Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/840/2024 du 30.10.2024 ( AI )
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/4020/2022 ATAS/840/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt incident du 30 octobre 2024 Chambre 5 |
En la cause
Hoirie de Feu Madame A______ représentée par Me Aurélie VALLETTA, avocate | recourante |
contre
OFFICE DE L’ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
ATTENDU EN FAIT
Que Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en ______ 1980, de nationalité brésilienne, a été employée par l’association B______ (ci‑après : l’association) à Genève ;
Que pour raison de maladie, elle s’est retrouvée en incapacité de travail ;
Qu’elle a déposé une demande de prestations invalidité auprès de l’office de l’assurance‑invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), qui l’a reçue le 28 août 2020 ;
Que par décision du 24 octobre 2022, l’OAI a rejeté sa demande de prestations en raison du fait que l’assurée ne comptait pas trois années de cotisations au moment de la survenance de l’invalidité ;
Que par acte de son mandataire, posté en date du 24 novembre 2022, l’assurée a interjeté recours contre la décision de l’OAI auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) ;
Qu’elle a allégué avoir été présente en Suisse depuis plus de dix ans, avoir commencé à travailler pour l’association en août 2010, en tant qu’aide polyvalente et avoir donc été obligatoirement assurée depuis plus de trois ans ; qu’elle a conclu à l’annulation de la décision du 24 octobre 2022, à la constatation qu’elle avait le droit à une rente invalidité entière et au renvoi de la cause à l’OAI, sous suite de frais et dépens ;
Que par réponse du 30 janvier 2023, l’OAI a conclu au rejet du recours, au motif que l’extrait de compte individuel de l’assurée ne faisait état d’aucune inscription à la date du 2 juillet 2021, qu’elle n’avait donc jamais cotisé et que la condition de durée minimale de cotisations de deux années et onze mois n’était donc pas remplie ;
Que par réplique du 23 février 2023, l’assurée a persisté dans ses conclusions, faisant notamment valoir qu’une procédure avait été ouverte par l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : l’OCIRT), au motif que l’employeur n’avait pas respecté ses obligations en matière de cotisations et ne l’avait pas déclarée « aux assurances sociales car [elle était] sans papiers en Suisse » (déclaration à l’OCIRT du 22 octobre 2022) ;
Que par duplique du 20 mars 2023, l’OAI a persisté dans ses conclusions en rejet du recours ;
Que par observations complémentaires du 23 mars 2023, l’assurée a communiqué à la chambre de céans un courrier de l’OCIRT du 14 mars 2023 démontrant, selon elle, l’activité lucrative soumise à cotisations ainsi que l’existence d’une procédure en affiliation rétroactive aux assurances sociales, pour les salaires versés à l’assurée entre 2010 et 2020 ;
Que par courrier du 16 mai 2023, la recourante a sollicité l’apport du dossier en main de l’OCIRT concernant l’association ;
Que par courrier du 31 août 2023, la recourante a produit un procès-verbal de l’audience du 30 août 2023 devant l’autorité de conciliation du tribunal des prud’hommes aux termes duquel l’association s’engageait à déclarer, auprès de la caisse de compensation AVS, de manière rétroactive, les salaires chiffrés par année, reçus par l’assurée entre 2010 et 2020 et s’engageait à prendre en charge, tant la part employeur qu’employé, desdites cotisations sociales, facturées par la caisse de compensation ;
Que par observations du 21 septembre 2023, l’OAI a déclaré ne pas s’opposer à l’apport du dossier de l’OCIRT tout en précisant qu’il maintenait ses conclusions en rejet du recours ;
Que par courrier du 26 septembre 2023, le mandataire de l’assurée a informé la chambre de céans du décès de sa mandante, en date du 15 septembre 2023, tout en relevant que sa mère, Madame C______, unique héritière, souhaitait poursuivre la procédure en cours ;
Qu’en raison du décès de la recourante, la chambre de céans, par ordonnance du 28 septembre 2023, a suspendu l’instruction de la cause, en application de l’art. 78 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA ‑ E 5 10), jusqu’à reprise de la procédure par déclaration écrite de la partie la plus diligente, mais au plus tard dans un délai d’un an ;
Que par courrier du 10 janvier 2024, la chambre de céans a interpellé le greffe des successions de la justice de paix, afin de connaître les héritiers légaux de la recourante ;
Que par réponse du 16 janvier 2024, le greffe des successions a informé la chambre de céans que la seule héritière de la recourante était sa mère, C______ (ci-après : l’héritière ou la mère de l’assurée) ;
Que par courrier du 24 janvier 2024, la chambre de céans a interpellé la mère de l’assurée et lui a demandé de lui transmettre un certificat d’héritier ;
Que cette dernière s’est exécutée par dépôt au guichet du greffe de la chambre de céans, en date du 26 janvier 2024, du certificat d’héritier dressé, en date du 18 janvier 2024, par la notaire D______ ;
