Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/264/2025 du 15.04.2025 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/3012/2024 ATAS/264/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du15 avril 2025 Chambre 2 |
En la cause
A______
| recourante |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
| intimé |
A. a. A______ (ci-après : l'assurée, l'intéressée ou la recourante), née en 1995, de nationalité suisse et domiciliée dans le canton de Genève, est diplômée de la faculté de droit de l'Université de Genève et titulaire d'un certificat de spécialisation en matière d’avocature.
b. Elle a accompli un stage de six mois – pris en compte dans la durée du stage d'avocate par la Commission du barreau –, du 15 juillet 2021 au 14 février 2022, au sein de l'office cantonal de l'agriculture et de la nature (OCAN), puis y a travaillé quelques mois supplémentaires en qualité de juriste.
c. Le 19 août 2022, elle s'est inscrite auprès de l’office régional de placement (ci‑après : ORP), déclarant être disposée à travailler immédiatement à 100% et a été mise au bénéfice d'un délai-cadre d'indemnisation courant du 19 août 2022 au 18 août 2024.
d. Le 31 octobre 2022, son dossier auprès de l'ORP a été annulé au motif qu'elle avait trouvé un emploi dès le 1er novembre 2022.
e. Du 1er novembre 2022 au 31 mars 2024, elle a effectué son stage d’avocate auprès d'une étude genevoise (ci-après : l'employeuse).
B. a. Le 30 mars 2024, l'assurée s’est réinscrite auprès de l'ORP, déclarant être disposée à travailler à 100% à compter du 1er avril 2024.
b. Le 19 avril 2024, la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse) auprès de laquelle l'assurée s'était inscrite a soumis à l'office cantonal de l'emploi (ci-après : l'OCE ou l'intimé) le dossier de l'intéressée, pour examen de son aptitude au placement durant la période du 1er avril au 15 mai 2024. Celle-ci devait passer l'examen du brevet d'avocate, prévu le 15 mai 2024, et avait demandé à son employeuse de terminer son stage un mois plus tôt, soit le 31 mars 2024 au lieu du 30 avril 2024, afin de se préparer au mieux pour son examen. Ceci ressortait notamment d'un avenant au contrat de stage de l'assurée établi le 17 octobre 2023 par l'employeuse, qui avait été transmis à la caisse.
c. Par courriel du 24 avril 2024, l'assurée a informé son conseiller en personnel qu'elle avait été engagée dès le 1er juillet 2024 en qualité d'avocate collaboratrice par l'employeuse, à la condition qu'elle obtienne son brevet d'avocate lors de la session d'examen prévue le 15 mai 2024, à laquelle elle était inscrite.
d. Interrogée par l'OCE par pli du 25 avril 2024, l'assurée à répondu par courriel du 2 mai 2024, expliquant que son stage d'avocate était un emploi incompatible avec la préparation à l'examen du brevet, au vu des nombreuses heures effectuées chaque jour, généralement entre neuf et dix heures, de son niveau de stress et de la survenance ponctuelle et imprévisible d'urgences nécessitant de longues et tardives heures de travail. Ayant préalablement validé six mois de stage au sein d'une administration, elle avait effectué, à la fin du mois de mars 2024, 23 mois de stage sur les 18 obligatoires. En terminant son stage le 31 mars 2024, elle remplissait ainsi les conditions pour s'inscrire à l'examen du brevet le 15 mai 2024, tout en bénéficiant de suffisamment de temps pour se préparer. Si elle avait continué son stage jusqu'au 30 avril 2024, il aurait été illusoire de se présenter à l'examen le 15 mai 2024, elle aurait alors dû attendre la session suivante, soit le 9 octobre 2024, et la période entre son stage et l'examen aurait été de cinq mois et demi et une période de chômage éventuel bien plus longue. Aussi avait-il été convenu avec son employeuse la modification de la durée de son stage par avenant du 17 octobre 2023, afin qu'elle se présente à l'examen du 15 mai 2024, révise correctement durant le mois d'avril 2024 et trouve, dans l'intervalle, un emploi, par exemple, de juriste, de paralegal ou d'assistante, plus compatible avec la préparation de son examen que le stage. L'examen du brevet d'avocat, pour lequel elle confirmait être inscrite à la session du 15 mai 2024, se composait d'une phase de rédaction d'une durée de cinq heures, puis d'une phase orale de 30 minutes. Les heures de passage d'examen seraient communiquées le 8 mai 2024, ce qui ressortait du courrier du 24 avril 2024 de l'École d'avocature (ci‑après : l'ECAV) joint en annexe, et les frais d'inscription s'élevaient à CHF 500.