Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/976/2024 du 05.12.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1877/2022 ATAS/976/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 5 décembre 2024 Chambre 5 |
En la cause
A______ représentée par Me Baptiste FAVEZ, avocat
| recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), ressortissante colombienne, née en 1973, a suivi une formation de styliste de l’ongle en 2007, puis d’aide-coiffeuse en 2011.
b. L’assurée a travaillé en qualité de femme de ménage à temps partiel (environ 75% en moyenne) dans un EMS, dès le 8 juin 2018. À ce titre, elle était assurée contre les accidents auprès de la SUVA Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la SUVA).
c. Le 30 novembre 2018, l’assurée a subi un accident. Lors d’une dispute avec un tiers qui a claqué une porte vitrée, sa main gauche a heurté la vitre qui s’est alors cassée. Elle a subi une coupure au poignet gauche et elle est tombée en arrière. Elle s’est rendue au service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG).
Selon un constat médical établi à la même date, il n’y avait au plan ostéoarticulaire pas de douleur à la palpation du cadre osseux de l’épaule, du coude, du bras et de l’avant-bras gauches. L’assurée présentait une plaie transversale palmaire du poignet gauche, zone V, avec ouverture de l'aponévrose palmaire superficielle, et une plaie longitudinale du bord radial de l’éminence thénarienne en zone IV. Elle a subi une intervention chirurgicale le même jour, consistant en une révision de plaie et une suture tendineuse et nerveuse.
Dès l’accident, l’assurée a été en incapacité de travail totale, régulièrement prolongée par les certificats médicaux de ses médecins traitants.
d. L’unité d’électroneuromyographie des HUG a noté, le 14 août 2019, une hyperalgie et une dysesthésie de toute la main gauche juste à l’effleurement, avec une force de la main gauche conservée. L'électroneuromyographe (ci-après : ENMG) n’avait pas pu être réalisé en raison de la mauvaise tolérance de l’assurée et du refus de le poursuivre. Néanmoins, la normalité de la latence sensitive du nerf médian gauche au poignet rendait un syndrome du canal carpien peu probable.
e. Le 16 octobre 2019, la docteure B______, médecin au service de chirurgie orthopédique des HUG, a fait état de douleurs neuropathiques et d’une perte de force. Le pronostic était réservé.
f. Le 18 décembre 2019, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI).
g. Dans une note de consultation du 20 décembre 2019, la docteure C______, médecin au service de chirurgie orthopédique des HUG, a rapporté des douleurs neuropathiques et une hyposensibilité palmaire des trois premiers doigts. L’ergothérapie n’avait pas permis une réelle amélioration fonctionnelle de la main gauche. Il n’y avait pas de syndrome douloureux régional complexe (ci‑après : SDRC) mais des douleurs neurogènes.
Un rapport d’ergothérapie du 20 décembre 2019 a conclu à un manque de force ainsi qu'à un ralentissement moteur. Les activités de nettoyage avec des machines professionnelles étaient fortement limitées ou non réalisables. Le port de charges et le déplacement de meubles lourds n’étaient pas possibles. De plus, l'exclusion des trois premiers doigts de la main gauche, dominante, ralentissait l'exécution des tâches. Le rythme professionnel n’était donc pas atteint. Les activités dans la coiffure et l’onglerie n’étaient pas non plus possibles, eu égard aux douleurs et aux limitations de la main.
h. Dans un avis du 20 janvier 2020, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement de la SUVA, a retenu que la reprise de l’activité n’était pas évidente, car les lésions traumatiques du nerf médian pouvaient laisser des douleurs neuropathiques au long cours.
i. Dans une note de consultation du 7 mai 2020, le docteur E______, médecin au service de chirurgie orthopédique des HUG, a notamment indiqué que les critères de Budapest étaient une sudation et rougeur. L’assurée présentait également des douleurs de l’épaule, il y avait une suspicion de complex regional pain syndrome (ci-après : CRPS) main-épaule et une allodynie sévère, mais pas de SDRC.
