Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/28/2024

ATAS/1051/2024 du 20.12.2024 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/28/2024 ATAS/1051/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 décembre 2024

Chambre 9

 

En la cause

A______

représentée par Me Butrint AJREDINI, avocat

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née le ______ 1964, a été victime d'un accident non professionnel en date du 3 novembre 2021, une nacelle élévatrice l'ayant percutée et ayant roulé sur son pied gauche.

b. L'assurée a séjourné au service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des Hôpitaux universitaires genevois (ci-après : HUG) du 3 au 14 novembre 2021, où un traitement conservateur a été mis en place.

c. Une radiographie et un scanner du pied réalisés après l'accident ont mis en évidence une fracture intra-articulaire peu déplacée de la malléole interne gauche, de multiples fractures non déplacées des os naviculaire, cunéiforme latéral et troisième métatarse, sans signe de luxation du Lisfranc, ainsi qu'un arrachement antéro-latéral du tibia. Une radiographie du poignet gauche a conclu à l'absence de fracture aigüe décelable, mais à une rhizarthrose de grade III et à une déminéralisation osseuse, tandis qu'une radiographie du genou gauche est revenue dans la norme.

d. La VAUDOISE GÉNÉRALE, Compagnie d'assurances SA (ci-après : l'assurance-accidents) a pris en charge le cas et alloué ses prestations.

e. L'assurée, diplômée en 1982 de l'école supérieure de commerce, avait mis un terme à son activité professionnelle dans le domaine administratif en 1997 pour se consacrer à l'éducation de ses deux enfants, puis avait développé une activité indépendante de thérapeute en 2009, qu'elle avait dû compléter par des activités d'animatrice parascolaire et de vendeuse sur les marchés dès la pandémie de Covid-19.

B. a. Le 1er février 2022, l'assurée a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI).

b. Dans un rapport du 14 février 2022, le docteur B______, médecin traitant de l'assurée et spécialiste en médecine interne générale et en rhumatologie, a diagnostiqué un polytraumatisme de la cheville et du pied gauches consécutif à l'écrasement du membre inférieur gauche. Il a relevé que l'assurée, qui marchait toujours avec deux cannes, était très limitée dans ses activités de la vie quotidienne et n'était pas en mesure de reprendre son activité professionnelle. S'agissant de la capacité de travail dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, il a renvoyé aux orthopédistes des HUG.

c. Une radiographie réalisée le 17 mars 2022 a conclu à la consolidation de l'ensemble des fractures de la cheville et du pied et à une déminéralisation osseuse de décharge.

d. Le 28 mars 2022, le Dr B______ a indiqué à l'assurance-accidents que l'assurée avait débuté un traitement pour soigner un état dépressif post-traumatique consécutif à l'accident qui avait bouleversé sa vie personnelle et professionnelle.

e. Dans un rapport de consultation ambulatoire initiale du 16 mai 2022, les médecins des HUG en chirurgie du pied ont retenu une probable étiologie d'algoneurodystrophie de la cheville et du pied gauches et ont adressé l'assurée aux spécialistes de l'antalgie afin de mieux gérer les douleurs.

f. Le 19 mai 2022, l'OAI a communiqué à l'assurée que des mesures d'intervention précoce et de réadaptation professionnelles n'étaient pas indiquées.

g. Une échographie de l'épaule droite du 21 juin 2022 a fait état de signes radiologiques compatibles en premier lieu avec une enthésopathie calcifiante de la coiffe des rotateurs et d'une minime omarthrose débutante.

h. Dans un rapport du 8 juillet 2022, le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, psychiatre traitant, a indiqué que l'assurée souffrait d'un trouble dépressif récurrent, épisode moyen avec syndrome somatique (F33.11), qui impactait sa capacité de travail, à la suite d'une rechute dépressive après l'accident et le décès de sa mère en avril 2022. Des traits de la personnalité émotionnellement labile étaient aussi présents, mais sans incidence sur la capacité de travail. Des troubles de la concentration et un ralentissement psychomoteur moyens étaient constatés. La capacité de travail de l'assurée était de 50% dans son activité habituelle et dans une activité adaptée « selon la jurisprudence de novembre 2017 ».

i. Par rapport du 28 octobre 2022, le docteur D______, médecin interne au service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des HUG, a indiqué que l'évolution de l'assurée était lentement favorable mais qu'une limitation de la mobilité en raison de douleurs persistait. L'assurée utilisait toujours une canne anglaise et ne pouvait exercer une activité professionnelle adaptée à son état de santé en raison de ses douleurs. Il a joint divers rapports de consultation de suivi, faisant état de l'absence de grande progression malgré l'optimisation du traitement antalgique par l'équipe de la douleur et d'une infiltration réalisée en avril 2022 pour traiter la rhizarthrose gauche, avec, depuis lors, réapparition des douleurs.

