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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1999/2024

ATAS/38/2025 du 22.01.2025 ( PC ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1999/2024 ATAS/38/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 janvier 2025

Chambre 4

 

En la cause

A______,

représenté par Me Karim HICHRI, avocat

 

 

Recourant

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé, le bénéficiaire ou le recourant), né le ______ 1974, s'est établi dans le canton de Genève en décembre 2010, en provenance du Portugal. Il est marié depuis mars 2007 et père de cinq enfants, nés respectivement en 2007, 2010, 2014, 2017 et 2022.

b. Depuis 2017, l'intéressé perçoit une rente entière de l'assurance-invalidité, ainsi que des rentes complémentaires pour enfant. Depuis 2018, il perçoit en outre une pension d'invalidité de la prévoyance professionnelle, ainsi que des pensions complémentaires pour enfant.

c. Le bénéficiaire était aidé dans ses démarches administratives par le Centre d'Information et de Réadaptation (CIR) de l'Association pour le Bien des Aveugles et malvoyants (ci-après : l'ABA).

d. Par décision du 7 février 2020, il a été mis, rétroactivement dès le 1er octobre 2017, au bénéfice de prestations complémentaires (ci-après : PC), étant précisé que le droit aux PC pour la période du 1er octobre 2017 au 29 février 2020, puis dès le 1er mars 2020 était de CHF 0.- et que le montant du subside d'assurance-maladie était déterminé par le service de l'assurance-maladie (ci-après : le SAM).

e. Dès le 1er juillet 2022, le bénéficiaire a commencé à percevoir des PC, en sus des subsides d'assurance-maladie.

B. a. En octobre 2023, il a, par l'intermédiaire de l'ABA, informé le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l'intimé) qu'il avait été mis, rétroactivement, au bénéfice d'une rente d'assurance-invalidité du Portugal.

b. Par décision du 31 janvier 2024, communiquée au bénéficiaire et, en copie, à l'ABA, le SPC a recalculé son droit aux PC dès le 1er octobre 2017, en tenant compte de sa rente étrangère. Les résultats de ses calculs laissaient apparaitre un trop-versé pour la période rétroactive du 1er juillet 2022 au 31 janvier 2024 et le montant de CHF 2'706.- lui était réclamé en restitution. Il était précisé que les plans de calculs, joints à la décision, faisaient partie intégrante de la décision et les montants présentés dans les tableaux « Établissement du droit rétroactif » et « Prestations déjà versées » n'incluaient pas la réduction individuelle de primes d'assurance-maladie qui seraient déterminée par le SAM. S'agissant du droit à venir, au total, le droit aux PC fédérales et cantonales dès le 1er février 2024 s'élevait à CHF 2'716.50 et, ce montant incluant la part de prestation de CHF 1'739.50 réservée au règlement des primes d'assurance-maladie, seul CHF 977.- lui serait versé. Le montant exact de la réduction individuelle de primes d'assurance-maladie serait communiqué par le SAM.

c. Par décision du 22 février 2024, adressée à l’intéressé le 27 février 2024, le SPC a requis le remboursement de CHF 21'198.60 à titre de réductions individuelles de primes d'assurance-maladie perçues en trop pour la période du 1er novembre 2018 au 31 décembre 2020.

d. Le 28 février 2024, le bénéficiaire a déposé une demande d'arrangement de paiement auprès du SPC, reconnaissant lui devoir la somme de CHF 2'706.- et sollicitant la possibilité d'acquitter ce montant en sept mensualités, soit CHF 386.50 par mois.

e. Le 21 mars 2024, le SPC a communiqué au bénéficiaire une nouvelle décision de remboursement des réductions individuelles de primes d'assurance-maladie datée du 12 mars 2024, annulant et remplaçant la décision du 22 février 2024 et ramenant le montant de la demande de restitution à CHF 8'960.-.

f. Le 18 avril 2024, le bénéficiaire a, toujours par l'intermédiaire de l'ABA, formé opposition à cette décision. Le SPC avait fait une erreur sur le montant des allocations familiales versées pour les années 2019 et 2020, en retenant un montant de CHF 19'200.- par an, au lieu de CHF 16'800.-, et tenant ainsi compte d'un supplément d'allocation pour tous les enfants de la famille alors que seuls deux enfants en bénéficiaient conformément à l'attestation d'allocations familiales qui était jointe. Il était précisé que le montant des allocations familiales retenu devait être identique à celui de 2018. Cette différence de revenu avait une incidence sur le montant réclamé par le SAM, qui était faux et trop élevé. Il demandait ainsi la mise à jour du montant des allocations familiales pour les périodes précitées.