Dans sa note de suivi du 24 septembre 2020, ce médecin a relevé un statu quo et un CRPS, ainsi qu’une allodynie sévère de la main gauche.
j. L’assurée a séjourné à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR) du 26 mai au 24 juin 2020. Les médecins ont posé, dans le rapport du 2 juillet 2021, les diagnostics de plaie transverse en face antérieure du poignet gauche, de section partielle inférieure à 50% du nerf médian et de section complète du tendon du long palmaire le 30 novembre 2018, de douleurs neuropathiques persistantes de la face palmaire de la main gauche avec irradiation dans l’avant-bras, et de probable SDRC de type 2, actuellement au décours. Ils ont également retenu les diagnostics secondaires d’enchondrome de la première phalange du quatrième doigt gauche, découvert fortuitement à la radiographie et confirmé par scanner et IRM, et de douleur de l’épaule gauche avec arthrose acromio-claviculaire et discrète bursite sous-acromiale. Lors de son arrivée, les limitations fonctionnelles et les plaintes de l’assurée étaient des douleurs de type électrique, fourmillements, et une intolérance au froid. Ses douleurs pouvaient remonter jusqu’au coude, ainsi que, depuis quelques semaines, jusqu’à l’épaule. Elle décrivait également des douleurs de type musculaire et des contractures qui pouvaient être invalidantes. Ces douleurs avaient commencé à affecter son moral, à l’instar de la perte d’activité professionnelle et des nombreuses ruminations sur son avenir. L’enchondrome justifiait une indication opératoire. S’agissant du SDRC, les critères de Budapest étaient remplis, mais le diagnostic restait probable, car on était à distance et tous les critères n’étaient plus positifs, bien qu’ils aient été plus importants par le passé, selon l’anamnèse. Les plaintes et limitations fonctionnelles s’expliquaient principalement par les lésions objectivement constatées. Des facteurs contextuels pouvaient influencer négativement les aptitudes fonctionnelles et compliquer la réinsertion, tels qu’une kinésiophobie élevée, une castrophisation très élevée, une cotation élevée de la douleur et son interférence avec le travail, une auto-évaluation très élevée du handicap, mais très basse des capacités fonctionnelles, avec un niveau d’effort perçu comme inférieur à sédentaire, une absence de formation, le licenciement et la maîtrise partielle de la langue française. L’évolution était partiellement favorable. La participation de l’assurée aux thérapies avait été très élevée, et aucune incohérence n’était relevée. Les limitations fonctionnelles provisoires suivantes étaient retenues : pas de port répétitif et prolongé de charges de plus de 5 kg avec le membre supérieur gauche, pas d’activités nécessitant des prises de force et des activités très répétitives avec la main gauche, et pas d’exposition prolongée au froid. La stabilisation était attendue dans un délai de trois à quatre mois, soit deux ans après l’accident. Le pronostic de réinsertion, dans l’ancienne activité de femme de ménage, était défavorable, mais il était favorable dans une activité adaptée, avec une capacité de travail complète attendue. Une incapacité de travail totale a été attestée par les médecins de la CRR, jusqu’au 4 juillet 2020.
k. Dans un avis du 19 octobre 2020, le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d'arrondissement de la SUVA, a indiqué que l’état était stabilisé.
Le 2 décembre 2020, ce médecin a examiné l’assurée. Il a posé les diagnostics de section partielle à 50% du nerf médian et section complète du long palmaire, et de status après suture du nerf médian. L’assurée présentait, en outre, un enchondrome de P1D4. Elle était gênée par les dysesthésies subjectivement dues à la section partielle et à la restauration de son nerf médian. Les douleurs étaient désormais stables. Sur le plan objectif, il existait une perte de force du côté dominant d’environ un tiers. Le Dr F______ ne retenait pas le diagnostic de CRPS, en relevant qu’il était ambigu à l’examen du Dr E______ : il ne retrouvait pas ces éléments, ni de syndrome épaule/main, les douleurs étant plutôt de type acromio-claviculaire sur une arthrose de cette articulation, et partant sans causalité en vraisemblance prépondérante avec l’évènement déclaré. Toutefois, la fonction restante était tout à fait utilisable en intensité pour des forces jusqu’à 10 kg. En fréquence et rapidité, il ne fallait pas utiliser la main au-delà de 5 kg. Compte tenu de ces éléments, la profession antérieurement exercée n’était plus exigible. Une activité complète adaptée aux limitations fonctionnelles utilisant les deux membres supérieurs était exigible, et des travaux d’exécution fine étaient tout à fait possibles. Il fallait éviter des prises de force très répétitives et des expositions prolongées au froid. Des séances d’ergothérapie pour désensibiliser la main et de physiothérapie devaient encore être prises en charge durant six mois, et le médicament Lyrica® encore au moins deux ans. Dans l’idéal, un électromyogramme serait le bienvenu pour confirmer une bonne restauration du nerf médian, mais il avait été par deux fois très mal toléré par l’assurée. Il n’y avait pas d’indication à une reprise chirurgicale.
