Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/831/2024 du 22.10.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/398/2024 ATAS/831/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 22 octobre 2024 Chambre 10 |
En la cause
A______ représentée par Maître Diane BROTO, avocate
| recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1966 au Maroc, arrivée en Suisse en 1990, a contracté un premier mariage en 1991, dissout par divorce en avril 1993. Elle a été naturalisée en 1991. Elle a eu un fils le 23 mai 2000, dont le père est décédé en novembre 2001. Elle s’est remariée en 2004, séparée en 2005 et a divorcé en 2010. Elle a été aidée par l’Hospice général à partir de l’an 2000. De janvier 2006 à mars 2020, elle a vécu au Maroc, avant de revenir à Genève. Depuis lors, elle loue une chambre et bénéficie de prestations versées par l’Hospice général.
b. Selon son extrait de compte individuel, l’assurée a été affiliée auprès de la FER-CIAM d’octobre 1991 à juin 1992 (revenus déclarés de CHF 4'500.- pour 1991 et CHF 8'280.- pour 1992) et d’octobre 1993 à mars 1994 (revenus déclarés de CHF 4'000.- pour 1993 et CHF 684.- pour 1994). Elle a par la suite uniquement cotisé en qualité de personne sans activité lucrative, à l’exception des mois de janvier et février 2003, durant lesquels elle a réalisé un revenu soumis à cotisations (CHF 2'104.-).
c. Le 17 janvier 2001, l’assurée a déposé une première demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI).
d. Dans le cadre de l’instruction du dossier, l’OAI a reçu plusieurs documents médicaux, faisant notamment état de dépression, de troubles du sommeil, de lombalgies, de lombo-cruralgies, d’asthénie et d’apnées du sommeil.
e. Le 7 mai 2003, l’assurée a indiqué à l’OAI qu’elle était au bénéfice d’une formation de dactylographie acquise en 1992 et qu’elle avait recherché une activité lucrative après son divorce, mais que cela avait été très difficile en raison de son manque de formation, de son inexpérience et surtout de la fatigabilité dont elle souffrait et ignorait la cause. Elle avait travaillé durant trois mois en 1993 dans un tea-room, comme vendeuse-serveuse, puis avait été aidée financièrement par sa famille et un ami. Elle avait ensuite travaillé dès 1996, durant une année et demi, en tant que « masseuse » pour s’assumer financièrement, mais cela avait été trop difficile à supporter. Elle avait encore fait des recherches d’emploi dans des magasins et des stations-services, sans résultat. Elle n’avait pas gardé de traces de ces recherches. Parallèlement, son état de santé s’était péjoré et elle était en incapacité totale de travail depuis juillet 1998.
f. Le 19 mai 2003, le service médical régional (ci-après : SMR) de l’OAI a procédé à un examen psychiatrique de l’assurée, au terme duquel il a conclu que l’intéressée présentait une capacité de travail exigible de 100% sur le plan psychiatrique. Il a notamment constaté qu’il n’existait pas de dépression majeure, de décompensation psychotique, d’anxiété généralisée ou de trouble de la personnalité morbide. Il a relevé une discordance entre les plaintes et les constatations objectives. En l’absence de comorbidité psychiatrique à ses douleurs chroniques, on pouvait attendre de l’assurée qu’elle mobilise ses ressources pour reprendre son activité professionnelle.
g. Dans un rapport du 10 septembre 2003, le SMR a estimé que l’intéressée présentait des lombo-cruralgies, qui justifiaient de retenir des limitations fonctionnelles en lien avec le port de charges de plus de 10 kg et les activités en porte-à-faux du tronc, et un syndrome d’apnées du sommeil, à traiter par CPAP de façon régulière. La capacité de travail était entière dans l’activité habituelle de secrétaire et dans toute activité respectant les restrictions précitées.
h. Par décision du 7 octobre 2003, confirmée sur opposition le 5 avril 2004, l’OAI a rejeté la demande de l’intéressée, au motif qu’elle ne souffrait d’aucune pathologie invalidante. Cette décision du 5 avril 2004 est entrée en force, en l’absence de recours.
i. Le 30 juin 2004, l’assurée a sollicité des prestations de la part de la Caisse cantonale genevoise de chômage, laquelle a rendu une décision d’inaptitude au placement le 22 décembre 2004.
