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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2506/2023

ATAS/847/2024 du 30.10.2024 ( LPP ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2506/2023 ATAS/847/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 octobre 2024

Chambre 4

 

En la cause

A______

représenté par Me Eric MAUGUÉ, avocat

 

 

demandeur

 

contre

FONDATION DE PRÉVOYANCE EN FAVEUR DU PERSONNEL DES TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS

représentée par Me Corinne MONNARD SÉCHAUD, avocate

 

 

défenderesse


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1958, marié, a travaillé au service des Transports publics genevois (ci-après : TPG).

b. À ce titre, il était affilié pour la prévoyance professionnelle auprès de la FONDATION DE PRÉVOYANCE EN FAVEUR DU PERSONNEL DES TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS (ci-après : la fondation).

B. a. Par formulaire signé le 3 novembre 1995, l'assuré a demandé à la fondation un versement anticipé à hauteur de CHF 90'656.15 pour l'acquisition d'une propriété d'un logement principal en France pour ses propres besoins. La date de versement désirée était fixée au 15 novembre 1995. Ce formulaire indiquait que, avant le versement anticipé, l'origine des droits remontait au 1er avril 1979, et que le montant de la rente de retraite à 65 ans s'élèverait à CHF 2'848.50 par mois. Après le versement anticipé, l'origine des droits remonterait au 1er avril 1995 et la rente de retraite à 65 ans s'élèverait à CHF 2'296.85 par mois. À la question de savoir si l'assuré désirait compenser la réduction des prestations de risque par une assurance complémentaire dont la prime était entièrement à sa charge, il a répondu par l'affirmative (les démarches devant être effectuées par l'assuré).

b. Par courrier du 16 novembre 1995, la fondation a informé l'assuré que, le dossier étant complet, elle transférerait le montant auquel il avait droit sur le compte de Crédit Agricole afin que ce dernier l'utilise pour l'achat de la résidence principale. Le montant net à payer, qui s'élevait à CHF 91'714.15, se décomposait comme suit :

-          Prestation de libre passage (PLP) au 31 mars 1995 CHF 90'656.15

-          Intérêts du 31 mars 1995 au 15 novembre 1995 CHF 1'558.-

À déduire :

-          Impôts à la source CHF 0.-

-          Frais de dossier CHF 500.-

c. Par formulaire du 2 mars 2006, l'assuré a demandé à la fondation un second versement anticipé à hauteur de CHF 68'607.20 pour le remboursement d'un prêt hypothécaire grevant la propriété du logement principal en France pour ses propres besoins. La date de versement désirée était arrêtée au 1er août 2006. Ce formulaire mentionnait que, avant le versement anticipé, l'origine des droits remontait au 1er avril 1995, et que le montant de la rente de retraite à 65 ans s'élèverait à CHF 2'801.95 par mois. Après le versement anticipé, l'origine des droits remonterait au 1er juin 2003 et la rente de retraite à 65 ans s'élèverait à CHF 1'987.35 par mois. À la question de savoir si l'assuré souhaitait compenser la réduction des prestations de risque par une assurance complémentaire dont la prime était entièrement à sa charge, il a répondu par la négative.

d. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2013 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Date d'affiliation 1er juin 2003

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 0.-

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements CHF 159'263.35

-          Rentes annuelles projetées :

Pension de base mensuelle à 65 ans CHF 2'099.85

e. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2014 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 0.-

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 159'263.35

-          Rachat maximum possible CHF 288'078.30

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans CHF 2'009.90 par mois

f. Par lettre du 16 juillet 2015, la fondation a fait savoir à un notaire sis en France, en lien avec la vente de la propriété immobilière de l'assuré, que le montant à lui restituer s'élevait à CHF 159'263.35.

g. Par courrier du 25 août 2015 à l'assuré, la fondation a attesté avoir reçu, valeur du 28 juillet 2015, le remboursement de l'accès à la propriété de CHF 166'862.38 en provenance du notaire français. À la suite de ce transfert, il apparaissait une plus-value de CHF 7'599.03 en faveur de l'assuré, la somme versée étant supérieure au montant demandé. La fondation proposait à l'assuré soit de lui rembourser cette plus-value sur un compte, soit de l'intégrer directement sous forme de rachat afin d'augmenter ses prestations de retraite. L'assuré était invité à communiquer son choix dans les meilleurs délais.

En annexe figurait notamment le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015 qui faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 159'263.35

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 133'869.60

-          Simulation de retraite projetée :

-             Pension de retraite sans revalorisation à 65 ans : CHF 3'294.40 par mois

-             Pension de retraite revalorisée au taux de 1.30% à 65 ans : CHF 3'608.90 par mois

h. Le 31 août 2015, l'assuré a reçu sur son compte bancaire le montant de CHF 7'599.03.

i. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2015 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 160'447.85

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 135'860.20

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans CHF 3'292.35 par mois

j. Par lettre du 7 avril 2016, la fondation a rappelé à l'assuré, qui atteignait l'âge d'une possible retraite anticipée, que, dans le courant du mois de novembre 2015, il avait reçu une information sur le changement de taux d'intérêt technique qui interviendrait au 1er janvier 2017. Elle l'encourageait à prendre contact avec elle afin de lui fournir une simulation personnelle de l'impact sur ses prestations à la suite de la modification du taux d'intérêt. Elle ajoutait que malgré la décision du Comité de débloquer une enveloppe de plus de deux millions de francs afin de mettre en place des mesures d'accompagnement pour les personnes qui étaient proches de la retraite, ces changements ne seraient pas sans conséquence sur les prestations de retraite futures.

k. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2016 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 162'453.45

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 142'520.85

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans CHF 3'292.65 par mois

l. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2017 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 162'453.45

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 183'733.90

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'827.65 par mois

m. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2017 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 164'078.-

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 220'451.45

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans CHF 2'858.70 par mois

n. Le certificat de prévoyance au 31 décembre 2018 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 165'718.80

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 234'341.50

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans CHF 2'862.30 par mois

o. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2019 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 165'718.80

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 242'127.25

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'867.50 par mois

p. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2020 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 167'376.-

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 271'458.90

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'886.60 par mois

q. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2021 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 169'049.75

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 286'053.35

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'881.45 par mois

r. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2022 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 170'740.25

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 295'109.90

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'909.85 par mois

s. Le certificat de prévoyance au 1er janvier 2023 faisait état des données suivantes :

-          Date d'entrée 1er avril 1979

-          Apport(s) personnel(s) et rachat(s) libre(s) CHF 172'447.65

-          Versements anticipés sous déduction

des remboursements pour accès à la propriété CHF 0.-

-          Rachat maximum possible CHF 292'231.10

-          Simulation de pension de retraite :

Pension de retraite projetée sans revalorisation à 65 ans : CHF 2'910.45 par mois

t. Ces certificats comportaient en bas de page la mention : « SAUF ERREUR OU OMISSION. Ce document est une information, le règlement FPTPG étant applicable et déterminant dans tous les cas, notamment lors de contestations ».

u. Le certificat « simulation de mise à la pension de retraite au 30 avril 2023 » faisait état d'une pension de retraite de CHF 2'910.45 par mois à partir de 65 ans. Dans un courriel d'accompagnement du 24 janvier 2023 à l'assuré, Madame B______, directrice de la fondation, s'est exprimée en ces termes : « Concernant la différence entre la situation sans avoir fait les retraits EPL [encouragement à la propriété du logement] et la situation s'il n'y avait pas eu de retraits, aujourd'hui la différence sur la prestation de libre passage est de CHF 210'090.-. Si vous n'aviez pas fait les retraits EPL à l'époque, votre rente serait aujourd'hui de CHF 3'672.- par mois au lieu de CHF 2'910.-. Vous avez perdu CHF 762.- par mois ».

v. Par lettre du 17 avril 2023, l'assuré, sous la plume de son avocat, a invité la fondation à lui confirmer que son droit aux prestations de retraite à compter de 65 ans s'élèverait à CHF 3'672.- par mois. Il a fait valoir que du moment que le retrait EPL avait été intégralement remboursé à concurrence du montant nécessaire pour lui permettre de réintégrer ses droits, il ne pouvait pas être affecté par l'usage de la faculté aménagé par le cadre légal en matière d'accession à la propriété. Un retrait EPL n'avait pas pour effet de sortir l'argent du circuit de la prévoyance, et la volonté du législateur n'avait pas été de permettre aux institutions de prévoyance de pénaliser l'assuré qui ferait usage de ce moyen.

w. Le certificat de prévoyance au 30 avril 2023 faisait état d'un rachat maximum possible de CHF 284'816.60.

x. Par courrier du 8 mai 2023, la fondation a répondu à l'assuré que sa rente mensuelle était bien de CHF 2'910.45. Elle a expliqué qu'en cas de prélèvement d'un capital de la prévoyance professionnelle et du remboursement du même montant des années plus tard, les intérêts que le montant aurait produit s'il n'avait pas été retiré manquaient. Le remboursement survenu le 28 juillet 2015 ne comprenait pas les intérêts manquants. De ce fait, l'avoir de retraite n'était pas complet en 2015. Depuis lors jusqu'en 2023, la différence s'était encore creusée pour arriver à un écart de prestations de libre passage de CHF 210'090.-.

C. a. Par acte du 3 août 2023, l'assuré, par l'intermédiaire de son avocat, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'une demande en paiement à l'encontre de la fondation, en concluant, sous suite de frais et dépens, à la condamnation de celle-ci à lui payer une rente de vieillesse de CHF 3’672.- par mois dès le 1er mai 2023 ainsi qu'une somme de CHF 2'286.-, avec intérêts à 5% à compter du 15 juin 2023 (date moyenne), sous réserve d'amplification.

Le demandeur a exposé que, en cas de vente du logement en propriété, le remboursement complet du versement anticipé devait inclure les intérêts afin que l'assuré puisse intégralement reconstituer ses expectatives de prévoyance.

Dans son cas, il avait versé le montant qui lui avait été demandé pour être intégralement réintégré dans ses droits. Si le montant versé était insuffisant, il appartenait à l'institution de prévoyance de l'en informer.

Dans les faits, tout le contraire s'était produit. La défenderesse avait prétendu qu'elle avait été créditée d'un trop-perçu. Son courrier du 25 août 2015 indiquait que le trop-perçu de CHF 7'599.03 pouvait être « intégré directement sous forme de rachat ». Or, pour effectuer un rachat, le demandeur devait avoir remboursé l'intégralité de son retrait EPL, intérêts compris.

De plus, les certificats de prévoyance qui lui avaient été adressés par la suite indiquaient invariablement à la rubrique relative à l'EPL que le solde était égal à zéro, de sorte qu'il n'y avait plus de place pour un remboursement d'un solde d'EPL.

Le demandeur en a tiré la conclusion qu'il avait remboursé un montant suffisant pour reconstituer l'intégralité de ses expectatives de prévoyance au regard des dispositions applicables lors de ce remboursement.

