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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2074/2024

ATAS/407/2025 du 30.05.2025 ( LAA ) , ADMIS

En fait
En droit

<rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2074/2024 ATAS/407/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 mai 2025

Chambre 3

 

En la cause

A______

représentée par Me Christian BRUCHEZ, avocat

 

recourante

 

contre

HELSANA ACCIDENTS SA

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. B______ (ci-après : l'assuré) était employé en qualité de physiothérapeute par A______ (ci-après : l'employeuse) et était à ce titre assuré contre le risque d'accidents professionnels et non professionnels auprès de HELSANA ACCIDENTS SA (ci-après : l'assurance).

b. Le 17 septembre 2023, l'assuré a subi un traumatisme à son genou gauche lors d'une activité sportive.

c. Il s'est trouvé dans l’incapacité totale de travailler du 18 septembre 2023 au 1er novembre 2023.

B. a. Par déclaration du 25 septembre 2023, l'employeuse a annoncé le sinistre à l'assurance en ces termes: « C'est survenu suite à des sauts et un mouvement de torsions évoquant une lésion méniscale. Remarque : J'ai déjà déclaré cette accident lundi 18 septembre, mais suite à mon appele avec vous c'était pas bien recu » (sic). La blessure annoncée était une torsion/foulure du genou gauche.

b. Un rapport d'imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) du 25 septembre 2023 rédigé par le docteur C______, spécialiste en radiologie, a conclu à une déchirure complexe de la corne postérieure et du segment moyen du ménisque médial atteignant la surface inférieure et le bord libre, avec une première languette méniscale inférieure libérée sous le segment moyen dans le récessus ménisco-tibial interne, et une seconde languette repliée contre le condyle fémoral au-dessus du secteur paramédian de la corne postérieure et de la racine tibiale. Étaient également mentionnés : une discrète infiltration œdémateuse bordant le ligament collatéral médial, sans déchirure, probablement secondaire de la souffrance méniscale sous-jacente et à des séquelles de déchirure partielle du faisceau postéro-latéral du ligament croisé antérieur d'allure ancienne, ainsi qu’un discret épanchement articulaire.

c. L'assuré a bénéficié d'une infiltration du genou gauche le 5 octobre 2023.

d. Le même jour, répondant à un questionnaire envoyé par l'assurance, l'assuré a exposé que le sinistre était arrivé dans le contexte d'une séance de sport en extérieur avec programme classique de course à pied, tractions, squats, fentes, pompes et sprints avec ses enfants. Voulant les rejoindre en haut du portique de traction, fatigué des bras, il avait grimpé à l'aide des jambes sur les poteaux. La première fois, cela s'était bien passé, la deuxième fois, son pied avait glissé ; il avait voulu se rattraper en poussant fort et en s'aidant de ses bras sur la barre. Cela avait entraîné une « rotation thorax = torsion valgus + RE + compression genou ». Il avait immédiatement ressenti une douleur vive du genou gauche en interne, telle un écrasement, ainsi qu'une raideur, et son genou avait gonflé. Il avait pris des antalgiques, suivait des séances de physiothérapie deux fois par semaine et avait reçu une infiltration. En cas d'échec du traitement conservateur, une chirurgie n'était pas exclue.

e. Le 16 octobre 2023, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin-conseil de l'assurance, après avoir reçu de cette dernière l'information que le sinistre était survenu suite à des sauts et à un mouvement de torsion évoquant une lésion méniscale, a conclu à une déchirure complexe du membre inférieur sur ancienne lésion partielle du faisceau postérieur du ligament croisé antérieur. Si la notion d'accident était admise, il serait difficile de prouver l'absence totale d'aggravation. Si l’on admettait une lésion assimilée, la lésion méniscale devait être admise, mais ne devrait pas être prise en charge par l'assurance-accidents, car manifestement dégénérative et préexistante.

f. Par décision du 19 octobre 2023, l'assurance a nié à l'assuré le droit à ses prestations, tout en annonçant renoncer à réclamer celles versées à tort. Les conditions requises pour reconnaître un accident n'étaient pas remplies, le facteur extérieur extraordinaire faisant défaut. Par ailleurs, la lésion méniscale diagnostiquée ne relevait pas de l’assurance-accidents, car dégénérative sur un état préexistant.

g. Dans un rapport du 12 octobre 2023 (reçu par l’assurance après que celle-ci a rendu sa décision), la docteure E______, médecin interne à l'Hôpital de la Tour, a indiqué avoir examiné l'assuré le 17 septembre 2023 et avoir constaté une douleur à la palpation médiale de l'articulation, une hyperflexion et un test de Grinding positif. Sous la rubrique « indications du patient », elle a mentionné une mauvaise réception lors d'un entraînement sportif.

h. Le 12 novembre 2023, l'assuré s’est opposé à la décision du 19 octobre 2023, en soulignant qu'un événement inattendu s'était bel et bien produit le 17 septembre 2023, soit une glissade occasionnant une torsion en charge de son genou gauche. Il s'agissait d'un mécanisme lésionnel en valgus et rotation externe du genou, en charge et à haute vélocité, l'un des plus fréquents lors des blessures sans contact du genou. Son ligament croisé n’avait pu être préservé que parce qu’il n'était pas en pleine charge sur sa jambe. L'événement du 17 septembre 2023 était donc bel et bien un accident que l'assurance devait prendre en charge. Concernant l'état préexistant de son genou, celui-ci n'était pas plus abîmé ou fragile que la moyenne compte tenu de son âge et il avait pu pratiquer plusieurs sports en compétition sans aucun symptôme. Plusieurs études montraient par ailleurs que des lésions identifiables à l'imagerie étaient très fréquentes et complètement asymptomatiques sur de nombreuses régions du corps, et non prédictives d'une pathologie à venir.