B. a. Par demande datée du 22 juin 2021, enregistrée par l’OAI le 1er juillet 2021, l’assurée a sollicité à nouveau des prestations d’invalidité, en raison d’une spondylarthrose évoluant depuis quinze ans et d’un état dépressif.
b. L’OAI a notamment reçu des rapports relatifs à une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) lombosacrée du 25 mai 2020, à une IRM cérébrale et neuro-crâne du 8 juin 2020, à un scanner cérébral du 8 juin 2020 et à une IRM de la colonne totale du 22 juin 2020, ainsi que des rapports du 19 juillet 2021 du docteur B______, médecin, du 17 juillet 2020 des Hôpitaux universitaires de Genève, et des 31 août 2021 et 20 octobre 2022 du docteur C______, psychiatre.
c. Mandatées par l’OAI, les docteures D______, spécialiste FMH en rhumatologie, et E______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont rendu un rapport d’expertise le 12 juin 2023.
Elles ont retenu les diagnostics de lombalgies avec des cruralgies intermittentes non déficitaires droites sur des troubles dégénératifs lombaires pluri-étagés, d’hernie discale L4-L5 volumineuse médiane et paramédiane avec une empreinte sur le fourreau dural, un rétrécissement foraminal bilatéral, un aspect Modic I des plateaux vertébraux adjacents et une arthrose des articulaires postérieures, de troubles dégénératifs étagés du rachis cervical en C3-C4 et C4-C5 avec un rétrécissement foraminal à ces deux niveaux, sévère à droite, sans contact radiculaire, de déconditionnement musculaire sévère global, marqué aux membres inférieurs, de cyphose dorsale avec port de tête en extension pour avoir le regard horizontal, d’épisode dépressif majeur avec des caractéristiques psychotiques, récurrent (F32.2 ; F33.l ), et de traits de personnalité schizotypique (F60.2).
L’experte rhumatologue a considéré que l’état de santé de l’intéressée s’était modifié depuis mai 2020, date de l’IRM, avec une exacerbation des lombocruralgies. Depuis lors, elle ne pouvait plus exercer sa dernière activité de serveuse dans une boulangerie en raison de l’instabilité L4-L5 et du déconditionnement musculaire sévère. En revanche, elle disposait d’une capacité de travail de 60%, à raison de cinq heures par jour. Les limitations fonctionnelles concernaient le port de charges de plus de 5 kg de manière non répétitive et 8 kg de manière exceptionnelle, le travail en position maintenue du buste en
porte-à-faux, les mouvements répétitifs en flexion/extension et rotation du buste, les montées et descentes répétitives des escaliers, le travail sur terrain accidenté, en hauteur, avec les membres supérieurs en élévation au-dessus de la ligne des épaules, en position accroupie ou à genoux, en ambiance froide. En cas de travail en position assise essentiellement, l’assurée devait pouvoir se lever toutes les heures à son gré quelques minutes, adapter l'assise de la chaise pour un redressement lombaire, et éventuellement ajuster la hauteur en cas de travail devant un écran, car la cyphose dorsale induisait une extension des cervicales.
L’experte psychiatre a retenu que l’intéressée était en totale incapacité de travail dans toute activité, depuis le mois de septembre 2020, période à laquelle une péjoration semblait s’être installée progressivement.
Au terme de leur évaluation consensuelle, les expertes ont conclu que l’assurée présentait une incapacité totale de travail dans toute activité depuis le mois de septembre 2020.
d. Par avis du 19 juin 2023, le docteur F______, médecin au SMR, a approuvé les conclusions de l’expertise.
e. L’OAI a mis en œuvre une enquête ménagère, réalisée le 30 octobre 2023 au domicile de l’assurée, en présence de sa logeuse.
L’intéressée a déclaré n’avoir jamais travaillé avant son arrivée en Suisse en 1990. Selon l’extrait de compte individuel, elle avait travaillé à temps partiel entre 1991 et 1994, et durant deux mois en 2003. Elle indiquait par ailleurs avoir exercé comme masseuse indépendante entre 1996 et 1998, mais il n’y avait aucune trace de cette activité dans ledit extrait. À la question de savoir si elle exercerait une activité lucrative sans atteinte à la santé, l’intéressée a répondu par l’affirmative, à 100%, pour être autonome financièrement et ne plus dépendre de l’aide sociale. Elle a ajouté ne jamais avoir travaillé de manière suivie, car elle avait souffert de problèmes de santé depuis l’enfance.