j. Le 23 novembre 2022, la docteure E______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a rendu un rapport d'expertise, à la demande de l'assurance-accidents. Elle a diagnostiqué, avec incidence sur la capacité de travail, un trouble de l'adaptation avec réaction dépressive prolongée (43.21) depuis novembre 2021, stabilisé. La symptomatologie dépressive était stabilisée, aucun symptôme du registre dépressif n'étant présent lors de l'examen et l'échelle de dépression de Hamilton revenant avec un score non significatif (trois points). Les troubles de l'adaptation, avec un traitement bien conduit, ne permettaient en outre pas de justifier une mise en incapacité de travail sur la durée. Aucun diagnostic d'état de stress post-traumatique ne pouvait être retenu au jour de l'examen, ni un syndrome douloureux somatoforme persistant. L'assurée avait des traits de la personnalité insécure. Le trouble dépressif récurrent retenu par le Dr C______ ne pouvait être confirmé, en l'absence d'antécédent psychiatrique et du nombre requis de symptômes de la dépression. Les capacités de concentration, de compréhension et d'adaptation au rythme de travail n'étaient pas limitées pour des motifs strictement psychiatriques et aucune autre limitation fonctionnelle n'était retenue par l'experte. La capacité de travail de l'assurée était entière, sans limitation de rendement, dans toute activité.

k. Dans un rapport du 12 janvier 2023, le Dr B______ a indiqué que l'assurée n'était pas en mesure d'exercer une activité professionnelle adaptée à son état de santé en raison de troubles psychiques post-traumatiques entraînant un épuisement psychique. Il a au surplus renvoyé aux HUG pour les suites de l'accident.

l. Le 29 janvier 2023, la docteure F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ayant poursuivi le traitement du Dr C______, a posé les diagnostics de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen avec symptômes somatiques (F33.11) et de syndrome douloureux somatoforme persistant, chronique (F45.4), restreignant tous deux sa capacité de travail. L'assurée avait présenté un premier épisode dépressif et des attaques de panique lors de son divorce. Actuellement, son attention et sa concentration étaient un peu diminuées, elle avait du mal à s'organiser, se plaignait de troubles de la mémoire, avait une thymie triste, une baisse de l'énergie et de la motivation, un ralentissement psychomoteur, un sentiment d'inutilité et une baisse de l'estime de soi. Le sommeil était désorganisé et l'appétit diminué. En raison des limitations psychiques mais aussi physiques (marche avec une canne, douleurs au niveau des pieds, surtout le gauche, des épaules, mains, surtout la droite, et au dos) elle avait une capacité de travail nulle dans toute profession.

m. En date du 24 mars 2023, sur mandat de l'assurance-accidents, le docteur G______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a rendu un rapport après avoir expertisé l'assurée et fait procéder à une scintigraphie osseuse ainsi qu'à un Spect-CT-scan le 27 février 2023. Selon les images recueillies, il n'existait aucun argument pour un syndrome douloureux régional complexe, pas d'anomalie scintigraphique en regard de la malléole interne, du cuboïde et du naviculaire du pied gauche, et pas de signe de pseudarthrose, ni de cal vicieux du tarse gauche. Dans ce contexte, on ne comprenait pas objectivement les raisons de la démarche actuelle de l'assurée et de ses plaintes somatiques ; des facteurs psycho-sociaux étaient suspectés. Les troubles suivants avaient une répercussion sur la capacité de travail de l'assurée : troubles algiques perdurants de la cheville et du pied gauches entraînant une démarche en suspension du talon gauche associée à une ostéopénie de décharge sans corrélation objective l'expliquant, rhizarthrose bilatérale préexistante, tendinopathie calcifiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite, préexistante. Des hypodysesthésies modérées associées à une dermite ocre dans la région de la malléole interne post-écrasement traumatique étaient diagnostiquées sans influence sur la capacité de travail. Sur le plan de l'assurance-accidents, les limitations fonctionnelles étaient la position verticale et en charge sur une longue durée, le déplacement sur des sols irréguliers et le port de charges de manière répétitive de plus de 5 kg. Dans une activité respectant ces limitations, telle que l'ancienne activité de secrétaire ou d'assistante de direction, la capacité de travail de l'assurée était entière sans baisse de rendement, dès fin 2022, au plus tard début 2023.

n. Le 28 avril 2023, la docteure H______, médecin interne au service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des HUG, a attesté que la rhizarthrose gauche de stade III entraînait une nette diminution de la force et de la préhension de la main gauche de l'assurée, ce qui proscrivait les activités nécessitant le port de charges et celles manuelles. Une autre activité était possible.

