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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3528/2023

ATAS/783/2024 du 10.10.2024 ( AI )

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3528/2023 ATAS/783/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt incident du 10 octobre 2024

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

représenté par Me William RAPPARD, avocat

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1965, de nationalité portugaise, titulaire d’une autorisation d’établissement C, entré en Suisse en 1983, marié, a exercé une activité de maçon

b. Le 29 novembre 2010, le docteur B______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a pratiqué une méniscectomie interne totale par anse du seau du genou gauche de l’assuré suite à une déchirure complexe du ménisque interne du 30 octobre 2010. Le 20 juin 2013, le Dr B______ a opéré l’assuré pour les suites d’une fracture avulsion du ligament croisé postérieur au tibia, suite à une grave entorse du genou droit le 5 juin 2013. Le 22 juin 2015, le Dr B______ a pratiqué au genou droit un toilettage du ligament croisé antérieur, avec résection de la corne postérieure du ménisque interne et synovectomie antéro-interne (plica synoviale).

Le 13 janvier 2016, l’assuré s’est blessé à l’index de la main droite en manipulant des pneus (fracture de la deuxième phalange de l’index droit et une entorse du pouce droit). La SUVA caisse nationale d’assurances en cas d’accidents (ci‑après : SUVA) a pris le cas en charge.

B. a. Le 20 juin 2016, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d'arrondissement de la SUVA, a examiné l'assuré.

Il a relevé que l'assuré avait présenté dans ses antécédents des traumatismes du genou gauche ayant nécessité une méniscectomie interne avec un bon résultat à ce jour ; il avait également présenté le cas pour le genou droit avec arrachement de l'insertion du ligament croisé postérieur et avait bénéficié d'une réinsertion avec un bon résultat clinique à ce jour. S’agissant de l’index droit, il ne persistait qu'un minime déplacement au niveau du refend intra-articulaire et on pouvait s’attendre à une reprise de l’activité professionnelle d’ici au 14 juillet 2016.

b. La SUVA a alloué une indemnité journalière jusqu’au 13 juillet 2016, décision confirmée par décision sur opposition du 6 décembre 2016 et arrêt de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice du 22 janvier 2018 (ATAS/44/2018).

c. Le 22 novembre 2016, l’assuré a déposé une demande de prestations d’invalidité, en mentionnant des atteintes aux genoux et au tibia.

d. Le Dr B______ a attesté d’accidents aux deux genoux, d’une fracture avulsion du ligament croisé postérieur au tibia le 20 juin 2013 et d’une déchirure du ménisque interne du genou gauche le 30 octobre 2010.

e. Du 8 mai au 4 juin 2017, l’assuré a bénéficié d’une mesure d’intervention précoce sous la forme d’une orientation professionnelle aux EPI, lesquels ont conclu à la possibilité d’une activité manuelle simple et pratique préservant les membres inférieurs (rapport des EPI du 16 juin 2017).

f. Le 21 avril 2018, le docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne, a attesté d’une capacité de travail nulle comme maçon et de limitations fonctionnelles de port de charges, station debout et marche.

g. À la demande de l’Office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI), le E______ a rendu une expertise orthopédique le 28 août 2017 (docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur). L’expert a posé les diagnostics avec incidence sur la capacité de travail de séquelles d’entorse grave du genou droit avec lésion du ligament croisé postérieur, traitée chirurgicalement, avec instabilité résiduelle et épanchement à l’effort et gonalgies gauches du compartiment interne sur arthrose débutante post entorse grave avec lésion du ménisque interne en anse de seau, opérée en 2010. La capacité de travail était totale dans une activité légère à moyenne (moins de 15 kg) en changeant de position, la position assise pouvant être tenue sans difficulté pendant deux heures et la position debout pendant une à deux heures. Les objets fins et l’utilisation de la pince entre le pouce et l’index étaient difficiles et déconseillés. La marche en terrain inégal, la montée/descente des escaliers, les échelles et les échafaudages étaient exclues.

h. Le 17 octobre 2017, le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci‑après : SMR) a retenu une capacité de travail totale dans une activité adaptée depuis juillet 2016, avec les limitations fonctionnelles suivantes : privilégier une activité légère à moyenne, un poste sédentaire ou semi-sédentaire où l’assuré puisse changer de position à sa guise, sans port de charge (exceptionnellement 10 kg), éviter les positions accroupie, à genoux, monter/descendre des escaliers, échafaudages etc. et la marche en terrain inégal. Les gestes fins de la main droite et l’utilisation de la pince (pouce/index) sont difficiles et déconseillés.