-. En semaine, soit du lundi au vendredi, elle consacrait deux à trois heures à ses révisions, généralement durant ses fins d'après-midis et soirées, ainsi que dix à seize heures les week-ends. Elle était ainsi disposée à exercer un emploi de huit heures par jour, cinq jours par semaine, aux horaires usuels, soit entre 8h00 et 18h00. Or un tel horaire régulier ne pouvait pas être garanti durant le stage d'avocate. Durant son cursus universitaire, elle avait régulièrement travaillé, de sorte qu'elle était habituée à conjuguer emploi et révisions. Dans l'hypothèse présentée, soit un emploi salarié à 100% et/ou une mesure du marché du travail à 100% qui lui aurait été proposé entre le 1er avril et le 15 mai 2024, elle l'accepterait, étant précisé qu'il lui faudrait pouvoir prendre congé le 15 mai 2024 pour passer son examen. Elle transmettait également les preuves de ses recherches d'emploi effectuées, par écrit, avant et depuis le 1er avril 2024, étant précisé qu'en janvier 2024 elle avait eu des contacts téléphoniques avec des personnes de son réseau pour leur faire part de sa recherche d'emploi dès avril 2024. Par ailleurs, elle informait l'OCE de son engagement en qualité d'avocate collaboratrice dès le 1er juillet 2024 auprès de son employeuse, sous réserve de l'obtention du brevet.
e. Par courriels du 21 mai 2024, l'assurée a informé l'OCE que la session d'examen du 15 mai 2024 avait été interrompue, puis annulée, en raison de problèmes informatiques. Elle joignait les justificatifs y relatifs, transmis par l'ECAV. Une nouvelle session, à laquelle elle était inscrite, était fixée au 13 juin 2024. Elle précisait que sa disponibilité pour un emploi demeurait inchangée.
f. Par décision du même jour, l'OCE a déclaré l'assurée inapte au placement du 1er avril au 15 mai 2024 et apte au placement dès le 16 mai 2024 à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100%. Bien que l'assurée ait déclaré être disposée à accepter un emploi à 100% en parallèle à sa préparation à l'examen, cela ne paraissait pas vraisemblable, dès lors que la prise d'un nouvel emploi était tout aussi stressante que le stage, voire d'avantage, compte tenu du fait qu'il convenait de s'adapter à un nouvel environnement, à de nouveaux collègues et de maîtriser de nouvelles règles et compétences, tout en ayant la pression de faire ses preuves, et que la survenance d'urgences était tout aussi probable. Au demeurant, le fait de continuer à travailler comme avocate-stagiaire pouvait être utile pour l'examen final.
g. Le 12 juin 2024, l'assurée a formé opposition contre cette décision. L'OCE n'avait pas tenu compte des spécificités de son cas et de la jurisprudence récente de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) en matière d'assurance chômage et de stage d'avocat. Ainsi, sa décision était arbitraire et violait les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité.
h. Par courriel du 27 juin 2024, l'assurée a informé son conseiller en personnel qu'elle avait passé, avec succès son examen du brevet lors de la session du 13 juin 2024. Elle allait donc commencer à travailler à compter du 1er juillet 2024 comme avocate collaboratrice pour son employeuse et quittait ainsi le chômage dès cette date.
i. Par décision sur opposition du 19 juillet 2024, l'OCE a confirmé sa décision. L'assurée n'avait apporté aucun élément nouveau permettant de revoir sa position.
C. a. Par acte du 16 septembre 2024, l'assurée a interjeté recours par-devant la chambre de céans contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu'il soit constaté qu'elle était apte au placement à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100% du 1er avril au 30 juin 2024 et au versement en sa faveur du solde des indemnités de chômage relatives à cette période, subsidiairement au renvoi de la cause à l'intimé pour nouvelle décision sur son aptitude au placement pour cette période.
b. Dans sa réponse du 14 octobre 2024, l'intimé a conclu au rejet du recours.
c. Copie de ce pli a été transmis à la recourante, qui n'a pas fait valoir d'observations dans le délai octroyé au 7 novembre 2024.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LACI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l’assurance-chômage obligatoire et à l’indemnité en cas d’insolvabilité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
1.3 Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai de trente jours (art. 60 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]) prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA ; art. 89C let. b LPA), le recours est recevable.
