/2008 du
11 mai 2009 consid. 4.1 et la référence citée).
Le caractère temporaire d'un emploi n'empêche pas qu'il soit considéré comme convenable (arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 9 juillet 2002 C 311/01 consid. 4).
Seuls les emplois non convenables au sens de l’art. 16 al. 2 LACI peuvent être refusés. Le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci refuse un travail convenable (art. 30 al. 1 let. d LACI). Cette règle, notoire, s’applique même lorsque l’assuré n’a pas encore pu y être rendu attentif par l’autorité (Boris RUBIN, La suspension du droit à l’indemnité de chômage, in DTA 2017 p. 11).
Tant qu’un assuré n’est pas certain d’obtenir un autre emploi – cette assurance suppose que l’assuré en question soit au bénéfice d’un précontrat ou d’une promesse d’embauche –, il a l’obligation d’accepter immédiatement l’emploi qui se présente. Ce n’est que si l’engagement est imminent qu’un assuré peut refuser un emploi libre immédiatement. L’engagement doit cependant avoir lieu dans un délai maximal d’un mois. Cette période maximale correspond à celle durant laquelle un assuré est libéré de son obligation de rechercher un travail dans les situations de conclusion d’un contrat avec entrée en service différée. Un chômeur ne pourra donc pas s’appuyer sur la perspective d’un engagement prochain pour refuser un autre emploi à repourvoir de suite lorsque l’engagement en question ne sera effectif que plusieurs mois après (Boris RUBIN, Commentaire, n. 64
ad art. 30 et les références citées ; ATAS/208/2023 du 21 mars 2023 consid. 4.4).
4. Conformément à l’art. 30 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu entre autres lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (al. 1 let. c), ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (al. 1 let. d). La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, 60 jours, et dans le cas de l’al. 1 let. g, 25 jours (al. 3, 3e phrase).
L’art. 45 OACI prévoit que le délai de suspension du droit à l’indemnité prend effet à partir du premier jour qui suit l’acte ou la négligence qui fait l’objet de la décision (al. 1 let. b). La suspension dure de 31 à 60 jours en cas de faute grave (al. 3 let. c). Il y a notamment faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (al. 5).
4.1 Selon la jurisprudence, la suspension du droit à l’indemnité est destinée à poser une limite à l’obligation de l’assurance-chômage d’allouer des prestations pour des dommages que l’assuré aurait pu éviter ou réduire. En tant que sanction administrative, elle a pour but de faire répondre l’assuré, d’une manière appropriée, au préjudice causé à l’assurance-chômage par son comportement fautif (ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; 125 V 197 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_316/2007 du 6 avril 2008 consid. 2.1.2), sans que soit requise la survenance d’un dommage effectif (arrêts du Tribunal fédéral C 30/06 du 8 janvier 2007 consid. 4.2 et C 152/01 du 21 février 2002 consid. 4). La suspension du droit à l’indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d’exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in
Ulrich MEYER, Soziale Sicherheit – Sécurité sociale, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, vol. XIV, 2016, p. 2427 ss, n. 831).
Lorsqu’un assuré peut se prévaloir d’un motif valable, il n’y a pas forcément faute grave, même en cas de refus d’un emploi assigné et réputé convenable. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s’agir, dans le cas concret, d’un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2011 du 9 mars 2012
consid. 4.2). Constituent notamment de telles circonstances le salaire offert ou l’horaire de travail (arrêt du Tribunal fédéral C 311/01du 9 juillet 2002 consid. 5).
L’autorité doit tenir compte de circonstances telles que la situation personnelle (en particulier familiale), l’état de santé au moment où la faute a été commise, le milieu social, le niveau de formation, d’éventuels obstacles culturels et linguistiques (dans une certaine mesure). Cependant, certains facteurs ne jouent en principe aucun rôle dans l’évaluation de la gravité de la faute. Il en va ainsi, entre autres, d’éventuels problèmes financiers (arrêts du Tribunal fédéral C 21/05 du
26 septembre 2005 ; C 224/02 du 16 avril 2003 ; Boris RUBIN, Commentaire
n. 101 et 109 ad art. 30).