À l'appui de sa position, l'assuré a produit un rapport du 10 novembre 2023 du docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, invitant l’assurance à reconsidérer sa position. Le médecin y expliquait que, le 17 septembre 2023, l'assuré avait subi un traumatisme en valgus et rotation externe en charge de son genou gauche sur un mouvement brusque et soudain du membre inférieur gauche. Son genou avait présenté un épanchement intra-articulaire qui avait été constaté à l’examen clinique du même jour. Lors de cet examen, l'assuré présentait aussi une douleur à la palpation de l'interligne fémoro-tibial interne et un test de Grinding positif, en faveur d'une lésion du ménisque interne. Le critère d'imputabilité entre le mécanisme décrit et la lésion vue à l'IRM était indéniable, et l'examen clinique parlait également en faveur d'une lésion récente, vu la présence d'un épanchement intra-articulaire. Il y avait donc concordance entre un mécanisme traumatique adéquat ayant entraîné une impotence fonctionnelle directe, une certitude diagnostique et des signes cliniques d'une lésion méniscale récente, qui parlait en faveur d'une lésion traumatique. La présence d'une lésion complexe de la corne postérieure du ménisque interne pouvait effectivement être attribuée à une origine dégénérative, mais une telle lésion n'excluait pas la possibilité d'une lésion d'origine traumatique ajoutée si le mécanisme, l'examen clinique et la concordance de l'enchaînement anatomo-clinique correspondaient – comme c’était le cas ici – et que le patient n'avait aucune gêne avant le traumatisme ou d'état favorisant, tel que le surpoids – ce qui n'était pas le cas en l'occurrence.

i. Le 27 novembre 2023, le Dr D______ a indiqué que le problème du cas d'espèce était en lien avec l'action vulnérante. Si l'on admettait la version du médecin, la survenue d'une déchirure complémentaire de la lésion complexe était plausible, en raison du valgus, de la rotation externe et du genou en charge. Cependant, si l'on se référait à la déclaration d'accident, les troubles étaient survenus suite à des sauts. Si l'on s’en rapportait au questionnaire accident du 5 octobre 2023, l'assuré avait grimpé à l'aide de ses jambes en haut d'un portique sur un poteau et son pied avait glissé. Cela ne correspondait pas à un mouvement de valgus, en rotation avec charge, de sorte que le raisonnement du médecin devenait caduc. L'événement avait pu, de manière plausible, révéler un problème méniscal par un épanchement, mais il n'était pas prouvé qu'il l'ait aggravé de manière déterminante. Il y avait par ailleurs une ancienne lésion partielle du ligament croisé antérieur, entraînant une surcharge du membre inférieur. Finalement, le médecin-conseil s'interrogeait sur l'option thérapeutique suivie et le fait d’avoir opté pour un traitement conservateur si l'événement avait vraiment été significatif pour léser le membre inférieur.

j. Par pli du 1er décembre 2023, l'assuré a noté qu'il existait une mésentente sur le mouvement à l'origine de sa blessure. S'il avait bien effectué quelques sauts lors de son entraînement et même suite à la première escalade du portique, il ne s'était cependant ni blessé, ni n'avait ressenti la moindre douleur. Son employeur n'était pas francophone de naissance, ce qui pouvait expliquer le malentendu. L'événement déterminant au cours duquel il s'était blessé était la deuxième tentative d'escalade du portique, lors de laquelle son pied avait glissé, ensuite de quoi, de manière réflexe, il l'avait appuyé de manière forte et soudaine sur le poteau du portique. Cette glissade l'avait déséquilibré et, se tenant à la barre, il se trouvait en rotation droite du haut du corps entraînant son genou en valgus/rotation externe en charge de par la poussée de son pied sur le poteau. Cette glissade du pied expliquait pourquoi sa première escalade s'était bien passée, contrairement à la seconde, alors que la même technique avait été employée. S'agissant de la lésion partielle du ligament croisé antérieur entraînant une surcharge du ménisque interne, l'IRM réalisée quelques jours après l'accident avait fait état de manière claire de l'aspect normal des ligaments croisés. L'infiltration œdémateuse concernait le ligament collatéral médial, ce qui écartait de fait l'hypothèse de la surcharge méniscale liée à une blessure ancienne. Sa constitution légèrement hyperlaxe avait par ailleurs peut-être permis la conservation de ses ligaments malgré ce traumatisme. Concernant enfin le choix du traitement conservateur, il a fait remarquer qu’il s'agissait-là des recommandations ressortant des bonnes pratiques internationales dans le cadre de lésions méniscales stables, n'impliquant pas de blocage, comme dans son cas. L'autre option aurait été une ablation de tout ou partie du ménisque, qui l'aurait exposé à un risque d'arthrose précoce. L'évolution de son état plaidait finalement en faveur du traitement conservateur suivi, car il ne ressentait plus de gêne au quotidien dans sa pratique professionnelle ou sportive. Le point de vue du Dr D______, qui procédait d'une erreur de retranscription du mécanisme lésionnel, d'une erreur de lecture de l'IRM et d'une méconnaissance des recommandations thérapeutiques, était selon lui infondé.