2. Le litige porte sur l'aptitude au placement de la recourante durant la période du 1er avril au 15 mai 2024, étant précisé que l'intimé l'a reconnue apte au placement dès le 16 mai 2024 à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100%.
3.
3.1 L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. Conformément à l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, être sans emploi ou partiellement sans emploi (let. a), avoir subi une perte de travail à prendre en considération (let. b), être domicilié en Suisse (let. c), avoir achevé sa scolarité obligatoire et n'avoir pas encore atteint l'âge donnant droit à une rente AVS et ne pas toucher de rente de vieillesse de l'AVS (let. d), remplir les conditions relatives à la période de cotisation ou en être libéré (let. e), être apte au placement (let. f) et satisfaire aux exigences de contrôle (let. g).
Ces conditions sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2). Elles sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI ‑ RS 837.02), ainsi que – dans les limites d'admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 et les références) – par les instructions édictées par le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) en sa qualité d'autorité de surveillance de l'assurance-chômage chargée d'assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l'indemnité de chômage (Bulletin LACI IC).
À teneur de l’art. 15 al. 1 LACI – auquel renvoie l'art. 8 al. 1 let. f LACI –, est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d'intégration et qui est en mesure et en droit de le faire.
L'aptitude au placement comprend ainsi deux éléments : la capacité de travail d'une part, c'est-à-dire la faculté de fournir un travail – plus précisément d'exercer une activité lucrative salariée – sans que l'assuré en soit empêché pour des causes inhérentes à sa personne, et d'autre part la disposition à accepter un travail convenable au sens de l'art. 16 LACI, ce qui implique non seulement la volonté de prendre un tel travail s'il se présente, mais aussi une disponibilité suffisante quant au temps que l'assuré peut consacrer à un emploi et quant au nombre des employeurs potentiels (ATF 146 V 210 consid. 3.1 ; 125 V 51 consid. 6a ; 123 V 214 consid. 3).
L'aptitude au placement est évaluée de manière prospective d'après l'état de fait existant au moment où la décision sur opposition a été rendue et n'est pas sujette à fractionnement. Soit l'aptitude au placement est donnée (en particulier la disposition à accepter un travail au taux d'au moins 20% d'une activité à plein temps ; cf. art. 5 OACI), soit elle ne l'est pas. Lorsqu'un assuré est disposé à n'accepter qu'un travail à temps partiel (d'un taux d'au moins 20%), il convient non pas d'admettre une aptitude au placement partielle pour une perte de travail de 100% mais, à l'inverse, d'admettre purement et simplement l'aptitude au placement de l'intéressé dans le cadre d'une perte de travail partielle. C'est sous l'angle de la perte de travail à prendre en considération (cf. art. 11 al. 1 LACI) qu'il faut, le cas échéant, tenir compte du fait qu'un assuré au chômage ne peut ou ne veut pas travailler à plein temps (ATF 143 V 168 consid. 2 ; 145 V 399 consid. 2.2 ; 126 V 124 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_465/2024 du 5 février 2025 consid. 4.2).
Le Tribunal fédéral a jugé qu'un étudiant est apte à être placé s'il est disposé et en mesure d'exercer de manière durable, tout en poursuivant ses études, une activité à plein temps ou à temps partiel. En revanche, il faut nier la disponibilité au placement d'un étudiant qui ne désire exercer une activité lucrative que pour de brèves périodes ou sporadiquement, notamment pendant les vacances (ATF 120 V 385 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_527/2021 du 16 décembre 2021 consid. 4.3 ; cf. aussi Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 32 ad art. 15 LACI). Pour un étudiant, le fait d'avoir régulièrement travaillé à temps partiel constitue un indice d'aptitude au placement souvent déterminant (Boris RUBIN, op. cit., n. 32 ad art. 15 LACI).
Dans un cas où les cours étaient dispensés les vendredi et samedi, une semaine sur deux, le Tribunal fédéral a retenu que, lorsque les heures de travail liées à une formation en cours d'emploi peuvent être effectuées le soir ou le weekend, elles n'ont pas à être déduites du temps disponible pour une activité lucrative ; retenir le contraire irait à l'encontre d'un des objectifs visés par ce genre de formations, qui est de permettre aux personnes intéressées de maintenir leur place de travail et, dans la mesure du possible, leur taux d'activité. Dans ces conditions, selon la Haute Cour, et contrairement à la position du SECO, la cour cantonale n'avait pas violé le droit fédéral en considérant que l'assuré était disponible à l'emploi, pour un taux d'activité de 90% (arrêt du Tribunal fédéral 8C_14/2015 du 18 mai 2015 consid. 4.3).