À la même date, le Dr F______ a estimé l'atteinte à l'intégrité à 7%.
l. Par courrier du 16 décembre 2020, la SUVA a indiqué à l’assurée que selon son service médical, il n’y avait plus lieu d’attendre une amélioration notable des suites de l’accident. Elle mettrait ainsi un terme au remboursement des soins médicaux et au versement des indemnités journalières au 31 mars 2021, hormis la prise en charge d’ergothérapie jusqu’au 30 juin 2021 et du Lyrica®. L’activité d’employée d’entretien n’était plus exigible, mais les séquelles de l’accident n’empêchaient pas la reprise d’une activité professionnelle adaptée aux limitations fonctionnelles retenues par le Dr F______. Dans une telle activité, la capacité de travail était totale sans baisse de rendement.
L’assurée a déclaré s’opposer à ce courrier.
m. Dans un rapport du 29 janvier 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en médecine générale, a retenu que dans les suites opératoires, l’assurée, gauchère, avait développé des douleurs neuropathiques de la face palmaire de la main gauche irradiant à l'avant-bras et persistant à ce jour, ainsi qu’une allodynie persistante dans le territoire médian irradiant au coude et à l’épaule gauches, impliquant un manque de force et un ralentissement moteur conséquents, et un SDRC de type II probable du membre supérieur gauche. L’assurée présentait en outre un enchondrome P1D4 gauche découvert fortuitement en mai 2020, dont le traitement était conservateur, une tendinopathie du sus-épineux avec bursite sous-acromiale sans rupture tendineuse et une arthrose acromio-claviculaire à gauche. Elle souffrait d’un état anxiodépressif. Le manque de force, le ralentissement moteur ainsi que les douleurs majorées par les efforts affectaient sa capacité de travail dans les domaines qu’elle connaissait. Le port de charges et le déplacement d'objets lourds étaient exclus. L’exclusion des trois premiers doigts de la main dominante pour toutes les activités entraînant une préhension en force et fine, associée au manque de force, limitait considérablement l’utilisation de cette main dans toutes les activités professionnelles. L’utilisation de la main droite ralentissait considérablement l’activité et générait un manque important d’agilité. Actuellement, les douleurs causées par l’allodynie persistante concouraient à limiter et ralentir l'activité, et l’arthrose acromio-claviculaire parasitait également les mouvements d’abduction et de rotation de l’épaule. Les compétences linguistiques étaient limitées au dialogue simple. Dans une activité adaptée, ne mettant pas en jeu la force et l’utilisation du membre supérieur gauche, la capacité de travail pourrait théoriquement être pleine. Les capacités de réadaptation semblaient fortement compromises par les limitations du bras dominant, les connaissances linguistiques et l’absence de formation.
n. Dans sa note de suivi du 15 février 2021, le Dr E______ a relevé un CRPS de longue durée, toujours en phase chaude.
Le 19 mai 2021, un médecin des HUG a noté que l’assurée rapportait des douleurs généralisées au niveau de l'épaule, du poignet et de la main et des paresthésies, allant de la main gauche dorsale et palmaire en augmentation, avec des douleurs irradiantes au niveau de l'avant-bras. Un CRPS de longue durée, toujours en phase chaude, était constaté.
Selon une note de consultation du 7 juillet 2021 d’un médecin des HUG, l’assurée présentait un SDRC de longue durée. Ses plaintes étaient inchangées.
o. Le 12 juillet 2021, l’assurée a adressé à la SUVA et à l’OAI un rapport établi par la docteure H______, spécialiste FMH en neurologie, à la suite de sa consultation du 15 juin 2021. Elle a affirmé qu’il s’agissait d’un élément jusque-là inconnu qui pourrait expliquer ses fortes douleurs. Un nouveau traitement médicamenteux avait été prescrit.
Dans le rapport joint, la Dre H______ a noté le développement d’un SDRC avec impotence fonctionnelle depuis l’accident. À l’issue de son examen clinique et de l’ENMG, elle a conclu à des allodynies prenant quasiment toute la main et l’avant-bras, ainsi qu’à une hyperalgésie de l’hémicorps gauche, la douleur se propageant à l’ensemble de l’hémicorps gauche dans le cadre d’un SDRC du membre supérieur gauche. L’ENMG révélait une réduction de l’amplitude des réponses sensitives du nerf médian gauche par rapport aux nerfs ulnaire et radial d’environ 50% sans ralentissement de la vitesse de conduction, et une réduction de l’amplitude de la réponse M du nerf médian gauche pour le thénar par rapport à l’amplitude et la surface du nerf ulnaire gauche. L’examen mettait en évidence des signes de dénervation-réinnervation chronique ancienne dans le court abducteur du pouce gauche. Ces constatations parlaient en faveur d’une lésion partielle du nerf médian gauche.