L'assuré a joint à son pli une photographie de reconstitution de sa posture et du lieu du sinistre avec des explications de ses mouvements.

k. Le 18 décembre 2023, le Dr D______ a émis l’avis que l'action vulnérante n'était pas plausible pour entraîner une lésion complexe du ménisque interne. Le problème restait la notion d'accident, qui était une question juridique. Soit l'assurance acceptait la dernière version et elle ne pourrait alors pas démontrer qu'il n'y avait pas eu une aggravation mineure et transitoire. Si elle optait en revanche pour une lésion assimilée, il maintenait que le problème était manifestement préexistant.

l. Par décision du 2 avril 2024, l'assurance a rejeté l’opposition.

L'existence d'un facteur extérieur était en principe admise en cas de mouvement non coordonné, lorsque le déroulement habituel et normal d'un mouvement corporel était interrompu par un empêchement non programmé, lié à l'environnement extérieur, tel le fait de glisser, de trébucher, de se heurter à un objet ou d'éviter une chute. Pour les lésions dues à l'effort, notamment soulèvements et déplacements de charges, il fallait examiner de cas en cas si l'effort devait être considéré comme extraordinaire en tenant compte de la constitution physique et des habitudes de l'intéressé. Les explications d'un assuré sur le déroulement d'un fait allégué étaient au bénéfice d'une présomption de vraisemblance et, en cas de déclarations successives contradictoires, il fallait privilégier la première déclaration, correspondant à celle que l'assuré avait faite alors qu'il n'était pas encore conscient de ses conséquences juridiques.

En l'occurrence, l'assuré avait en premier lieu expliqué que le sinistre était survenu suite à des sauts et un mouvement de torsion évoquant une lésion méniscale. Il manquait à cette description une cause extérieure, raison pour laquelle l'événement du 17 septembre 2023 ne pouvait être qualifié d'accident. S'agissant de la notion de lésion assimilée, son médecin-consultant avait émis un avis argumenté en pleine connaissance du dossier médical et considéré que l'assuré avait souffert d'une lésion complexe du ménisque interne sur une ancienne lésion partielle du faisceau postérieur du ligament croisé antérieur, de sorte que la lésion était due de manière prépondérante à l'usure ou à la maladie.

Ladite décision a été adressée à l’assuré par pli recommandé, rue G______ 1______, à Gex (France).

m. Le 21 mai 2024, ayant contacté l'assurance afin d'être informé de l'avancée de son dossier, l'assuré l'a informée qu'il n'avait jamais reçu la décision du 2 avril 2024.

n. En date du 21 mai 2024, l'assurance lui a renvoyé, par pli recommandé, la décision sur opposition du 2 avril 2024 (rue G______ 2______ [et non 1______ comme précédemment], Gex, France).

o. Le 18 juin 2024, l'employeuse de l'assuré a sollicité de l'assurance la notification de la décision sur opposition, avec indication des voies de recours.

p. Par pli du 20 juin 2024, distribué le lendemain, l'assurance a communiqué à l'employeuse la décision sur opposition – dans laquelle tous les éléments médicaux avaient été caviardés – et s'est enquise de la date à laquelle l'assuré l’avait informée de l’existence de la décision, ainsi que des conditions de l'assurance perte de gain maladie.

C. a. Par acte du 20 juin 2024 déposé auprès de la Cour de céans, l'employeuse a formé recours contre la décision sur opposition dont elle a indiqué n’avoir reçu qu’une copie partielle par son ancien employé. Elle sollicite un délai de 30 jours dès la notification de la décision complète pour compléter son recours. Sur le fond, elle conclut à l'annulation de la décision et à ce que le droit aux prestations de l'assurance-accidents soit reconnu à son employé.

b. Le 9 juillet 2024, l'intimée a communiqué son dossier à la Cour de céans.

c. Par écriture du 31 juillet 2024, la recourante, invitée à expliquer les raisons pour lesquelles elle n’avait interjeté recours qu’en date du 20 juin 2024, a allégué que la décision sur opposition ne lui avait pas été notifiée et qu’elle n’en avait été informée que par l'intermédiaire de son ancien employé. Elle avait ensuite reçu de l'intimée une copie de la décision litigieuse, mais dans laquelle tous les éléments médicaux avaient été caviardés, de sorte qu'il lui avait été impossible de se déterminer utilement. Elle a réitéré sa demande visant à compléter son recours après consultation du dossier.

d. Le 2 septembre 2024, dans le délai imparti pour compléter son recours, la recourante a conclu, préalablement, à l'audition de l'assuré et du Dr F______, principalement, sous suite de dépens, à ce que l'intimée soit condamnée à prendre en charge l'accident du 17 septembre 2023 et à verser des indemnités journalières du 20 septembre au 1er novembre 2023.