L’enquêtrice a rappelé les atteintes à la santé mentionnées par le SMR, ainsi que les limitations fonctionnelles retenues. Elle a relevé que l’assurée louait une chambre avec accès aux pièces communes, soit la salle de bain et la cuisine, et qu’il était attendu de sa logeuse qu’elle partage la tenue du ménage pour ces pièces, de sorte qu’une exigibilité avait été retenue. Les empêchements étaient fixés, sans aide exigible, à 0% pour l’alimentation, 8% pour l’entretien du logement, 0% pour les achats et courses diverses, tâches administratives, 0% pour la lessive et l’entretien des vêtements, 0% pour les soins et l’assistance aux enfants et aux proches, et 0% pour les soins au jardin ou extérieur de la maison, et garde des animaux domestiques. Après déduction de l’aide exigible de la logeuse, l’empêchement était nul dans tous les postes. L’enquêtrice a relevé que l’intéressée se donnait la peine de maintenir une certaine régularité dans la sphère ménagère et semblait être à même d’organiser les différentes tâches ménagères qu’elle pouvait effectuer, tranquillement à son rythme et de manière fractionnée sur la semaine. En outre, pour les gros travaux qu’elle ne pouvait plus réaliser en raison de son état de santé, elle pouvait bénéficier de l’aide de sa logeuse depuis le mois de mars 2020, soit avant l’aggravation de son état de santé.
f. Par décision du 2 janvier 2024, notifiée le 5 janvier 2024, l’OAI a confirmé son projet du 10 novembre 2023 et a rejeté la demande de l’assurée. Cette dernière, qui consacrait tout son temps à ses travaux habituels, présentait une atteinte à la santé invalidante dès septembre 2020. L’enquête ménagère avait toutefois permis de constater l’absence de tout empêchement dans le ménage, et donc de degré d’invalidité.
C. a. Par acte du 5 février 2024, l’assurée, représentée par une avocate, a interjeté recours contre cette décision auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à l’annulation de la décision entreprise et à l’octroi d’une rente d’invalidité dont le degré devrait être fixé après une instruction complémentaire. Elle a fait grief à l’intimé d’avoir mal apprécié son statut et mal instruit son dossier.
b. Par décision du 21 mars 2024, la recourante a été mise au bénéfice de l’assistance juridique.
c. Dans son complément au recours et réplique du 27 mars 2024, l’intéressée a conclu, préalablement, à son audition et à celle de son psychiatre. Principalement, elle a conclu à l’annulation de la décision du 2 janvier 2024 et à ce qu’il soit dit qu’elle avait droit à une rente entière depuis le 1er septembre 2020. Subsidiairement, elle a requis que la décision soit annulée en tant qu’elle retenait qu’elle n’était pas empêchée d’effectuer ses travaux ménagers. La recourante a allégué qu’elle avait commencé à souffrir d’hypersomnie, de fatigue, d’asthme, de troubles du sommeil et d’apnées du sommeil suite à un accident de voiture et de multiples chutes survenues entre 1996 et 1998, de lombalgies apparues durant sa grossesse et devenues progressivement invalidantes et majorées en position assise. Elle sous-louait une chambre dans un appartement, mais était allergique au chien de sa logeuse, de sorte qu’elle devrait déménager au plus vite. Elle était seule, coupée de sa famille vivant au Maroc, avec laquelle elle n’avait plus de contact. Elle n’avait aucun loisir, pas d’animal et plus d’enfant à charge. Ses seules interactions sociales étaient celles avec son fils et son assistante sociale. Sans atteinte à la santé, elle devrait travailler. Elle avait suivi une formation initiale en dactylographie et avait eu une activité professionnelle. Son état de santé psychique et physique l’empêchait de mener à bien toute recherche d’emploi effective, ce qui ne signifiait pas qu’elle n’en possédait pas la volonté.
La recourante a notamment produit :
- un certificat du Dr B______, mentionnant que la patiente, asthmatique, devait changer de logement en raison d’une allergie au chien de sa colocataire ;
- un rapport du 4 mars 2024 du Dr B______, attestant d’un état anxio-dépressif chronique, de lombalgies sur une spondylarthrose lombaire et une hernie L4-L5 droit avec un Modic I, d’une cervico-brachialgie sur une uncarthrose C4-C5 et C5-C6 avec une sténose sévère du côté droit, et relevant des difficultés à la marche et au port de charges ;
- un certificat du 15 mars 2024 du Dr C______, indiquant que sa patiente n’était pas en mesure d’effectuer ses travaux ménagers quotidiens ni de rechercher un emploi à cause de son état psychiatrique ; il a diagnostiqué un épisode dépressif sévère avec à l’avant-plan une aboulie, une clinophilie, des épisodes d’agoraphobie et de mélancolie aigües, un retrait social, une neurasthénie sévère, une fatigue et une fatigabilité importantes avec la nécessité de fournir des efforts importants pour effectuer des tâches minimes, une apathie, une baisse marquée du seuil de tolérance au stress.
d. Dans sa réponse du 24 avril 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours. La recourante avait indiqué n’avoir jamais travaillé au Maroc, avoir été masseuse indépendante de 1996 à 1998 et avoir travaillé trois mois comme vendeuse en 2003. Aucune recherche d’emploi ou inscription au chômage ne figurait au dossier et aucun élément ne faisait état d’une incapacité de travail médicalement attestée avant le mois de septembre 2020. Rien ne corroborait les déclarations de l’intéressée quant à une modification de son statut. S’agissant des empêchements dans le ménage, ils avaient été évalués sur la base d’une enquête qui remplissait les critères pour se voir attribuer une pleine valeur probante. La recourante ne démontrait d’ailleurs pas en quoi les conclusions du rapport ne seraient pas plausibles ou insuffisamment motivées, ni quels éléments n’auraient pas été pris en considération.