g. Par décision du 17 mai 2024, le SPC a rejeté l'opposition et confirmé sa décision du 12 mars 2024. Cette dernière décision – comme celle du 22 février 2024 qu'elle avait annulée et remplacée – portait exclusivement sur la restitution des réductions individuelles de primes d'assurance-maladie et n'était munie d'aucun plan de calcul. Or, le montant des réductions de primes à restituer était basé sur les plans de calcul de la décision du 31 janvier 2024, contre laquelle le bénéficiaire n'avait pas formé opposition, de sorte qu'elle était entrée en force. Par ailleurs, le bénéficiaire avait demandé un arrangement de paiement de la dette de CHF 2'706.- ressortant de la décision du 31 janvier 2024, ce qui indiquait qu'il avait reçu et admis les calculs. Il n'y avait ainsi pas lieu d'y revenir.

C. a. Par acte du 13 juin 2024, le bénéficiaire, représenté par un conseil, a interjeté recours par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre de céans) contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à l'intimé pour nouveau calcul et nouvelle décision.

b. Invité à se déterminer, l'intimé a, par réponse du 12 juillet 2024, conclu au rejet du recours.

c. Par pli du 16 août 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. Interpellé par la chambre de céans, le SAM a expliqué, par courrier du 12 novembre 2024, que le recourant avait notamment bénéficié de subsides mensuels de CHF 390.- pour les mois de novembre et décembre 2018, puis de CHF 430.- pour les années 2019 et 2020, mais qu'à la suite du nouveau plan de calcul transmis par l'intimé, il avait procédé à un nouveau calcul pour déterminer le montant des subsides pour le recourant et sa famille. Ainsi, le droit au subside pour le recourant s'élevait à CHF 230.- pour les mois de novembre et décembre 2018, puis à 70.- pour les années 2019 et 2020. Le SAM joignait ses calculs pour les périodes en cause.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10). La LPGA ne trouve cependant pas application en matière de réduction de primes, respectivement de subsides d’assurances-maladies (art. 1 al. 2 let. c LAMal).

S’agissant de prétentions fondées sur le droit cantonal comme les subsides, l’art. 36 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal - J 3 05) prévoit que les décisions sur opposition, et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte, peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice dans un délai de trente jours à partir de leur notification.

La compétence de la chambre de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Selon l’art. 36 al. 2 LaLAMal, la procédure devant la chambre de céans est réglée par les art. 89A à 89I de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

1.3 Interjeté dans les formes prévues par la loi (cf. art. 89B LPA) et dans le délai de recours de trente jours (cf. art. 62 al. 1 let. a LPA par renvoi de l’art. 89A LPA), le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le montant de CHF 8'960.- demandé en restitution au recourant à titre de réductions de primes d'assurance-maladie (subsides) perçues en trop en 2018, 2019 et 2020, en particulier, sur la quotité du droit aux subsides pour les années 2019 et 2020.

3.             Au préalable, il convient de trancher la question de savoir si les plans de calcul, tels qu'établis par l'intimé à l'appui de la décision de restitution de PC du 31 janvier 2024 – à laquelle le recourant ne s'est pas opposé –, peuvent faire l'objet d'un nouvel examen dans le cadre de la présente cause.

En effet, le recourant invoque le fait que, pour les années 2019 et 2020, l'intimé a établi des plans de calcul tenant compte d'un montant d'allocations familiales supérieur à celui auquel sa famille avait droit, augmentant ainsi le montant du revenu déterminant et donc l'excédent de ressources dont a tenu compte le SAM pour calculer le droit aux subsides pour les années en question.

Pour sa part, l'intimé estime que les plans de calcul, qui ont été transmis au SAM pour la fixation des subsides, sont entrés en force, dès lors qu'ils étaient joints à la décision du 31 janvier 2024 à laquelle le recourant ne s'est pas opposé. Selon l'intimé, les calculs ne peuvent ainsi plus être revus dans le cadre de la décision de restitution de subsides.