o. Dans un avis du 15 mai 2023, le service médical régional (ci-après : SMR) de l'OAI a fait siennes les conclusions des expertises des Drs E______ et G______ et, en raison de douleurs chroniques de la cheville et du pied gauche, de troubles de la marche, d'un syndrome de Reynaud, d'enthésopathie calcifiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite, d'une rhizarthrose des deux côtés, de lombalgies chroniques non déficitaires, de douleurs mécaniques du genou gauche sur fond de troubles dégénératifs et de trouble de l'adaptation traité, a retenu une capacité de travail nulle de l'assurée dans son activité habituelle, et entière dès janvier 2023 au plus tard dans une activité respectant les limitations suivantes : activité légère, sédentaire, principalement en position assise, permettant l'alternance des positions au gré de l'assurée, sans activité répétée en force des deux mains, sans manipulations de charges de plus de 5 kg à répétition, sans position du rachis en porte-à-faux, à répartir sur cinq jours ouvrables.

p. Par décision du 27 juin 2023, l'assurance-accidents a mis fin au versement de l'indemnité journalière avec effet au 30 septembre 2023, afin de permettre à l'assurée de changer d'orientation professionnelle, et a refusé de verser une rente d'invalidité, la comparaison des revenus ne faisant pas apparaître de perte économique.

q. Le 8 août 2023, la Dre F______ a rédigé un certificat médical aux termes duquel l'assurée souffrait d'un état de stress post-traumatique depuis l'accident et d'un épisode dépressif d'intensité moyenne à sévère qui nécessitaient un traitement. Les problématiques psychiatriques étaient secondaires à l'accident et aux conséquences physiques et économiques en découlant.

r. Après avoir reçu l'assurée en entretien le 19 septembre 2023 et obtenu des renseignements sur sa situation professionnelle avant accident, l'OAI a fixé le revenu annuel de l'assurée sans invalidité à CHF 44'617.-, correspondant au bénéfice réalisé pour son activité d'indépendante en 2019, avant le Covid-19, chiffre qui était plus favorable que la moyenne des années 2016-2019. L'assurée a indiqué ne pas se sentir prête à reprendre une quelconque activité professionnelle, même à temps partiel, en raison de ses douleurs et du traitement médicamenteux qui la fatiguait. Elle a par ailleurs relevé avoir contesté la décision de
l'assurance-accidents du 27 juin 2023, devoir subir une intervention pour la pose d'un boîtier de neurostimulation dans le dos et devoir recevoir une nouvelle infiltration dans l'épaule droite ainsi que dans la main gauche. De nouvelles pièces médicales ont dans ce cadre été produites et soumises au SMR, lequel, le 25 septembre 2023, n'a pas retenu d'aggravation notable et durable de l'état de santé de l'assurée, de sorte que son précédant avis demeurait inchangé.

s. Par projet de décision du 29 septembre 2023, reçu le 3 octobre 2023 par le conseil de l'assurée selon le timbre apposé sur le pli, l'OAI a dit que l'assurée avait droit à une rente entière d'invalidité du 1er novembre 2022 au 31 mars 2023, sa capacité de travail dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles étant de 100% sans baisse de rendement dès le 1er janvier 2023 au plus tard. Des mesures professionnelles n'étaient pas indiquées, n'étant ni simples, ni adéquates et ne respectant pas le principe d'équivalence. De telles mesures n'entraîneraient de plus que très difficilement une diminution de la perte de gain. La perte de gain ne devait pas être établie par le biais d'une enquête économique, dans la mesure où l'assurée ne pouvait reprendre son activité habituelle indépendante en raison de ses atteintes à la santé, mais par le biais de la comparaison ordinaire des revenus. Compte tenu d'un revenu sans invalidité de CHF 44'416.- et d'un revenu avec invalidité de CHF 54'222.- (correspondant au salaire statistique 2020 d'une femme travaillant dans une activité de niveau 1, après indexation), la perte de gain était nulle.