La recourante argue que son recours a été interjeté dans les délais légaux.

Elle affirme sa qualité pour recourir, rappelant qu’en qualité d'employeuse, à défaut de prestations de l'assureur-accidents, elle serait temporairement tenue de verser le salaire pendant la période d'incapacité de travail.

Elle considère que, dans la mesure où l'assuré s’est valablement opposé à la décision du 19 octobre 2023, elle peut interjeter recours, même si elle n'a pas participé à la procédure d'opposition.

Sur le fond, elle fait valoir qu’il y a lieu d’admettre l’existence d’un accident et que, si, par impossible, la Cour en jugeait différemment, les prestations seraient aussi dues en application de la disposition relative aux lésions assimilées, l'intimée n'ayant pas prouvé que la lésion du ménisque serait due de manière prépondérante à l'usure ou à la maladie. Son médecin-conseil s'est borné à émettre, sans même examiner l'assuré, des avis médicaux extrêmement succincts, relevant plus de considérations juridiques et dénotant une partialité certaine en faveur de l'intimée.

e. Invitée à se déterminer, l’intimée, dans sa réponse du 24 octobre 2024, a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

L'assuré semblait ne plus être domicilié au numéro 1______ de la rue G______, mais au numéro 2______. Ces deux numéros se trouvaient cependant dans le même bâtiment, ce qui impliquait que la poste avait remis l'avis postal pour retirer le recommandé à la bonne adresse. L'assuré avait au surplus bien reçu le courrier qu'elle lui avait envoyé le 27 novembre 2023 à la première adresse, puisqu'il y avait répondu. La décision sur opposition était par conséquent réputée notifiée à l'assuré le 16 avril 2024 et le renvoi du 21 mai 2024 ne faisait pas courir un nouveau délai de recours. Cette décision était par conséquent entrée en force de chose décidée à l'égard de l'assuré.

Si les dires de la recourante quant à son information au sujet de la décision sur opposition étaient vérifiés, le recours du 20 juin 2024 serait recevable et on ne pourrait lui reprocher de ne pas l'avoir motivé, à défaut d'avoir connaissance du contenu de la décision sur opposition. L’intimée fait cependant remarquer qu’il serait étonnant que l'assuré ait informé son employeuse de l'existence de la décision sur opposition, sans la lui transmettre. Or, si la recourante en a reçu une copie, le recours du 20 juin 2024, insuffisamment motivé, doit être déclaré irrecevable.

Sur le fond, les explications quant aux circonstances de l'accident sont contradictoires et ne se complètent pas. La première déclaration fait en effet référence à des sauts, tandis que les explications ultérieures font état de mouvements avec les bras. L’intimée se réfère à l’avis du Dr D______, qui établit selon elle que la lésion méniscale est manifestement dégénérative.

f. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 L’art. 59 LPGA prévoit que quiconque est touché par la décision ou la décision sur opposition et a un intérêt digne d’être protégé à ce qu’elle soit annulée ou modifiée a qualité pour recourir.

Selon la jurisprudence fédérale rendue en matière d’assurance-accidents, l'employeur qui a payé les primes d'assurance et avancé le salaire d'un employé en cas d'accident est touché par une décision contestant à celui-ci la qualité d'assuré ou niant l'existence d'un événement accidentel ; il a par conséquent un intérêt digne de protection à la voir annulée (ATF 131 V 298 consid. 5.2 et les références). Notre Haute Cour a précisé que le droit de recours que la jurisprudence a reconnu à l'employeur dans le domaine de l'assurance-accidents est étroitement lié, d'une part, au contrat de travail, spécialement aux obligations découlant des art. 324a et 324b CO, d'autre part, à l'indemnité journalière de l'assurance-accidents. En cas de refus de l'assureur-accidents de prendre en charge le cas, la jurisprudence a donc admis jusqu'à présent que l'employeur peut avoir un intérêt direct pour former opposition afin que l'assuré obtienne une indemnité journalière qui a pour vocation de se substituer au salaire qu'il serait tenu de verser ou d'avancer (ATF 131 V 298 consid. 5.3.1 et 5.3.2 ; cf. également Jean MÉTRAL, Commentaire romand de la LPGA, 2018, n. 31 ad art. 59 LPGA).

Au surplus, la qualité pour recourir doit être reconnue au tiers touché par la décision et ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, même s'il n'a pas participé à la procédure administrative antérieure (ATF 148 V 2 et la référence ; Jean MÉTRAL, op. cit., 2018, n. 8 ad art. 59 LPGA).

La qualité pour recourir de la recourante, employeuse de l'assuré au moment de l'événement du 17 septembre 2023 et lors de l'incapacité de travail subséquente, doit par conséquent être admise, bien qu'elle ne soit pas opposée à la décision du 19 octobre 2023.