Subsidiairement, il s'est prévalu du principe de la protection de la bonne foi. Il pouvait légitimement partir du principe que lors de la vente de son logement, il avait versé le montant nécessaire pour intégralement reconstituer ses expectatives de prévoyance. Une fois encore, le courrier de la défenderesse du 25 août 2015 indiquait que le trop-perçu de CHF 7'599.03 pouvait être « intégré directement sous forme de rachat ». Or, pour réaliser un rachat, il devait avoir remboursé l'intégralité de son retrait EPL, intérêts compris. À cela s'ajoutait que les certificats de prévoyance qui lui avaient été remis par la suite indiquaient invariablement, à la rubrique relative à l'EPL, que le solde était égal à zéro, de sorte qu'il n'y avait plus de place pour un remboursement. S'il avait su qu'il devait réaliser un remboursement complémentaire pour être réintégré intégralement dans ses droits, il l'aurait effectué. En ce sens, il avait pris des dispositions sur lesquelles il ne pouvait plus revenir dans la mesure où un remboursement n'était plus possible lorsqu'il avait été informé que celui-ci était incomplet faute des intérêts, le délai de trois ans avant l'âge de la retraite étant largement échu.

En tout état de cause, il appartenait à la défenderesse de procéder au calcul détaillé de la différence de prestation de libre passage, respectivement de droit à la rente, qu'elle faisait valoir, au regard des règles applicables lors du remboursement, à savoir en août 2015.

En l'état, les prestations échues qui lui étaient dues s'élevaient à CHF 2'286.-, avec intérêts à 5% à compter du 15 juin 2023, soit le différentiel mensuel de CHF 762.- multiplié par trois mois (mai, juin et juillet 2023).

b. Dans sa réponse du 28 septembre 2023, la défenderesse a conclu, sous suite de frais et dépens, à la forme, à l'irrecevabilité des conclusions du demandeur, et au fond, au rejet de celles-ci.

La défenderesse a relevé que le demandeur ne pouvait pas prétendre à une rente d'un montant identique à celui qu'il aurait obtenu sans avoir jamais procédé à une accession à la propriété.

Elle a indiqué être une caisse régie en primauté de prestations, dans le cadre de laquelle la réduction des prestations de prévoyance dépendait de ses bases techniques.

Elle a rappelé avoir mentionné dans chaque certificat de prévoyance délivré au demandeur sous la ligne « rachat » la possibilité de racheter la perte d'intérêts résultant de la diminution du capital de prévoyance consécutive au versement anticipé. Cette pratique était la même que celle de l'ensemble des institutions de prévoyance en Suisse.

Elle a exposé que la loi exigeait, en cas de vente du bien immobilier, le remboursement du montant retiré, mais ne requérait pas obligatoirement le rachat de la perte d'intérêts. Si le demandeur avait effectivement remboursé la totalité du montant retiré, il n'avait en revanche pas racheté la perte d'années d'assurance consécutive aux versements anticipés. À cet égard, elle l'avait dûment informé en lui transmettant chaque année un certificat de prévoyance faisant état du « rachat maximum possible ». Il était ainsi loisible au demandeur de racheter la perte d'intérêts figurant sur chacun des certificats annuels.

Ensuite, elle a considéré que les conditions pour se prévaloir de la bonne foi n'étaient pas réunies. Il était faux d'avancer que « le demandeur pouvait légitimement partir du principe que lors de la vente de son [logement], il avait versé le montant nécessaire pour intégralement reconstituer ses expectatives de prévoyance ». Il était également incorrect de prétendre que le courrier du 25 août 2015, de concert avec les certificats de prévoyance remis, lui auraient donné un renseignement ou une décision erronés de l'administration qui puissent obliger celle-ci à consentir un avantage à son administré qui soit contraire à la réglementation en vigueur. Le demandeur avait eu diverses réunions avec l'administration de la défenderesse, notamment avec l'ancien président et la nouvelle présidente, qui pouvaient témoigner l'avoir pleinement renseigné. À aucun moment, la défenderesse n'avait donné la confirmation au demandeur qu'il ne pouvait plus effectuer un nouveau rachat. À aucun moment, celui-ci n'avait demandé à pouvoir procéder à un tel rachat pour améliorer sa situation. Ni en 2015 ni en 2017 (au moment du changement du taux technique), il n'avait manifesté un intérêt au sujet des adaptations introduites. À aucun moment, il n'avait contesté le montant de la rente de vieillesse projeté tel que figurant sur les certificats délivrés, lesquels ne faisaient pas état d'un montant supérieur à la rente de retraite effectivement versée depuis le début de sa retraite.

Enfin, le demandeur ne pouvait pas obtenir, en violation du principe d'égalité de traitement, une rente de retraite d'un montant supérieur à celui alloué à un retraité qui, pour sa part, n'aurait pas bénéficié de versements anticipés ou aurait procédé au rachat correspondant. L'égalité de traitement entre un assuré qui n'avait jamais effectué un retrait EPL et un assuré qui l'avait fait et remboursé le capital commandait de servir des rentes de montants adaptés, et donc différents.

La défenderesse a requis la production par le demandeur :

-          de toute pièce établissant les dispositions qu'il avait prises auxquelles il ne pouvait pas renoncer sur la base exclusive d'informations incorrectes qu'elle lui avait données ; et

-          la preuve de rachats entre le 31 mars 1995 et le 30 avril 2023.

La défenderesse a proposé l'audition des témoins suivants :

-          Monsieur C______, gestionnaire auprès d'elle ;

-          Monsieur D______, son ancien président ;

-          Madame E______, sa présidente actuelle ; et

-          B______, sa directrice.

La défenderesse a versé au dossier en particulier :

-          son règlement d'application de la loi fédérale sur l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, valable dès le 1er janvier 1996 (ci-après : règlement 1996) ;

-          son règlement d'application de la loi fédérale sur l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, valable dès le 1er janvier 2003 (ci-après : règlement 2003) ;

-          son règlement général, entré en vigueur au 1er janvier 2014 (ci-après : règlement 2014) ; et

-          son règlement général, entré en vigueur au 1er janvier 2022 (ci-après : règlement 2022).

c. Dans sa réplique du 19 octobre 2023, le demandeur a conclu préalablement à ce qu'il soit ordonné à la défenderesse d'expliquer le mécanisme de rachat prévu par l'art. 84 de son règlement 2014 lors du passage de l'ancien au nouveau système avec effet au 1er janvier 2014, de produire le calcul réalisé à la suite du remboursement des retraits EPL en juillet 2015 permettant d'aboutir aux montants retenus dans le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, soit au rachat maximum possible de CHF 133'869.- et à une simulation de pension mensuelle de retraite à 65 ans de CHF 3'294.-, et d'établir par des calculs les raisons pour lesquelles, selon le certificat de prévoyance au 1er janvier 2017, le rachat maximum possible était passé à un montant de CHF 183'733.90, respectivement à une simulation de pension mensuelle de retraite à 65 ans de CHF 2'827.65, ainsi que les raisons pour lesquelles, sans retrait EPL, le demandeur aurait eu droit à une pension mensuelle de retraite de CHF 3'672.- en lieu et place de CHF 2'910.-. À titre principal, il a persisté dans ses conclusions, tout en amplifiant celles liées aux prestations échues qui s'élevaient à CHF 5'572.- (recte : CHF 4'572.-), représentant le différentiel mensuel de CHF 762.- de mai à octobre 2023, avec intérêts à 5% à compter du 31 août 2023 (date moyenne), sous réserve d'amplification.

À titre liminaire, le demandeur s'est opposé à l'audition de prétendus témoins, car à l'exception du gestionnaire, les autres personnes physiques dont l'audition était sollicitée par la défenderesse étaient des organes de cette dernière, qui ne pouvaient être entendus qu'à titre de renseignements.

Il a allégué que la notion de « perte d'intérêts » était propre à une institution de prévoyance en primauté de cotisations. Les incidences d'un retrait, respectivement d'un remboursement, dans le système en primauté de prestations pratiqué par la défenderesse, ne faisaient pas intervenir explicitement la notion de « perte d'intérêts » que ce soit dans le système en vigueur jusqu'en 2013 ou dans le nouveau système introduit en 2014.

Il a ajouté que rien n'indiquait dans le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015 que le montant du rachat maximum possible de CHF 133'869.- correspondait aux prétendus intérêts moratoires manquants. Il se demandait de quel intérêt moratoire il était question : la performance annuelle de l'institution de prévoyance durant les années de retraits EPL ou le taux technique appliqué durant les années de retrait EPL. Dans la première éventualité, en cas de performances négatives, il se demandait si le remboursement permettait de racheter des années supplémentaires.

Il a souligné qu'il était parfaitement conscient qu'il pouvait réaliser des rachats en marge du remboursement des deux retraits. En revanche, il n'imaginait pas un seul instant que des lacunes de prévoyance subsisteraient en lien avec ces retraits EPL.

Le demandeur a fait valoir que la défenderesse lui avait clairement indiqué lors de la réception des fonds virés par le notaire que le remboursement était intervenu avec une plus-value de CHF 7'599.03. Les certificats de prévoyance émis par la suite comprenaient la rubrique : « versements anticipés sous déduction des remboursements pour accès à la propriété : 0 ». De plus, selon l'art. 55 al. 3 du règlement 2014, il était question du rétablissement du droit aux prestations consécutif à un remboursement de l'EPL et non pas d'une simple possibilité de rachat partiel des droits. Le demandeur en a tiré la conclusion qu'il pouvait, en application du principe de l'interprétation objective, considérer que les retraits EPL avaient été intégralement remboursés, de sorte que ceux-ci n'avaient plus d'incidence sur son droit aux prestations. Cette interprétation s'imposait d'autant plus que le législateur avait voulu que l'assuré puisse se prémunir contre la diminution de prestations résultant de retraits EPL. Ainsi, pour les risques invalidité et décès, l'assuré pouvait conclure une assurance pour compenser intégralement cette diminution. Corrélativement, l'institution de prévoyance devait offrir, de manière claire et transparente, à l'assuré la faculté de pourvoir rembourser un montant lui permettant d'éviter toute forme de diminution de prestations pour l'éventualité retraite.

Le demandeur a répété que la défenderesse était tenue de l'informer correctement de l'incidence du retrait sur son droit aux prestations et des possibilités de remboursement. Il n'était pas admissible qu'il apprenne à la veille de sa retraite que sa rente était réduite de plus de 20% au motif qu'il n'aurait pas remboursé les intérêts en lien avec son retrait. Le comportement de la défenderesse n'était pas conforme à ses obligations au regard du principe de la bonne foi.

Le demandeur a relevé que lors de deux retraits intervenus en 1995 et 2006, le règlement prévoyait que ceux-ci avaient pour conséquence une réduction des prestations résultant du déplacement de l'origine des droits. Ce déplacement intervenait selon les normes actuarielles et techniques appliquées par la défenderesse.

Lors du remboursement intervenu en 2015, les règles avaient changé.

Dans le cas présent, le demandeur ignorait la méthode de calcul appliquée au moment du remboursement.