p. Dans une appréciation du 15 juillet 2021, le Dr F______ a affirmé que le SDRC était au décours et ce qui subsistait était une allodynie sur lésion du nerf médian.
q. Dans un avis du 20 juillet 2021, le docteur I______, médecin au service médical régional de l’assurance-invalidité (ci-après : le SMR), a retenu une capacité de travail nulle dans l’ancienne activité mais totale dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles depuis le 2 décembre 2020. Il estimait que le trouble anxiodépressif secondaire à l’attente somatique n’était pas durablement incapacitant. À l’instar du Dr F______, il ne retenait pas le diagnostic de SDRC. Les limitations fonctionnelles étaient celles admises par ce médecin d’arrondissement, ainsi qu’une limitation dans les mouvements fins avec la main gauche.
r. Le 19 août 2021, l’OAI a adressé un projet de décision à l’assurée lui octroyant une rente d’invalidité totale, du 30 novembre 2019 au 31 mars 2021.
s. Par décision du 6 octobre 2021, la SUVA a fixé le taux d’invalidité à 3%, ce qui n’ouvrait pas le droit à une rente. Elle a alloué à l’assurée une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 7%.
t. L’assurée s’est opposée à la décision de la SUVA le 8 novembre 2021. Elle a notamment conclu à la poursuite du versement des indemnités journalières depuis le 1er avril 2020 jusqu'à la stabilisation de son état de santé, au versement d’une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50%, et à ce qu’une expertise soit mise en œuvre pour déterminer la stabilisation de son état de santé, sa capacité de gain et son atteinte à l'intégrité.
Elle a contesté la stabilisation de son état de santé. Elle a en substance allégué ne pas disposer d’une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, dès lors qu’elle avait perdu presque totalement l'usage de sa main dominante. Elle avait récemment été déclarée inapte au placement par l’assurance-chômage. Le Dr G______ attestait son incapacité de travail totale. Elle présentait en outre de très importantes douleurs irradiant dans l'hémicorps gauche.
Elle a joint la décision de l’office cantonal de l'emploi la déclarant inapte au placement en raison de son incapacité de travail dès le 1er avril 2021.
u. Par décision du 10 février 2022, la SUVA a écarté l’opposition de l’assurée.
v. L’assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision de la SUVA le 14 mars 2022 (procédure no A/829/2022). Elle a conclu, sous suite de dépens, préalablement, à la mise en œuvre d’une expertise à même de confirmer ou d'infirmer la stabilisation de son état de santé, son incapacité de gain et son atteinte à l'intégrité ; principalement, à l’annulation de la décision, à ce qu’il soit constaté que son état de santé n’était pas stabilisé, au versement d’indemnités journalières et à la prise en charge des soins médicaux depuis le 1er avril 2020 jusqu'à la stabilisation de son état de santé, à ce qu’aucune rente ne soit fixée tant que son état n’était pas stabilisé, à ce qu’il soit dit que la diminution de son intégrité (sic) était de 35% et au versement d’une indemnité pour atteinte à l'intégrité de ce taux ; subsidiairement, au versement d’indemnités journalières et à la prise en charge des soins médicaux depuis le 1er avril 2020 jusqu'à la stabilisation de son état de santé, au versement d’une rente d'invalidité calculée en tenant compte de son incapacité totale de travailler, à ce qu’il ce qu’il soit dit que la diminution de son intégrité était de 35% et au versement d’une indemnité pour atteinte à l'intégrité de ce taux ; et plus subsidiairement, au renvoi du dossier à l’intimée pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
w. Dans sa réponse du 11 avril 2022, la SUVA a conclu au rejet du recours.
x. Par décision du 5 mai 2022, l’OAI a alloué une rente entière à l’assurée du 1er juin 2020 au 31 mars 2021. Dès le 2 décembre 2020, compte tenu d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée, le degré d’invalidité était de 3.6% et ne donnait ainsi droit ni à une rente, ni à des mesures d’ordre professionnel. L’OAI a retenu que l’assurée pourrait exercer une activité telle que patrouilleuse ou surveillante scolaire, gardienne de musée, gardienne de parking, huissière d’accueil et téléphoniste de centrale, par exemple.