Dans un autre arrêt, récent, le Tribunal fédéral a considéré qu’une pharmacienne inscrite en tant que demandeuse d’emploi à 100% depuis le 10 janvier 2019, qui effectuait un diplôme d'études avancées (ci-après : DAS) à l’Université – de septembre 2018 à juin 2019, à raison de trois jours consécutifs de cours par
mois –, présentait une aptitude au placement pour une disponibilité de 85% dès l’ouverture du délai-cadre d’indemnisation au 10 janvier 2019 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_742/2019 du 8 mai 2020).
3.2 En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 ; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1).
4.
4.1 En l'espèce, l'intimé estime que la recourante était inapte au placement durant la période du 1er avril au 15 mai 2024. Selon lui, elle a mis un terme à son contrat de stage, d'entente avec l'employeuse, un mois avant, soit le 30 mars 2024 à la place du 30 avril 2024, afin qu'elle puisse préparer son examen du brevet d'avocate prévu le 15 mai 2024. Bien que la recourante ait déclaré être disposée à accepter un emploi à 100% en parallèle à sa préparation à l'examen, l'intimé considère que la prise d'un nouvel emploi est tout aussi stressante que le stage, voire davantage, compte tenu du fait qu'il convient de s'adapter à un nouvel environnement, à de nouveaux collègues et de maîtriser de nouvelles règles et compétences, tout en ayant la pression de faire ses preuves, et que la survenance d'urgences est tout aussi probable. Il fait valoir également que le fait de continuer à travailler en tant qu'avocate-stagiaire peut être utile pour l'examen final. À l'appui de sa décision, il se réfère à un arrêt du Tribunal fédéral 8C_431/2012 du 12 décembre 2012 (publié in DTA 2013 n. 7 p. 175) portant sur l'aptitude au placement d'un assuré durant sa préparation au brevet d'avocat à Bâle-Campagne.
La recourante conteste cette position. Elle estime que la décision litigieuse est arbitraire et viole les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité. Selon elle, l'intimé n'a pas tenu compte de ses réponses aux questions spécifiques qui lui ont été posées et s'est limité à retenir qu'un nouvel emploi serait équivalant au stage d'avocate en terme de stress. Elle relève que la position de l'intimé entre en contradiction avec la jurisprudence récente de la chambre de céans dans un cas similaire ayant fait l'objet de l'ATAS/350/2023 du 17 mai 2023. Elle fait valoir qu'elle a régulièrement exercé de nouveaux emplois tout au long de ses études universitaires et même en périodes d'examens, de sorte qu'il lui était tout à fait possible de prendre un emploi durant des révisions. La recourante considère, en revanche, que les conditions du stage ne sont pas adaptées à la révision du brevet, contrairement aux emplois qu'elle recherchait depuis le début de l'année 2024. Elle relève d'ailleurs que l'intimé a admis qu'elle avait recherché activement un emploi à la satisfaction de l'ORP. Elle considère que dès lors que son stage était rémunéré en-dessous du salaire minimum en vigueur à Genève, il n'aurait pas été raisonnable qu'elle prolonge, passés les 18 mois de stage requis, un emploi qui n'aurait pas été réputé convenable au sens de la LACI, étant précisé qu'elle a obtenu son brevet lors de sa première tentative, ce qui confirme qu'il n'était pas nécessaire qu'elle poursuive son stage. Elle souligne que les modalités d'examen du brevet diffèrent d'un canton à l'autre, qu'à Genève, il consiste en un examen écrit de cinq heures, suivi en principe le jour-même d'un examen oral de 30 minutes, alors qu'à Bâle-Campagne, il consiste en un examen écrit se composant d'un travail à domicile de cinq jours, ainsi que de deux examens de onze heures, et en un examen oral se divisant en quatre à cinq épreuves de 30 minutes chacune, la totalité de ces examens s'étendant sur une période de six mois. Aussi estime-t-elle que la jurisprudence sur laquelle repose la décision litigieuse ne saurait s'appliquer à son cas. Selon la recourante, il est choquant de considérer qu'un avocat-stagiaire, rémunéré durant 18 mois à un salaire inférieur au salaire minimum genevois, pourrait subvenir à ses propres besoins sans aucune rémunération durant environ six mois, le temps de passer son brevet d'avocat. Par ailleurs, elle fait valoir qu'il existe une inégalité avec les avocats-stagiaires arrivés au terme de leur contrat de stage et révisant pour le brevet d'avocat, dont l'aptitude au placement n'a pas été remise en question par l'intimé, ce dernier les considérant prêts à reprendre un emploi en parallèle de leurs révisions, et qui ont pu bénéficier d'indemnités de chômage. À l'appui de cela, elle se réfère à l'ATAS/350/2023 précité. Enfin, elle allègue qu'à suivre le raisonnement de l'intimé – qui n'a pas réellement examiné sa disponibilité pour un emploi –, elle serait incapable d'effectuer ne serait-ce qu'une demi-journée de travail par semaine, alors qu'elle a déclaré consacrer environ deux à trois heures par jour à ses révisions en semaine, généralement en fin d'après-midi.