Lors de l'entrée en vigueur du règlement 2014, la prestation de sortie réglementaire que le demandeur avait acquise au 31 décembre 2013, dont le montant était garanti (art. 83 du règlement 2014), avait servi à racheter les droits correspondants au 1er janvier 2014 dans le nouveau plan : système de sortie / entrée (art. 84 du règlement 2014). Au regard des dispositions transitoires du règlement 2014, le demandeur se demandait comment les cas de retraits EPL en cours avaient été traités et comment les remboursements intervenus après l'entrée en vigueur de ce règlement avaient été pris en compte. Ces interrogations prenaient une acuité particulière au vu des montants figurant dans les certificats de prévoyance, notamment concernant la pension de retraite projetée à 65 ans. Il se demandait pour quels motifs le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, émis au moment du remboursement, retenait une rente mensuelle de CHF 3'294.40 et celui au 1er janvier 2017 un montant de CHF 2'827.65. Il ignorait également le calcul réalisé par la défenderesse pour prétendre qu'en 2022, la situation, sans les retraits EPL, aurait permis au demandeur de bénéficier au 1er mai 2023 d'une prestation de libre passage d'un montant supplémentaire de CHF 210'090.-, respectivement une rente mensuelle de CHF 3'672.- en lieu et place de CHF 2'910.-. Il se demandait comment le montant de CHF 133'869.60 en 2015 avait pu passer à CHF 210'090.- en 2022. Le remboursement EPL intervenait soit par un rachat d'années d'assurance selon l'ancien système, soit en fonction du salaire cotisant selon le nouveau système. Une fois ce rachat effectué, il ne discernait pas le mécanisme qui pouvait conduire à un accroissement du déficit en termes de prestation de libre passage. Pour ces motifs, il contestait la diminution des prestations de vieillesse résultant des retraits EPL.

d. Dans sa duplique du 19 janvier 2024, la défenderesse a conclu au rejet de toutes les conclusions du demandeur.

Elle a réitéré sa demande d'audition de l'ensemble des témoins. B______ et C______, en leur qualité de membres de l'organe de gestion et non du Conseil de fondation, ne pouvaient pas être considérés comme des organes de celle-ci. En tous cas, la défenderesse a requis que D______ et E______ soient entendus à titre de renseignement. Le cas échéant, toutes ces personnes pouvaient établir des déclarations écrites.

La défenderesse a allégué que l'art. 9 al. 6 du règlement 1996 avait été supprimé, de sorte qu'on ne pouvait pas admettre qu'un retrait suivi, des années plus tard, d'un remboursement EPL en 2015 permettait un retour à l'origine des droits.

Elle a contesté la portée qu'entendait donner le demandeur aux termes « rétablissement du droit aux prestations consécutif à un remboursement » (règlement 2014), en précisant qu'elle ne pouvait correspondre qu'à un rétablissement partiel. Elle a ajouté qu'il n'y avait pas matière à interpréter l'art. 55 al. 3 du règlement 2014 et qu'il ne pouvait pas y avoir d'inégalité de traitement avec d'autres assurés qui n'auraient effectué aucun retrait durant toute la période d'affiliation.

Elle a également contesté que les règles relatives aux conséquences d'un retrait EPL, respectivement d'un remboursement EPL, aient changé. C'étaient les paramètres techniques de la caisse de pension et les systèmes de primauté qui avaient changé.

Elle a indiqué que la notion « d'intérêts moratoires » employée par le demandeur n'était pas adéquate. De plus, la performance annuelle de l'institution de prévoyance durant les années de retrait EPL n'influait pas les prestations dans une institution de prévoyance en primauté des prestations. Elle a contesté que le taux technique n'ait aucune influence s'agissant du rachat. Le barème pour calculer la prestation de sortie reposait sur des bases techniques appliquées par la caisse, et les bases techniques étaient définies en fonction du taux d'intérêt technique et des tables (tables LPP 2020 périodiques).

Elle a aussi contesté que les certificats de prévoyance auraient laissé entendre que les deux retraits n'avaient plus de conséquence sur les prestations de vieillesse. Précisément, des montants de rachat ouverts figuraient sur ces certificats. Les variations du montant du rachat au cours du temps étaient liées au changement des paramètres techniques et à l'augmentation du salaire.

La défenderesse a déclaré que lors du premier versement anticipé dont avait bénéficié le demandeur, il avait été expressément informé qu'un remboursement tardif entraînerait une perte d'intérêt plus élevée et, par conséquent, une reconstitution des prestations assurées plus faible. Elle a produit à cet effet le courrier du 12 juin 1995 qu'elle avait adressé au demandeur attirant son attention en particulier sur le fait qu' « un rachat par mensualités n'est pas possible. Par contre, des remboursements par tranche de CHF 20'000.- au minimum peuvent être échelonnés. (…) la somme nécessaire pour recouvrer l'intégralité de vos droits sera d'autant plus importante que les remboursements seront tardifs ».

La défenderesse a également joint un rapport du 11 décembre 2023 de Madame Laura SAÏD, actuaire, spécialiste en prévoyance professionnelle, ainsi que ses annexes, portant sur :

-          l'explication sur la perte d'intérêts consécutive à un versement anticipé dans une institution de prévoyance appliquant la primauté des prestations (Annexe 1) ;

-          l'explication du mécanisme de rachat prévu par l'art. 84 du règlement général lors du passage de l'ancien au nouveau système au 1er janvier 2014 (Annexe 2) ;

-          l'attestation des calculs réalisés à la suite du remboursement des versements anticipés effectué par le demandeur en juillet 2015 et permettant d'aboutir aux montants retenus dans le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, soit au rachat maximal de CHF 133'869.- et à une simulation de rente de retraite mensuelle à 65 ans de CHF 3'294.- (Annexe 3) ;

-          l'explication, au moyen de calculs, des raisons pour lesquelles le rachat maximal possible était passé à un montant de CHF 183'733.90 en 2017, avec une rente de retraite mensuelle à 65 ans de CHF 2'827.65 (Annexe 4) ; et

-          l'explication, au moyen de calculs, des raisons pour lesquelles, sans versement anticipé, le demandeur aurait eu droit à une rente de retraite mensuelle de CHF 3'672.- en lieu et place de CHF 2'910.- (Annexe 5).

La défenderesse a repris la teneur de certains extraits dudit rapport qui expliquait que lorsqu'un assuré effectuait un versement anticipé dans le cadre de l'encouragement à la propriété du logement, le montant ainsi retiré sortait du système de la capitalisation (mais restait lié à la prévoyance professionnelle) et ne portait plus intérêt. Un remboursement ultérieur lui permettait de reconstituer une partie de ses prestations selon les dispositions règlementaires en vigueur, mais entre la date du retrait et celle du remboursement, le montant retiré ne bénéficiait pas de l'intérêt servi par l'institution de prévoyance, d'où cette notion de perte d'intérêt. Le fait qu'une institution de prévoyance appliquait la primauté des cotisations ou la primauté des prestations ne changeait en rien ce principe.

La défenderesse avait changé de système d'assurance au 1er janvier 2014. La somme des salaires cotisants constituait dès cette date la nouvelle base réglementaire pour calculer les prestations assurées. Afin de garantir les droits acquis des assurés lors du passage de l'ancien au nouveau système, leur prestation de sortie acquise au 31 décembre 2013 avait servi au rachat d'une somme de salaires cotisants au 1er janvier 2014. La prestation de sortie de CHF 121'923.05 acquise par le demandeur au 31 décembre 2013 avait permis de racheter une somme de salaires cotisants de CHF 638'108.25 au 1er janvier 2014. Ces deux montants avaient fait l'objet de calculs présentés dans l'Annexe 2 précitée.

Le calcul réalisé à la suite du remboursement des versements anticipés en juillet 2015 avait permis d'aboutir au montant retenu dans le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, soit au rachat maximal de CHF 133'869.- et à une simulation de rente de retraite mensuelle à 65 ans de CHF 3'294.-. Le remboursement des versements anticipés de CHF 159'263.35 le 28 juillet 2015 avait permis le rachat d'une somme de salaires cotisants de CHF 777'991.85, base de calcul des prestations assurées. Le montant de la rente de retraite annuelle assurée avait ainsi augmenté pour atteindre CHF 3'294.-. Après remboursement des versements anticipés au 28 juillet 2015, le demandeur avait encore la possibilité d'effectuer des rachats volontaires pour un montant de CHF 133'869.65 (Annexe 3 précitée).

La capacité de rachat dépendait de plusieurs paramètres : la somme des salaires cotisants, le dernier salaire cotisant, le taux de rente et le taux de prestation de sortie. Au 28 juillet 2015, la capacité de rachat du demandeur s'élevait à CHF 133'869.65 pour augmenter à CHF 143'838.85 au 31 décembre 2016 en raison du vieillissement de celui-ci. Au 1er janvier 2017, la défenderesse avait changé son plan, en passant des bases techniques EVK 2000 (3.5%) aux bases techniques LPP 2010 (2.75%) et en diminuant son taux de rente de 1.829% à 1.68%. À la suite de ces modifications, la capacité de rachat était passée à CHF 183'733.90 et la rente de retraite mensuelle du demandeur avait atteint CHF 2'827.65 (Annexe 4 précitée).

L'ancien système valable jusqu’au 31 décembre 2013 prévoyait une rente de retraite assurée qui dépendait de la date d'affiliation au sein de la fondation défenderesse, de sorte qu'à salaire assuré égal, les prestations assurées étaient d'autant plus grandes que la période d'affiliation était élevée. Des apports et des retraits effectués au sein de la fondation défenderesse déplaçaient la date d'affiliation, qualifiée de date d'affiliation « théorique », principe propre aux institutions de prévoyance en primauté de prestations. Un versement anticipé effectué par un assuré réduisait son épargne et déplaçait ainsi la date d'affiliation théorique à une date plus proche, ayant pour conséquence une diminution de la durée d'affiliation et, enfin, des prestations assurées. Juste avant d'effectuer son premier versement anticipé en 1995, la date d'affiliation du demandeur s'établissait au 1er avril 1979. À la suite des deux versements anticipés en faveur du demandeur en 1995 et en 2006, la date d'affiliation théorique s'était déplacée au 1er juin 2003. Ces versements anticipés n'avaient pas pu bénéficier de l'intérêt servi par la fondation défenderesse. Pour mesurer l'impact des versements anticipés sur les prestations assurées, des calculs devaient être effectués comme si la date d'affiliation du demandeur s'établissait toujours au 1er avril 1979. Ainsi, le demandeur aurait obtenu à 65 ans une prestation de sortie de CHF 837'610.- au lieu de CHF 627'165.- et une rente de retraite mensuelle de CHF 3'887.- au lieu de CHF 2'910.- amenant à une différence de CHF 210'445.-, respectivement CHF 977.-. En définitive, la perte d'intérêt consécutive aux années écoulées entre les versements anticipés et leur remboursement ainsi que les changements de base technique intervenus entre-temps avaient conduit aux différences de prestations de sortie et de rentes de retraite contestées par le demandeur (Annexes 5 et 6 précitées).

Dans le rapport précité, l'actuaire avait expliqué les raisons pour lesquelles il existait un écart entre le montant de CHF 3'672.- de rente de retraite mensuelle communiqué en son temps par la défenderesse et celui qu'elle retenait de CHF 3'887.-. L'écart entre ces deux montants était lié au fait que le demandeur avait différé sa retraite d'une année, soit à 65 ans au lieu de 64 ans. L'actuaire précisait que cela ne changeait en rien les conclusions relatives à l'impact du versement anticipé sur les prestations assurées.

La défenderesse a relevé que le rapport de l'actuaire permettait de répondre aux différentes interrogations soulevées par le demandeur. Le cas échéant, l'audition de celle-ci était requise pour fournir des explications plus détaillées.

La défenderesse a ensuite exposé que seules étaient discutées en l'espèce les conséquences du retrait anticipé pour accession à la propriété sur la prestation de retraite versée. La couverture d'assurance pour les risques d'invalidité et décès n'était aucunement litigieuse.