1.3 Le recours doit être déposé dans les 30 jours suivant la notification de la décision sujette à recours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Selon la jurisprudence, le fardeau de la preuve de la notification et de la date de celle-ci incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 136 V 295 consid. 5.9 et les références). L'autorité supporte donc les conséquences de l'absence de preuve, en ce sens que si la notification ou sa date sont contestées et qu'il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi. La preuve de la notification peut néanmoins résulter d'autres indices ou de l'ensemble des circonstances, par exemple un échange de correspondance ultérieur ou le comportement du destinataire (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 et les références). Cette preuve doit être rapportée au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 121 V 5 consid. 3b).

En l'occurrence, aucun élément n'indique que la recourante aurait recouru de manière tardive et n'aurait pas respecté le délai de 30 jours à compter de la notification à son égard de la décision du 2 avril 2024.

S'agissant, premièrement, de la notification de la décision à l'assuré, il n'est pas prouvé, au degré de la vraisemblance prépondérante, que celui-ci en a eu connaissance avant la réexpédition du pli du 21 mai 2024. Le dossier ne contient en effet pas la preuve que l'avis d'invitation à retirer le pli recommandé a été déposé dans sa boîte aux lettres et, au vu de l'attitude de l'assuré et de l'adresse de correspondance qu'il utilise, à savoir le numéro 2______ au lieu du numéro 1______, le contraire semble s'être réalisé. En effet, alors que l'assuré avait réagi de manière circonstanciée aux premières communications de l'intimée – bien qu'adressées au numéro 1______ –, dans le but de défendre son point de vue, il ne l'a plus fait après la lettre du 28 décembre 2023 et a au contraire spontanément téléphoné, le 21 mai 2024, afin de s'enquérir de l'avancement de l'affaire. Cela dénote qu'il n'avait a priori pas connaissance de l'envoi d'une nouvelle correspondance par l'intimée. Par conséquent, contrairement à ce que soutient cette dernière, il n'est pas démontré que la décision du 2 avril 2024 était entrée en force à l'égard de l'assuré au moment où la recourante a interjeté recours, dans les 30 jours qui ont suivi la notification de la correspondance du 21 mai 2024.

Par ailleurs, quand bien même tel aurait été le cas, il n'est pas contesté que la recourante n'était pas destinataire de la décision du 2 avril 2024. Aucun élément ne permet de retenir qu'elle en aurait eu connaissance, dans une mesure suffisante pour la contester utilement, avant l'envoi du 20 juin 2024 fait par l'intimée. Avant la notification de ce pli, la recourante avait tout au plus été informée par son ancien employé de l'existence d'une décision et, selon la pièce jointe à son recours, n'en avait reçu de sa part que le dispositif. Ce n'est en outre qu'après la transmission de l'intégralité du dossier à la Cour de céans que la recourante a eu un accès entier au dossier et a pu prendre connaissance de la décision non caviardée.

Dans ces circonstances, il faut retenir que le recours du 20 juin 2024, qui contient les conclusions, et son complément du 2 septembre 2024, qui contient une motivation et qui a été déposé dans le délai imparti par la Cour de céans, sont intervenus en temps utile, étant relevé qu'en application de l'art. 61 let. b 2e phrase LPGA, si l’acte n’est pas conforme aux règles formelles et ne contient pas de motivation, le tribunal doit impartir un délai convenable au recourant pour combler les lacunes, en l’avertissant qu’en cas d’inobservation le recours sera écarté.

1.4 Au vu de ce qui précède, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur la question de savoir si l'intimée doit prendre en charge les suites de l'événement du 17 septembre 2023, et notamment sur celle de savoir si ce dernier est constitutif d'un accident.

3.              

3.1 Aux termes de l'art. 6 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA).

La notion d'accident se décompose ainsi en cinq éléments ou conditions, qui doivent être cumulativement réalisés : une atteinte dommageable ; le caractère soudain de l'atteinte ; le caractère involontaire de l'atteinte ; le facteur extérieur de l'atteinte ; enfin, le caractère extraordinaire du facteur extérieur. Il suffit que l'un d'entre eux fasse défaut pour que l'événement ne puisse pas être qualifié d'accident (ATF 142 V 219 consid. 4.31 ; 129 V 402 consid. 2.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_159/2023 du 9 novembre 2023 consid. 3.1).

3.2 Suivant la définition même de l'accident, le caractère extraordinaire de l'atteinte ne concerne pas les effets du facteur extérieur, mais seulement ce facteur lui-même. Dès lors, il importe peu que le facteur extérieur ait entraîné des conséquences graves ou inattendues. Pour admettre la présence d’un accident, il ne suffit pas que l’atteinte à la santé trouve sa cause dans un facteur extérieur. Encore faut-il que ce facteur puisse être qualifié d’extraordinaire. Cette condition est réalisée lorsque le facteur extérieur excède le cadre des événements et des situations que l'on peut objectivement qualifier de quotidiens ou d'habituels, autrement dit des incidents et péripéties de la vie courante (ATF 134 V 72 consid. 4.1 ; 129 V 402 consid. 2.1). Pour des lésions dues à l'effort (soulèvement, déplacement de charges notamment), il faut examiner de cas en cas si l'effort doit être considéré comme extraordinaire, en tenant compte de la constitution physique et des habitudes professionnelles ou autres de l'intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_827/2017 du 18 mai 2018 consid. 2.1). Il n'y a pas d'accident, au sens de ce qui précède, lorsque l'effort en question ne peut entraîner une lésion qu'en raison de facteurs maladifs préexistants, car c'est alors une cause interne qui agit, tandis que la cause extérieure – souvent anodine – ne fait que déclencher la manifestation du facteur pathologique (ATF 116 V 136 consid. 3b).

