Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/278/2025 du 10.04.2025 ( AI ) , ADMIS/RENVOI
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1932/2024 ATAS/278/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 10 avril 2025 Chambre 3 |
En la cause
A______ représenté par le Syndicat UNIA, mandataire | recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’assuré), né en ______ 1975, souffre d’une cardiopathie et d’une tumeur cervicale opérée en mai 2022, ce qui a entraîné des séquelles neurologiques, avec une parésie proximale importante du bras gauche.
b. Par décision du 27 mai 2024, l’assuré a été mis au bénéfice d’une rente entière d’invalidité à compter du 1er août 2022.
B. a. Le 20 novembre 2023, l’assuré a saisi l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) d’une demande d’allocation pour impotent, dont il ressort que, depuis mai 2022, il a besoin d’aide pour plusieurs actes ordinaires de la vie quotidienne, en particulier pour « se vêtir/se dévêtir » (difficultés à enfiler une chemise ainsi qu’à mettre et à attacher des baskets), « manger » (couper certains aliments) et « faire sa toilette » (difficultés à se raser, se coiffer, se doucher, etc.).
b. Du rapport pour les personnes impotentes, établi le 27 novembre 2023 par la docteure B______, médecin praticien FMH, il ressort que l’assuré souffre d’une parésie sévère du deltoïde gauche entraînant, depuis mai 2022, une incapacité de lever ou de porter avec le membre supérieur gauche. L’impotence peut être réduite par des moyens auxiliaires appropriés, non décrits par le médecin traitant.
c. Le 11 mars 2024 a eu lieu une enquête à domicile, à l’issue de laquelle seule le besoin d’aide pour l’acte de « manger » – l’assuré ayant des difficultés pour couper la nourriture – a été admis.
d. Le même jour, l’OAI a adressé à l’assuré un projet de décision dont il ressortait qu’il entendait lui nier le droit à une allocation pour impotent, dès lors qu’il n’avait besoin d’aide que pour un seul acte ordinaire de la vie et que son état de santé ne nécessitait ni surveillance personnelle permanente, ni accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie.
e. L’assuré a contesté ce projet par courrier du 18 avril 2024. Il a expliqué qu’en raison de l’atteinte à son bras gauche, il ne pouvait se nettoyer que d’une main, de sorte que toute la partie latérale gauche de son dos n’était jamais correctement lavée. Il ne pouvait pas non plus se sécher le dos ou se raser, tâche requérant l’utilisation des deux mains. Enfin, il devait porter des bas de contention, qu’il ne pouvait tirer que jusqu’aux genoux, même avec un enfile-chaussettes. Dès lors, il estimait avoir besoin d’aide pour trois actes de la vie ordinaire : « manger », « faire sa toilette » et « se vêtir/se dévêtir ».
f. Par décision non datée, mais reçue par le recourant le 8 mai 2024, l’OAI lui a nié le droit à une allocation pour impotent.
C. a. Le 7 juin 2024, l’assuré a interjeté recours contre cette décision. À l’appui de son recours, il reprend les arguments déjà évoqués dans son courrier du 18 avril 2024.
b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 4 juillet 2024, a conclu au rejet du recours.
L’intimé soutient qu’aucun élément objectif ne permet de remettre en cause les conclusions du rapport d’enquête à domicile du 11 mars 2024. Seule la nécessité d’une aide régulière et importante pour l’acte « manger » peut être admise.
c. Dans sa réplique du 22 juillet 2024, le recourant a critiqué le rapport d’enquête à domicile.
Il se plaint en outre d’une violation de son droit d’être entendu, dès lors que ce rapport ne lui a pas été soumis avant que la décision querellée ne soit rendue.
d. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
2.
2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
2.2 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).
3. Le litige porte sur le droit du recourant à une allocation pour impotent, singulièrement sur le nombre d’actes de la vie quotidienne pour lesquels il a besoin de l’aide importante et régulière d’autrui.