La défenderesse a répété avoir respecté ses obligations d'information en toute transparence envers le demandeur, tant dans ses écrits que dans ses certificats. Celui-ci disposait donc des renseignements nécessaires pour procéder à des rachats s'il le souhaitait. C'était sans fondement que le demandeur invoquait qu'il n'aurait pas été correctement informé de l'incidence de son retrait sur son droit aux prestations et des possibilités de remboursement et de rachat. Il avait été correctement orienté par les certificats de prévoyance régulièrement délivrés et par les échanges qu'il avait pu avoir avec les personnes dont l'audition était requise. Il était faux de prétendre que le demandeur n'aurait appris qu' « à la veille de sa retraite que sa rente était réduite de plus de 20% ». Quoi qu'il soit, le demandeur n'avait pas établi avoir pris des dispositions irrévocables en sa défaveur.

e. Par courrier du 14 février 2024, le demandeur a estimé que, en termes de loyauté des débats, le procédé consistant à mandater l'actuaire questionnait. Si une expertise s'avérait nécessaire, il appartenait à la chambre de céans de l'ordonner.

f. Par écriture du 25 mars 2024, le demandeur a persisté dans ses conclusions, tout en amplifiant les prestations échues qui s'élevaient à CHF 8'382.-, avec intérêts à 5% à compter du 15 septembre 2023 (date moyenne), sous réserve d'amplification ultérieure.

Le demandeur a réitéré que les personnes physiques dont l'audition était requise par la défenderesse étaient des organes.

Il a indiqué ne pas disposer de la formation nécessaire pour apprécier les calculs réalisés par l'actuaire.

Il a fait valoir que les écritures de la défenderesse comportaient des contradictions. Dans son mémoire de réponse, cette dernière faisait état, pour 2017, « d'une baisse du taux technique de 3.75% à 2.25%, ce qui aurait impliqué une augmentation de la capacité de rachat ». Or, selon le mémoire de duplique, « Au 1er janvier 2017, la fondation défenderesse a changé son plan en passant des bases techniques EVK 2000 (3.5%) aux bases techniques LPP 2010 (2.75%) ». Des divergences aussi importantes sur un paramètre aux conséquences considérables en termes actuariels étaient pour le moins troublantes.

Par ailleurs, selon le rapport de l'actuaire, respectivement les dispositions applicables, notamment l'annexe au règlement 2014, ce n'était pas la baisse du taux technique qui avait eu pour conséquence d'augmenter la capacité de rachat au 1er janvier 2017 mais la modification du taux de rente. Le montant du rachat était fixé selon la formule suivante : SSCR = Rachat / (taux de rente * TxPS), SSCR étant la somme de salaires cotisants rachetés et TxPS le taux de prestation de sortie selon le barème de prestation de sortie à l'âge au moment du calcul. Au 1er janvier 2017, c'était la modification de ce taux de rente de 1.829% à 1.68% qui avait eu pour conséquence d'augmenter la possibilité de rachat et non pas la baisse du taux technique, paramètre qui n'entrait pas dans ce calcul. Dans un plan en primauté de prestations, la baisse du taux technique pouvait avoir pour conséquence une baisse du taux de rente mais cela n'allait pas nécessairement de soi. Il en allait de même dans un plan en primauté de cotisations, la baisse du taux technique ne conduisait pas fatalement à une baisse du taux de conversion. En effet, la baisse du taux technique n'emportait pas de manière inéluctable une baisse des prestations. Il était possible de compenser cette baisse par une augmentation des cotisations.

Le demandeur a considéré que les explications de l'actuaire, en relation avec les intérêts moratoires durant les années de retrait EPL, n'étaient pas convaincantes. Les développements auxquels il était fait référence étaient, pour l'essentiel, propres à la situation d'un retrait suivi d'un rachat dans un plan en primauté de cotisations. Dans un plan en primauté de prestations, l'avoir de prévoyance n'était pas crédité d'un intérêt annuel.

En tout état de cause, dans le cas d'espèce, le déficit allégué par la directrice de la défenderesse d'un montant de CHF 210'090.- résultait principalement des deux changements successifs du plan de prévoyance qui avaient eu un effet de levier. Les calculs réalisés par l'actuaire permettaient de s'en convaincre. C'était singulièrement le changement du mécanisme de rachat au 1er janvier 2014 puis la baisse du taux de rente au 1er janvier 2017 qui avaient contribué à induire ce déficit considérable. L'Annexe 6 du rapport de l'actuaire l'illustrait parfaitement. À sa lecture, le différentiel de prestations de sortie que le demandeur aurait dû combler par des rachats au 31 décembre 2015 s'élevait à CHF 146'322.- (CHF 471'768.- / CHF 352'442.-), étant précisé qu'en juillet 2015, ce montant aurait été encore inférieur. À cela s'ajoutait que si le calcul avait été réalisé selon les bases techniques en vigueur avant la modification du 1er janvier 2014, le déficit aurait été encore moindre.

Il était incontestable que le basculement dans le nouveau système au 1er janvier 2014 et la modification du plan au 1er janvier 2017 avaient eu un effet démultiplicateur. En cas de plan de prévoyance constant avec des bases techniques identiques tout au long de la période considérée, les conséquences auraient été toutes autres. Cette précision était importante pour la bonne compréhension du litige. Ce n'était pas simplement parce que le demandeur n'aurait pas « remboursé les intérêts » durant la période de retrait qu'il s'était trouvé considérablement prétérité à l'âge de la retraite. C'étaient principalement les deux modifications réglementaires aux conséquences massives en termes de prestations qui avaient conduit à cette situation.

Dans le cadre de ces modifications réglementaires, le demandeur a reproché à la défenderesse d'avoir gravement manqué à ses obligations en termes d'informations, singulièrement à l'égard des assurés qui avaient opéré un retrait EPL. Lors du remboursement en juillet 2015, il n'avait pas été avisé du changement radical de système d'assurance au 1er janvier 2014. L'information qui lui avait été donnée selon laquelle « une plus-value de CHF 7'599.03 » en sa faveur correspondait à un montant supérieur au montant demandé était non seulement fausse mais également trompeuse. Tout aussi trompeuse était la mention sur les certificats de prévoyance annuels selon laquelle le demandeur avait remboursé l'intégralité de son retrait EPL. En réalité, le montant remboursé avait été traité comme un simple rachat volontaire sans qu'aucune information ne lui ait été fournie sur le fait que le remboursement ne lui permettait en aucun cas de « reconstituer les expectatives diminuées ». Cette information était d'autant plus impérieuse que l'art. 55 al. 3 du règlement 2014 stipulait expressément que le remboursement avait pour objectif « le rétablissement du droit aux prestations ». La défenderesse se devait de lui indiquer que le système d'assurance avait radicalement changé au 1er janvier 2014 et lui communiquer le montant de rachat nécessaire au « rétablissement » de ses droits. Avec un tel changement, la défenderesse ne pouvait pas simplement traiter le remboursement EPL comme un quelconque rachat volontaire en le laissant accroire qu'il avait retrouvé l'intégralité de ses droits. Le devoir de la défenderesse exigeait qu'elle lui communique les informations nécessaires pour qu'il puisse prendre ses dispositions, à savoir qu'il puisse se déterminer en toute connaissance de cause sur la question du financement à consacrer pour assurer le rétablissement de ses droits. Il n'était pas admissible, au regard du principe de la bonne foi, d'attendre la veille de sa retraite pour le rendre attentif au fait qu'il n'avait nullement été réintégré dans ses droits aux prestations lors du remboursement effectué en 2015.

Le demandeur a ensuite fait valoir le même grief en relation avec la modification du plan de prévoyance au 1er janvier 2017. Il a allégué que les informations fournies étaient également dramatiquement lacunaires. La lettre de la défenderesse du 7 avril 2016 relatait que les assurés avaient été informés de la baisse du taux technique mais aucunement que cette baisse avait eu pour conséquence une réduction du taux de rente. Au surplus, cette lettre se rapportait à la perspective d'une retraite anticipée et ne traitait pas de l'impact général de la modification du plan de prévoyance pour l'ensemble des assurés. Cette communication ne mentionnait nullement que le maintien des droits nécessitait de procéder à des rachats.

Le demandeur a argué qu'une omission d'informer avait la même conséquence légale qu'une information inexacte. En l'espèce, non seulement les informations étaient erronées mais celles nécessaires pour qu'il puisse se déterminer en relation avec le rétablissement de ses droits dans le contexte d'un remboursement EPL ne lui avaient pas été fournies. Au regard du comportement de la défenderesse, il était fondé à partir du principe que les retraits EPL étaient sans conséquence sur son droit aux prestations de retraite à la suite du remboursement intervenu en juillet 2015. S'il avait été informé que tel n'était pas le cas, il aurait pris les dispositions nécessaires pour combler le déficit de couverture, qu'il ne pouvait plus faire dorénavant. Ce déficit de couverture ne représentait nullement CHF 210'445.- en juillet 2015. Selon l'Annexe 6 établie par l'actuaire, le différentiel de prestations de sortie qu'il aurait dû combler par des rachats au 31 décembre 2015 s'élevait à CHF 146'322.- (CHF 471'768.- / CHF 352'442.-). L'incurie de la défenderesse en termes d'informations avait occasionné un dommage conséquent qu'il lui incombait de combler en versant au demandeur les prestations auxquelles il pouvait légitimement prétendre.

g. Par écriture spontanée du 9 avril 2024, la défenderesse a maintenu sa position.

Elle a rappelé avoir fourni des explications circonstanciées au demandeur sur la méthode de calcul, en s'appuyant sur les certificats de prévoyance de 2013 à 2023 ainsi que sur la liste de témoins à entendre.

Elle a admis qu'il était difficile de pouvoir apprécier les calculs de l'actuaire. Les calculs de primauté des prestations étaient, par natures, compliqués. Il était toutefois surprenant que le demandeur allègue ne pas avoir les compétences pour évaluer ces calculs tout en les recalculant et en les contestant.

En outre, le demandeur ne pouvait pas prétendre que les modifications réglementaires ne lui avaient pas été annoncées, dès lors qu'il avait reçu a minima deux courriers l'informant en ce sens, respectivement en 2015 et 2019 (recte : 2016) - les pièces 107 et 109 auxquelles se réfère la défenderesse se rapportent au courrier figurant dans son dossier daté du 16 juillet 2015 adressé au notaire, respectivement du 7 avril 2016 à l'attention du demandeur (tous deux déjà cités).

Ces deux courriers n'étaient du reste pas les seules informations qu'elle avait fournies au demandeur dans le cadre du changement du taux d'intérêt. À cet égard, elle a versé au dossier :

-          son rapport de gestion 2012 qui faisait état de ce qui suit : « Le Comité de la fondation a décidé d'adopter les nouvelles tables techniques LPP 2010 dès 2014 et a également décidé une baisse de son taux technique de 4.5% à 3.5%, conformément à la recommandation faite par la chambre suisse des actuaires, ainsi que par son propre actuaire et également par le Conseil d'État genevois » ;

-          son rapport de gestion 2023, qui faisait état du même constat, au mot près ;

-          sa circulaire du 9 décembre 2013 à ses membres actifs les informant de l'entrée en vigueur du nouveau règlement au 1er janvier 2014, consultable sur son site internet ;

-          une note d'information du 13 février 2017 à ses membres actifs en lien avec la modification du taux d'intérêt technique de 3.5% à 2.75% dès le 1er janvier 2017, accompagnée du certificat de prévoyance tenant compte de cette réduction du taux d'intérêt ;

-          une communication à ses assurés actifs dans le courant de l'année 2018 relative au dépôt d'un projet de loi visant à recapitaliser la fondation ;

-          une communication à ses assurés actifs dans le courant de l'année 2019 les informant de l'évolution du projet de loi en cours visant à recapitaliser la fondation ;

-          une communication dans le courant de l'année 2019 aux assurés ayant passé ou qui passeraient l'âge de 58 ans au 31 décembre 2019, accompagnée, d'une part, d'un certificat de prévoyance faisant état des pensions futures projetées selon le règlement actuel et correspondant aux prestations qui seraient maintenues en cas d'approbation du projet de loi par le Grand Conseil, et d'autre part, d'une simulation faisant état des pensions futures projetées en cas de réduction de celles-ci dès le 1er janvier 2020 au cas où ce projet de loi serait refusé ou ne serait pas voté.