Selon la jurisprudence, le critère du facteur extraordinaire extérieur peut résulter d'un « mouvement non coordonné ». Lors d'un mouvement corporel, l'exigence d'une incidence extérieure est en principe remplie lorsque le déroulement naturel d'un mouvement corporel est influencé par un empêchement « non programmé », lié à l'environnement extérieur. Dans le cas d'un tel mouvement non coordonné, l'existence du facteur extérieur doit être admise, parce que le facteur extérieur – la modification entre le corps et l'environnement extérieur – constitue en même temps le facteur extraordinaire en raison du déroulement non programmé du mouvement (ATF 130 V 117 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_159/2023 du 9 novembre 2023 consid. 3.2 et les références). On peut ainsi retenir à titre d'exemples de facteurs extérieurs extraordinaires le fait de trébucher, de glisser ou de se heurter à un objet (RAMA 2004 n. U 502 p. 184 consid. 4.1 ; RAMA 1999 n. U 345 p. 422 consid. 2b). Le Tribunal fédéral a, dans un arrêt récent, nié le facteur extraordinaire chez un assuré qui avait monté un petit escalier normal en tenant quelque chose à la main (arrêt du Tribunal fédéral 8C_24/2022 du 20 septembre 2022, in SVR 2023 UV n. 13 p. 40).

Pour les accidents survenus dans l'exercice du sport, l'existence d'un événement accidentel doit être niée lorsque et dans la mesure où le risque inhérent à l'exercice sportif en cause se réalise. Autrement dit, le caractère extraordinaire de la cause externe doit être nié lorsqu'une atteinte à la santé se produit alors que le sport est exercé sans que survienne un incident particulier (arrêt du Tribunal fédéral 8C_410/2017 du 22 mars 2018 consid. 3.2).

À titre d'exemples, le critère du facteur extérieur extraordinaire a été admis dans le cas d'une charge contre la balustrade subie par un hockeyeur (ATF 130 V 117 consid. 3), d'une réception au sol manquée par un gymnaste lors d'un « saut de carpe » (arrêt du Tribunal fédéral U 43/92 du 14 septembre 1992 consid. 3b, in RAMA 1992 n. U 156 p. 258), ou encore dans le cas d'un skieur dans un champ de bosses qui, après avoir perdu le contrôle de ses skis en raison d'une plaque de glace, aborde une nouvelle bosse qui le soulève et le fait retomber lourdement au sol (arrêt du Tribunal fédéral U 114/97 du 18 mars 1999, in RAMA 1999 n. U 345 p. 420). En revanche, il a été nié dans le cas d'un duel entre deux joueurs lors d'un match de basket-ball, lors duquel l'un est « touché » au bras tendu devant le panier par l'autre et se blesse à l'épaule en réagissant à cette action du joueur adverse (arrêt du Tribunal fédéral 8C_835/2013 du 28 janvier 2014 consid. 5, in SVR 2014 UV n. 21 p. 67).

3.3 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références ; 129 V 402 consid. 4.3.1 et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et la référence ; 129 V 402 consid. 2.2 et les références).

Une fois que le lien de causalité naturelle a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, l’obligation de prester de l’assureur cesse lorsque l'accident ne constitue pas (plus) la cause naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (arrêt du Tribunal fédéral 8C_481/2019 du 7 mai 2020 consid. 3.1 et les références). En principe, on examinera si l’atteinte à la santé est encore imputable à l’accident ou ne l’est plus (statu quo ante ou statu quo sine) selon le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (arrêt du Tribunal fédéral 8C_650/2019 du 7 septembre 2020 consid. 3 et les références). La simple possibilité que l'accident n'ait plus d'effet causal ne suffit pas (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2).

3.4 L'assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA). S'il est totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite d’un accident, il a droit à une indemnité journalière (art. 16 al. 1 LAA). Le droit à l'indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l'accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (art. 16 al. 2 LAA). L’indemnité journalière correspond, en cas d’incapacité totale de travail (art. 6 LPGA), à 80 % du gain assuré (art. 17 al. 1 1e phrase LAA).

4.              

4.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

4.2 Les explications d'un assuré sur le déroulement d'un fait allégué sont au bénéfice d'une présomption de vraisemblance. Il peut néanmoins arriver que les déclarations successives de l'intéressé soient contradictoires avec les premières. En pareilles circonstances, selon la jurisprudence, il convient de retenir la première affirmation, qui correspond généralement à celle que l'assuré a faite alors qu'il n'était pas encore conscient des conséquences juridiques qu'elle aurait, les nouvelles explications pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (ATF 143 V 168 consid. 5.2.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016, déjà cité, consid. 4.3).