4. Le recourant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu, dans la mesure où il n’a pu prendre connaissance du rapport d’enquête à domicile du 11 mars 2024 avant la décision querellée.
Ce grief, de nature formelle, doit être examiné en premier lieu (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa, 124 V 90 consid. 2 notamment).
4.1 À teneur de l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 [Cst. - RS 101]), les parties ont le droit d'être entendues.
Le droit d’être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l’annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond. Selon la jurisprudence, la violation du droit d’être entendu – pour autant qu’elle ne soit pas d’une gravité particulière – est réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s’exprimer devant une autorité de recours jouissant d’un plein pouvoir d’examen. Au demeurant, la réparation d’un vice éventuel ne doit avoir lieu qu’exceptionnellement (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa, ATF 126 V 132 consid. 2b et les références). Une violation du droit d'être entendu est considérée comme réparée lorsque l'intéressé jouit de la possibilité de s'exprimer librement devant une autorité de recours pouvant contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée, à condition toutefois que l'atteinte aux droits procéduraux de la partie lésée ne soit pas particulièrement grave, de sorte qu'il n'en résulte aucun préjudice pour le justiciable (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 133 I 201 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C 47/2013 du 28 octobre 2013).
4.2 En l’espèce, la question d’une violation du droit d’être entendu du recourant peut rester ouverte. En effet, dans la mesure où, dans le cadre de la présente procédure, le recourant a eu la possibilité de prendre connaissance du rapport d’enquête et de s’exprimer, une éventuelle violation de son droit d’être entendu a quoi qu’il en soit été réparée (voir dans le même sens les ATAS/991/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5 et ATAS/372/2018 du 2 mai 2018 consid. 14, notamment).
5.
5.1 Selon l’art. 42 LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une allocation pour impotent (al. 1). L’impotence peut être grave, moyenne ou faible (al. 2).
Aux termes de l’art. 9 LPGA, est réputée impotente toute personne qui, en raison d’une atteinte à la santé, a besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne.
L’art. 37 al. 1 du règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201) prévoit que l’impotence est grave lorsque l’assuré est entièrement impotent. Tel est le cas s’il a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des soins permanents ou une surveillance personnelle.
À teneur de l’art. 37 al. 2 RAI, l’impotence est moyenne si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin : d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie (let. a) ; d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et, en outre, d’une surveillance personnelle permanente (let. b) ; ou d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et, en outre, d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 38 RAI (let. c).
On est en présence d’une impotence de degré moyen au sens de la let. a lorsque l’assuré doit recourir à l’aide de tiers pour au moins quatre actes ordinaires de la vie (arrêt du Tribunal fédéral 9C_560/2017 du 17 octobre 2017 consid. 2 et la référence).
Conformément à l’art. 37 al. 3 RAI, l’impotence est faible si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin : de façon régulière et importante, de l’aide d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie (let. a) ; d’une surveillance personnelle permanente (let. b) ; de façon permanente, de soins particulièrement astreignants, en raison de son infirmité (let. c) ; de services considérables et réguliers de tiers lorsqu’en raison d’une grave atteinte des organes sensoriels ou d’une grave infirmité corporelle, il ne peut entretenir des contacts sociaux avec son entourage que grâce à eux (let. d) ; ou d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 38 RAI (let. e).
L’expression « même avec des moyens auxiliaires » figurant à l’art. 37 al. 1 à 3 RAI se rapporte à ceux qui sont remis par l’assurance-invalidité, ainsi qu’aux moyens auxiliaires bon marché ou à des adaptations dont la prise en charge peut être exigée de l’assuré, ceci indépendamment de son obligation de réduire le dommage (arrêt du Tribunal fédéral I 639/06 du 5 janvier 2007 consid. 4.1 et les références).