i. Du 11 décembre 2017 au 18 mars 2018, l’assuré a bénéficié d’une orientation professionnelle aux EPI.

j. Le 13 février 2018, le Dr D______ a signalé au SMR que l’assuré présentait une hernie discale avec sacro-iliite.

k. Le 19 mars 2018, l’OAI a pris en charge un reclassement professionnel comme agent de conditionnement dans l’industrie légère, aux EPI, du 19 mars au 30 septembre 2018. L’assuré a débuté à un taux de 50% en raison d’un arrêt maladie de 50% attesté par le Dr D______, puis a été en arrêt de travail total dès le 7 mai 2018, en raison d’un accident (fissure du talon). La mesure a été interrompue le 31 juillet 2018.

l. Le 18 juillet 2019, le Dr D______ a indiqué un état de santé stationnaire, avec une capacité de travail de 50% depuis le 19 mars 2018.

m. Du 5 octobre 2020 au 31 décembre 2021, l’assuré a été mis au bénéfice d’une mesure de reclassement comme agent de conditionnement dans l’industrie légère aux EPI (reprise de la première mesure de reclassement).

L’assuré a été en arrêt de travail à un taux de 50% du 29 mars 2021 au 31 décembre 2021.

n. Le 15 février 2021, le Dr D______ a attesté d’un travail léger à 50% possible.

o. Le 19 avril 2021, le SMR a estimé que la capacité de travail de l’assuré dans une activité adaptée était entière, avec une baisse de rendement de 20 à 30%.

p. Les 15 septembre et 20 octobre 2021, le Dr D______ a écrit au SMR que l’assuré présentait une aggravation de son état de santé (lombosciatalgies, gonarthrose gauche et arthrose du talon droit), que sa capacité de travail était nulle dans une activité adaptée et qu’il présentait des limitations de port de charge et station debout.

q. Le 21 septembre 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en anesthésiologie, a réalisé une infiltration périradiculaire L5, en raison d’une sciatalgie L5-S1 gauche non déficitaire.

r. L’assuré, victime d’un accident de la circulation, a été en arrêt de travail du 25 septembre au 3 octobre 2021 (choc au visage, épaules et colonne cervicale).

s. La mesure de reclassement a été interrompue en raison de l’incapacité de travail de l’assuré et le 23 décembre 2021, le service de réadaptation a conclu que l’activité d’agent en conditionnement était adaptée aux limitations fonctionnelles.

t. Le 28 mars 2022, le Dr D______ a estimé que l’assuré était totalement incapable de travailler car il était trop limité physiquement et psychiquement.

u. À la demande de l’OAI, les docteurs H______, spécialiste FMH en médecine interne générale et rhumatologie, et I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont rendu le 23 avril 2023 une expertise bidisciplinaire rhumatologique et psychiatrique, concluant à une capacité de travail totale dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles physiques. L’assuré présentait une gonarthrose bilatérale, une arthrose sous-talienne, une limitation fonctionnelle de l’articulation interphalangienne proximale (à droite), des rachialgies lombaires et cervicales. Du point de vue psychique, l’assuré présentait une dysthymie non incapacitante.

v. Le 2 mai 2023, le SMR a retenu une capacité de travail nulle comme maçon dès le 3 janvier 2016 et de 100% dans une activité adaptée dès le 1er juillet 2016 (éviter la marche en terrain plat >500 m et la marche en terrain irrégulier, les escaliers à répétition, l’utilisation d’échelles ou d’échafaudages, les positions à genoux ou accroupies répétées, les positions maintenues en anteflexion du rachis, le port de charges au-delà de 15 kg, privilégier une activité sédentaire, permettant les changements de position une fois/heure).

w. Le 15 juin 2023, l’OAI a fixé le degré d’invalidité à 21,23%.

x. Par projet de décision du 16 juin 2023, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

y. Le 13 septembre 2023, l’assuré, représenté par une avocate, a contesté le projet de décision, au motif que l’OAI ne ciblait pas les activités adaptées, étant relevé que la formation comme agent de conditionnement avait été interrompue. Le revenu d’invalide était contesté, le Dr D______ attestant d’une incapacité à reprendre une activité professionnelle. Une rente entière d’invalidité était justifiée.