Elle en a inféré qu'elle avait communiqué à plusieurs reprises le changement du taux d'intérêt et les conséquences en découlant. Le demandeur pouvait savoir depuis 2012 que le taux d'intérêt allait changer. Dans tous les cas, il ne pouvait l'ignorer après 2013 puisqu'il en avait été personnellement informé. La défenderesse a ainsi fermement contesté avoir violé son devoir d'information. Du reste, le demandeur n'avait pas saisi l'Autorité cantonale de surveillance des fondations et des institutions de prévoyance de la République et Canton de Genève, ce qui démontrait la faible portée de son argument.

La défenderesse a enfin répété n'avoir pas donné d'assurances au demandeur qui l'auraient conduit à prendre des engagements irrémédiables sous l'angle du principe de la bonne foi.

h. Dans sa détermination du 2 mai 2024, le demandeur a indiqué avoir démontré de manière circonstanciée dans son écriture du 25 mars 2024 que les explications qui lui avaient été initialement fournies par la direction de la défenderesse étaient erronées. La pièce 112 à laquelle la défenderesse faisait référence (i.e. les certificats de prévoyance concernant le demandeur de 2013 à 2023) ne permettait aucunement de soutenir le contraire.

Pour ce qui était des manquements en termes d'informations, les nouvelles pièces au dossier n'étaient d'aucun secours à la défenderesse. En cas de modification de leur règlement, les institutions de prévoyance informaient spontanément et à temps leurs assurés de manière à ce qu'ils puissent prendre les dispositions nécessaires, notamment en matière de rachat. Lesdites pièces n'étaient ni objectives, ni compréhensibles ni loyales pour les assurés ayant opéré un retrait EPL durant la période considérée. Les rapports de gestion, introuvables sur le site internet de la défenderesse, ne figuraient pas au titre des informations communiquées chaque année aux assurés et celle-ci ne prétendait pas les avoir adressés à l'ensemble de ses assurés. Un profane ne pouvait pas réaliser les conséquences que pouvait avoir une réduction du taux technique de 4.5% à 3.5% sur son droit aux prestations, d'autant que la baisse du taux technique n'entraînait pas ipso facto une baisse des prestations. Par ailleurs, l'envoi d'une simple circulaire laconique informant les assurés qu'ils pouvaient consulter le nouveau règlement sur le site internet de la défenderesse ne constituait pas une information répondant aux exigences légales et jurisprudentielles. Le demandeur a ainsi contesté avoir été mis au courant de la modification du taux d'intérêt dès le mois de décembre 2013 au plus tard. Absolument aucune information n'était donnée aux assurés en relation avec la baisse du taux technique de 4.5% à 3.5% avec effet au 1er janvier 2014.

En ce qui concernait la baisse du taux technique de 3.5% à 2.75% au 1er janvier 2017, le courrier informatif du 7 avril 2016 se rapportait à l'hypothèse d'une retraite anticipée. Une fois encore, il n'était aucunement indiqué aux assurés que la baisse du taux technique aurait pour conséquence une baisse drastique des prestations de retraite dans tous les cas de figure. Le courrier se terminait d'ailleurs comme suit : « Nous vous encourageons vivement, en premier lieu, à contacter l'AVS afin d'obtenir une simulation précise de vos futures prestations à 65 ans, de manière à nous permettre une simulation au plus juste, dans le cas où vous seriez intéressé par un Pont AVS (PCR) en supplément à une rente de retraite anticipée ». L'assuré qui n'entendait pas prendre de retraite anticipée ne serait donc pas enclin à donner suite à ce courrier.

La note d'information du 13 février 2017 mettait en lien la baisse du taux technique de 3.5% à 2.75% dès le 1er janvier 2017 avec les prestations de retraite projetées. Or, cette baisse du taux technique était intervenue bien après le remboursement effectué en juillet 2015. Cette note d'information en rapport avec la seconde baisse du taux technique, ultérieure au remboursement, ne pouvait pas palier les manquements de la défenderesse en relation avec la première diminution du taux technique au 1er janvier 2014.

Les informations d'ordre général en lien avec un projet de loi qui avait été largement remanié par le Grand Conseil ne répondaient pas aux exigences légales et jurisprudentielles en matière d'informations à communiquer aux assurés.

La communication dans le courant de l'année 2019 aux assurés ayant passé ou qui passeraient l'âge de 58 ans au 31 décembre 2019 consistait également en une information d'ordre général faisant état de différentes hypothèses en relation avec le projet de loi débattu au Grand Conseil. Il ne s'agissait aucunement d'une information en relation avec une modification du règlement, complète, objective et loyale permettant aux assurés de prendre leur disposition.

Enfin, un assuré pouvait faire valoir une violation du devoir d'informer dans le contexte d'une procédure par voie d'action portant sur des prestations par-devant la chambre de céans. La défenderesse errait lorsqu'elle prétendait que le demandeur aurait dû saisir l'autorité de surveillance.

i. Le 18 septembre 2024, la chambre de céans a procédé à une audience de comparution personnelle des parties et d'enquêtes lors de laquelle a été entendue B______, directrice de la défenderesse, à titre de renseignement. À l'issue de l'audience, le demandeur a été invité à produire dans le délai imparti un extrait du compte bancaire, ou un avis de taxation, de l'état de sa fortune générale de 2015, au moment de la vente de son bien immobilier.

j. Le 9 octobre 2024, le demandeur a versé au dossier :

-          sa déclaration fiscale 2015 ;

-          l'avis de taxation 2015 ;

-          un extrait de son compte au 31 décembre 2015 auprès de la Banque Migros ;

-          un extrait de son compte au 4 décembre 2015 auprès de Crédit Agricole ;

-          un extrait du compte de son épouse au 31 décembre 2015 auprès de BCGE.

k. Copie de ces documents a été transmise à la défenderesse pour information.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce ou de dissolution du partenariat enregistré, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220] ; art. 52, 56a al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40] ; ancien art. 142 du Code civil [CC - RS 210]).

1.1.1 La compétence des autorités visées par l'art. 73 LPP est doublement définie.

Elle l'est, tout d'abord, quant à la nature du litige : il faut que la contestation entre les parties porte sur des questions spécifiques de la prévoyance professionnelle, au sens étroit ou large. Ce sont donc principalement des litiges qui portent sur des prestations d'assurance, des prestations de libre passage (actuellement prestations d'entrée ou de sortie) et des cotisations. En revanche, les voies de droit de l'art. 73 LPP ne sont pas ouvertes lorsque la contestation a un fondement juridique autre que le droit de la prévoyance professionnelle, même si elle devait avoir des effets relevant du droit de ladite prévoyance (ATF 125 V 168 consid. 2 ; 122 V 323 consid. 2b et les références).

Cette compétence est également limitée par le fait que la loi désigne de manière non équivoque les parties pouvant être liées à une contestation, à savoir les institutions de prévoyance, les employeurs et les ayants droit (ATF 128 V 254 consid. 2a). Il s’agit des institutions de prévoyance enregistrées qui participent au régime de l’assurance obligatoire (art. 48 al. 1 LPP), avec la possibilité d’étendre la prévoyance au-delà des prestations minimales (institutions de prévoyance dites « enveloppantes » ; art. 49 al. 2 LPP) ; ces institutions doivent revêtir la forme d’une fondation ou d’une société coopérative, ou être une institution de droit public (art. 48 al. 2 LPP et art. 331 al. 1 CO ; arrêt du Tribunal fédéral B.95/02 du 5 juin 2003 consid. 3.2).

1.1.2 Selon l’art. 73 al. 3 LPP, le for est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans laquelle l'assuré a été engagé.

1.1.3 En l'espèce, la demande en paiement du 3 août 2023 porte sur le montant de la pension de retraite du demandeur découlant de la prévoyance professionnelle. Par ailleurs, tant le siège de la défenderesse, qui revêt la forme d'une institution de droit public, que le lieu de l’exploitation dans laquelle le demandeur était engagé se situent dans le canton de Genève. Partant, la compétence de la chambre de céans à raison de la matière et du lieu est établie.

1.2 L’ouverture de l’action prévue à l’art. 73 al. 1 LPP n’est soumise, comme telle, à l’observation d’aucun délai (ATF 117 V 329 consid. 4).

La demande respecte en outre la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Elle est en conséquence recevable.

2.             Le litige porte sur le montant de la prestation de vieillesse due par la défenderesse au demandeur à compter du 1er mai 2023, ce dernier réclamant un montant de CHF 3'672.- en lieu et place de CHF 2'910.45 accordée par la défenderesse. Il s'agit singulièrement de déterminer les conséquences des versements anticipés effectués en 1995 et 2006 ainsi que de leur remboursement en juillet 2015 sur le montant de la pension de retraite, et si le demandeur peut fonder sa prétention sur la violation d'une obligation d'informer en relation avec une omission de l'avertir de la possibilité de racheter la perte d'intérêts consécutive aux versements anticipés.

3.              

3.1 Selon l'art. 30c LPP, qui figure sous la section 2 de la LPP intitulée « Encouragement à la propriété du logement » introduite par le ch. I de la LF du 17 décembre 1993 sur l’encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, en vigueur depuis le 1er janvier 1995 (RO 1994 2372, FF 1992 VI 229), l’assuré peut, au plus tard trois ans avant la naissance du droit aux prestations de vieillesse, faire valoir auprès de son institution de prévoyance le droit au versement d’un montant pour la propriété d’un logement pour ses propres besoins (al. 1). Les assurés peuvent obtenir, jusqu’à l’âge de 50 ans, un montant jusqu’à concurrence de leur prestation de libre passage. Les assurés âgés de plus de 50 ans peuvent obtenir au maximum la prestation de libre passage à laquelle ils avaient droit à l’âge de 50 ans ou la moitié de la prestation de libre passage à laquelle ils ont droit au moment du versement (al. 2). Le versement entraîne simultanément une réduction des prestations de prévoyance calculée d’après les règlements de prévoyance et les bases techniques des institutions de prévoyance respectives. Afin d’éviter que la couverture ne soit restreinte par la diminution des prestations en cas de décès ou d’invalidité, l’institution de prévoyance offre elle-même une assurance complémentaire ou fait office d’intermédiaire pour la conclusion d’une telle assurance (al. 4).

Selon l'art. 1 al. 1 de l'ordonnance sur l’encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle du 3 octobre 1994 (OEPL - RS 831.411), les fonds de la prévoyance professionnelle peuvent être utilisés pour : acquérir ou construire un logement en propriété (let. a) ; acquérir des participations à la propriété d’un logement (let. b) ; rembourser des prêts hypothécaires (let. c).