5.2 Selon une jurisprudence constante (ATF 127 V 94 consid. 3c ; 125 V 297 consid. 4a et les références citées), ainsi que selon les chiffres 2020ss de la Circulaire sur l’impotence (CSI) édictée par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), les actes élémentaires de la vie quotidienne comprennent les six actes ordinaires suivants :
- se vêtir, se dévêtir (y compris mettre et retirer un éventuel moyen auxiliaire, pour autant qu’il ne serve pas à un traitement ou à une thérapie) ;
- se lever, s’asseoir, se coucher (y c. se mettre au lit ou le quitter), changer de position ;
- manger (apporter le repas au lit, couper des morceaux, amener la nourriture à la bouche, réduire la nourriture en purée et se nourrir par sonde) ;
- faire sa toilette (se laver, se peigner, se raser, prendre un bain / se doucher) ;
- aller aux toilettes (se rhabiller, hygiène corporelle / vérification de la propreté, façon inhabituelle d’aller aux toilettes) ;
- se déplacer (dans l’appartement, à l’extérieur, entretenir les contacts sociaux).
5.3 De manière générale, on ne saurait réputer apte à un acte ordinaire de la vie, l'assuré qui ne peut l'accomplir que d'une façon non conforme aux mœurs usuelles (ATF 106 V 159 consid. 2b). Ce principe est en particulier applicable lorsqu'il s'agit d'apprécier la capacité d'accomplir l'acte consistant à aller aux toilettes (ATF 121 V 95 consid. 6c ; ATF 121 V 94 consid. 6b et les références). Cependant, si certains actes sont rendus plus difficiles ou même ralentis par l'infirmité, cela ne suffit pas pour conclure à l'existence d'une impotence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_633/2012 du 8 janvier 2013 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 25/85 du 11 juin 1985 consid. 2b, in RCC 1986 p. 509 ; RCC 1989 p. 228 et RCC 1986 p. 507 ; ch. 8013 CIIAI).
Pour qu'il y ait nécessité d'assistance dans l'accomplissement d'un acte ordinaire de la vie comportant plusieurs fonctions partielles, il n'est pas obligatoire que la personne assurée requière l'aide d'autrui pour toutes ou la plupart de ces fonctions partielles ; il suffit bien au contraire qu'elle ne requière l'aide d'autrui que pour une seule de ces fonctions partielles (ATF 121 V 88 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_360/2014 du 14 octobre 2014 consid. 4.4 ; ch. 2021 CSI [jusqu’au 31 décembre 2021, ch. 8011 CIIAI]).
Il faut cependant que, pour cette fonction, l'aide soit régulière et importante. Elle est régulière lorsque la personne assurée en a besoin ou pourrait en avoir besoin chaque jour, par exemple, lors de crises se produisant parfois seulement tous les deux ou trois jours mais pouvant aussi survenir brusquement chaque jour ou même plusieurs fois par jour (ch. 2010 CSI [jusqu’au 31 décembre 2021, ch. 8025 CIIAI]). L'aide est considérée comme importante lorsque la personne assurée ne peut plus accomplir au moins une fonction partielle d'un acte ordinaire de la vie ou qu'elle ne peut le faire qu'au prix d'un effort excessif ou d'une manière inhabituelle (ATF 117 V 146 consid. 3b ; Pratique VSI 1996 p. 182 ; RCC 1981 p. 364 ; RCC 1979 p. 272 ; ch. 2013 CSI [jusqu’au 31 décembre 2021, ch. 8026 CIIAI]).
6.
6.1 Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références citées).
6.2 Une enquête effectuée au domicile de la personne assurée constitue en règle générale une base appropriée et suffisante pour évaluer les handicaps de celle-ci. En ce qui concerne la valeur probante d’un tel rapport d’enquête, il est essentiel qu’il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il s’agit en outre de tenir compte des indications de la personne assurée et de consigner les opinions divergentes des participants. Enfin, le contenu du rapport doit être plausible, motivé et rédigé de façon suffisamment détaillée en ce qui concerne les diverses limitations et correspondre aux indications relevées sur place. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision, le juge ne saurait remettre en cause l’appréciation de l’auteur de l’enquête que s’il est évident qu’elle repose sur des erreurs manifestes (ATF 130 V 61 consid. 6.1 et 6.2).