4.2 Il convient donc de déterminer si le temps consacré à la préparation de la recourante, pour passer l'examen final du brevet d'avocat à Genève, a des conséquences sur sa disponibilité pour un emploi salarié durant la période du 1er avril au 15 mai 2024.
Comme l'a relevé, à juste titre, la recourante, le système de formation du métier d'avocat diffère d'un canton à un autre.
À Genève, la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10) régit notamment les conditions d’obtention du brevet d’avocat dans son chapitre IV. Aux termes de l’art. 24 LPAv, pour obtenir le brevet d’avocat, la personne concernée doit, cumulativement, avoir effectué des études de droit sanctionnées soit par une licence ou un master délivrés par une université suisse, soit par un diplôme équivalent délivré par une université de l’un des États qui ont conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes (let. a), avoir effectué une formation approfondie à la profession d’avocat validée par un examen (let. b), avoir accompli un stage (let. c) et avoir réussi un examen final (let. d). L'examen final est un examen professionnel vérifiant la maîtrise des compétences juridiques théoriques et pratiques des avocats stagiaires (art. 33A al. 3 LPAv). L’al. 3 de l'art. 33A LPAv prévoit que l'organisation de la commission d'examens et les modalités d’examen sont fixées par le règlement d’application [de la loi sur la profession d’avocat] (RPAv - E 6 10.01). Selon l'art. 34 RPAv, l'examen final comprend une épreuve écrite et une épreuve orale qui doivent être subies au cours de la même session, en principe le même jour.
Dans le canton de Genève, jusqu’en 2011, l’examen du brevet d’avocat suivait un schéma « classique » : diplôme universitaire en droit, stage d’avocat, examen du brevet. Après l’obtention de la licence ou du Master en droit, le/la candidat-e effectuait un stage de 21 mois – durant lequel il/elle suivait des cours de procédure et de déontologie – avant d’entamer une période de préparation rémunérée de trois mois, puis de se présenter aux examens finaux (un écrit et un oral). Au début des années 2000, l’on a jugé ce système inadéquat et, en 2011, l’école d’avocature de l’Université de Genève (« école d’avocature ») fut créée avec un double objectif principal : mieux préparer à la pratique du barreau en amont du stage et éviter les échecs définitifs à un stade très avancé du parcours. Le schéma classique a ainsi laissé place à un nouveau système : licence ou Master en droit, formation approfondie au sein de l’école d’avocature pendant un semestre universitaire, examen approfondi au terme de ce semestre, stage de 18 mois, examen final du brevet d’avocat (un écrit et un oral ; Hadrien MANGEAT, « Le brevet d'avocat à Genève : 10 ans d'école d'avocature », in Revue de l'Avocat 9/2021 p. 387ss). Avant cette réforme du système de formation du métier d'avocat de 2011, les candidats se préparaient durant trois à quatre mois pour présenter l'examen final. L'un des buts visés par la réforme était également de réduire au maximum cette période de préparation, voire dans l'idéal, d'arriver à faire en sorte que les candidats puissent se présenter à l'examen final dans les dernières semaines de leur stage (MGC 2008-2009/ IV A 5965). On précisera encore que selon le rapport du Conseil d'État du 26 août 2015 – faisant un premier bilan du système de l'école d'avocature –, la période de préparation à l’examen final a été réduite, la plupart des candidats se présentant à l’examen final juste après la fin de leur stage, mais il semblerait que d’autres candidats préfèrent passer deux ou trois mois supplémentaires à préparer l’examen, même si la formule de l’examen ne rend pas cette préparation nécessaire. Par conséquent, si l’objectif de réduire la période de préparation à l’examen final est généralement atteint, il reste des cas particuliers qui résultent des choix faits par les stagiaires concernés (Rapport du Conseil d'État du 26 août 2015, M 2149-A, p. 9).
