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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2121/2023

ATAS/556/2024 du 03.07.2024 ( LAA )

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2121/2023 ATAS/556/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d'expertise du 3 juillet 2024

Chambre 10

 

En la cause

A______A______
représentée par Me Michel BERGMANN, avocat

 

 

recourante

 

contre

BÂLOISE ASSURANCE SA
représentée Me Michel D'ALESSANDRI, avocat

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1983, domiciliée en France, a été engagée à compter du 29 août 2016 par le secteur petite enfance rive droite (ci-après : l'employeur), sis à Genève, en qualité d'éducatrice, à un taux initial de 100%, puis à un taux de 60% à une date indéterminée. À ce titre, elle était assurée contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la Bâloise Assurance SA (ci-après : la Bâloise).

b. Le 24 octobre 2018, alors qu'elle conduisait son scooter, l'assurée a été percutée par le véhicule d’un automobiliste en état d’ébriété arrivant à grande vitesse. Elle a été renversée et a terminé sa chute coincée sous la voiture l'ayant heurtée, se faisant traîner sur une distance de plus de 25 mètres. Grièvement blessée, elle a été conduite au service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) par une ambulance (déclarations de sinistre du 25 octobre 2018 et du 1er novembre 2018 complétées par l'employeur ; rapport de police du
21 janvier 2019).

c. L'assurée a séjourné au service des soins intensifs des HUG du 24 au
26 octobre 2018 en raison d'une lacération hépatique, de fractures du sacrum droit et des cotyles bilatéraux, d'une suspicion de contusion pulmonaire apicale gauche et de dermabrasion profonde sur 1% de la surface corporelle au dos de la main droite (rapport du 25 octobre 2018 du service des soins intensifs des HUG).

Le 24 octobre 2018, des radiographies des poignet, main, genou et bassin, ainsi qu'un CT-scan du thorax et de l'abdomen ont été effectués. Les radiographies ont toutes démontré une absence de fracture visualisée. En revanche, le CT-scan a mis en évidence de multiples lacérations et contusions complexes intraparenchymateuses hépatiques du foie droit de grade 3 de la classification AAST, avec une suffusion veineuse au sein d'une plage de contusion du segment VI probablement par atteinte d'une branche distale de la veine hépatique médiane, ainsi qu'une fracture bilatérale des parois antérieures des deux cotyles avec refend vers les branches ilio-pubiennes de façon bilatérale non déplacée (rapport médical du 29 octobre 2018 du service des urgences des HUG).

d. L'assurée a ensuite séjourné au sein du service de chirurgie viscérale du
26 octobre au 2 novembre 2018 avant d'être transférée à la Clinique S______. Elle présentait une incapacité de travail complète (lettre de transfert du
12 novembre 2018 du service de chirurgie viscérale).

e. Le 13 décembre 2018, l’assurée a quitté la Clinique S______ et se trouvait toujours en arrêt de travail.

Le rapport de sortie du 28 décembre 2018 de ladite clinique indiquait que la patiente présentait dès son arrivée d'importantes douleurs et avait été mise au bénéfice d'un programme multidisciplinaire associant physiothérapie et ergothérapie, ainsi que des activités physiques adaptées. Sur le plan psychiatrique, elle relatait des troubles du sommeil probablement en lien avec le stress post-traumatique et avait été suivie par un psychiatre. À la fin de son séjour, l'évolution était favorable sur le plan fonctionnel, tout à fait favorable sur le plan antalgique et stabilisée sur le plan psychique. Des séances de physiothérapie étaient prescrites, ainsi qu'un suivi ambulatoire par un psychologue en cas de besoin.

f. La Bâloise a pris en charge le cas, en versant des indemnités journalières et en s'acquittant des frais médicaux.

g. Suite à des douleurs persistantes au genou gauche, une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) a été effectuée le 21 janvier 2019 par le service de radiologie des HUG qui n'a révélé aucune lésion osseuse ou ligamentaire
post-traumatique.

h. Le 25 janvier 2019, un inspecteur de sinistres de la Bâloise s'est rendu au domicile de l'assurée pour y effectuer un entretien.