B. a. Par écriture du 7 juin 2022, la recourante a interjeté recours contre la décision de l’OAI du 5 mai 2022 auprès de la chambre de céans. Elle a conclu, sous suite de dépens, préalablement, à la mise en œuvre d’une expertise afin de déterminer sa capacité de travail, dès le 2 décembre 2020, à l’audition du Dr G______ et principalement, à l’annulation de la décision en tant qu’elle supprimait le droit à la rente dès le 1er avril 2021 et refusait les mesures professionnelles, à ce qu’il soit constaté que la recourante restait incapable de travailler depuis le 2 décembre 2020, à l’octroi d’une rente entière depuis le 1er avril 2021, au versement de cette rente ; subsidiairement, à ce qu’il soit dit que la recourante avait temporairement et partiellement recouvré sa capacité de travail du 1er décembre 2021 au 28 avril 2022 ; et à ce qu’il soit constaté qu’elle était à nouveau incapable de travailler depuis le 28 avril 2022.
La recourante a allégué avoir essayé à plusieurs reprises de reprendre une activité lucrative depuis son accident, sans succès en raison de ses très fortes douleurs. Elle a produit les certificats de salaire relatifs à une activité de nettoyeuse à raison de deux heures par jour, dès décembre 2021, puis de 50% dès le 10 février 2022. Le 31 mars 2022, le Dr G______ avait établi un certificat médical attestant une capacité de travail de 50% en précisant que la situation devrait être réévaluée le 10 mai 2022. Elle avait travaillé 110 heures pour deux sociétés, en avril 2022, mais cela avait conduit à une aggravation de ses douleurs. Le docteur Christian IUREA lui avait prescrit des antidouleurs le 28 avril 2022. Le Dr G______ avait dans son certificat médical du 29 avril 2022 fait état d’une exacerbation des douleurs du membre supérieur gauche depuis la reprise du travail. Il avait attesté une incapacité de travail totale dès cette date. La recourante a reproché à l’intimé d’avoir écarté les avis des Drs H______ et G______, qui avaient admis le caractère incapacitant de ses lésions. Au vu des contradictions avec l’avis du Dr F______, il appartenait à l’intimé d'instruire les éléments divergents. S'agissant de l’exigibilité d'une activité lucrative, sa capacité de travail était théorique, malgré sa motivation. Elle a détaillé les postes proposés par l’intimé, et a allégué que leurs descriptifs, trouvés sur un site de recherche d’emploi, n’étaient pas compatibles avec ses limitations fonctionnelles.
Elle a notamment produit deux certificats du Dr G______ attestant une incapacité de travail de 50% dès le 10 février 2022 et totale dès le 29 avril 2022.
b. Dans sa réponse du 30 juin 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours. La seule position divergente du Dr G______ ne justifiait pas la mise en œuvre d’une expertise, dès lors qu’il ne faisait état d’aucun élément que le Dr F______ aurait ignoré. Les facteurs psychosociaux n’étaient pas pertinents dans l’évaluation de l’assurance-invalidité.
L’intimé a joint un avis du SMR du 16 juin 2022, aux termes duquel les éléments médicaux à l’appui du recours ne modifiaient pas sa position.
c. Par écriture du 29 août 2022, la recourante a renoncé à répliquer et a persisté dans ses conclusions.
d. Le 15 novembre 2022, la chambre de céans a informé l’intimé du recours interjeté par la recourante à l’encontre de la décision de la SUVA. Dans un souci d'économie de procédure et de simplification, elle envisageait de mettre en œuvre une expertise orthopédique comprenant une partie commune à l’assurance-accidents et l’assurance-invalidité et un volet concernant chacune de ces assurances. Les parties étaient invitées à se déterminer sur ce point.
e. La SUVA s’est déterminée le 29 novembre 2022, notant des troubles maladifs liés à l’arthrose acromio-claviculaire ne relevant pas de l’assureur-accidents. S’agissant des troubles à la main gauche, la stabilisation était admise par tous les médecins, si bien qu’elle ne comprenait pas la nécessité d’une expertise. Elle ne s’y opposait néanmoins pas.
f. Le 1er décembre 2022, l’intimé a déclaré ne pas s’opposer à la réalisation d’une seule expertise, pour autant que les volets soient bien délimités par les experts.
g. Le lendemain, la recourante s’est également ralliée à cette proposition.
h. Dans ses observations du 8 février 2023, la SUVA a souligné que l’expert proposé par la chambre de céans, soit le docteur J______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, n’était pas spécialiste en chirurgie de la main et n’était donc pas apte à établir une expertise dans la présente cause. Elle a proposé un autre expert.