t. Sous la plume de son conseil, l'assurée a contesté, le 1er novembre 2023, le projet précité, concluant à l'octroi d'une rente entière d'invalidité. Elle a exposé qu'avant l'accident, elle exerçait plusieurs activités économiques, tout d'abord en tant qu'indépendante, qu'elle avait complétée par des activités salariées pour subvenir à ses besoins à l'arrivée de la pandémie de Covid-19. Son intention avait toutefois toujours été d'exercer son activité en sa qualité d'indépendante et de la développer par de nouvelles formations et thérapies à la levée des mesures sanitaires, si l'accident n'était pas survenu. Au vu de son intention d'accroître l'offre des prestations proposées, le revenu sans invalidité aurait à tout le moins été de CHF 55'000.- sans atteinte à la santé. Elle a au surplus souligné que les rapports de ses médecins traitants étaient concordants et concluaient à une capacité de travail nulle, notamment en raison de ses importantes atteintes psychiques. S'agissant de l'activité adaptée sédentaire préconisée par les experts, telle qu'assistante de direction, elle était contraire à ses limitations fonctionnelles, au vu de l'arthrose des mains. Cela faisait en outre plus de 30 ans qu'elle n'avait pas exercé dans ce domaine et plus de 20 ans qu'elle n'exerçait pas dans le secteur privé. Il était donc illusoire qu'elle puisse exercer une telle activité sur le marché équilibré de l'emploi, à son âge, avec ses limitations fonctionnelles et sans compétences informatiques ou en anglais. Un abattement de 25% sur le revenu avec invalidité devait à tout le moins être retenu, si par impossible une comparaison des revenus était maintenue.

u. Par décision du 15 novembre 2023 notifiée par la caisse de compensation, l'OAI a déclaré maintenir son projet de décision et a alloué à l'assurée une rente entière d'invalidité du 1er novembre 2022 au 31 mars 2023, ainsi qu'une rente enfant liée. L'OAI avait par ailleurs préparé une nouvelle motivation à la suite des observations déposées par l'assurée, aux termes de laquelle, en l'absence de nouvelles pièces médicales probantes, il maintenait sa position. Ladite motivation avait été transmise le 3 novembre 2023 à la caisse, mais la décision notifiée par cette dernière mentionne qu'en l'absence de contestation dans les délais, il était présupposé que l'assurée était d'accord avec le projet de décision.

C. a. Le 3 janvier 2024, l'assurée, représentée par son avocat, a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision précitée, sollicitant son annulation. Elle a souligné avoir été hospitalisée en clinique psychiatrique durant trois semaines au mois de novembre 2023. Elle a repris les arguments développés dans ses observations faisant suite au projet de décision du 20 septembre 2023 et exposé que sa situation somatique et psychique n'était pas stabilisée. Les douleurs rhumatologiques entraînaient une incapacité de travail pouvant être évaluée à hauteur de 100%, tout comme les troubles psychiatriques dont elle souffrait. Compte tenu de l'arrêt de toute activité dans le domaine administratif depuis de longues années, de sa non-maîtrise de l'informatique et de l'anglais, de son âge et de ses limitations fonctionnelles, il était au surplus impossible qu'elle exerce une telle activité ou qu'un reclassement dans ce domaine soit ordonné.

b. Le 10 janvier 2024, l'intimé a indiqué, à la demande de la chambre de céans, que la décision du 15 novembre 2023 avait été envoyée sous pli simple, de sorte qu'il n'y avait aucun récépissé postal.

c. Le 1er février 2024, l'intimé a conclu à l'irrecevabilité du recours, celui-ci étant tardif selon les indications en sa possession, au vu de la notification de la décision entreprise le 16 novembre 2023 au domicile élu (selon les allégations de la recourante) et de l'envoi du recours le 4 janvier 2024. Il réservait sa position sur le fond du litige, si par impossible le recours devait être déclaré recevable.

d. Par réplique du 8 février 2024, la recourante, joignant des justificatifs, a souligné avoir interjeté recours dans les délais utiles, celui-ci ayant été déposé dans un automate MyPost 24 le 3 janvier 2024.

e. Le 12 février 2024, la chambre de céans a sollicité des précisions quant à l'envoi du recours, remarquant que le numéro de suivi des envois indiqué par la recourante ne correspondait pas à celui du pli contenant le recours.

f. Le 18 février 2024, la recourante a fourni des explications et transmis des justificatifs montrant que le pli contenant le recours avait été affranchi avec un certain numéro de suivi, et ensuite réaffranchi avec un autre numéro.

g. Par mémoire de réponse du 14 août 2024, l'OAI a relevé avoir retenu le revenu sans invalidité le plus favorable à la recourante avant l'atteinte à la santé et qu'il ne se justifiait pas de prendre en compte un revenu considérablement supérieur, par pure opportunité. Sur le plan médical, deux expertises avaient été réalisées, desquelles il découlait que la recourante pouvait effectuer une activité légère, et aucun élément médical objectif ne venait contredire cette conclusion.