L'arrêt du Tribunal fédéral auquel se réfère l'intimé pour motiver la décision litigieuse concernait un assuré inscrit aux examens du brevet d'avocat à Bâle‑Campagne, qui a été déclaré inapte au placement par l'autorité cantonale durant la période courant du terme de son stage d'avocat à la fin de ses examens du barreau, soit une période de sept mois. Dans cette affaire, le Tribunal fédéral a considéré comme non arbitraire et non manifestement inexact de la part de la juridiction de Bâle-Campagne de retenir que la préparation à l’examen d’accès à la profession d’avocat équivalait à un emploi à plein temps durant environ six mois. Il n’a pas critiqué l’assertion de la juridiction cantonale selon laquelle l’assurance-chômage ne sert pas à dédommager un temps de travail supérieur à 100% mais se limite à des activités de travail dans la norme. Le secrétaire de la commission d'examen du barreau de Bâle-Campagne avait indiqué que la préparation aux examens d'avocat représentait généralement un volume de travail équivalent à un emploi à plein temps pendant environ six mois. En outre, il ressortait des faits de la cause que les examens du barreau auxquels se présentait l'assuré, débutaient le 8 août 2011 par cinq jours de travaux écrits et finissaient le 14 décembre 2011 par les épreuves orales, étant précisé que l'intéressé avait été informé par pli du 9 novembre 2011 de son échec aux examens écrits, de sorte qu'il n'avait pas pu se présenter aux épreuves orales (arrêt du Tribunal fédéral 8C_431/2012 précité).
Force est de constater que le système de formation du métier d'avocat du canton de Bâle-Campagne – tel qu'il ressort de cette affaire portée devant le Tribunal fédéral –, est tout à fait différent de celui du canton de Genève. Depuis la réforme de 2011, on ne saurait retenir que l'examen final du brevet d'avocat à Genève, ainsi que sa préparation, nécessitent autant de disponibilité que pour l'examen du brevet à Bâle-Campagne. L'intimé ne pouvait donc se fonder exclusivement sur cet arrêt pour motiver sa position.
Au contraire, il se justifiait d'examiner la situation spécifique de la recourante pour déterminer son aptitude au placement.
Il ressort du dossier que la recourante – qui était titulaire d’un certificat de spécialisation en matière d’avocature, avait accompli un stage de six mois auprès d'une autorité administrative (validé par la Commission du barreau) et se devait d'accomplir douze mois supplémentaires de stage (cf. art. 31 al. 1 LPAv) dans une étude d’avocats genevoise pour pouvoir se présenter à l’examen final du brevet et terminer sa formation –, a mis un terme à son stage d'avocate le 31 mars 2024 afin de se présenter à l'examen final du brevet de la session du 15 mai 2024. Elle a expliqué qu'elle avait l'intention de réviser durant le mois d'avril et de trouver un emploi, par exemple, de juriste, de paralegal ou d'assistante, notamment auprès d'études d'avocats ou notaires ou de sociétés, plus compatible avec la préparation de son examen que le stage. Il ressort d'ailleurs des formulaires de preuves de recherches d'emploi au dossier, qu'elle a effectivement présenté sa candidature pour ce type de postes dès le mois de janvier 2024, en vue de la fin de son stage et de la période de préparation de l'examen du brevet.
En outre, la recourante a expliqué qu'elle consacrait deux à trois heures – par jour – à ses révisions du lundi au vendredi, généralement durant ses fins d'après-midis et soirées, et dix à seize heures les week-ends, et qu'elle était disposée à exercer un emploi de huit heures par jour, cinq jours par semaine, aux horaires usuels, soit entre 8h00 et 18h00.
On relèvera encore qu'elle a indiqué avoir régulièrement travaillé durant sa formation universitaire – ce qui est confirmé par son curriculum vitae figurant au dossier –, de sorte qu'elle est habituée à conjuguer emploi et révisions.