En l'occurrence, on ne saurait suivre la position de l'intimé dès lors que cette manière de faire, dans le cas particulier, reviendrait à priver l'assuré d'une voie de droit.

En effet, si l'intimé a recalculé le droit aux PC pour la période rétroactive allant jusqu'au 1er octobre 2017, dans sa décision du 31 janvier 2024, il a uniquement fixé le montant des PC versées en trop pour la période du 1er juillet 2022 au 31 janvier 2024, dès lors que pour les périodes précédentes – y compris les années litigieuses, soit 2019 et 2020 –, le recourant avait un droit aux PC de CHF 0.- selon les anciens et nouveaux plans de calcul. Ainsi, il ne ressort pas de la décision du 31 janvier 2024 un quelconque changement sur le droit au PC du recourant pour les périodes en cause (2019 et 2020) et le recourant n'avait ainsi aucun intérêt, à ce stade, à s'opposer à cette décision.

À cet égard on soulignera qu'en droit fédéral – applicable à la décision du 31 janvier 2024 en matière de restitution de PC –, la qualité pour former opposition (cf. art. 52 LPGA) doit être appréciée de manière identique à la qualité pour recourir selon l'art. 59 LPGA (cf. Valérie DÉFAGO GAUDIN, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 16 ad art. 52 LPGA), que l'art. 59 LPGA reconnaît la qualité pour recourir à celui qui a un intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision litigieuse (Jean MÉTRAL, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 11 ad art. 59 LPGA) et que l’intérêt au recours doit porter sur la modification ou sur l’annulation du dispositif de la décision et non uniquement sur une rectification de la motivation de la décision (ATF 131 II 587 consid. 4.2.1 ; Jean MÉTRAL, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 15 ad art. 59 LPGA). Ainsi, par exemple, la partie recourante ne peut-elle en principe pas se prévaloir d’un intérêt digne de protection à la rectification du taux d’invalidité fixé dans la décision litigieuse, si la rectification n’entraîne aucun changement du droit à la rente. Demeurent réservées des circonstances particulières qui pourraient justifier une décision de constatation sur ce point (ATF 106 V 91 consid. 1 ; Jean MÉTRAL, ibidem). Si cet exemple est un cas d'assurance-invalidité, ce raisonnement peut s'appliquer de la même manière aux autres assurances sociales.

Ainsi, si l'on suit le raisonnement de l'intimé, le recourant aurait dû demander une décision en constatation sur la question du montant de l'allocation familiale pour les années 2019 et 2020, alors qu'elle n'avait aucune incidence sur son droit direct au versement de PC, soit l'objet de la décision du 31 janvier 2024. Or, force est encore de constater qu'à la lecture de cette décision (du 31 janvier 2024), le recourant n'était pas en mesure de saisir les conséquences d'une telle rectification sur son droit aux subsides pour la période en cause. Les plans de calculs pour les années 2019 et 2020 – que ce soit les anciens ou les nouveaux plans –, ne comprennent aucun poste relatif ni à l'assurance obligatoire des soins ni à la réduction de prime individuelle, contrairement aux plans de calcul établis postérieurement au 1er janvier 2021. En outre, la décision du 31 janvier 2024 indique expressément que « les montants présentés dans les tableaux « Etablissement du droit rétroactif » et « Prestations déjà versées » n'incluent pas la réduction individuelle de primes d'assurance-maladie qui sera déterminée par le SAM ». Or, cette mention prête également à confusion quant aux éléments de détermination du subside. Dans ces conditions, le recourant ne pouvait saisir la portée desdits plans pour l'établissement du droit aux subsides d'assurance-maladie.

Au demeurant, on relèvera que les anciens plans de calcul pour les périodes relatives aux années 2019 et 2020 faisaient état d'un montant d'allocations familiales de CHF 16'800.- et que l'intimé, dans ses nouveaux plans relatifs aux mêmes périodes, a modifié ce montant à la hausse, indiquant simplement qu'il tenait compte du supplément d'allocation pour famille nombreuse pour chacun des enfants du recourant. Ce faisant, comme il sera exposé ci-après, l'intimé a procédé à une application inexacte de la loi sur les allocations familiales du 1er mars 1996 (LAF - J 5 10). On relèvera d'ailleurs également que dans les nouveaux plans de calcul pour les périodes donnant droit à un versement direct de PC, soit dès 2022, le montant des allocations familiales retenu par l'intimé est correct.