Que par courrier du 31 janvier 2024, la chambre de céans a demandé à l’héritière de se déterminer sur la suite de la procédure initiée par Feu sa fille ;
Qu’après plusieurs demandes de délais supplémentaires, accordés par la chambre de céans à l’héritière, le mandataire de l’héritière a informé la chambre de céans, par courrier du 19 juin 2024, qu’il était constitué et qu’il souhaitait un délai pour accéder au dossier, étant précisé que la présente procédure était toujours suspendue ;
Que par courrier de son mandataire du 17 septembre 2024, l’héritière s’est déterminée, demandant préalablement la reprise de la procédure entreprise par sa fille et alléguant, notamment, qu’il appartenait à l’assureur d’effectuer les démarches pour encaisser les créances non prescrites, dès lors que l’assurée avait pu prouver que les cotisations sociales lui avaient été déduites ;
Que par courrier du 19 septembre 2024, la chambre de céans a informé les parties que l’instance, suspendue par l’ordonnance du 28 septembre 2023, était reprise et a fixé à l’OAI un délai pour répondre aux arguments de l’héritière contenus dans son courrier du 17 septembre 2024 ;
Que par réponse du 26 septembre 2024, l’OAI a persisté dans ses conclusions en rejet du recours, au motif qu’il n’y avait aucune preuve de versement des cotisations sociales et que, pour le surplus, le recouvrement des cotisations relevait de la compétence de la caisse de compensation (ci-après : la caisse), y compris la question de la péremption ;
Que par courrier du 18 octobre 2024, le mandataire de l’héritière a sollicité une nouvelle suspension de trois mois de la présente procédure, dans l’attente de l’issue du contentieux entre sa mandante et la caisse, qui avait été mise en demeure, par courrier du 18 octobre 2024, de rendre une décision formelle ; que subsidiairement, ladite caisse devait être appelée en cause dans la présente procédure et que plus subsidiairement encore, l’audition de toute les parties était requise, y compris l’audition d’un représentant de la caisse à titre de témoin.
CONSIDÉRANT EN DROIT
Que conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20) ;
Que sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie ;
Que le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 LPA) ;
Qu’interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est, prima facie, recevable ;
Que le litige porte sur le bien-fondé de la décision du 24 octobre 2022 rejetant la demande de prestations invalidité déposée par l’assurée, au motif qu’aucune cotisation sociale n’était inscrite sur son compte individuel ;
Que suite au décès de l’assurée, la procédure a été suspendue puis reprise à la demande de son héritière ;
Que dans le canton de Genève, la procédure en matière d’assurance-invalidité est régie par la LPA, et plus particulièrement par les art. 89A et ss ;
Qu’aux termes de l’art. 14 LPA, applicable compte tenu du renvoi de l’art. 89A LPA, la procédure peut être suspendue lorsque son sort dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative pendante devant une autre autorité, jusqu’à droit connu sur ces questions (al. 1) ; que les autorités administratives et les juridictions administratives saisies d’une question préjudicielle sont toutefois liées par les décisions de l’organe compétent qui l’ont résolue avec force de chose jugée (al. 2) ;
Qu’en l’espèce, il ressort des pièces produites par l’héritière qu’elle a interpellé la caisse afin que cette dernière rende une décision formelle sur l’inscription au compte individuel de l’assurée des cotisations légales retenues et/ou leur recouvrement pour les années 2010 à 2020 ;
Attendu que la question du recouvrement des cotisations sociales et de la rectification de l’inscription au compte individuel de l’assurée est préalable à la résolution du litige ;
Que, par conséquent, la présente procédure doit être suspendue jusqu’à droit connu dans la procédure opposant l’héritière à la caisse ;
Que la suite de la procédure reste réservée, étant précisé qu'il appartient aux parties, particulièrement à l’héritière, d’informer spontanément et sans délai la chambre de céans de l’issue de la procédure l’opposant à la caisse, quand bien même la décision rendue par la caisse ne serait pas définitive.
PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENCE DE LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant sur incident
1. Suspend l'instance en application de l’art. 14 LPA, jusqu’à droit connu dans la procédure opposant l’héritière à la caisse de compensation quant au sort des cotisations sociales dues entre 2010 et 2020.
2. Enjoint aux parties d’informer, spontanément et sans délai, la chambre de céans des décisions rendues par la caisse de compensation dans ladite procédure.
3. Réserve la suite de la procédure.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Véronique SERAIN |
| Le président
Philippe KNUPFER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le