3.1.1 Le système de la prévoyance professionnelle en vertu de la LPP repose sur le principe selon lequel les assurés ne peuvent pas disposer de leur avoir de prévoyance avant la réalisation d'un risque assuré ; c'est pourquoi en cas de libre passage la prestation de sortie est obligatoirement versée auprès d'une nouvelle institution ou transférée sur une police ou un compte de libre passage. En ce sens, l'art. 30c LPP constitue une exception au système car il donne aux assurés un droit légal et direct au capital épargné dans une institution de prévoyance pour acquérir la propriété d'un logement destiné à leur usage personnel (Message du Conseil fédéral du 19 août 1992 concernant l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle, FF 1992 VI 229 p. 256). L'idée à la base de cette possibilité de versement en capital est que la propriété d'un logement offre une garantie de prévoyance équivalente aux autres formes légales de maintien de la prévoyance (les frais de logement constituant l'une des charges principales des ménages ; ATF 130 V 191 consid. 3.1).

La somme qu'un assuré peut utiliser à titre de versement anticipé pour l'acquisition d'un logement dépend, comme le texte de l'art. 30c al. 2 LPP le spécifie, du montant de la prestation de libre passage à laquelle il a droit. Le versement anticipé est donc directement lié à la réglementation sur le libre passage (LFLP). En fait, la propriété du logement remplace la part de la prestation de libre passage utilisée à cette fin, raison pour laquelle le versement anticipé entraîne simultanément une diminution correspondante des prestations de prévoyance (art. 30c al. 4 LPP). Ce sont en effet les mêmes fonds de prévoyance accumulés par un assuré qui servent au financement des diverses prestations prévues par la LPP, qu'il s'agisse des prétentions en matière de vieillesse, d'invalidité et de survivants, de la prestation de sortie en cas de départ de l'institution de prévoyance ou du versement anticipé dans le cadre des dispositions sur l'encouragement à la propriété du logement (ATF 130 V 191 consid. 3.2).

Les moyens utilisés pour acquérir un logement aux conditions des art. 30c ss LPP demeurent liés à un but de prévoyance, même si le versement anticipé et le logement au financement duquel il a servi sortent des avoirs de prévoyance (ATF 135 V 324 consid. 4.2).

3.1.2 Selon l'art. 30d al. 1 let. a LPP, l’assuré ou ses héritiers doivent rembourser le montant perçu à l’institution de prévoyance si le logement en propriété est vendu.

Selon l'art. 30d al. 2 LPP, l’assuré peut rembourser en tout temps le montant perçu, à condition de respecter les dispositions fixées à l’al. 3.

Selon l'art. 30d al. 3 LPP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020 ici applicable, le remboursement est autorisé : jusqu’à trois ans avant la naissance du droit aux prestations de vieillesse (let. a) ; jusqu’à la survenance d’un autre cas de prévoyance (let. b) ; jusqu’au paiement en espèces de la prestation de libre passage (let. c).

Selon l'art. 30d al. 5 LPP, en cas de vente du logement, l’obligation de rembourser se limite au produit réalisé. Par produit, on entend le prix de vente, déduction faite des dettes hypothécaires et des charges légales supportées par le vendeur.

En cas d’aliénation, seul le montant nominal du versement anticipé sera remboursé à l’institution de prévoyance (Message du Conseil fédéral concernant la révision du code civil suisse [Partage de la prévoyance professionnelle en cas de divorce] du 29 mai 2013, FF 2013 4341 p. 4394).

Selon l'art. 30d al. 6 LPP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016 ici applicable, en cas de remboursement du versement anticipé à l’institution de prévoyance, celle-ci doit reconnaître à l’assuré un droit à des prestations proportionnellement plus élevées, déterminé par son règlement.

Selon l'art. 30e al. 6 LPP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020 ici applicable, l’obligation et le droit de rembourser subsistent jusqu’à trois ans avant la naissance du droit à la rente de vieillesse, jusqu’à la survenance d’un autre cas de prévoyance ou jusqu’au paiement en espèces.

En cas de versement anticipé EPL, les fonds de prévoyance restent liés. Le versement anticipé se distingue en cela du paiement en espèces de la prestation de libre passage prévu à l’art. 5 LFLP. En conséquence, le retour dans une institution de prévoyance ou de libre passage des fonds investis dans la propriété du logement ne constitue pas un rachat, car, en cas de vente du logement, les fonds – pour autant qu’ils soient encore disponibles – doivent obligatoirement être reversés à l’institution de prévoyance ou de libre passage (FF 2013 4341 p. 4388).

 

3.2 Selon l'art. 79b LPP, introduit par le ch. I de la LF du 3 oct. 2003 (1re révision LPP), en vigueur depuis le 1er janvier 2006 (RO 2004 1677 ; FF 2000 2495), l’institution de prévoyance ne peut permettre le rachat que jusqu’à hauteur des prestations réglementaires (al. 1).

3.2.1 Le règlement peut permettre le rachat aussi bien des lacunes issues du passé dues, par exemple, aux augmentations de salaire et à l'amélioration du plan, que des lacunes futures, dues à la réduction de la rente de vieillesse en cas de retraite anticipée (Jacques-André SCHNEIDER / Nicolas MERLINO / Didier MANGE, Commentaire des assurances sociales suisses, LPP et LFLP, 2020, n. 10 ad art. 79b LPP).

Les contributions de rachat prévues par la loi et le règlement de prévoyance et versées par l'assuré sont entièrement déductibles selon l'art. 33 let. d de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11 ; SCHNEIDER / MERLINO / MANGE, op cit., n. 16 ad art. 79b LPP).

3.2.2 Selon l'art. 79b al 3 LPP, les prestations résultant d’un rachat ne peuvent être versées sous forme de capital par les institutions de prévoyance avant l’échéance d’un délai de trois ans. Lorsque des versements anticipés ont été accordés pour l’encouragement à la propriété, des rachats facultatifs ne peuvent être effectués que lorsque ces versements anticipés ont été remboursés.

Selon l'art. 60d de l'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 18 avril 1984 (OPP 2 - RS 831.441.1), dans les cas où le remboursement d’un versement anticipé pour l’encouragement à la propriété du logement n’est plus admis en vertu de l’art. 30d al. 3 let. a LPP, le règlement de l’institution de prévoyance peut permettre des rachats volontaires pour autant que ces rachats, ajoutés aux versements anticipés, ne dépassent pas les prétentions de prévoyance maximales admises par le règlement.

Jusqu'à l'entrée en vigueur de l'art. 79b LPP, des rachats pouvaient être effectués même en cas de retrait anticipé au titre de l'encouragement à la propriété ; il n'était pas nécessaire d'avoir auparavant reconstitué le capital retiré. L'art. 14 al. 1 OEPL, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2005, limitait certes la déductibilité des rachats au plan fiscal, mais dans une mesure moindre que l'art. 79b LPP. En effet, selon l'art. 14 al. 1 OEPL - abrogé par le ch. 1 de l’annexe à l’O du 10 juin 2005, avec effet au 1er janv. 2006 (RO 2005 4279) -, les montants rachetés pouvaient être déduits du revenu imposable dans la mesure où, ajoutés aux versements anticipés (au titre de l'encouragement à la propriété), ils ne dépassaient pas les prestations de prévoyance maximales prévues par le règlement de l'institution de prévoyance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_462/2008 du 20 mars 2009 consid. 6.2).

Depuis l'entrée en vigueur de l'art. 79b LPP, lorsqu'un versement anticipé a eu lieu pour acquérir un logement, il faut d'abord que ces fonds soient remboursés avant de pouvoir prétendre à un rachat déductible fiscalement (SCHNEIDER / MERLINO / MANGE, op cit., n. 108 ad art. 79b LPP et la référence).

Le nouvel art. 79b al. 3 LPP interdit les rachats facultatifs tant que les versements anticipés pour l'encouragement à la propriété du logement n'ont pas été remboursés. Le législateur voulait ainsi éviter que des personnes disposant de lacunes de prévoyance en raison d'un versement anticipé pour l'encouragement à la propriété du logement ou pour d'autres raisons procèdent à des rachats facultatifs sans rembourser le versement anticipé. Cette opération était partiellement acceptée par les institutions de prévoyance pour des motifs étrangers à la prévoyance (optimisation fiscale des assurés). Selon les travaux parlementaires, le législateur ne voulait pas empêcher que les assurés qui disposent des possibilités financières puissent combler les lacunes de leur prévoyance. C'est pourquoi l'art. 60d OPP2 précise que dès le moment ou le remboursement du versement anticipé est exclu, les rachats facultatifs des lacunes de prévoyance qui subsistent sont possibles (Bulletin de la prévoyance professionnelle n° 83 p. 24).

3.3 En résumé, dans le cadre de l’encouragement à la propriété du logement, différentes mesures ont été prévues par le législateur destinées à reconstituer le capital de couverture de l’assuré. Ainsi, l’art. 30c al. 4 LPP permet à l’assuré de combler les lacunes d’assurance en concluant une assurance complémentaire pour la couverture des risques de décès et d’invalidité. Les remboursements du versement anticipé sont régis aux art. 30d LPP et 7 OEPL (voir infra). En outre, en vertu de l’art. 30d al. 6 LPP, lorsque l’assuré rembourse le versement anticipé, il a droit à des prestations proportionnellement plus élevées en fonction des remboursements, calculées selon le règlement de la caisse. Enfin, il y a encore lieu de mentionner, lorsque le versement anticipé est entièrement remboursé, la possibilité de racheter la perte d’intérêts résultant de la diminution du capital de prévoyance suite au versement anticipé (cf. art. 60a al. 2 let. c OPP2, en lien avec l'art. 79a LPP - intitulé « Rachat » -, dans leur teneur en vigueur du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2005 ; Bulletin de la prévoyance professionnelle n. 76 ch. 448), car les avoirs de prévoyance investis dans la propriété du logement ne produisent plus d’intérêts (FF 2013 4341 p. 4393).

L'art. 60a al. 2 let. c OPP2 précité - figurant sous le chapitre 5 intitulé « Limitation du rachat » - régit exclusivement le rachat faisant suite au remboursement du versement anticipé pour l'acquisition du logement au moyen de la prévoyance professionnelle et visant à combler la lacune de prévoyance. Le montant du versement anticipé doit certes pouvoir être restitué en tout temps à l'institution de prévoyance, mais il n'en va pas de même des intérêts échus. En cas de remboursement quelque temps après le versement anticipé, l'assuré risquerait ainsi de ne pas se retrouver, sur le plan du rachat de la prévoyance, dans la même situation que celle qu'il avait avant le versement anticipé. Il est dès lors nécessaire de procéder à un rachat supplémentaire pour rétablir l'état antérieur de prévoyance. Le fait que le remboursement du versement anticipé ne constitue pas un rachat résulte de la volonté expresse du législateur (Bulletin de la prévoyance professionnelle n. 56 ch. 332 p. 10 et la référence).