On ajoutera que si l'intimé entendait se prévaloir de ses plans de calcul pour l'établissement du droit au subside et la demande de remboursement d'un trop perçu de subsides, il aurait dû attendre de recevoir les montants établis par le SAM avant de notifier la totalité des décisions. En procédant en deux temps, comme il l'a fait, il faut considérer qu'il prive l'assuré d'une voie de droit s'il estime que les plans de calculs ne peuvent plus être contestés.

Aussi, dans ce contexte, il y a lieu de revenir sur les plans de calcul de l'intimé pour les périodes déterminantes, soit 2019 et 2020, et revoir le calcul de l'excédent de ressource établi par l'intimé et utilisé par le SAM pour le calcul du droit au subside.

4.             Il convient donc d'examiner si les conditions pour demander la restitution des subsides sont réalisées.

4.1 Conformément à l’art. 33 LaLAMal, les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l’art. 25 LPGA (al. 1). Lorsque les subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire de prestations du SPC, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du service de l’assurance-maladie (al. 2).

En vertu de l'art. 25 al. 2, 1ère phr., LPGA (dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2021) – applicable à la question de la restitution des subsides d'assurance-maladie (cf. art. 33 al. 1 LaLAMal) –, le droit de demander la restitution s'éteint trois ans après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Jusqu’au 31 décembre 2020, l’art. 25 al. 2 1ère phr. aLPGA prévoyait que le droit de demander la restitution s’éteignait un an après le moment où l’institution d’assurance avait eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

D'un point de vue temporel, les règles de droit déterminantes sont en principe celles qui s'appliquent lors de l'accomplissement des faits entraînant des conséquences juridiques. Par ailleurs, le juge se base, en principe, sur les faits survenus jusqu'au moment où la décision litigieuse a été rendue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_193/2021 du 31 mars 2022 consid. 2.2 et les références).

Les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 146 V 217 consid. 2.1 et les références ; 142 V 20 consid. 3.2.2 et les références). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision (ATF 119 V 431 consid. 3c), le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (ATF 138 V 74 consid. 5.2 et les références). En tant qu'il s'agit de délais de péremption, l’administration est déchue de son droit si elle n'a pas agi dans les délais requis (cf. ATF 134 V 353 consid. 3.1 et les références).

Le délai de péremption absolu de cinq ans commence à courir à la date du versement effectif de la prestation, et non à la date à laquelle elle aurait dû être fournie (ATF 112 V 180 consid. 4a et les références).

L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision - formelle ou non - par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426
consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

4.2 En l'occurrence, l'intimé a été informé en octobre 2023 que le recourant avait été mis au bénéfice, rétroactivement, d'une rente étrangère. Il s'agit d'un fait nouveau découvert après coup susceptible de modifier le calcul des prestations et justifiant avec effet ex tunc la révision procédurale des décisions précédemment rendues d'octroi de subsides. En réclamant, par décision du 21 mars 2024, la restitution des subsides versées, selon son appréciation, à tort en 2020, rétroactivement pour les années 2018, 2019 et 2020 (cf. art. 33 al. 1 et 2 LaLAMal), l'intimé a respecté tant le délai relatif de trois ans à compter du moment où il a eu connaissance des faits que le délai absolu de cinq ans après le versement de la prestation (art. 25 al. 1 1ère phrase et al. 2 – dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2021 – LPGA).

5.             Reste à examiner le grief invoqué par le recourant sur le fond

5.1 Aux termes de l’art. 19 LaLAMal, conformément aux art. 65ss LAMal, l’État de Genève accorde aux assurés de condition économique modeste des subsides destinés à la couverture totale ou partielle des primes de l’assurance-maladie. Les subsides sont notamment destinés aux assurés bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI accordées par le SPC (cf. art. 20 al. 1 let. b LALAMal). Le droit aux subsides s'étend notamment au conjoint et aux enfants à charge de l'ayant droit (cf. art. 21 al. 4 LaLAMal).