L’intimé a joint un rapport du 18 avril 2024 du Dr F______, lequel a conclu que les pièces produites par la recourante dans le cadre de la procédure n’apportaient aucun élément médical objectif nouveau et que les atteintes qui y étaient mentionnées avaient été prises en compte lors de l’évaluation des empêchements dans la sphère ménagère.
e. Par écriture du 16 mai 2024, la recourante a notamment rappelé qu’elle s’était occupée de son fils depuis sa naissance, qu’elle avait été mère au foyer et avait dû vivre avec des problèmes médicaux qui l’avaient progressivement invalidée. Suivre la position de l’intimé reviendrait à dénier à chaque personne atteinte dans sa santé la possibilité de se réinsérer professionnellement et ainsi pouvoir modifier son statut ménager. Au surplus, il était attendu que le conjoint se réinsère dans le monde du travail suite à une séparation ou un divorce, y compris à un âge avancé.
f. Le 17 juin 2024, l’intimé a maintenu ses conclusions. Il a relevé que la volonté hypothétique de la recourante de reprendre une activité professionnelle n’était en l’occurrence pas confortée par des indices extérieurs. Avant son atteinte à la santé et même lorsque son enfant était scolarisé, elle était ménagère.
g. Le 9 juillet 2024, la recourante a également persisté dans ses conclusions
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2.
2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
2.2 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du
19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).
En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).
En l’occurrence, un éventuel droit à une rente d’invalidité naîtrait au plus tôt en 2022, dès lors que la demande de prestations a été déposée le 1er juillet 2021
(art. 29 al. 1 LAI), de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.
3. Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d’invalidité, singulièrement sur le statut à retenir et sur son empêchement dans le ménage.
4. L’art. 8 LPGA prévoit qu’est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. L’art. 4 LAI précise en outre que l’invalidité peut résulter d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident.
Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable
(al. 2).
À teneur de l’art 28 al. 1 LAI, l’assuré a droit à une rente aux conditions
suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail
(art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c).
Conformément à l’art. 28a LAI, l’évaluation du taux d’invalidité des assurés exerçant une activité lucrative est régie par l’art. 16 LPGA. Le Conseil fédéral fixe les revenus déterminants pour l’évaluation du taux d’invalidité ainsi que les facteurs de correction applicables (al. 1). Le taux d’invalidité de l’assuré qui n’exerce pas d’activité lucrative, qui accomplit ses travaux habituels et dont on ne peut raisonnablement exiger qu’il entreprenne une activité lucrative est évalué, en dérogation à l’art. 16 LPGA, en fonction de son incapacité à accomplir ses travaux habituels (al. 2). Lorsque l’assuré exerce une activité lucrative à temps partiel ou travaille sans être rémunéré dans l’entreprise de son conjoint, le taux d’invalidité pour cette activité est évalué selon l’art. 16 LPGA. S’il accomplit ses travaux habituels, le taux d’invalidité pour cette activité est fixé selon l’al. 2. Dans ce cas, les parts respectives de l’activité lucrative ou du travail dans l’entreprise du conjoint et de l’accomplissement des travaux habituels sont déterminées ; le taux d’invalidité est calculé dans les deux domaines d’activité (al. 3).
L’art. 24septies RAI stipule que le statut d’un assuré est déterminé en fonction de la situation professionnelle dans laquelle il se trouverait s’il n’était pas atteint dans sa santé (al. 1). L’assuré est réputé (al. 2) : exercer une activité lucrative au sens de l’art. 28a al. 1 LAI dès lors qu’en bonne santé, il exercerait une activité lucrative à un taux d’occupation de 100% ou plus (let. a) ; ne pas exercer d’activité lucrative au sens de l’art. 28a al. 2 LAI dès lors qu’en bonne santé, il n’exercerait pas d’activité lucrative (let. b) ; exercer une activité lucrative à temps partiel au sens de l’art. 28a al. 3 LAI dès lors qu’en bonne santé, il exercerait une activité lucrative à un taux d’occupation de moins de 100% (let. c).