Si les circonstances particulières le justifient, il est donc possible, exceptionnellement, de fixer un nombre de jours de suspension inférieur à 31 jours. Toutefois, les motifs de s'écarter de la faute grave doivent être admis restrictivement (Boris RUBIN, Commentaire, n. 117 ad art. 30 LACI et les références).
Contrairement au pouvoir d’examen du Tribunal fédéral, celui de l’autorité judiciaire de première instance n’est, concernant notamment la quotité de la suspension du droit à l’indemnité de chômage dans un cas concret, pas limité à la violation du droit (y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation), mais s’étend également à l’opportunité de la décision administrative
(« Angemessenheitskontrolle »). En ce qui concerne l’opportunité de la décision en cause, l’examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité, dans un cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l’administration. Il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 précité consid. 4.3).
4.2 En tant qu’autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l’intention des organes d’exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d’exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d’apprécier le comportement de l’assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l’intéressé au regard de ses devoirs généraux d’assuré qui fait valoir son droit à des prestations (arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 5 ; 8C_425/2014 du
12 août 2014 consid. 5.1). Elles ne lient ni les administrés, ni le juge, ni même l’administration qui pourront, le cas échéant, aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (arrêt du Tribunal fédéral 8C_708/2019 consid. 4.1).
Le barème du SECO prévoit, en cas de premier refus d’un emploi convenable ou d’un emploi en gain intermédiaire à durée indéterminée assigné à l’assuré ou qu’il a trouvé lui-même, une suspension entre 31 et 45 jours pour faute grave (Bulletin LACI IC/D79, 2.B-1).
Pour la détermination de la faute individuelle et de la quotité de la suspension dans le domaine de la faute grave il faut partir, selon le Tribunal fédéral, du milieu de la fourchette de 31 à 60 jours (art. 45 al. 3 let. c OACI), soit 45 jours, et tenir compte des facteurs aggravants, atténuants et du principe de proportionnalité (ATF 123 V 153). Ce principe doit également s’appliquer en cas de faute légère et moyenne (art. 45 al. 3 let. a et b OACI ; Bulletin LACI IC/D77).
5. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 360 consid. 5b ;
125 V 195 consid. 2). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).
De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1).
6. En l’espèce, l’intimé a retenu que la recourante avait commis une faute grave en laissant échapper une concrète opportunité d’un emploi convenable et a prononcé une suspension de 37 jours dans son droit à l’indemnité, compte tenu du fait qu’il s’agissait de son second manquement.
6.1 La recourante fait valoir que le travail proposé consistait uniquement en des tâches de nettoyage, contrairement à ce qui était mentionné dans l’annonce, soit des activités beaucoup moins variées et valorisantes que la fonction d’aide de cuisine. Elle considère également que le taux de 20% réparti sur une seule journée requérait trop d’endurance.
La chambre de céans rappelle que la recourante, qui n’a exercé que des activités bénévoles ou non qualifiées depuis 1997 selon son curriculum vitae, était inscrite au chômage depuis deux mois lorsque cet emploi lui a été assigné. Elle devait donc faire preuve de flexibilité. En outre, l’emploi en question tenait raisonnablement compte des aptitudes de l’intéressée, même s’il ne correspondait pas en tous points au cahier des charges joint à l’assignation. D’ailleurs, l’intéressée avait déclaré rechercher une activité en tant qu’animatrice communautaire et aide-cuisinière, mais également en qualité de casserolière, et ses recherches d’emploi comprenaient des activités de plongeuse, de nettoyeuse, ou encore d’intendante. Ainsi, que le travail proposé consiste essentiellement, voire exclusivement, en des tâches de nettoyage, alors que le descriptif de l’emploi mentionnait d’autres activités en sus du nettoyage et du lavage de la vaisselle, est sans pertinence. De même, le fait que la recourante puisse considérer que l'emploi assigné n'était pas à la hauteur de ses aptitudes et ne correspondait pas à ses envies ou ambitions ne permet pas de nier son caractère convenable. L’intéressée avait donc l’obligation d’accepter immédiatement l’emploi qui se présentait à elle.