L’art. 22 LaLAMal, à son al. 6 dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2019 et à son al. 7 dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2020 au 31 mars 2021, disposait que les bénéficiaires d’une prestation annuelle, fédérale et/ou cantonale, complémentaire à l’AVS/AI versée par le service ont droit à un subside égal au montant de leur prime d’assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l’intérieur. Les personnes qui ont un excédent de ressources inférieur à la prime moyenne cantonale ont droit à un subside équivalent à la différence entre la prime moyenne cantonale et l’excédent de ressources.

En pratique, le SPC procédait au calcul des dépenses du bénéficiaire, sans prendre en considération les primes d’assurance-maladie, puis il admettait le droit au subside en fonction du montant de l’excédent de ressources (ATAS/1039/2013 du 29 octobre 2013 consid. 11a/cc).

L'art. 11A al. 1 du règlement d'exécution de la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 15 décembre 1997 (RaLAMal - J 3 05.01) prévoyait qu'en application de l'art. 22 al. 6 [dans sa teneur du 10 octobre 2018 au 31 décembre 2019] et al. 7 [dans sa teneur du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020], de la loi [LaLAMal], les bénéficiaires de prestations complémentaires à l'AVS/AI dont l'excédent de ressources était inférieur à la prime moyenne cantonale avaient droit à un subside correspondant à la différence entre la prime moyenne cantonale et l'excédent de ressources, mais, sous réserve des alinéas 2 et 3, au moins égal : à CHF 30.- par mois par personne adulte (let. a) ; à la moitié de la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur, arrondie au franc supérieur, par jeune assuré majeur au sens de l'art. 20 al 3 let. b, de la loi (let. b) ; au montant de la prime mensuelle, mais au maximum au montant de la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur, arrondie au franc supérieur, par enfant mineur à charge de l'ayant droit (let. c).

L'al. 2 de l'art. 11A RaLAMal prévoyait – dans sa teneur du 10 octobre 2018 au 31 décembre 2019 – que lorsqu'un solde était disponible après application de l'alinéa 1, il était attribué sous forme de subside aux différents bénéficiaires selon les principes suivants : le solde était attribué par tranches successives de CHF 20.- à concurrence du montant disponible (let. a) ; la dernière tranche était arrondie à la vingtaine de francs supérieure (let. b) ; le solde est attribué jusqu'à son épuisement, successivement à chaque bénéficiaire du plus jeune au plus ancien (let. c) ; pour chacun des bénéficiaires, le solde est attribué jusqu'à concurrence de la prime moyenne cantonale (let. d). La lettre d de cet alinéa a été modifié le 1er janvier 2020 et, dans sa teneur durant l'année 2020, elle précisait que pour chacun des bénéficiaires, le solde est attribué jusqu'à concurrence de la prime moyenne cantonale pour le calcul des prestations complémentaires.

Enfin, selon l'alinéa 3 de l'art. 11A RaLAMal, en cas de variation de dépenses ou de revenus donnant lieu à un changement du montant du subside déterminé selon l'article 22, alinéa 6 [dans sa teneur du 10 octobre 2018 au 31 décembre 2019] et alinéa 7 [dans sa teneur du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020], de la loi [LaLAMal], le subside est modifié ou supprimé. En cas de justes motifs, le service peut toutefois, à la demande du service des prestations complémentaires, ne pas maintenir ce subside.

Selon l'ordonnance du DFI relative aux primes moyennes de l'assurance obligatoire des soins pour le calcul des prestations complémentaires (RS 831.309.1), la prime moyenne cantonale annuelle à Genève pour un adulte s'élevait à CHF 7'164.- (soit CHF 597.- par mois) en 2019 et à CHF 7'224.- (soit CHF 602.- par mois) en 2020. Pour un enfant, elle s'élevait à CHF 1'704.- (soit CHF 142.- par mois) en 2019 et à CHF 1'716.- (soit CHF 143.- par mois) en 2020.

Selon l'art. 8 LAF, l'allocation pour enfant est de CHF 300.- par mois pour l'enfant jusqu'à 16 ans (al. 2 let. a), de CHF 400.- par mois pour l'enfant de 16 à 20 ans (al. 2 let. b LAF) et pour le troisième enfant donnant droit aux allocations et chacun des enfants suivants, les montants figurant notamment à l'alinéa 2 sont augmentés de 100 francs (al. 4 let. b).