4.1 Pour déterminer la méthode d'évaluation de l'invalidité applicable dans un cas particulier, il faut à chaque fois se demander ce que l'assuré aurait fait si l'atteinte à la santé n'était pas survenue (ATF 137 V 334 consid. 3.2). Il convient par conséquent de procéder à une évaluation hypothétique incluant la prise en compte des choix également hypothétiques que l'assuré aurait faits (ATF 144 I 28
consid. 2.4).
Lorsque l'assuré accomplit ses travaux habituels, il convient d'examiner, à la lumière de sa situation personnelle, familiale, sociale et professionnelle, si, étant valide il aurait consacré l'essentiel de son activité à son ménage ou s'il aurait exercé une activité lucrative. Pour déterminer le champ d'activité probable de l'assuré, il faut notamment prendre en considération la situation financière du ménage, l'éducation des enfants, l'âge de l'assuré, ses qualifications professionnelles, sa formation ainsi que ses affinités et talents personnels
(ATF 144 I 28 consid. 2.3 ; 137 V 334 consid. 3.2 ; 117 V 194 consid. 3b ; Pratique VSI 1997 p. 301 ss consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_722/2016 du 17 février 2017 consid. 2.2). Cette évaluation tiendra également compte de la volonté hypothétique de l'assurée, qui comme fait interne ne peut être l'objet d'une administration directe de la preuve et doit être déduite d'indices extérieurs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2015 du 11 mai 2015 consid. 2.3 et l'arrêt cité) établis au degré de la vraisemblance prépondérante tel que requis en droit des assurances sociales (ATF 126 V 353 consid. 5b).
Selon la pratique, la question du statut doit être tranchée sur la base de l'évolution de la situation jusqu'au prononcé de la décision administrative litigieuse, encore que, pour admettre l'éventualité de la reprise d'une activité lucrative partielle ou complète, il faut que la force probatoire reconnue habituellement en droit des assurances sociales atteigne le degré de vraisemblance prépondérante
(ATF 144 I 28 consid. 2.3 et les références ; 141 V 15 consid. 3.1 ; 137 V 334 consid. 3.2 ; 125 V 146 consid. 2c et les références).
4.2 Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels
(ATF 130 V 97).
4.2.1 L'évaluation de l'invalidité des assurés pour la part qu'ils consacrent à leurs travaux habituels nécessite l'établissement d'une liste des activités que la personne assurée exerçait avant la survenance de son invalidité, ou qu'elle exercerait sans elle, qu'il y a lieu de comparer ensuite à l'ensemble des tâches que l'on peut encore raisonnablement exiger d'elle, malgré son invalidité, après d'éventuelles mesures de réadaptation. Pour ce faire, l'administration procède à une enquête sur place et fixe l'ampleur de la limitation dans chaque domaine entrant en considération. En vertu du principe général de l'obligation de diminuer le dommage, l'assuré qui n'accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap doit en premier lieu organiser son travail et demander l'aide de ses proches dans une mesure convenable. La jurisprudence pose comme critère que l'aide ne saurait constituer une charge excessive du seul fait qu'elle va au-delà du soutien que l'on peut attendre de manière habituelle sans atteinte à la santé. En ce sens, la reconnaissance d'une atteinte à la santé invalidante n'entre en ligne de compte que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies le sont par des tiers contre rémunération ou par des proches et qu'elles constituent à l'égard de ces derniers un manque à gagner ou une charge disproportionnée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_191/2021 du 25 novembre 2021 consid. 6.2.2 et les références).
Selon la jurisprudence, une enquête ménagère effectuée au domicile de la personne assurée constitue en règle générale une base appropriée et suffisante pour évaluer les empêchements dans l’accomplissement des travaux habituels. En ce qui concerne la valeur probante d’un tel rapport d’enquête, il est essentiel qu’il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il y a par ailleurs lieu de tenir compte des indications de l'assuré et de consigner dans le rapport les éventuelles opinions divergentes des participants. Enfin, le texte du rapport doit apparaître plausible, être motivé et rédigé de manière suffisamment détaillée par rapport aux différentes limitations, de même qu'il doit correspondre aux indications relevées sur place. Si toutes ces conditions sont réunies, le rapport d’enquête a pleine valeur probante. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision dans le sens précité, le juge n’intervient pas dans l’appréciation de l’auteur du rapport sauf lorsqu’il existe des erreurs d’estimation que l’on peut clairement constater ou des indices laissant apparaître une inexactitude dans les résultats de l’enquête (ATF 140 V 543 consid. 3.2.1 et 129 V 67 consid. 2.3.2 publié in VSI 2003 p. 221 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_625/2017 du 26 mars 2018 consid. 6.2 et I 733/06 du 16 juillet 2007).