Le Tribunal fédéral a admis qu'un questionnaire dépourvu de tout commentaire explicatif, que doit remplir un assuré à la suite d'un accident, ne permet pas d'exclure la survenance d'un événement particulier, même si l'assuré n'en fait pas expressément mention lorsqu'il remplit le questionnaire (arrêt du Tribunal fédéral 8C_496/2007 du 29 avril 2008 consid. 4). En outre, un document qui fait état d'un renseignement recueilli oralement ou par téléphone ne constitue un moyen de preuve recevable et fiable que s'il porte sur des éléments d’importance secondaire, tels que des indices ou des points accessoires. Si les renseignements portent sur des aspects essentiels de l'état de fait, ils doivent faire l'objet d'une demande écrite (ATF 117 V 282 consid. 4c).

5.             En l'espèce, l'intimée nie que l'événement du 17 septembre 2023 constitue un accident, au motif qu’une cause extérieure à celui-ci ferait défaut, à tout le moins d’un caractère extraordinaire. Elle fait valoir que les différentes déclarations du recourant au sujet des circonstances du sinistre seraient contradictoires et ne se compléteraient pas, et qu'il faudrait privilégier la version donnée dans la déclaration d'accident, à savoir qu'un mouvement de torsion était intervenu lors de sauts à l'occasion d'un entraînement sportif.

La Cour de céans ne partage pas ce raisonnement.

5.1 Il sied de constater que la déclaration de sinistre du 25 septembre 2023 à laquelle se réfère l'intimée a été remplie, comme d'usage, par l'employeuse et non par l'assuré lui-même. Il est ainsi possible que l’employeuse n'ait pas compris les circonstances exactes de l'accident et qu'un malentendu à ce propos ait surgi, comme le mentionne l'assuré dans sa lettre du 1er décembre 2023, ce d'autant plus que le traumatisme est survenu dans un contexte particulier d'entraînement sportif durant lequel l'assuré a réalisé plusieurs exercices, dont des sauts, et avec un module et une position qu'il est difficile de décrire par des mots. Il ressort également de la formulation utilisée que la personne ayant déclaré le sinistre n'est manifestement pas de langue maternelle française, ce qui a pu accroître le risque de mécompréhension. On ignore en outre si l'employeuse a réellement déclaré le sinistre le 18 septembre 2023, comme elle l'a allégué, et quelle en était alors l'éventuelle description donnée, aucune annonce n'ayant alors été enregistrée.

Quoi qu’il en soit, on ne saurait privilégier la brève description de l’évènement faite par l'employeuse le 25 septembre 2023 par rapport à celle, bien plus détaillée et complète donnée par l'assuré lui-même dans le questionnaire du 5 octobre 2023. Or, dans ce document, rédigé avant que l'intimée ne statue sur le cas et nie l'existence d'un accident, l'assuré a décrit que son genou avait subi un mouvement de torsion en valgus compte tenu de la position de son thorax et de la glissade de son pied d'un des poteaux du portique d'entraînement. Cette glissade du pied d'appui a expressément été désignée comme un événement imprévu par rapport au mouvement anticipé. Cette version des faits a encore été précisée dans l'opposition de l'assuré et dans sa lettre du 1er décembre 2023, desquelles il ressort que la glissade a été déterminante et a causé la lésion, dans la mesure où, se tenant à la barre, il se trouvait en rotation droite du haut du corps et son genou en valgus/rotation externe en charge lorsqu'il a glissé et essayé de se rattraper avec son pied. Il avait déjà effectué une première escalade du portique sans encombre ; seule la glissade décrite explique qu’il n’en ait pas été de même la seconde fois. Afin de rendre encore plus claire sa description des faits, l'assuré a en outre transmis dans son dernier pli une reconstitution photographique de sa position et du module d'entraînement, qui illustre clairement ses propos.

Contrairement à ce que soutient l’intimée, les explications fournies par le principal intéressé, loin d’être contradictoires, se complètent. Elles apparaissent concordantes entre elles, la dernière étant encore plus détaillée quant à la position de son corps et aux mouvements entrepris (pour un récent cas similaire, cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_828/2023 du 6 février 2025 consid. 4.3.2). En outre, comme déjà relevé, les premières explications données par l'assuré en date du 5 octobre 2023 l'ont été avant même que l'intimée nie son devoir de prester et à un moment où l’intéressé ne pouvait anticiper un tel refus. Il a aussi été souligné que la déclaration d'accident faite par l'employeuse le 25 septembre 2023 manquait de précision et pouvait être le fruit d'une mécompréhension. Dans ces circonstances, aucun argument ne saurait être déduit de la jurisprudence afférente à la portée de la première déclaration (cf. consid. 4.2 supra), invoquée par l'intimée.