Enfin, il ressort du dossier que la recourante a activement recherché un emploi et, selon l'intimé, elle l'a fait à la satisfaction de l'ORP (cf. décision initiale du 21 mai 2024 de l'intimé, § 4 de la partie « EN FAIT »).
Or, tous ces éléments tendent clairement en faveur d'une aptitude à l'emploi.
S'agissant en particulier du stage d'avocat, la chambre de céans a déjà eu l'occasion de souligner qu'il ne constitue pas une activité lucrative comme une autre mais, au contraire, la partie pratique d’une formation professionnelle, prévue par le droit cantonal, conduisant à l’obtention du brevet d’avocat et que la poursuite du stage, dont les exigences sont connues pour être élevées, notamment en terme de charge de travail, rend illusoire la préparation du brevet, soit la justification même dudit stage (cf. ATAS/350/2023 précité).
On ajoutera que bien qu'il faille toujours faire preuve d'une certaine adaptation en débutant un emploi, les postes visés par la recourante ne sont pas aussi exigeants en terme de charge de travail que ne l'est le stage d'avocat. Aussi, on ne saurait suivre l'intimé lorsqu'il retient que la prise d'un nouvel emploi est tout aussi stressante, voire davantage, que le stage d'avocat.
Dans la mesure de ce qui précède, l'aptitude au placement ne pouvait d'emblée être niée.
On relèvera encore que l'ATAS/350/2023 précité, sur lequel se fonde la recourante, porte également sur la période entre la fin du stage d'avocate et l'examen final du brevet d'une assurée. Dans cette affaire, l'assurée, qui s'était inscrite au chômage le 2 janvier 2022 après avoir démissionné de son stage d'avocate pour le 31 décembre 2021, avait été déclarée apte au placement par l'OCE à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100% dès le 3 janvier 2022, sous réserve du 23 mars 2022, date de son examen final du brevet d'avocat. L'OCE avait relevé qu'elle avait toujours eu l’habitude de travailler en parallèle à ses formations, avait recherché activement un emploi de juriste, s’était rendue disponible pour ses entretiens de conseil à satisfaction de l’ORP, s’était déclarée prête à repousser l’examen du brevet à une date ultérieure, dans l’hypothèse où elle aurait trouvé un emploi avec entrée en fonction immédiate et que dans ces circonstances, les révisions en vue du brevet étaient compatibles avec la reconnaissance d’une aptitude au placement à un taux de 100%. La question litigieuse n'était donc pas l'aptitude au placement mais la suspension de son droit à l'indemnité de chômage en raison de la résiliation par l'assurée de son contrat de stage d'avocate, qui avait été conclu pour une durée indéterminée. Cette affaire présente de grandes similitudes avec le cas de la recourante.
Au vu de l'ensemble des circonstances, l'aptitude au placement doit être reconnue dès le 1er avril 2024 – et pas seulement à partir du 16 mai 2024 –, à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100%. L'organisation rigoureuse mise en place par la recourante, telle qu'elle l'a exposée, en vue de la préparation à l'examen final du brevet, apparaît compatible avec un emploi à 100% comme ceux recherchés par l'intéressée.
En revanche, la chambre de céans ne saurait trancher, en l'état, la question du versement du solde des indemnités de chômage pour la période du 1er avril au 15 mai 2024, dès lors que la décision litigieuse ne traite que de la condition de l'aptitude au placement et non de l'ensemble des conditions cumulatives ouvrant le droit à ces prestations. Au surplus, la caisse n'est pas partie à la procédure.
5. En conséquence, le recours sera partiellement admis, la décision sur opposition querellée annulée et il sera dit que la recourante était apte au placement dès le 1er avril 2024, à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100%.
La recourante, qui obtient partiellement gain de cause, n'est pas représentée par un mandataire et n’a pas allégué des frais particulièrement importants pour défendre ses droits dans le cadre de la présente procédure de recours, de sorte qu'aucune indemnité ne lui sera accordée à titre de participation à d’éventuels frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).
La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L'admet partiellement.
3. Annule la décision sur opposition du 19 juillet 2024.
4. Dit que la recourante était apte au placement dès le 1er avril 2024, à raison d'une disponibilité à l'emploi de 100%.
5. Dit que la procédure est gratuite.
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Christine RAVIER |
| Le président
Blaise PAGAN |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le