4.2.2 Il existe dans l'assurance-invalidité - ainsi que dans les autres assurances sociales - un principe général selon lequel l'assuré qui demande des prestations doit d'abord entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour atténuer les conséquences de son invalidité (ATF 141 V 642 consid. 4.3.2 et les références ; 140 V 267 consid. 5.2.1 et les références). Dans le cas d'une personne rencontrant des difficultés à accomplir ses travaux ménagers à cause de son handicap, le principe évoqué se concrétise notamment par l'obligation d'organiser son travail et de solliciter l'aide des membres de la famille dans une mesure convenable. Un empêchement dû à l'invalidité ne peut être admis chez les personnes qui consacrent leur temps aux activités ménagères que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies sont exécutées par des tiers contre rémunération ou par des proches qui encourent de ce fait une perte de gain démontrée ou subissent une charge excessive. L'aide apportée par les membres de la famille à prendre en considération dans l'évaluation de l'invalidité de l'assuré au foyer va plus loin que celle à laquelle on peut s'attendre sans atteinte à la santé. Il s'agit en particulier de se demander comment se comporterait une famille raisonnable si aucune prestation d'assurance ne devait être octroyée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références). La jurisprudence ne pose pas de grandeur limite au-delà de laquelle l'aide des membres de la famille ne serait plus possible. L'aide exigible de tiers ne doit cependant pas devenir excessive ou disproportionnée (ATF 141 V 642 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3.1 et les références).
Toutefois, la jurisprudence ne répercute pas sur un membre de la famille l'accomplissement de certaines activités ménagères, avec la conséquence qu'il faudrait se demander pour chaque empêchement si cette personne entre effectivement en ligne de compte pour l'exécuter en remplacement (ATF 141 V 642 consid. 4.3.2 ; 133 V 504 consid. 4.2). Au contraire, la possibilité pour la personne assurée d'obtenir concrètement de l'aide de la part d'un tiers n'est pas décisive dans le cadre de l'évaluation de son obligation de réduire le dommage. Ce qui est déterminant, c'est le point de savoir comment se comporterait une cellule familiale raisonnable, soumise à la même réalité sociale, si elle ne pouvait pas s'attendre à recevoir des prestations d'assurance. Dans le cadre de son obligation de réduire le dommage (art. 7 al. 1 LAI), la personne qui requiert des prestations de l'assurance-invalidité doit par conséquent se laisser opposer le fait que des tiers - par exemple son conjoint [art. 159 al. 2 et 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210)] ou ses enfants (art. 272 CC) - sont censés remplir les devoirs qui leur incombent en vertu du droit de la famille (arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3.2 et les références, in SVR 2023 IV n. 46 p. 156).
Le Tribunal fédéral a récemment confirmé qu'il n'y a pas de motif de revenir sur le principe de l'obligation de diminuer le dommage tel que dégagé par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.3 et les références).
4.2.3 Le facteur déterminant pour évaluer l'invalidité des assurés n'exerçant pas d'activité lucrative consiste dans l'empêchement d'accomplir les travaux habituels, lequel est déterminé compte tenu des circonstances concrètes du cas particulier. C'est pourquoi il n'existe pas de principe selon lequel l'évaluation médicale de la capacité de travail l'emporte d'une manière générale sur les résultats de l'enquête ménagère. Une telle enquête a valeur probante et ce n'est qu'à titre exceptionnel, singulièrement lorsque les déclarations de l'assuré ne concordent pas avec les constatations faites sur le plan médical, qu'il y a lieu de faire procéder par un médecin à une nouvelle estimation des empêchements rencontrés dans les activités habituelles (VSI 2004 p. 136 consid. 5.3 et VSI 2001 p. 158 consid. 3c; arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 308/04 et I 309/04 du 14 janvier 2005).
4.2.4 En présence de troubles d'ordre psychique, et en cas de divergences entre les résultats de l'enquête économique sur le ménage et les constatations d'ordre médical relatives à la capacité d'accomplir les travaux habituels, celles-ci ont, en règle générale, plus de poids que l'enquête à domicile. Une telle priorité de principe est justifiée par le fait qu'il est souvent difficile pour la personne chargée de l'enquête à domicile de reconnaître et d'apprécier l'ampleur de l'atteinte psychique et les empêchements en résultant (arrêt du Tribunal fédéral 9C_657/2021 du 22 novembre 2022 consid. 5.1 et la référence).
5. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ;
125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable
(ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).
6. En l’espèce, l’intimé a retenu un statut de ménagère et considéré, sur la base d’une enquête économique, que le degré d’invalidité était nul.
La recourante conteste le statut de personne non active retenu par l’intimé, ainsi que le résultat de l’enquête ménagère.