h. Par observations du 11 novembre 2024, la recourante a conclu à l'octroi d'une rente entière d'invalidité, subsidiairement à ce qu'une expertise pluridisciplinaire soit ordonnée. L'évolution de son état de santé était très défavorable. Elle avait été vue par un rhumatologue, qui avait diagnostiqué une fibromyalgie sévère, elle souffrait d'atteintes articulaires (rhizarthrose de stade III au pouce, omarthorse et enthésopathie à l'épaule et au bras droit), d'un trouble somatoforme douloureux, d'hyperventilation et d'une dyspnée chronique, et avait subi deux embolies pulmonaires. Son psychiatre traitant avait par ailleurs diagnostiqué un trouble dépressif récurrent avec syndrome somatique nécessitant une hospitalisation de trois semaines dans une clinique. Elle bénéficiait par ailleurs de l'aide d'un infirmier psychiatrique pour ses démarches administratives et, malgré le suivi médical intensif et multidisciplinaire, aucune amélioration de son état de santé n'était envisagée à court ou moyen terme. Les diagnostics cliniques et leur impact fonctionnel sur son quotidien démontraient qu'elle n'avait aucune capacité de gain, ce de manière irréversible et durable. L'intimé se fondait sur des rapports médicaux datant de plus de trois ans qui n'avaient aucune force probante compte tenu de l'aggravation continue de son état de santé.

i. Le 6 décembre 2024, la recourante a déposé un chargé de pièces complémentaire comportant les résultats de divers rendez-vous médicaux réalisés entre avril et mai 2024, faisant notamment état de ce qu'elle était atteinte d'une fibromyalgie sévère, de ce qu'elle avait subi deux embolies pulmonaires et présentait une dyspnée sur respiration dysfonctionnelle avec hyperventilation.

j. Le 12 décembre 2024, la recourante a produit un rapport des HUG du 19 novembre 2024 indiquant qu'elle avait été admise au service des urgences en raison d'un épisode d'hypotension et de ralentissement psychomoteur.

k. Ces éléments ont été transmis à l'intimé.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA) et au vu des justificatifs d'envoi fournis par la recourante, le recours a été interjeté le délai prévu par la loi.

Il respecte en outre les exigences de forme, de sorte qu'il est recevable.

2.             Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestations de
l'assurance- invalidité au-delà du 31 mars 2023, une rente entière lui ayant été allouée du 1er novembre 2022 jusqu'à cette date.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

En l’occurrence, le droit à une rente d’invalidité est né en novembre 2022, en raison de l'exigence d'une incapacité de travail d'au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (cf. art. 28 al. 1 let. b LAI), de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

3.2 En vertu de l'art. 57a al. 1 LAI, au moyen d'un préavis, l'office AI communique à l'assuré toute décision finale qu'il entend prendre au sujet d'une demande de prestations, ou au sujet de la suppression ou de la réduction d'une prestation déjà allouée ainsi que toute décision qu'il entend prendre au sujet d'une suspension à titre provisionnel des prestations. L'assuré a le droit d'être entendu, conformément à l'art. 42 LPGA. L'al. 3 énonce que les parties peuvent faire part de leurs observations concernant le préavis dans un délai de 30 jours.

L'assuré peut communiquer ses observations à l'office AI par écrit ou oralement, lors d'un entretien personnel (art. 73ter al. 2 1ère phr. RAI).

À teneur de l'art. 74 RAI, une fois l'instruction de la demande achevée, l'office AI se prononce sur la demande de prestations (al. 1). La motivation tient compte des observations qui ont été faites par les parties sur le préavis, pour autant qu'elles portent sur des points déterminants (al. 2).

En dérogation à l'art. 52 LPGA, les décisions des offices AI cantonaux peuvent directement faire l'objet d'un recours devant le tribunal des assurances du domicile de l'office concerné (art. 69 al. 1 let. a LAI).

Selon la jurisprudence et la doctrine, le délai accordé à l'assuré pour faire valoir d'éventuelles observations doit être respecté par l'office AI. Ce dernier commet ainsi une violation du droit de l'assuré à être entendu, lorsqu'il statue avant l'échéance du délai imparti à celui-ci pour qu'il se détermine sur le projet de décision, en écartant ainsi des moyens déposés en temps utile, ou en n'entrant pas en matière sans tenir compte d'une demande de prolongation du délai présentée par l'assuré dans le délai de trente jours, par exemple afin qu'il puisse se faire conseiller par le représentant qu'il a désigné entre-temps (arrêts du Tribunal fédéral I 658/04 du 27 janvier 2006 consid. 5 ; I 459/02 du 29 octobre 2002 consid. 4 ; Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur
l'assurance-invalidité, 2018, n. 8 ad art. 57a LAI).

Dans le cadre de la procédure de préavis, l'office AI ne saurait se limiter à prendre connaissance et à examiner les observations ou les objections de l'assuré. Il doit bien plutôt se prononcer expressément sur les points essentiels justifiant sa décision ou à tout le moins indiquer les raisons pour lesquelles il ne peut prendre en compte certains points de vue (arrêts du Tribunal fédéral 9C_606/2014 du 9 décembre 2014 consid. 2.1 ; 8C_589/2014 du 16 juin 2015). Le droit d'être entendu est ainsi violé lorsque, malgré les objections de l'assuré, la décision est identique à celle du préavis (arrêt du Tribunal fédéral I 658/04 du 27 janvier 2006 consid. 4 ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 9 ad art. 57a LAI).