D’ailleurs, l'intimée ne développe aucune critique précise au sujet des déclarations de l'assuré telles que rapportées ci-dessus et ne soutient en particulier pas que l'enchaînement des mouvements qu'il décrit ne serait pas à même de causer une lésion du ménisque. Lorsque son médecin-conseil affirme que l'action vulnérante ne peut pas entraîner, de manière plausible, une lésion complexe du ménisque interne, il ne prend en réalité pas en considération la position en rotation droite du haut du corps de l'assuré et le valgus du genou. Il ne fait en effet pas mention de ces éléments dans ses prises de position du 27 novembre 2023 et du 18 décembre 2023 et invoque uniquement une glissade du pied. Il sied en outre d'avoir à l'esprit que l'administration n'a pas fourni une description complète des faits à son médecin-conseil puisque, dans sa soumission du 16 octobre 2023, elle ne reprend étonnamment que la formulation contenue dans la déclaration d'accident et ne tient pas compte des informations complémentaires transmises par l'assuré quelques jours auparavant, à la suite de sa demande expresse de clarification.

Compte tenu de ce qui précède et au vu du fait que les explications d'un assuré sur le déroulement d'un fait allégué sont au bénéfice d'une présomption de vraisemblance (cf. consid. 4.2 ci-dessus), la Cour de céans considère comme établi, au degré de la vraisemblance prépondérante aussi applicable en matière d'appréciation des déclarations d'une personne assurée au sujet d'un sinistre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_27/2019 du 20 août 2019 consid. 5.2), que la lésion du genou gauche est survenue consécutivement à la position et aux mouvements rapportés dans ses écrits successifs des 5 octobre, 12 novembre et 1er décembre 2023.

5.2 À l'inverse de ce qu'a retenu l'intimée, il faut ainsi admettre que le traumatisme est survenu en présence d'un facteur extérieur extraordinaire, soit la glissade du pied alors que l'assuré avait le haut de son corps suspendu et son genou en rotation externe, ce qui a entraîné une torsion de celui-ci. Un tel enchaînement des faits excède le cadre des événements quotidiens de la vie courante et constitue un mouvement non programmé, qui répond à l'exigence d'un facteur extérieur extraordinaire. Au surplus, bien que l'assuré se soit blessé alors qu'il réalisait des exercices sportifs, il ne s'agit pas d'un incident ordinaire inhérent à la pratique sportive en cause, mais d'un incident particulier et imprévu qui sort des éventualités usuelles d'un entraînement sportif classique.

Par conséquent, il doit être constaté que le sinistre du 17 septembre 2023 répond à la notion d'accident, la condition du facteur extérieur extraordinaire étant donnée, à l'instar des autres éléments constitutifs, non remis en cause par l'intimée.

5.3 Dans la mesure où l'intimée ne conteste pas que l'atteinte à la santé soit en relation de causalité naturelle et adéquate avec le traumatisme du 17 septembre 2023 – son médecin-conseil ayant lui-même considéré que si un accident était reconnu, une aggravation de l'état de santé préexistant devrait être admise – et ne plaide en particulier pas que le statu quo ante ou le statu quo sine auraient été atteints avant la fin de la période d'incapacité de travail de l'assuré, il lui incombe de verser les prestations prévues par la LAA, en particulier l'indemnité journalière, du 20 septembre au 1er novembre 2023, comme y a conclu la recourante. Le taux d'incapacité de travail de l'assuré n'étant pas non plus contesté et résultant des divers certificats d'arrêt de travail qu'il a fournis, l'intimée doit indemniser, pour la période en cause, une totale incapacité de travail.

6.             À titre superfétatoire, la Cour de céans relève que l'argumentation de l'intimée au sujet de l'art. 6 al. 2 LAA et de l'état maladif préexistant du genou de l'assuré paraît bien peu convaincante, étant rappelé qu'il revient à l'assurance d'apporter la preuve qu'une lésion corporelle figurant dans la liste est due à l’usure ou à une maladie (entre autres : arrêts du Tribunal fédéral 8C_618/2019 du 18 février 2020 consid. 5 et 8C_1/2024 du 10 juin 2024 consid. 3.2 et les références). Le médecin-conseil de l'assurance n'a en particulier que lapidairement motivé son point de vue, qui plus est dans une seule de ses évaluations, en se référant à une ancienne lésion partielle du ligament croisé qui aurait entraîné une surcharge du membre inférieur gauche, sans répondre aux arguments contraires du Dr F______ ou de l'assuré.

La Cour de céans se dispensera cependant d'examiner ces éléments en détail, dans la mesure où, un accident ayant été reconnu, le droit aux prestations se détermine en fonction de l'art. 6 al. 1 LAA exclusivement, et non de l'art. 6 al. 2 LAA, même si l'atteinte causée par l'accident est une lésion corporelle énumérée à cette dernière disposition (ATF 146 V 51 consid. 9.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_520/2020 du 3 mai 2021 consid. 5.1 et les références).

7.             Au vu de ce qui précède, le recours est admis et la décision du 2 avril 2024 annulée.

La recourante obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 3'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision de l'intimée du 2 avril 2024.

4.        Dit que l’intimée doit prendre en charge les suites de l’événement du 17 septembre 2023 et la condamne, en tant que de besoin, à verser l'indemnité journalière en fonction d'une totale incapacité de travail du 20 septembre 2023 au 1er novembre 2023.

5.        Condamne l'intimée à verser à la recourante une indemnité de CHF 3'000.- à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le