6.1 En ce qui concerne le grief relatif au statut, la chambre de céans rappelle que la recourante a déclaré n’avoir jamais travaillé dans son pays d’origine, quitté à l’âge de 24 ans, et avoir très peu travaillé en Suisse, soit uniquement entre les années 1991 et 1994, ainsi que durant trois mois en 2003.
Il ressort effectivement de son extrait de compte individuel, que l’intéressée a été affiliée auprès de la FER-CIAM d’octobre 1991 à juin 1992 (revenus déclarés de CHF 4'500.- pour 1991 et CHF 8'280.- pour 1992) et d’octobre 1993 à mars 1994 (revenus déclarés de CHF 4'000.- pour 1993 et CHF 684.- pour 1994). Par la suite elle a uniquement cotisé en qualité de personne sans activité lucrative, à l’exception des mois de janvier et février 2003 (CHF 2'104.-). Ainsi, il peut être retenu que la recourante a travaillé durant seulement deux mois, et non trois mois, au cours des 30 dernières années, et ce à temps partiel au vu des revenus annoncés.
Contrairement à ce que soutient la recourante, cette absence d’activité lucrative n’est pas justifiée par des problèmes de santé. Il est rappelé à cet égard que, par décision du 7 octobre 2003 entrée en force en l’absence de recours, l’intimé avait retenu qu’elle disposait d’une entière capacité de travail dans une activité adaptée, exempte du port de lourdes charges en raison des troubles somatiques. En effet, dans son avis du 19 septembre 2003, le SMR avait notamment constaté que la fatigabilité chronique, plainte principale, pouvait être expliquée par le syndrome d’apnées du sommeil, à traiter par CPAP de façon régulière. L’intéressée n’avait d’ailleurs plus rapporté d’apnées du sommeil lors de son évaluation psychiatrique et avait déclaré que ses troubles du sommeil étaient irréguliers (rapport d’examen psychiatrique du 19 mai 2003). Quant aux lombalgies et lombo-cruralgies, le
Dr G______ avait indiqué ne pas voir de limitation rhumatologique particulière à l’exercice d’une activité professionnelle, hormis pour le port de lourdes charges et les positions statiques prolongées (rapport du 13 mars 2003).
La recourante ne démontre pas avoir cherché un emploi postérieurement à cette décision. Si elle a sollicité des indemnités de chômage le 30 juin 2004 et mentionné être disposée à travailler à 80%, il ressort de la décision d’inaptitude au placement du 22 décembre 2004 qu’elle a également produit des certificats d’incapacité de travail et déclaré qu’elle n’avait effectué aucune recherche d’emploi et qu’elle n’envisageait pas « tout de suite » de prendre une activité professionnelle. Ainsi, en dépit de la décision de refus de rente, elle n’a pas mis à profit sa capacité de travail résiduelle, ni ne démontre avoir tenté de le faire.
De janvier 2006 à mars 2020, la recourante a vécu au Maroc, chez sa mère. Elle ne prétend pas avoir travaillé durant ces années.
Depuis son retour à Genève, elle loue une chambre et bénéficie de prestations financières versées par l’Hospice général. Elle a déposé sa seconde demande auprès de l’intimé le 1er juillet 2021 et produit dans ce cadre de nombreux rapports établis depuis le mois de mai 2020. Dans leur rapport d’expertise du 12 juin 2023, la rhumatologue a retenu une capacité de travail de 40% dès le mois de mai 2020 et la psychiatre une incapacité totale dès le mois de septembre 2020. Ces appréciations n’apparaissent pas critiquables, puisque le Dr B______, lequel n’est pas psychiatre, a considéré que l’incapacité de travail résultait de l’état dépressif sévère, et non pas des lombosciatalgies (rapport du 19 juillet 2021), et que le Dr C______, psychiatre, n’a été consulté qu’à partir du 20 septembre 2020 (rapport du 31 août 2021). Or, la recourante n’a effectué aucune démarche afin de trouver un emploi alors qu’elle disposait encore d'une capacité de travail.
Au niveau familial, elle a été économiquement dépendante de ses deux maris et du père de son fils. Il est notamment rappelé qu’après son premier divorce prononcé en avril 1993, lors duquel aucune indemnité ou pension alimentaire ne lui a été accordée (cf. jugement de divorce du 18 janvier 1993), l’intéressée n’a travaillé que durant quelques mois à temps partiel, malgré son absence de ressources financières. Elle a alors été aidée par des proches, soit sa mère et un ami, puis dès 2000 par l’Hospice général. Suite au décès du père de son enfant, en novembre 2001, elle n’a pas non plus exercé d’activité lucrative, à l’exception d’une très brève période de deux mois en 2003, et ce alors que ses revenus se limitaient aux avances de l’Hospice général et à la rente d’orphelin de son enfant. Elle s’est ensuite remariée en janvier 2004, puis séparée, et est retournée vivre chez sa mère au Maroc en 2006, où elle est restée durant quatorze ans.