Une violation du droit d'être entendu est considérée comme réparée lorsque l'intéressé jouit de la possibilité de s'exprimer librement devant une autorité de recours disposant du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et pouvant ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 133 I 201 consid. 2.2). Si la réparation d'un vice éventuel doit cependant demeurer l'exception (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa ; 126 V 130 consid. 2b), même en cas de violation grave du droit d'être entendu, un renvoi de la cause pour des motifs d'ordre formel à l'instance précédente peut être exclu, par économie de procédure, lorsque cela retarderait inutilement un jugement définitif sur le litige, ce qui n'est dans l'intérêt ni de l'intimé, ni de l'administré dont le droit d'être entendu a été lésé (ATF 132 V 387 consid. 5.1).

En l'espèce, la décision dont est recours notifiée par la caisse de compensation ne tient pas compte de la motivation après audition préparée par l'intimé, mais indique au contraire que les observations élevées par la recourante contre le projet de décision du 29 septembre 2023 ne sont pas prises en considération compte tenu de leur tardiveté. Or, tel n'était pas le cas, le projet de décision ayant été reçu, selon les informations au dossier, le 3 octobre 2023 au domicile élu et les observations ayant été formulées le 1er novembre 2023, ce qui avait d'ailleurs conduit l'intimé à les examiner et à se prononcer dessus.

Au vu du plein pouvoir de cognition de la chambre de céans en fait en droit (cf. art. 89A cum art. 61 LPA), la violation du droit d'être entendue de la recourante – qui n'est du reste pas soulevée par cette dernière – n'apparaît pas particulièrement grave et a été réparée par la présente procédure, lors de laquelle elle a pu faire valoir tous ses arguments.

Il n'y a par conséquent pas matière à annuler la décision entreprise en raison de cette irrégularité, ce d'autant plus que la cause doit être renvoyée à l'intimé pour d'autres motifs.

3.3 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

A droit à une rente d’invalidité, l’assuré dont la capacité de gain ou la capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, qui a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et qui, au terme de cette année, est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (art. 28 al. 1 LAI).

Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA, applicable par analogie (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références ; 130 V 343 consid. 3.5.2 ; 125 V 413 consid. 2d et les références). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5 ; 113 V 273 consid. 1a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

En vertu de l'art. 88a al. 1 RAI, si la capacité de gain ou la capacité d’accomplir les travaux habituels de l’assuré s’améliore ou que son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d’aide découlant de son invalidité s’atténue, ce changement n’est déterminant pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu’à partir du moment où on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre.

Dans certains cas particuliers, lorsque la rente a été allouée de façon prolongée, la jurisprudence considère qu'il n'est pas opportun de supprimer la rente, malgré l'existence d'une capacité de travail médicalement documentée, avant que les possibilités théoriques de travail aient été confirmées avec l'aide de mesures médicales de réhabilitation et/ou de mesures d'ordre professionnel. Des mesures d'ordre professionnel sont même nécessaires, malgré l'existence d'une capacité de travail médico-théorique, lorsque la réduction ou la suppression, par voie de révision (ou de reconsidération), du droit à la rente concerne une personne assurée qui est âgée de 55 ans révolus ou qui a bénéficié d'une rente pendant quinze ans au moins. Dans une telle situation, l'administration doit, avant de réduire ou de supprimer la rente d'invalidité, examiner et prendre les mesures nécessaires à la réintégration de la personne assurée dans le circuit économique, même si cette dernière a recouvré une capacité de travail et indépendamment du taux d'invalidité qui subsiste, mais sous réserve de la réalisation des conditions matérielles du droit à la prestation de réadaptation et de la collaboration de l'intéressé (ATF 145 V 209 consid. 5.1 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_303/2022 du 31 mai 2023 consid. 5.2 et les références ; 9C_407/2021 du 17 mai 2022 consid. 6.2 et la référence). Cette jurisprudence, qui est également applicable lorsque l'on statue sur la limitation et/ou l'échelonnement en même temps que sur l'octroi de la rente (ATF 145 V 209 consid. 5 et les références), ne signifie pas que la personne assurée peut se prévaloir d'un droit acquis dans le cadre d'une procédure de révision ou de reconsidération ; il est seulement admis qu'une réadaptation par soi-même ne peut, sauf exception, être exigée d'elle en raison de son âge ou de la durée du versement de la rente. Des exceptions à ce principe peuvent être admises notamment lorsque la longue absence du marché de l'emploi résulte de motifs étrangers à l'invalidité, lorsque la personne assurée est particulièrement agile, flexible et bien intégrée dans l'environnement social, lorsqu'elle dispose d'une formation et d'une expérience professionnelle étendues ou lorsqu'elle a maintenu une activité lucrative malgré le versement de la rente, de sorte qu'il n'existe pas une longue période d'éloignement professionnel (arrêts du Tribunal fédéral 8C_141/2024 du 3 septembre 2024 consid. 6.1 ; 8C_510/2020 du 15 avril 2021 consid. 5.2 et les références). Il incombe à l’OAI de prouver que, contrairement à la règle précitée, la personne assurée est en mesure de mettre en valeur, grâce à une réadaptation par soi-même, la capacité de travail
médico-théorique recouvrée (cf. ATF 148 V 321 consid. 7.1.2 et la référence).

