Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/340/2025 du 13.05.2025 ( LAA )
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/1463/2025 ATAS/340/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt incident du 13 mai 2025 Chambre 9 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS
| intimée |
A. a. A______ (ci-après : l’assuré), né en 1988, travaillait pour le compte de la société B______.
b. À ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : CNA) contre le risque d’accident, professionnel ou non.
c. Le 17 janvier 2020, il a subi un traumatisme au poignet gauche lors de travaux de jardinage à la maison.
d. Dans la déclaration d’accident du 26 janvier 2020, l’employeur a indiqué un taux d’occupation contractuel de 60%.
e. La CNA a procédé au paiement du traitement médical et des indemnités journalières sur la base d’une activité de 100%.
B. a. Par courrier du 22 mars 2021, rédigé en allemand, la CNA a reconsidéré sa décision et versé les indemnités journalières sur la base d’une activité de 60% dès le 1er mars 2021. Ce courrier ne contient pas l’indication de voies de recours.
b. Le 18 septembre 2024, l’assuré a demandé la rectification du montant de l’indemnité journalière à 100%, indiquant que l’employeur s’était trompé lors de la déclaration d’accident.
c. Le 23 janvier 2025, la CNA a rendu une décision formelle, par laquelle elle a calculé le montant de l’indemnité journalière sur la base d’une activité de 60%.
d. Le 24 février 2025, l’assuré a formé opposition à cette décision, concluant à la rectification du montant de l’indemnité journalières avec effet au 1er mars 2021, ainsi qu’au versement du solde dû en conséquence.
e. Par décision sur opposition du 12 mars 2025, déclarée exécutoire nonobstant recours, la CNA a maintenu sa position.
Les pièces au dossier ne permettaient pas de déterminer si l’assuré travaillait à 100% ou à 60% avant l’accident, ni quel salaire il percevait. Le contrat de travail ne donnait aucune indication sur le taux d’occupation et ne permettait pas de prouver que l’assuré avait effectivement perçu un salaire de 100%. Dans sa déclaration du 26 janvier 2020, l’employeur avait indiqué un taux de travail de 60%. En réponse à son interpellation du 18 décembre 2024, l’assuré avait déclaré qu’il ne disposait d’aucune fiche de salaire pour son activité auprès de B______. Elle était dès lors fondée à reconsidérer la situation et verser des indemnités journalières sur la base d’une activité de 60%.
C. a. Par acte du 17 avril 2025, l’assuré a interjeté recours devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision concluant, sous suite de frais, préalablement, à la restitution de l’effet suspensif et principalement à la restitution du solde rétroactif des indemnités journalières dues depuis le 1er mars 2021, avec intérêts à 5% dès cette date. Il a également requis son audition.
Dès lors qu’il s’agissait d’un revirement totalement contradictoire et infondé, intervenu plus d’une année après la décision initiale accordant le versement d’indemnités journalières basées sur un taux de 100%, sans que la CNA n’ait eu connaissance d’un quelconque élément nouveau, la sécurité du droit imposait que l’assureur ne prive pas la décision d’un effet suspensif.
Il ressortait de son contrat de travail qu’il avait été engagé en qualité de transporteur de meubles à raison de 45 heures hebdomadaires, correspondant à un taux d’activité de 100%. Cela était corroboré par la déclaration de sinistre du 26 janvier 2020, qui mentionnait un nombre de 40 heures par semaine. L’employeur avait confirmé, dans ses courriers des 8 mars, 22 avril et 6 septembre 2024, qu’il s’agissait bien d’une erreur de sa part, le taux de 60% correspondant à celui d’un autre employé ayant fait l’objet d’une annonce similaire.
b. Par réponse du 8 mai 2025, la CNA a conclu au rejet du recours et de la requête de restitution de l’effet suspensif.
c. Cette écriture a été transmise au recourant.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté en temps utile, le recours est prima facie recevable (art. 60 al. 1 LPGA).
2.
2.1 Selon l'art. 54 al. 1 let. c LPGA, les décisions et les décisions sur opposition sont exécutoires lorsque l'effet suspensif attribué à une opposition ou à un recours a été retiré.