Ainsi, en dépit de sa situation financière précaire et du fait qu’elle avait la charge exclusive de son fils en bas âge, la recourante n’a pas démontré avoir cherché à intégrer le marché de l’emploi, que ce soit en Suisse ou au Maroc.
La volonté hypothétique de l’intéressée, selon laquelle elle aurait travaillé à plein temps en bonne santé, n’est étayée par aucun indice et ne saurait donc être considérée comme établie, au degré de la vraisemblance prépondérante.
Dans ces conditions, la chambre de céans considère que l’intimé était fondé à retenir un statut de personne non active.
6.2 S’agissant des conclusions du rapport d’enquête économique, la chambre de céans constate que ce document a été établi par une personne qualifiée, au domicile de l’intéressée. Il rappelle toutes les atteintes à la santé retenues dans le rapport d’expertise, aux niveaux somatique et psychique, et énumère précisément les limitations fonctionnelles retenues. Interrogée à cet égard, la recourante a déclaré que son état de santé était identique à celui qui prévalait au mois de juin 2023, soit au moment de l’expertise médicale.
S’agissant des différents postes, la recourante n’a décrit aucun empêchement pour les postes en lien avec l’alimentation. Concernant l’entretien du logement, l’enquêtrice a rapporté que l’intéressée pouvait effectuer les travaux légers dans sa chambre et les pièces communes, et qu’elle ne rencontrait aucun empêchement pour les travaux lourds et saisonniers, puisqu’elle n’avait jamais participé à ces tâches depuis qu’elle était rentrée en Suisse, car la femme de ménage de sa logeuse venait une fois toutes les deux semaines et s’occupait de ces tâches. Pour les achats et courses diverses, l’intéressée n’avait décrit aucun empêchement et elle était aidée par une assistante sociale pour les démarches administratives. Concernant les lessives et l’entretien des vêtements, aucune restriction n’avait été évoquée par l’intéressée, qui n’avait jamais fait de repassage ni de travaux de couture. Enfin, le fils de la recourante était indépendant et vivait dans son propre studio, de sorte qu’aucune limitation ne pouvait être retenue pour les soins aux proches. Il en allait de même pour les soins de l’extérieur de l’appartement, sans terrasse ou balcon, et l’intéressée n’avait pas d’animal.
Les rapports produits par la recourante dans le cadre de la procédure ne permettent pas de remettre en cause le rapport d’enquête ménagère. En effet, les atteintes somatiques rappelées par le Dr B______ (cf. rapport du 4 mars 2024) ont été dûment prises en compte par la Dre D______. Il en va de même des troubles psychiques attestés par le Dr C______ (cf. certificat du 15 mars 2024), dont le contenu est analogue à celui de ses précédents rapports, qui évoquaient déjà un épisode dépressif sévère, avec une anhédonie, une anxiété, des ruminations anxieuses, des sentiments de dévalorisation, de culpabilité et d’injustice, une aboulie, une clinophilie, des épisodes d’agoraphobie et de mélancolie aigües, des difficultés de concentration, de mémoire, une baisse d’appétit, une fatigue, la nécessité de fournir des efforts importants pour effectuer des tâches minimes. Son appréciation, selon laquelle sa patiente ne serait pas en mesure d’effectuer ses travaux ménagers quotidiens n’est pas propre à remettre en cause celle de l’enquêtrice, conforme aux déclarations de la recourante.
La chambre de céans ne constate donc aucune raison de s’écarter des conclusions de l’enquêtrice. La recourante n’en fait d’ailleurs valoir aucune. Son seul argument réside dans son allergie au chien de sa logeuse, qui justifierait un prochain déménagement. Toutefois, dès lors que la recourante habite toujours chez sa logeuse, c’est à bon droit que l’intimé a retenu que celle-ci devait partager la tenue du ménage pour les pièces communes. L’exigibilité retenue est donc parfaitement justifiée.
6.3 La chambre de céans considère, par appréciation anticipée des preuves, qu’il n’est pas nécessaire d’entendre la recourante, ni son psychiatre, étant rappelé que l’intéressée a largement pu s’exprimer par écrit, à plusieurs reprises.
7. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.
Il convient de renoncer à la perception d'un émolument, la recourante étant au bénéfice de l'assistance juridique (art. 69 al. 1bis LAI et 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Dit qu’il n’est pas perçu d’émolument.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Julia BARRY |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le