7.
7.1 En l’espèce, depuis mai 2022, le recourant souffre d’une parésie et d’un manque de force de son bras gauche. En raison de cette atteinte, il a été mis au bénéfice d’une rente d’invalidité entière. Il sollicite, en sus, l’octroi d’une allocation pour impotent de degré faible, en alléguant avoir besoin d’aide pour « manger », « se vêtir/se dévêtir » et « faire sa toilette ».
L’intimé admet le besoin d’aide pour « manger » seulement. Il convient d’examiner si c’est à juste titre que l’intimé refuse de connaître le besoin d’une aide importante et régulière pour les deux autres actes de la vie quotidienne invoqués par le recourant.
7.1.1 En ce qui concerne l’acte de « se vêtir/se dévêtir », le recourant explique qu’il doit porter des bas de contention, qu’il est incapable d’enfiler et d’enlever seul, même avec un enfile-chaussettes.
Les bas de contention en question ayant été prescrits le 12 avril 2024, soit postérieurement à la visite à domicile, l’enquêtrice n’a pu se prononcer sur l’aide nécessaire pour les enfiler et les retirer. La prescription de ces bas a cependant été portée à la connaissance de l’intimé dans le cadre du droit de l’assuré à être entendu (cf. son opposition du 18 avril 2024), soit avant que la décision litigieuse ne soit rendue. De plus, dans son écriture du 6 juin 2024, le recourant a, une nouvelle fois, expliqué avoir besoin d’aide pour enfiler ses bas de contention. Pourtant, à aucun moment l’OAI n’en a tenu compte.
Préalablement, il y a lieu de rappeler qu’en vertu de la jurisprudence du Tribunal fédéral, le fait d’enfiler et de retirer des bas de contention relève de l’acte « se vêtir / se dévêtir » (arrêt du Tribunal fédéral 9C_656/2012 du 22 mai 2013 consid. 4.2 et la référence citée). Certes, le ch. 2027 de la CSI précise que les moyens auxiliaires servant au traitement médical (par exemple, les bas de soutien et les attelles nocturnes) doivent être pris en compte au titre des soins. Cependant, le Tribunal fédéral a laissé entendre que le ch. 8014.1 de la CIIAI – applicable jusqu’au 31 décembre 2021 et correspondant aujourd’hui au ch. 2027 de la CSI – ne serait pas conforme à sa jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_76/2019 du 1er mai 2019 consid. 5.3). En tout état de cause, les circulaires de l'OFAS, directives à l'égard des autorités administratives, ne lient pas le juge des assurances sociales (ATF 142 V 442 consid. 5.2 ; 141 V 139 consid. 6.3.1). La Cour de céans ainsi que la Cour des assurances sociales du canton de Vaud s’en sont d’ailleurs déjà écartées sur la question des bas de contention (cf. à Genève : ATAS 469/2020 du 11 juin 2020 ; dans le canton de Vaud : arrêts AI 90/23 – 61/2024 et AI 90/23 – 61/2024 du 20 février 2024).
Or, le recourant souffre de parésie et d’un manque de force au bras gauche, ce qui a d’ailleurs été admis par l’enquêtrice à domicile. Compte tenu de la nature des bas de contention – dont on sait qu’ils sont difficiles à enfiler et ce, même pour des personnes tout à fait valides –, et vu les atteintes et limitations fonctionnelles de l’assuré au niveau de son bras gauche, il peut être considéré comme établi au degré de la vraisemblance requis que le recourant n’est pas capable d’enfiler et d’ôter seul des bas de contention. Il convient donc de reconnaître un besoin d’assistance pour l’acte de « se vêtir / se dévêtir », ce qui porte à deux le nombre d’actes pour lesquels une aide est nécessaire.
7.1.2 Concernant l’acte de « faire sa toilette », le recourant explique qu’il ne peut se laver que d’une main, de sorte que toute la partie latérale gauche de son dos n’est jamais correctement nettoyée. Il ne peut pas non plus se sécher le dos, dès lors que deux mains sont nécessaires. Enfin, il a besoin d’aide pour se raser, car il ne peut pas tirer la peau avec sa main gauche.