La recourante s’en est quant à elle rapportée à justice quant au choix de l’expert.
i. Le 13 février 2023, l’intimé a déclaré se rallier à l’argument développé par la SUVA dans la procédure opposant celle-ci à la recourante, s’agissant de la proposition de désigner un expert en chirurgie de la main, plutôt que le Dr J______.
j. Après un échange d’écritures sur l’expert pressenti, la chambre de céans a informé les parties par courrier du 20 avril 2023 que l’expertise serait réalisée par le Dr J______, les médecins proposés par la SUVA n’étant pas disponibles pour établir une expertise.
k. La chambre de céans a transmis aux parties les questions d’expertise pour déterminations le 29 juin 2023.
l. Par courrier du 17 juillet 2023, l’OAI s’est déterminé en joignant une demande de questions complémentaires présentées par son SMR. Lesdites questions ont été ajoutées au mandat d’expertise.
m. Par courrier du 28 août 2023, après avoir obtenu un délai supplémentaire, la recourante a suggéré que l’expert orthopédiste s’adjoigne les services d’un co‑expert neurologue, afin que ce dernier se prononce également sur ses troubles de la santé, ce point étant confirmé par un certificat daté du 10 août 2023 signé par le Dr G______ et joint en annexe. La chambre de céans a considéré qu’il n’était pas nécessaire de donner suite à la suggestion de la recourante, dès lors que la problématique principale était de nature orthopédique. Par ordonnance d’expertise du 22 décembre 2023, elle a mandaté le Dr J______, sans retenir la proposition de lui adjoindre un co-expert.
n. En date du 5 août 2024, le Dr J______ a rendu son rapport d’expertise concernant le volet OAI.
Il a relevé un certain nombre de diagnostics comme antécédents, estimant que la capacité de travail dans l’activité habituelle de femme de ménage et nettoyeuse était de 0% dès le jour du traumatisme, soit le 30 novembre 2018. Il considérait que selon la documentation fournie, une activité lucrative adaptée était exigible dès le 2 décembre 2020, date de l’évaluation médicale par le médecin d’arrondissement de la SUVA, le Dr F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur. On pouvait admettre une prolongation de l'incapacité de travail à 100 % jusqu’au 31 mars 2021, ce trimestre en sus de suite de traitement devait être considéré comme traitement de confort. Le médecin a conclu que l’assurée pouvait reprendre son activité de femme de ménage, le cas échéant se faire engager dans le domaine de la surveillance. Il estimait que dans une activité adaptée, il n’y avait pas de diminution de rendement.
o. L’OAI s’est déterminé par courrier du 16 septembre 2024, considérant que l’expert ne mettait en évidence aucune anomalie objectivable du membre supérieur gauche et ne retenait pas de limitations fonctionnelles au jour de l’expertise ; pour le surplus, les diagnostics étaient semblables à ceux précédemment posés par la SUVA, de telle sorte que l’intimé persistait dans ses conclusions. Était annexé un avis médical du SMR, daté du 27 août 2024, qui après analyse du rapport d’expertise considérait que les diagnostics de l’expert étaient semblables à ceux retenus, à la fois, par la SUVA et par le SMR.
p. Par courrier de son mandataire, daté du 25 octobre 2024, l’assurée a considéré que l’expert se contredisait manifestement et passait sous silence les nombreux constats médicaux établis par les médecins traitants, lesquels avaient confirmé, à plusieurs reprises, le caractère incapacitant des lésions de la recourante. À cet égard, le médecin traitant G______ s’était prononcé sur le rapport d’expertise dans une attestation du 14 octobre 2024 qui était jointe en annexe. Il demeurait convaincu que la reprise de l’activité dans le domaine du nettoyage était illusoire et ne voyait pas, au demeurant, dans quel secteur d’activité l’assurée pourrait retrouver une activité professionnelle lucrative. Considérant que l’expert était retombé dans « le même travers » que l’OAI en refusant d’accorder le moindre crédit à ses médecins traitants, la recourante persistait à solliciter l’audition du Dr G______.
q. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
r. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi (art. 56ss LPGA), le recours est recevable.
2. Le litige porte sur le droit à des prestations d’invalidité dès le 1er avril 2021.
3.
3.1 La LAI a connu une novelle le 19 juin 2020, entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Dans ce cadre, le système des quarts de rente jusque-là applicable a été remplacé par un système linéaire de rentes (Message concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité [Développement continu de l'assurance-invalidité], FF 2017 2442). Cela étant, conformément aux principes de droit intertemporel, en cas de changement de règles de droit, la législation applicable est en principe celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1). Partant, les dispositions topiques seront citées dans leur ancienne teneur.
3.2 En vertu de l’art. 28 al. 1er LAI, l’assuré a droit à une rente d’invalidité aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c). L’art. 28 al. 2 LAI dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2021 dispose que l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à trois quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
L'art. 16 LPGA prévoit que, pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation.