Pour tous les rachats effectués à partir du 1er janvier 2006, date à compter de laquelle la limitation du rachat de l'art. 79a LPP a été abrogée et l'art. 79b LPP est entrée en vigueur, il faudra d’abord rembourser tous les versements anticipés pour le logement qui ne le sont pas encore, indépendamment du fait que ces versements soient antérieurs ou postérieurs à cette date (l’art. 14 al. 1 OEPL sur la coordination entre les versements anticipés et les rachats a été abrogé dès le 1er janvier 2006). Le montant minimal pour le remboursement d’un versement anticipé est de CHF 20'000.- (CHF 10'000.- depuis le 1er octobre 2017 [RO 2017 5017]), sauf lorsque le solde du versement anticipé à rembourser est inférieur à cette somme (cf. art. 7 OEPL). Pour les personnes qui ne peuvent plus rembourser des versements anticipés pour le logement en raison de leur âge (cf. art. 30d al.3 let. a LPP), l’art. 60d OPP 2 prévoit une exception afin qu’elles puissent effectuer des rachats pour combler d’autres lacunes de prévoyance, dans la mesure où le règlement admet encore de tels rachats (Bulletin de la prévoyance professionnelle n. 84 ch. 487 p. 4).

3.4  

3.4.1 Selon l'art. 30g LPP, le Conseil fédéral détermine : l’obligation incombant aux institutions de prévoyance, en cas de mise en gage ou de versement anticipé, d’informer les assurés des conséquences sur leurs prestations de prévoyance, de la possibilité de conclure une assurance complémentaire pour les risques de décès ou d’invalidité et des répercussions fiscales (let. e).

Selon l'art. 86b LPP, introduit par le ch. I de la LF du 3 octobre 2003 (1re  révision LPP), en vigueur depuis le 1er janvier 2005 et depuis le 1er avril 2004 pour l’al. 2 (RO 2004 1677 ; FF 2000 2495), l’institution de prévoyance renseigne chaque année ses assurés de manière adéquate sur (al. 1) : leurs droits aux prestations, le salaire coordonné, le taux de cotisation et l’avoir de vieillesse (let. a).

Sont visées par cette disposition toutes les prestations légales et réglementaires entrant en considération en cas de sortie de l'institution ou de survenance d'un cas d'assurance (vieillesse, invalidité ou mort ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_159/2019 du 31 octobre 2019 consid. 6).

Les données concernant la situation de prévoyance individuelle doivent être contenues dans une certificat d'assurance individuel (Kurt PÄRLI, Commentaire des assurances sociales suisses, LPP et LFLP, 2020, n. 6 ad art. 86b LPP).

Dans un arrêt 9C_339/2013 du 29 janvier 2014, le Tribunal fédéral a considéré que l'obligation d'information n'était pas respectée, lorsque ce n'est qu'en examinant de manière approfondie un nouveau règlement que les assurés peuvent identifier les exigences modifiées pour le versement des prestations de prévoyance (PÄRLI, op cit., n. 5 ad art. 86b LPP). Une institution de prévoyance de droit public ne remplit pas non plus de manière satisfaisante son obligation de renseigner ses assurés de manière adéquate sur leurs droits aux prestations, si elle se contente de la simple publication officielle du texte législatif et sa mise en ligne sur son site Internet avec la mention de l'existence d'une nouvelle forme de prestation (i.e. rente de partenaire ; ATF 136 V 331 consid. 4.2.3).

Selon l'art. 86b al. 2 LPP, dans sa nouvelle teneur selon l’annexe ch. 10 de la LF du 19 juin 2020 (Droit de la société anonyme), en vigueur depuis le 1er janvier 2023 (RO 2020 4005; 2022 109 ; FF 2017 353), les assurés peuvent demander la remise des comptes annuels et du rapport annuel. L’institution de prévoyance doit en outre informer les assurés qui le demandent sur le rendement du capital, l’évolution du risque actuariel, les frais d’administration, les principes de calcul du capital de couverture, les provisions supplémentaires, le degré de couverture et les principes régissant l’exercice de l’obligation de voter incombant à l’institution en sa qualité d’actionnaire (art. 71a LPP).

Le devoir d'information consacré par l’art. 86b LPP concerne la situation personnelle concrète de la personne assurée en matière de prévoyance, afin, d'une part, de lui permettre de vérifier en tout temps l'état et l'évolution de sa situation individuelle de prévoyance et, d'autre part, de pouvoir se faire une idée de l'ensemble des activités de son institution de prévoyance (Message du Conseil fédéral relatif à la révision de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 1er mars 2001 ; FF 2000 2495 p. 2537).

Selon l'art. 11 OEPL, en lien avec l'art. 30g let. e LPP, l’institution de prévoyance donne à la personne assurée, lors du versement anticipé, de la mise en gage ou sur sa demande écrite, des informations sur : le capital de prévoyance dont elle dispose pour la propriété du logement (let. a) ; les réductions de prestations consécutives au versement anticipé ou à la réalisation du gage (let. b) ; les possibilités de combler la lacune de prévoyance que crée le versement anticipé ou la réalisation du gage dans la couverture des prestations d’invalidité ou de survivants (let. c) ; l’imposition fiscale en cas de versement anticipé ou de réalisation du gage (let. d) ; le droit au remboursement des impôts payés lorsque le versement anticipé ou le montant correspondant au produit de réalisation du gage ont été remboursés ainsi que sur les délais à observer (let. e).

Cette disposition prévoit une obligation de renseigner particulière en relation avec l'encouragement à la propriété du logement. Le devoir d'information se rapporte également aux « prestations consécutives à des versements anticipés », singulièrement à leur diminution (arrêt du Tribunal fédéral 9C_159/2019 précité consid. 6).

3.4.2 Le principe de la bonne foi, ancré à l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 [Cst. - RS 101]), protège le citoyen dans la confiance placée dans les assurances reçues des autorités (lorsqu'il règle sa conduite d'après les décisions, les déclarations ou le comportement de l'administration) ; un renseignement ou une décision erronés peuvent contraindre l'administration à consentir à l'administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur ; il faut alors que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète envers une personne particulière (a), qu'elle ait agi, ou soit censée avoir agi, dans les limites de ses compétences (b), que l'administré n'ait pas pu immédiatement réaliser l'inexactitude de l'information obtenue (c), qu'il se soit fondé sur les assurances ou sur le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne peut renoncer sans subir de préjudice (d) et que la loi n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (e) ; ces conditions doivent aussi être remplies lorsque l'administration omet de renseigner l'administré alors qu'elle était légalement tenue de le faire ; la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante : que l'administré n'ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu'il n'avait pas à s'attendre à une autre information. Ces conditions sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 9C_753/2016 du 3 avril 2017 consid. 6.1 ; 9C_568/2013 du 9 janvier 2014 consid. 4.2 et les références).

La jurisprudence relative à l'obligation de renseignement et de conseil de l'art. 27 LPGA vaut également en matière de prévoyance professionnelle quand bien la LPGA ne s'applique pas dans ce domaine. Il en découle notamment qu'en cas de modification de leur règlement, les institutions de prévoyance informent spontanément et à temps leurs assurés de manière à ce que ces derniers puissent prendre les dispositions nécessaires (p. ex. concernant le rachat ; PÄRLI, op cit., n. 9 ad art. 86b LPP).

Les renseignements figurant dans un certificat de prévoyance reflètent uniquement la situation de la personne assurée à un moment donné et n'ont qu'un rôle informatif. Dès lors, ils ne sauraient en principe préjuger du droit futur de la personne assurée aux prestations (arrêt du Tribunal fédéral 9C_224/2010 du 1er septembre 2010 consid. 3.1). L'administration n'est liée par un renseignement émanant d'elle que dans la mesure où la réglementation légale n'a pas subi de modification depuis lors (ATF 130 I 26 consid. 8.1), principe qui vaut également pour les renseignements relatifs à un plan de prévoyance, singulièrement pour un certificat de prévoyance (arrêt du Tribunal fédéral 9C_78/2007 du 15 janvier 2008 consid. 5.5.2).

4.              

4.1 En l'occurrence, conformément à l'art. 30c al. 4 LPP, les deux versements anticipés en 1995 et 2006 en faveur du demandeur dans le cadre de l'acquisition d'une propriété d'un logement sis en France voisine à hauteur de CHF 90'656.15, respectivement de CHF 68'607.20 ont eu pour conséquence une diminution des prestations en cas de retraite calculées selon les normes actuarielles et techniques alors appliquées par la défenderesse. Cela ressort expressément des formulaires des 3 novembre 1995 et 2 mars 2006 signés par le demandeur. Le premier faisait état, avant le retrait anticipé, d'une pension de retraite mensuelle de CHF 2'848.50 à 65 ans contre CHF 2'296.85 après le retrait anticipé. Le second projetait, avant le retrait anticipé, d'une pension de retraite mensuelle de CHF 2'801.95 à 65 ans contre CHF 1'987.35 après le retrait anticipé. L'amputation d'une partie de la prestation accumulée dans un but de prévoyance a en effet nécessairement des répercussions sur les prestations versées lorsqu'un cas de prévoyance se réalise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_568/2013 du 9 janvier 2014 consid. 4.3).

Une fois le remboursement des deux versements anticipés le 28 juillet 2015, la défenderesse a reconnu au demandeur des prestations de retraite à 65 ans plus élevées, calculées selon son règlement 2014 applicable à cette époque (cf. rapport de l'actuaire p. 17-18 ; cf. art. 30d al. 6 LPP dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016). D'après le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, la pension de retraite mensuelle projetée sans revalorisation à 65 ans s'élevait à CHF 3'294.40 contre CHF 2'009.90 selon le certificat de prévoyance au 31 décembre 2014, avant ledit remboursement.

Le demandeur reproche à la défenderesse de ne pas l'avoir renseigné sur la possibilité de racheter la perte d'intérêts consécutive aux versements anticipés.

Contrairement à ce que fait valoir le demandeur, lors de la vente du bien immobilier, la défenderesse a agi conformément à la loi, en demandant uniquement la restitution des capitaux retirés. Dans la limite du cas particulier prévu à l'art. 30d al. 5 LPP et/ou de remboursements préalables volontaires (cf. art. 30d al. 2 LPP), c'est l'intégralité du montant du versement anticipé qui doit être restitué à l'institution de prévoyance au moment de la vente de l'immeuble (cf. art. 30d al. 1 let. a LPP ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_288/2017 du 26 octobre 2017 consid. 2.3). C'était ainsi à juste titre que, à compter du 28 juillet 2015, date du remboursement intégral des versements anticipés, les certificats de prévoyance mentionnaient sous la rubrique « versements anticipés sous déduction des remboursements pour accès à la propriété » : CHF 0.-.

C'est le lieu de rappeler que la prévoyance professionnelle repose sur le système de la capitalisation (cf. rapport de l'actuaire p. 2). Les avoirs de prévoyance investis dans la propriété du logement ne produisent plus d’intérêts (FF 2013 4341 p. 4393) entre la date des versements anticipés et celle de leur remboursement (cf. rapport de l'actuaire p. 2).

Au moment de l'aliénation du bien immobilier, la loi n'oblige pas la « restitution » de la perte d'intérêts résultant du versement anticipé (cf. art. 30d al. 5 LPP). C'est logique, puisque ceux-ci n'ayant pu exister, l'assuré n'a pas pu les percevoir. On ne saurait alors reprocher à la défenderesse de ne pas avoir, lors du remboursement des versements anticipés, attiré l'attention du demandeur spécifiquement sur cette perte d'intérêts. Lorsque, comme en l'espèce, les versements anticipés ont été entièrement restitués (soit CHF 159'263.35), pour combler totalement ou partiellement des lacunes de prévoyance résultant de la perte d'intérêts consécutive à la diminution du capital de prévoyance à la suite du versement anticipé, le demandeur pouvait effectuer des rachats facultatifs (consid. 3.3 supra), visant précisément à améliorer les prestations de l'institution de prévoyance, notamment les rentes de vieillesse (cf. arrêt du Tribunal fédéral B.49/01 du 23 août 2001 consid. 2b). Cette perte d'intérêts est « noyée » dans le montant du rachat - vu que son paiement n'est que facultatif - maximum admis figurant sur les certificats de prévoyance que recevait le demandeur chaque année (procès-verbal d'enquêtes p. 2).