Dans un arrêt du 11 juin 1985, le Tribunal fédéral a considéré qu'un assuré totalement paralysé du bras gauche était tenu, en vertu de l'obligation de réduire le dommage, de se procurer une longue brosse lui permettant de se laver le dos sans l’aide d'autrui (RCC 1989, p. 230 consid. 2b et RCC 1986, p. 509 consid. 2b). Quant à la Cour des assurances sociales vaudoise, elle a considéré qu’un sèche-cheveux fixé au mur permettait une indépendance totale par rapport au séchage (cf. arrêt de la Cour des assurances sociales AI 27/11 - 200/2012 du 3 mai 2012 consid. 4b/aa). Enfin, les juges valaisans ont, pour leur part, estimé qu’un rasoir électrique facilitait l’autonomie d’un assuré ne disposant de l’usage que d’un bras (arrêt du Tribunal fédéral 8C_437/2009 du 3 décembre 2009 consid. 4)
L’acquisition et la mise en place de tels moyens ne semble pas nécessiter de transformations importantes ; elle paraît facilement envisageable et donc exigible.
Par conséquent, c’est à juste titre que l’OAI n’a pas admis le besoin d’aide pour l’acte de « faire sa toilette ».
7.2 Des considérations qui précèdent, il ressort qu’à la date déterminante du 7 mai 2024 (date de la décision attaquée), le recourant avait besoin de l'aide d'autrui pour deux actes ordinaires de la vie, soit « se vêtir/se dévêtir » (enfiler les bas de contention et les enlever) et « manger » (couper les aliments).
Partant, la décision querellée doit être annulée et le droit du recourant à une allocation pour impotent de degré faible reconnu.
8. Reste à examiner à partir de quand l’allocation doit être versée au recourant.
8.1 A teneur de l’art. 42 al. 4 LAI, l’allocation pour impotent est octroyée au plus tôt à la naissance et au plus tard à la fin du mois au cours duquel l’assuré a fait usage de son droit de percevoir une rente anticipée, conformément à l’art. 40 al. 1 LAVS. Le droit naît dès qu’une impotence de degré faible au moins existe depuis une année sans interruption notable.
Selon l’art. 35 al. 1 RAI, le droit à l’allocation pour impotent prend naissance le premier jour du mois au cours duquel toutes les conditions du droit sont réalisées.
Aux termes de l’art. 48 al. 1 LAI, si un assuré ayant droit à une allocation pour impotent présente sa demande plus de douze mois après la naissance de ce droit, la prestation, en dérogation à l’art. 24 al. 1 LPGA, n’est allouée que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande.
8.2 En l’espèce, le recourant présente une impotence de degré faible depuis son opération, en mai 2022, de sorte que le délai d’attente est venu à échéance en mai 2023. Par conséquent, c’est avec effet au 1er mai 2023 que le droit à une telle allocation est né, le recourant ayant déposé sa demande moins de douze mois après la naissance de son droit.
9. Au vu de ce qui précède, le recours est admis et le droit à une allocation pour impotent de degré faible, avec effet au 1er mai 2023, est reconnu au recourant.
Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 1'500.- lui est accordée à titre de participation à ses frais et dépens, à charge de l'intimé (art. 61 let. g LPGA; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 – RFPA ; RS E 5 10.03).
Etant donné que depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 500.-.
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L’admet.
3. Annule la décision de l’intimé, non datée, reçue par le recourant le 8 mai 2024.
4. Dit que le recourant a droit à une allocation pour impotence de degré léger depuis le 1er mai 2023.
5. Renvoie la cause à l'intimé pour calcul des prestations dues.
6. Condamne l'intimé à verser au recourant la somme de CHF 1'500.- à titre de participation à ses frais et dépens.
7. Met un émolument de CHF 500.- à la charge de l'intimé.
8. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le