Dans un arrêt rendu le 27 juin 2022, le Tribunal fédéral a précisé que les organes de l'assurance-invalidité doivent se fonder sur le moment du prononcé de la décision pour déterminer si l'âge de référence de 55 ans est atteint (ATF 148 V 321 consid. 7.3 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_303/2022 du 31 mai 2023 consid. 5.2).

3.4 De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

4.             En l'occurrence, en application de l'art. 88a al. 1 RAI, l'intimé a supprimé le droit à la rente d'invalidité de la recourante au 31 mars 2023, après avoir retenu une capacité entière de travail entière de sa part dans une activité adaptée dès le 1er janvier 2023 à tout le moins.

4.1 La recourante conteste cette appréciation et estime être restée totalement incapable de travailler après le 1er janvier 2023.

Elle ne saurait cependant être suivie. En effet, elle se contente de critiquer le résultat de l'instruction médicale réalisée par l'intimé sans apporter d'éléments probants permettant de remettre en causes ses conclusions.

L'intimé s'est en particulier appuyé sur les résultats de deux expertises externes réalisées à la demande de l'assurance-accidents par une médecin spécialiste en psychiatrie et un médecin spécialiste en chirurgie orthopédique. Les conclusions de ces expertises n'ont pas été examinées par ses médecins traitants, et sont donc restées incontestées sur le plan médical. La recourante n'avance par ailleurs aucun élément objectif qui n'aurait pas été pris en considération par les experts et n'expose pas de manière précise que leurs conclusions seraient lacunaires, non motivées, et ne pourraient être suivies. Elle ne peut tout au plus que se prévaloir des prises de position de certains de ses médecins traitants, ayant jugé qu'elle ne pouvait travailler à 100% au vu de ses atteintes à la santé (cf. rapport du Dr C______ du 8 juillet 2022, du Dr B______ du 12 janvier 2023 et de la docteure F______ du 29 janvier 2023).

Or, de jurisprudence constante, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; 125 V 351 consid. 3b/bb). Au vu par ailleurs de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

Or, tel n'est manifestement pas le cas en l'occurrence.

Les pièces versées par la recourante à la procédure ne permettent pas non plus de s'écarter des conclusions des expertises mises en œuvre. Outre que la plupart de ces documents rapporte des faits survenus postérieurement au prononcé de la décision, qui ne peuvent être pris en considération dans le cadre de la présente procédure, aucun d'entre eux ne se prononce sur la capacité de travail de la recourante. Ainsi, s'il est certes vrai que le rhumatologue consulté diagnostique une fibromyalgie sévère, son évaluation, faite en juin 2024, ne mentionne pas quelles sont les éventuelles répercussions sur la capacité de travail de la recourante et depuis quand ce trouble peut être retenu. Quant aux autres rapports et examens médicaux, ils ne renseignent pas plus sur le degré de sévérité des troubles affectant la recourante et leurs conséquences sur le plan professionnel.

Dans ces circonstances, il n'y a pas matière à se distancer des conclusions de l'intimé et à remettre en cause l'appréciation selon laquelle la recourante disposait d'une pleine capacité de travail dans une activité adaptée dès le 1er janvier 2023.

4.2 La recourante soutient en outre de manière sommaire que l'intimé a mal calculé son degré d'invalidité, dans la mesure où il aurait mal établi le revenu avec et sans invalidité.