5.2 En l'espèce, la décision litigieuse fait état d'un montant de CHF 8'960.- à rembourser à titre de subsides versés en trop pour les années 2018, 2019 et 2020.

Le recourant conteste le montant des subsides relatifs aux années 2019 et 2020 réclamés en restitution, en particulier celui de l'allocation familiale retenu dans les plans de calcul établis par l'intimé pour la détermination de l'excédent de ressources dont tient compte le SAM pour calculer le droit aux subsides.

En l'occurrence, comme indiqué précédemment, en établissant ses nouveaux plans de calcul pour les périodes couvrant les années 2019 et 2020, l'intimé a modifié le montant des allocations familiales, retenant CHF 19'200.- en lieu et place de CHF 16'800.-. Or, il ressort de la décision d'allocations familiales du 9 août 2019, produite par le recourant, que dès le 1er juillet 2019, son épouse avait mensuellement droit à CHF 300.- en faveur de chacun de ses deux enfants plus âgés et à CHF 400.- en faveur de chacun de ses deux plus jeunes enfants, soit au total à CHF 1'400.- par mois. On rappellera à cet égard que pour les années en cause, le recourant avait quatre enfants, tous âgés de moins 16 ans. Ainsi, conformément à la décision d'allocations familiales précitée, le supplément de CHF 100.- est attribué seulement au troisième enfant et aux suivants, et non aux deux premiers enfants, comme semble l’avoir retenu par erreur l'intimé dans ses nouveaux plans de calculs.

En conséquence, il convient de retenir le montant de CHF 16'800.- d'allocations familiales pour le calcul de l'excédent de ressource du recourant pour les années 2019 et 2020. Il n'y a pas lieu de revenir sur les autres postes des plans de calcul, lesquels ne sont au demeurant pas contestés par le recourant. Ainsi, en rectifiant uniquement le montant des allocations familiales pour les périodes en cause dans les nouveaux plans de calcul établis par l'intimé, l'excédent de ressource en matière de PC cantonales – déterminant pour le calcul du montant du droit au subside – se voit diminué de la manière suivante :

Du 1er janvier au 30 juin 2019, CHF -4'037.- (au lieu de CHF -6'437.-) ;

Du 1er juillet au 31 octobre 2019, CHF -4'050.- (au lieu de CHF -6'450.-) ;

Du 1er novembre au 31 décembre 2019, CHF -4'051.- (au lieu de CHF -6'451.-) ;

Du 1er janvier au 31 décembre 2020, CHF -4'117.- (au lieu de CHF -6'517.-).

Ainsi, il appartiendra à l'intimé de transmettre ces nouveaux montants au SAM, à titre d'excédent de ressource, afin qu'il recalcule le droit au subside du recourant pour les années 2019 et 2020 et rectifie le montant des subsides à demander en restitution à ce dernier.

La chambre de céans relèvera encore que les calculs transmis par le SAM comprennent deux imprécisions qu'il conviendra de rectifier. Ainsi, pour le calcul du subside de 2019, la prime moyenne cantonale est de CHF 142.- par enfant et non CHF 138.-, et elle est de CHF 597.- pour un adulte et non CHF 598.- (cf. ordonnance du DFI susmentionnée).

On rappellera également que l'établissement du droit au subside doit se faire conformément à la règle posée à l'art. 11A RaLAMal précité et que, ainsi, après avoir déterminé le montant mensuel à allouer au groupe familial, il convient de procéder en deux étapes.

La chambre de céans soulignera, enfin, qu'au même titre que les plans de calcul sont joints à la décision de restitution de PC, les calculs d'établissement du droit au subside devraient être joints à la décision de restitution de subsides, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, puisqu'il a fallu interpeller le SAM pour les obtenir.

6.             Dans la mesure de ce qui précède, le recours est admis, la décision du 21 mars 2024 annulée et la cause renvoyée à l'intimé pour nouveau calcul au sens des considérants du trop-alloué de subsides pour les années 2019 et 2020 et nouvelle décision.

Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 2’500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (89H al. 1 LPA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision du 21 mars 2024.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour nouveau calcul au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Alloue au recourant, à la charge de l’intimé, une indemnité de CHF 2’500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le