4. Pour pouvoir trancher le droit aux prestations, l'administration ou l'instance de recours a besoin de documents que le médecin ou d'autres spécialistes doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 ; 115 V 133 consid. 2). Ces données médicales permettent généralement une appréciation objective du cas. Elles l'emportent sur les constatations qui peuvent être faites à l'occasion d'un stage d'observation professionnelle, lesquelles sont susceptibles d'être influencées par des éléments subjectifs liés au comportement de l'assuré pendant le stage (arrêt du Tribunal fédéral 8C_713/2019 du 12 août 2020 consid. 5.2).
4.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales, le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3a, 122 V 157 consid. 1c).
4.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien- fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).
4.3 S'agissant de la valeur probante des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier. Ainsi, la jurisprudence accorde plus de poids aux constatations faites par un spécialiste qu'à l'appréciation de l'incapacité de travail par le médecin de famille (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références). Au surplus, on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou un juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_405/2008 du 29 septembre 2008 consid. 3.2).
4.4 Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).
5. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).
6. En l’espèce, la SUVA s’est fondée sur l’avis de son médecin-conseil, le Dr F______, pour mettre un terme au versement des indemnités journalières et au remboursement des soins médicaux au 31 mars 2021.
L’OAI a suivi l’évaluation de la SUVA, sans procéder à une instruction autonome du dossier au plan médical.
La chambre de céans a considéré que les appréciations du Dr F______ étaient insuffisamment motivées et a désigné un expert orthopédiste, soit le Dr J______.
L’assurée ne remet pas expressément en question la valeur probante de l’expertise judiciaire mais déclare que l’expert serait tombé « dans le même travers que l’autorité intimée » en refusant d’accorder le moindre crédit aux appréciations de ses médecins traitants, plus particulièrement son médecin généraliste, le Dr G______.
L’intimé, de son côté, considère que les appréciations de l’expert rejoignent celles de son SMR et conclut que la recourante présente une capacité de travail totale dans une activité adaptée.
Il sied d’examiner la valeur probante du rapport d’expertise.
6.1 Le rapport de l’expert correspond en tous points aux exigences en la matière. Il a été établi en parfaite connaissance du dossier médical, dont les rapports médicaux sont exposés et résumés sur plusieurs pages. Il contient, en outre, une anamnèse personnelle, familiale, médicale et professionnelle complète et l’expert a rapporté ses observations cliniques de manière détaillée, à la suite d’un examen clinique ayant duré deux heures et demie. Les diagnostics retenus sont soigneusement motivés, et l’expertisée a pu décrire son travail, une journée-type et s’exprimer sur ses plaintes et les troubles de la santé qu’elle ressent. L’expert a de surcroît exposé de manière convaincante pour quelles raisons il se ralliait aux avis des autres intervenants ou au contraire s’en écartait. Ses conclusions sont elles aussi claires et motivées.
En p. 35 de son rapport d’expertise, le Dr J______ a tenu à mettre en exergue certains éléments, notamment l’impossibilité de préciser le mécanisme traumatique en raison de la version inconstante de l’expertisée, des contradictions, tel que cela ressort de rapports médicaux antérieurs, et enfin des ambiguïtés dans les rapports médicaux des HUG des 20 décembre 2019 et 7 mai 2020.
Lors de l’examen clinique, l’expert n’a relevé aucun trouble significatif au niveau des épaules, avec une mobilité active conservée et des amplitudes articulaires identiques en élévation et en abduction à droite et à gauche ainsi qu’en rotation externe, la seule différence entre l’articulation droite et gauche étant objectivée en rotation interne. L’articulation acromioclaviculaire bilatérale est considérée comme non douloureuse à la palpation et mobilisation et la coiffe des rotateurs est compétente en bilatérale. Les coudes et les poignets montrent une mobilité active normale avec les amplitudes articulaires et enfin les mains ont une force conservée, y compris dans la main gauche. Lors de l’examen, l’expert a demandé à l’assurée d’écrire de sa main gauche dominante une phrase en espagnol ; cette dernière s’est exécutée sans aucune gêne ni hésitation, ce qui est interprété comme une preuve d’une bonne évolution de son état.
Les diagnostics depuis 2018 jusqu’à 2021 ont été résumés et, en ce qui concerne les troubles orthopédiques, le médecin a clairement mentionné qu’il n’existait plus, à l’heure actuelle, de trouble orthopédique objectivement fondé, relevant notamment que les plaintes de l’assurée concernant le membre supérieur gauche et la nuque ne correspondent à aucune anomalie ou pathologie active (rapport, p. 37).