Les critiques qu'elle esquisse concernant, d'une part, le revenu avec invalidité, et, d'autre part, le revenu sans invalidité, ne peuvent être admises. S'agissant du revenu avec invalidité, comme il a été vu ci-dessus, le résultat de l'instruction médicale menée par l'intimé doit être confirmé, de sorte que l'on ne saurait tenir compte d'un revenu plus bas que celui pris en considération par l'intimé en fonction d'une capacité de travail entière et des statistiques résultant de l'enquête suisse sur la structure des salaires, tel que le préconise la jurisprudence lorsque la personne assurée n'a pas repris un emploi (cf. ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Par ailleurs, bien que la recourante sollicite un abattement sur ce salaire statistique, elle ne motive aucunement quelles circonstances devraient conduire à en retenir un, et aucun motif objectif ne plaide en ce sens dans le cas particulier, ses capacités fonctionnelles lui permettant en particulier de travailler à un taux d'occupation de plus de 50% (cf. art. 26bis al. 3 RAI dans sa version en vigueur du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023). S'agissant du revenu sans invalidité, c'est aussi en vain que la recourante soutient qu'il aurait dû être fixé à tout le moins à CHF 55'000.-, en vertu de son intention d'accroître l'offre de ses services pour le cas où elle n'aurait pas dû cesser son activité indépendante. Elle ne fournit en effet aucun élément permettant de retenir qu'elle aurait de manière vraisemblable augmenté son chiffre d'affaires, alors que celui-ci était stable avant la pandémie de Covid-19 et qu'il suffisait à couvrir ses besoins, selon ses affirmations dans le cadre de l'enquête économique. Au surplus, en prenant en considération le revenu annuel de l'année 2019 au lieu de la moyenne sur plusieurs années, l'intimé a adopté une solution favorable à la recourante.

Les différents griefs articulés par la recourante dans ses écritures doivent ainsi être rejetés.

4.3 Cela étant, il sied de constater que l'intimé a supprimé la rente allouée à la recourante, sans lui proposer de mesures d'ordre professionnel, alors même qu'elle est née en 1964, et avait plus de 55 ans lors du prononcé de la décision.

Une suppression de rente sans examen préalable de la nécessité de mesures de réadaptation est contraire au droit. Cette question doit être examinée d’office par le juge des assurances sociales (ATF 148 V 321 consid. 7.1.3 et 7.1.4 et les références). En cas de suppression d'une rente d'invalidité, la question de l'exigibilité d'une réadaptation par soi-même fait partie de l'objet du litige (arrêt du Tribunal fédéral 8C_494/2018 du 6 juin 2019 consid. 2.2, non publié in ATF 145 V 209 mais in SVR 2019 IV n. 73 p. 233).

Or, il n'apparaît pas, compte tenu des circonstances, que la recourante pourrait se réadapter seule, sans mesures d'ordre professionnel. Il est en effet acquis que ses limitations fonctionnelles l'empêchent d'exercer son ancienne activité indépendante ; les activités de vendeuse sur les marchés et d'animatrice au parascolaire qu'elle avait initiées durant la période de Covid-19 ne sont pas plus adaptées aux limitations fonctionnelles, exigeant de travailler debout et de se déplacer, voire le port de charges. Enfin, elle n'a plus travaillé depuis de nombreuses années dans le domaine administratif et ses connaissances en la matière ne sont plus actualisées (selon ses écritures, non-maîtrise de l'informatique et de l'anglais). En outre, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de dire que les bénéficiaires de rente ont non seulement le droit, mais aussi l'obligation de participer activement aux mesures de nouvelles réadaptation raisonnablement exigibles, de sorte que la capacité subjective à se réadapter du bénéficiaire de rente ne constitue pas une condition pour la mise en œuvre de telles mesures (ATF 145 V 2 consid. 4.3.1 et 4.3.3). Ainsi, les réticences de la recourante à envisager une réinsertion professionnelle – qui transparaissent dans l'entretien du 19 septembre 2023 et dans ses écritures – ne sont pas déterminantes et ne conduisent pas à se passer de mesures professionnelles dans le cas d'espèce. La situation ne peut être comparée aux cas dans lesquels la jurisprudence fédérale a admis de supprimer une rente d'invalidité sans octroyer d'autres mesures, les personnes assurées ayant alors refusé des propositions concrètes qui avaient été formulées (arrêts du tribunal fédéral 9C_407/2021 du 17 mai 2022 consid. 6.3 ; 8C_290/2021 du 12 octobre 2021 consid. 7).

Par conséquent, la décision litigieuse est contraire au droit et il se justifie de renvoyer le dossier à l'intimé pour qu'il mette en œuvre les mesures d'ordre professionnel nécessaires et rende, à leur suite, une nouvelle décision tenant compte de l'évolution de la situation médicale de la recourante dans l'intervalle, notamment du diagnostic de fibromyalgie posé en juin 2024.

5.             Compte tenu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision du 15 novembre 2023 sera annulée.

La recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

******


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Renvoie le dossier à l'intimé au sens des considérants.

4.        Condamne l'intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 2'500.- à titre de dépens.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le