La LPGA ne contient aucune disposition topique en matière d'effet suspensif. Selon l'art. 55 al. 1 LPGA, les points de la procédure administrative en matière d'assurances sociales qui ne sont pas réglés de manière exhaustive aux art. 27 à 54 de la LPGA ou par les dispositions des lois spéciales sont régis par la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA - RS 172.021). L'art. 61 LPGA, qui règle la procédure de recours devant le tribunal cantonal des assurances, renvoie quant à lui à l'art. 1 al. 3 PA. Aux termes de cette disposition, l'art. 55 al. 2 et 4 PA relatif au retrait de l'effet suspensif est applicable à la procédure devant les autorités cantonales de dernière instance qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit public fédéral.
2.2 L'art. 55 al. 3 PA prévoit que l'autorité de recours ou son président peut restituer l'effet suspensif à un recours auquel l'autorité inférieure l'avait retiré ; la demande de restitution de l'effet suspensif est traitée sans délai.
La possibilité de retirer ou de restituer l'effet suspensif au recours n'est pas subordonnée à la condition qu'il existe, dans le cas particulier, des circonstances tout à fait exceptionnelles qui justifient cette mesure. Il incombe bien plutôt à l'autorité appelée à statuer d'examiner si les motifs qui parlent en faveur de l'exécution immédiate de la décision l'emportent sur ceux qui peuvent être invoqués à l'appui de la solution contraire. L'autorité dispose sur ce point d'une certaine liberté d'appréciation. En général, elle se fondera sur l'état de fait tel qu'il résulte du dossier, sans effectuer de longues investigations supplémentaires. En procédant à la pesée des intérêts en présence, les prévisions sur l'issue du litige au fond peuvent également être prises en considération ; il faut cependant qu'elles ne fassent aucun doute (ATF 124 V 82 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_885/2014 du 17 avril 2015 consid. 4.2).
2.3 L'intérêt de la personne assurée à pouvoir continuer à bénéficier des prestations qu'elle percevait jusqu'alors n'est pas d'une importance décisive, tant qu'il n'y a pas lieu d'admettre que, selon toute vraisemblance, elle l'emportera dans la cause principale. Ne saurait à cet égard constituer un élément déterminant la situation matérielle difficile dans laquelle se trouve la personne assurée depuis la diminution ou la suppression des prestations. En pareilles circonstances, l'intérêt de l'administration apparaît généralement prépondérant, puisque dans l'hypothèse où l'effet suspensif serait accordé et le recours serait finalement rejeté, l'intérêt de l'administration à ne pas verser des prestations paraît l'emporter sur celui de la personne assurée ; il serait effectivement à craindre qu'une éventuelle procédure en restitution des prestations versées à tort ne se révèle infructueuse (ATF 119 V 503 consid. 4 et les références ; voir également arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 267/98 du 22 octobre 1998, in VSI 2000 p. 184 consid. 5; Hansjörg SEILER, in Praxiskommentar zum VwVG, n° 103 ad art. 55 PA).
2.4 En l’espèce, les chances de succès du recours n’apparaissent, prima facie et sans préjudice de l’examen au fond, pas à ce point manifestes qu’elles justifieraient à elles seules la restitution de l’effet suspensif. Certes, le courrier de l’intimée du 22 mars 2021, par lequel elle a indiqué avoir reconsidéré sa décision et réduit les prétentions du recourant ne satisfait a priori pas aux exigences posées à l’art. 49 al. 3 LPGA. Or, même à considérer que l’écriture du recourant du 18 septembre 2024 constitue une opposition valable à la décision du 22 mars 2021, les éléments au dossier - en particulier les fiches de salaire pour les mois de janvier et février 2020, le contrat de travail et l’extrait du compte individuel du recourant - ne suffisent de prime abord, et en l’état du dossier, pas à retenir que celle-ci serait manifestement bien fondée. S’ajoute à cela que l’exécution immédiate de la décision apparaissait d’autant plus justifiée qu’au moment de la décision litigieuse, les prestations en question avaient été réduites depuis déjà quatre ans.
Dans ces conditions, et compte tenu de la jurisprudence précitée, l'intérêt de l’intimée l’emporte sur celui de la personne assurée à obtenir des indemnités journalières plus élevées durant la période considérée.
3. Partant, la demande de restitution de l’effet suspensif sera rejetée et la suite de la procédure réservée.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant selon l’art. 21 al. 2 LPA-GE
1. Rejette la demande de restitution de l’effet suspensif.
2. Réserve la suite de la procédure.
3. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Sylvie CARDINAUX |
| La présidente
Eleanor McGREGOR |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le