Quand bien même le demandeur ignorait « ce qu'[il] pouvai[t] racheter puisqu'[il] avai[t] remboursé la somme » [exigée par la défenderesse] (cf. procès-verbal d'enquêtes p. 2), soit CHF 159'263.35, il savait quoi qu'il en soit que le montant restitué des versements anticipés - équivalant à celui retiré - ne pouvait à l'évidence pas comprendre les intérêts. Par courrier du 12 juin 1995, la défenderesse avait fourni au demandeur diverses informations en lien avec le versement anticipé qu'il sollicitait dont (lettre i) le fait qu'un remboursement tardif avait un impact non négligeable sur son capital de prévoyance, et par voie de conséquence, sur sa prestation de retraite (« […] la somme nécessaire pour recouvrer l'intégralité de vos droits sera d'autant plus importante que les remboursements seront tardifs. »). Il est donc incorrect d'affirmer, comme l'a fait le demandeur lors de l'audience de comparution personnelle du 18 septembre 2024, que la défenderesse ne lui aurait donné aucun renseignement sur les conséquences du versement anticipé en 1995 (procès-verbal p. 1). Même si à cette occasion il a déclaré ne pas comprendre le sens de la lettre i précitée - qui lui a été lue -, et qu'il ignorait que le capital de prévoyance était crédité d'intérêts (p. 2), il n'en demeure pas moins qu'il a indiqué, de manière contradictoire, lors de cette audience qu'il « savai[t] que la situation n'était pas la même que s['il] n'avai[t] pas retiré le capital pendant plusieurs années […]» et que, dans la mesure où il devait encore travailler dix ans après le remboursement des versements anticipés, il pensait qu'il récupérerait de cette façon les intérêts qu'il avait perdus (p. 2). En d'autres termes, contrairement à ce que prétend le demandeur, ce dernier savait parfaitement qu'un retrait anticipé entraînait une perte d'intérêts. À cela s'ajoute que le courrier du 16 novembre 1995, par lequel la défenderesse confirmait le montant du capital de prévoyance qui serait transféré aux fins de l'achat du bien immobilier, mentionnait les intérêts courus du 31 mars 1995 au 15 novembre 1995, correspondant à la date de versement désirée selon le formulaire du 3 novembre 1995. Le demandeur ne pouvait donc ignorer l'existence des intérêts sur les avoirs de prévoyance.

Le demandeur était conscient qu'en effectuant un rachat, il pouvait améliorer sa pension de retraite. Cela ressort du courrier de la défenderesse du 25 août 2015 l'informant que le capital versé par le notaire français comportait une plus-value de CHF 7'599.03 en sa faveur susceptible d'être affectée à un rachat dans le but précisément d'augmenter ses prestations de retraite. Le demandeur a expliqué lors de l'audience de comparution personnelle n'avoir pas donné suite à ce courrier au motif qu'il devait encore travailler dix ans (procès-verbal p. 2). Celui-ci a collaboré 44 ans au service de son employeur (d'avril 1979 à avril 2023), dont près de 20 sans que le capital de prévoyance ayant fait l'objet du premier versement anticipé (à lui seul) ne puisse produire d'intérêts. Lors du remboursement des deux versements anticipés en juillet 2015, demeurait une période d'activité de huit ans avant la retraite ordinaire à 65 ans. Le demandeur ne pouvait ainsi pas s'attendre à ce que cette durée restante d'activité lucrative - en soit brève en comparaison de la durée de la carrière complète - compense totalement la baisse des prestations de vieillesse résultant des versements anticipés. Il faut dès lors s'étonner qu'il ait pu penser que des lacunes de prévoyance ne pouvaient pas subsister en lien avec les versements anticipés, d'autant moins que, comme on l'a déjà dit, les formulaires des 3 novembre 1995 et 2 mars 2006 signalaient la baisse du montant de la pension de retraite à la suite des retraits anticipés. On ne peut pas non plus suivre le demandeur lorsqu'il se prévaut de l'art. 55 al. 3 du règlement 2014 - qui stipule que le rétablissement du droit aux prestations consécutif à un remboursement se calcule suivant les règles du rachat volontaire de prestations - pour soutenir que son droit à la pension de retraite avait été intégralement rétabli à la suite du remboursement complet des versements anticipés. Cette disposition a trait au calcul des prestations assurées suivant le remboursement - obligatoire - du (seul) versement anticipé (en cas de produit de la vente suffisant du bien immobilier), ce calcul, identique qu'en cas de rachat volontaire, permet d'augmenter la somme des salaires cotisants, et par voie de conséquence, les prestations assurées (rapport de l'actuaire p. 16). C'est pour cette raison que la pension de retraite du demandeur était plus élevée au 28 juillet 2015 par rapport à celle escomptée avant le remboursement, comme on l'a dit plus haut. Cette disposition ne traite toutefois pas de la perte d'intérêts - résultant du versement anticipé - qui peut faire l'objet d'un rachat facultatif en vue d'améliorer également les prestations assurées, rachat dont le demandeur était avisé chaque année au moyen des certificats de prévoyance.

De surcroît, le demandeur pouvait s'informer de l'étendue de ses droits en s'enquérant auprès de la défenderesse bien avant octobre 2022 (six mois avant la retraite), puisqu'à la suite du remboursement des versements anticipés le 28 juillet 2015, les certificats de prévoyance qui lui ont été remis annuellement entre fin 2015 et 2022 faisaient mention d'une pension de retraite projetée à l'âge de 65 ans d'un montant inférieur à celui qui figurait sur le certificat de prévoyance au 28 juillet 2015, comme l'illustre le tableau suivant :

28.7.15

31.12.15

31.12.16

1.1.17

31.12.17

31.12.18

1.1.19

1.1.20

1.1.21

1.1.22

3'294.4

3'292.35

3'292.65

2'827.65

2'858.7

2'862.3

2'867.5

2'886.6

2'881.45

2'909.85

La baisse de la pension de retraite aurait dû pousser le demandeur à se renseigner auprès de la défenderesse. Il ne s'en est pas inquiété davantage bien qu'il ait trouvé cela « un peu bizarre » (procès-verbal de comparution personnelle p. 2).

Il est vrai que la perte d'intérêts entre la date des retraits anticipés et celle du remboursement de ceux-ci n'a pas à elle seule impacté le montant de la pension de retraite du demandeur. Les modifications réglementaires en 2014 et 2017 - sans rapport avec les versements anticipés - ont également joué un rôle déterminant (cf. rapport de l'actuaire p. 4).

La question de savoir si la défenderesse a respecté son devoir d'informer en portant ces modifications réglementaires à la connaissance du demandeur de manière adéquate peut demeurer ouverte. Quoi qu'il en soit, l'augmentation du montant du rachat - en raison des changements de bases techniques et de la baisse du taux d'intérêt technique (rapport de l'actuaire p. 25) -, a été dûment portée à la connaissance du demandeur qui se voyait communiquer annuellement le certificat de prévoyance faisant état du montant du rachat maximum admis. Par courrier du 7 avril 2016, la défenderesse avait du reste renseigné le demandeur, qui atteignait l'âge d'une possible retraite anticipée, sur le changement du taux d'intérêt technique qui interviendrait dès le 1er janvier 2017 en précisant que cette modification ne serait pas sans conséquence sur les prestations de retraite futures et en l'encourageant à prendre contact avec elle pour une simulation personnelle de l'impact sur ses prestations. Or, le demandeur n'a pas donné suite à ce courrier. Même s'il ne désirait pas prendre une retraite anticipée, il ne pouvait pas ignorer les répercussions que pouvait avoir cette modification sur sa pension de retraite au-delà du 18 avril 2016 (58 ans), d'autant que le certificat de prévoyance au 1er janvier 2017 faisait état d'une pension de retraite mensuelle projetée à 65 ans de CHF 2'827.65 contre CHF 3'292.65 d'après le certificat de prévoyance au 31 décembre 2016, avant ladite modification. À réception du certificat de prévoyance au 1er janvier 2017, rien n'empêchait le demandeur de prendre contact avec la défenderesse pour discuter de la baisse de sa pension de retraite, de la possibilité d'améliorer cette prestation ainsi que des moyens/modalités à cette fin.

En définitive, la défenderesse n'a pas omis d'avertir le demandeur des conséquences des versements anticipés sur le montant de sa pension de retraite, singulièrement sur sa diminution. C'est donc en connaissance de cause qu'il a obtenu les deux versements anticipés. Le demandeur pouvait en effet vérifier l'état et l'évolution de sa situation individuelle de prévoyance tant après les versements anticipés en 1995 et 2006 qu'après le remboursement de ceux-ci en 2015. En particulier, les formulaires des 3 novembre 1995 et 2 mars 2006, le courrier de la défenderesse du 12 juin 1995, de même que les certificats de prévoyance annuels au dossier contenaient toutes les informations dont le demandeur avait besoin pour se faire une idée des prestations de retraite auxquelles il aurait droit, au fil du temps, au moment de l'accession à l'âge de la retraite (65 ans). Il était averti du montant de la pension de vieillesse (escomptée) qui lui serait servi à l'âge de 65 ans, à défaut de rachat. Ces documents n’ont pas suscité de réaction particulière de sa part. Il ne peut donc pas exiger en toute bonne foi d'être traitée de la même manière qu'un assuré n'ayant pas bénéficié de versements anticipés.

La défenderesse n'était au demeurant pas tenue de renseigner spontanément le demandeur sur la perte d'intérêts consécutive au versement anticipé, dès lors que la loi n'oblige pas le « retour » de ces intérêts dans l'institution de prévoyance. Elle l'avait en revanche renseigné sur la faculté de procéder à un rachat en vue d'améliorer ses prestations de retraite, en lui communiquant les certificats de prévoyance annuels et le courrier du 25 août 2015.

Par ailleurs, le demandeur avait connaissance de l'existence de cette perte d'intérêts quand bien même il en ignorait l'étendue.

Le grief tiré d'une violation du principe constitutionnel de la protection de la bonne foi est par conséquent mal fondé sans qu'il soit nécessaire d'examiner si le demandeur a pris des dispositions sur lesquelles il ne peut revenir sans subir de préjudice, les conditions d'application de ce principe étant cumulatives.

4.2 Enfin, le demandeur ne prétend pas que le montant de sa pension de vieillesse versé depuis le 1er mai 2023 par la défenderesse ne correspondrait pas à celui de la pension réglementaire.

5.             Au vu de ce qui précède, la demande ne peut qu'être rejetée.

Les caisses de pension n’ont en principe pas droit à des dépens, sauf en cas de recours téméraire ou interjeté à la légère par l’assuré ; cela vaut également pour les actions en matière de prévoyance professionnelle (ATF 126 V 143 consid. 4). Ces exceptions n'étant pas réalisées en l'espèce, la défenderesse, qui obtient gain de cause, ne saurait se voir allouer, comme elle le sollicite, une indemnité à titre de dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 73 al. 2 LPP et art. 89H al. 1 LPA).

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande en paiement du 3 août 2023 recevable.

Au fond :

2.        La rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le