Concernant l’horaire de travail, la recourante expose que le taux de 20% proposé lui convenait, mais qu’elle souhaitait qu’il soit réparti sur plusieurs jours, et non pas sur une seule journée. Cette préférence personnelle ne constitue en aucun cas un motif valable lui permettant de refuser l’emploi convenable.
Il est encore observé que l’intéressée n’avait pas d’autres perspectives d’emploi lorsqu’elle a décliné l’assignation litigieuse et que son engagement ultérieur n’est pas déterminant pour se prononcer sur la sanction contestée.
La recourante ne pouvait donc pas refuser l’emploi d’« employée de cuisine (auxiliaire) » assigné, sans violer son obligation de réduire le dommage, conformément à la jurisprudence.
Dans ces circonstances, l’intimé était fondé à retenir que la recourante avait refusé un contrat de travail qui lui aurait permis de réduire le dommage de
l’assurance-chômage et donc à suspendre son droit à l’indemnité.
6.2 La recourante reproche à l’intimé de lui avoir infligé une sanction excessive et d’avoir tenu compte du précédent manquement, qui relevait d’une toute autre situation. Elle souligne les efforts fournis pour retrouver un emploi.
La chambre de céans constate que la sanction prononcée est conforme au barème du SECO, étant rappelé que l’emploi auquel elle a renoncé était convenable, de sorte que sa faute est réputée grave.
Si la recourante a activement recherché un travail, comme l’attestent ses formulaires de recherches personnelles, il ressort également du dossier que l’intimé lui avait assigné d’autres emplois. Ces éléments démontrent les difficultés de la recourante à trouver une activité professionnelle non qualifiée, ce qui aurait précisément dû l’inciter à accepter l’offre proposée. D’ailleurs, la recourante n’a retrouvé un emploi à durée indéterminée qu’à partir du 1er mars 2025, selon le contrat de travail produit dans le cadre de la présente procédure.
En outre, la proposition déclinée portait sur un poste à 20% sur une seule journée, ce qui avait l’avantage de lui offrir suffisamment de disponibilité et de flexibilité pour trouver un autre emploi à temps partiel, jusqu’au taux de 50% convoité.
Renoncer à un tel poste de transition, que l’intéressée aurait pu changer en temps opportun contre un autre lui convenant mieux, justifie dès lors le prononcé d’une sanction pour faute grave, dont le minimum est de 31 jours.
Une sanction de 37 jours apparaît proportionnée et adéquate à la faute, pour les motifs évoqués ci-dessus et compte tenu du fait qu’il s’agissait du deuxième manquement de la recourante. À cet égard, il sera précisé que l’intimé était fondé à tenir compte de la précédente sanction, puisque toutes les suspensions subies au cours des deux dernières années sont prises en considération dans le calcul de la prolongation.
Eu égard à tout ce qui précède, la chambre de céans considère que la décision litigieuse respecte le principe de la proportionnalité.
6.3 Enfin, prononcer la suspension à compter du 17 septembre 2024 n’apparait pas critiquable en soi, dès lors que le délai pour l’assignation était fixé au même jour et que l’emploi était immédiatement à pourvoir.
Pour le surplus, la recourante a demandé la remise, qui s’avère effectivement prématurée. En effet, la restitution et la remise de l'obligation de restituer et son étendue font l'objet de deux procédures distinctes (arrêts du Tribunal fédéral P 63/06 du 14 mars 2003 consid. 3 et C 264/05 du 25 janvier 2006 consid. 2.1). La demande de remise devra donc être traitée par l’intimé après l’entrée en force du présent arrêt. La cause lui sera donc transmise pour raison de compétence.
7. Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté et transmis à l’intimé dans le sens des considérants.
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Le transmet à l’intimé dans le sens des considérants.
4. Dit que la procédure est gratuite.
5. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le