En conclusion, l’expert a considéré que l’assurée pouvait reprendre son activité de femme de ménage, sans diminution du rendement et sans limitation fonctionnelle, tout en ajoutant qu’une activité adaptée de surveillante était également possible avec une capacité de travail complète. Il a ajouté que sur le plan médical, une réadaptation professionnelle n’était plus nécessaire.
Le SMR de l’OAI a constaté que les diagnostics retenus par l’expert étaient semblables à ceux retenus par lui-même et par la SUVA. Il a toutefois précisé que l’activité habituelle n’était pas exigible, mais qu’une capacité de travail complète était retenue dans une activité adaptée.
6.2 S’agissant de la recourante, elle s’est fondée pratiquement exclusivement sur l’appréciation de son médecin généraliste, le Dr G______, pour contester être en mesure de retrouver une activité professionnelle lucrative. Ce dernier a rédigé une attestation datée du 14 octobre 2024, dans laquelle il déclare que « malgré les conclusions théoriques de la récente expertise, je constate à la lumière de l’échec de tentative de reprise de l’activité professionnelle de février 2022 qu’il existe un écart important entre cet avis d’expert et la réalité ». Il a ainsi contesté la possibilité d’une reprise dans l’activité habituelle qui impliquerait le levage de poids et la manipulation de machines de nettoyage, ce qui semblait se solder par une réactivation des douleurs au membre supérieur gauche, « dont l’étiologie reste peu claire ». S’agissant d’une activité adaptée, il a mentionné l’absence de formation professionnelle qualifiée, le maniement limité des capacités linguistiques en français, la présence de mouvements dépressifs déjà antérieurs à l’accident et renforcés par un sentiment d’injustice et de victimisation, une situation sociale et familiale compliquée, le refus d’entrée en matière des assurances sociales consécutivement à un accident vécu comme une injustice qui, selon lui, étaient autant d’obstacles concomitants à la reprise d’une activité lucrative régulière.
Il sied de rappeler que l’éventuelle reprise dans l’activité habituelle a été exclue par l’OAI ; la question ne se pose donc pas.
S’agissant des remarques du médecin traitant concernant une activité adaptée, elles sont principalement d’ordre socioprofessionnel et ne se fondent pas sur des éléments médicaux objectifs, ce d’autant moins que le médecin traitant relève lui-même l’étiologie « peu claire » concernant les douleurs au membre supérieur gauche dont se plaint la recourante.
À l’aune de ce qui précède, la chambre de céans considère que le rapport d’expertise du Dr J______ présente une pleine valeur probante et que ses conclusions peuvent être suivies.
6.3 S’agissant de la demande d’audition du médecin traitant, le Dr G______, elle est d’autant moins nécessaire que ce dernier a pu largement s’exprimer, notamment dans le cadre de son attestation du 14 octobre 2024 faisant suite au rapport d’expertise, étant rappelé, de surcroît, qu’il a les mêmes interrogations que l’expert quant à l’étiologie des douleurs à l’épaule gauche et que ses appréciations divergent essentiellement sur des éléments socioprofessionnels, soit l’existence d’une activité adaptée et non pas sur des éléments médicaux. Par appréciation anticipée des preuves, la demande d’audition du Dr G______ est considérée comme superflue et sera donc écartée (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; 122 III 219 consid. 3c).
6.4 Reste à examiner la question des coûts de l'expertise qui peuvent être mis à la charge de l'assureur social (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2).
Conformément à la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, l’art. 45 al. 1 LPGA constitue une base légale suffisante pour mettre les coûts d’une expertise judiciaire à la charge de l’assureur (ATF 143 V 269 consid. 6.2.1 et les références), lorsque les résultats de l'instruction mise en œuvre dans la procédure administrative n'ont pas une valeur probatoire suffisante pour trancher des points juridiquement essentiels et qu'en soi un renvoi est envisageable en vue d'administrer les preuves considérées comme indispensables, mais qu'un tel renvoi apparaît peu opportun au regard du principe de l'égalité des armes (ATF 139 V 225 consid. 4.3).
Encore faut-il que l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2).
On se trouve ici dans un cas limite, où l’on peut considérer que l’OAI n’aurait pas dû se fonder sans réserve sur les appréciations du médecin-conseil de la SUVA ; néanmoins, au vu du résultat, cela ne permet pas de déduire que l'autorité administrative a diligenté une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées. Par conséquent, les frais d’expertise seront laissés à la charge de l’État.
7.
7.1 Mal fondé, le recours est rejeté.
7.2 Étant donné que, depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner la recourante au paiement d'un émolument de CHF 200.-.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Véronique SERAIN |
| Le président
Philippe KNUPFER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le