Il a communiqué un rapport du Dr D______ du 5 septembre 2023, mentionnant une aggravation de l’état de santé depuis 2021 : l’assuré était très limité, sa capacité d’adaptabilité était nulle, avec une labilité psychique et un état anxio-dépressif réactionnel ne laissant aucun espoir pour une réinsertion professionnelle.

z. Par décision du 27 septembre 2023, l’OAI a rejeté la demande de prestations, en se ralliant à un avis du SMR du 25 septembre 2023, estimant que le certificat médical du Dr D______ n’apportait pas d’éléments médicaux objectifs nouveaux.

C. a. Le 30 octobre 2023, l’assuré, représenté par un avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision de l’OAI précitée, en concluant à son annulation et à l’octroi de prestations d’invalidité, préalablement à son audition et à celle des docteurs D______ et J______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. Subsidiairement, il a conclu à l’ordonnance d’une expertise judiciaire pluridisciplinaire.

L’intimé ne tenait pas compte de l’échec de la mesure de reclassement et il ne disposait pas des capacités physiques pour être agent de conditionnement. Le revenu d’invalide devait être réduit de CHF 58'795.- à CHF 46'572. Il a joint des offres d’emplois en matière de conditionnement et une fiche attestant d’un salaire moyen de CHF 3'881.- pour un agent de conditionnement.

b. Le 27 novembre 2023, l’intimé a conclu au rejet du recours, en relevant que l’expertise des Drs H______ et I______ était probante et que le revenu d’invalide était fondé, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, sur l’ESS 2020, indexé à l’année 2021, tableau TA1, total, homme, niveau 1.

c. Le 19 décembre 2023, le recourant a répliqué, en contestant la valeur probante de l’expertise bidisciplinaire et a requis un délai complémentaire pour communiquer d’autres rapports médicaux.

d. Le recourant n’a pas réagi dans le délai accordé au 29 février 2024.

e. Le 17 juin 2024, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle. Le recourant a communiqué des nouvelles pièces médicales.

f. Le 3 juillet 2024, le SMR, après examen des nouvelles pièces médicales, a maintenu son appréciation et le 9 juillet 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

g. Le 4 octobre 2024, le recourant a requis des mesures superprovisionnelles, en concluant à ce que l’intimé lui verse immédiatement une rente entière d’invalidité. Il a communiqué une attestation du docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, du 28 août 2024, sollicitant une analyse attentive et une réévaluation de la situation afin que l’assuré puisse obtenir reconnaissance de l’impact limitatif de la situation actuelle sur ses capacités et démarches.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est prima facie recevable (art. 56 et 60 LPG ; art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.             Le recourant a requis l’octroi de mesures superprovisionnelles.

2.1 Selon l’art. 21 LPA, l’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s’il s’agit d’une autorité collégiale ou d’une juridiction administrative (al. 2).

Par ailleurs, selon l’art. 56 PA (applicable par renvoi de l’art. 55 al. 1 LPGA), après le dépôt du recours, l’autorité de recours, son président ou le juge instructeur peut prendre d’autres mesures provisionnelles, d’office ou sur requête d’une partie, pour maintenir intact un état de fait existant ou sauvegarder des intérêts menacés.

Cela étant, les mesures provisionnelles au sens de l'art. 56 PA ne sont légitimes, aux termes de la loi, que si elles s'avèrent nécessaires au maintien de l'état de fait ou à la sauvegarde des intérêts compromis. En revanche, elles ne sauraient anticiper sur le jugement définitif, ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond ni aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire le procès au fond (ATF 119 V 506 consid. 3 ; arrêt R. du 7 janvier 2005, B 97/04 ; Fritz GYGI, L'effet suspensif et les mesures provisionnelles en procédure administrative, RDAF 1976 p. 228 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 65/05 du 21 juillet 2005, consid. 3.2).

2.2 En l’occurrence, la requête de mesures provisionnelles se confond avec les conclusions prises au fond par le recourant. Or, donner droit à cette requête reviendrait à accorder au recourant ce qu’il réclame dans la procédure principale, à savoir l’octroi d’une rente d’invalidité.

En conséquence, la demande de mesures superprovisionnelles ne peut qu’être rejetée.

 

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Rejette la demande de mesures superprovisionnelles.

2.        Réserve la suite de la procédure.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le