Selon le rapport du 7 février 2019 délivré suite à cette visite, l’intéressée n'avait aucun antécédent au niveau des membres inférieurs avant l'accident. Elle présentait des douleurs aux niveaux du genou gauche et de la cheville gauche, une mobilité incomplète, ainsi qu'une impossibilité de se mettre en position accroupie ou à genoux. Elle s'était également plainte de douleurs sur les plis inguinaux et au niveau du bas du dos avec une prédominance à droite, et de douleurs aiguës qui bloquaient sa mobilisation. Elle pouvait marcher un trajet d'une trentaine de minutes sans cannes, puis les douleurs se faisaient ressentir progressivement selon la fatigue. Quant à la position assise, elle pouvait la gérer sous médication, pour une durée limitée à une heure. Sur le plan psychique, elle était très fragile, présentant un traumatisme important.

i. Entre le 30 janvier et le 27 août 2019, plusieurs documents médicaux ont été établis, dont :

-          une note de consultation du 30 janvier 2019 du docteur B______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie aux HUG, indiquant une amélioration du status de l'assurée, cette dernière pouvant marcher deux heures par jour, avec parfois une persistance de douleurs postérieures sacro-iliaques droites ;

-          un rapport médical du 31 janvier 2019 rendu par le service de radiologie des HUG suite à une radiographie du bassin effectuée le 6 décembre 2018 concluant à une absence de fracture visible sur cette modalité d'imagerie ;

-          un rapport médical intermédiaire du 8 février 2019 du docteur C______, médecin interne au département de chirurgie des HUG, faisant état d'une amélioration du status de l'assurée, celle-ci pouvant marcher deux heures par jour, avec des douleurs persistantes sacro-iliaques droites, ainsi qu'une mobilité complète des hanches et un test FADIR sensible. Étaient retenues une incapacité de travail de 100% en raison des limitations physiques dues à une consolidation osseuse non terminée et une absence de limitation mentale ;

-          une note de consultation du 7 mars 2019 du docteur D______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, spécialisé en médecine du sport à l'Hôpital de la Tour, dans laquelle il relevait que l'assurée gardait des douleurs lombaires en barre, des douleurs au genou gauche et à la cheville gauche, ainsi qu'à la hanche droite. Il a constaté une marche prudente mais sans boiterie, un FADIR sensible des hanches, ainsi que des douleurs à la palpation du sacrum à gauche. Il a retenu, à titre de diagnostics, des fractures des deux cotyles antérieurs, du sacrum à droite, ainsi qu'un trouble de stress
post-traumatique. L'assurée pouvait marcher de façon autonome deux heures par jour, faire du vélo et présentait un arrêt de travail complet ;

-          une note de consultation du 10 avril 2019 du docteur E______, médecin aux HUG, relevant une douleur sacrée invalidante lors de la position debout prolongée ou pour ramasser un objet, une marche sans boiterie, un FADIR légèrement douloureux côté droit et une compression du sacrum douloureuse à gauche ;

-          un rapport médical du 17 mai 2019 rendu par le service de radiologie des HUG suite à une radiographie du bassin effectuée le 10 avril 2019 constatant une absence de lésion ostéo-articulaire aiguë visible, des traits de fractures non visualisés par cette modalité d'imagerie, une visualisation de l'épine ischiatique gauche, sans épaulement du col fémoral ni protrusion acétabulaire ni signes de coxa profunda, une absence de kyste intra-osseux pour une lésion de « Pitt », ainsi que la présence d'os acetabuli accessoires bilatéralement ;

-          un rapport médical du 17 mai 2019 rendu par le service de radiologie des HUG suite à une IRM des articulations sacro-iliaques effectuée le même jour, concluant à une consolidation acquise de la fracture de l'hémisacrum droit, à une absence d'œdème osseux au regard de la fracture, ainsi qu'à un œdème osseux en hypersignal STIR des berges sacro-iliaques des deux côtés, à prédominance postéro-inférieure, sans franche anomalie osseuse adjacente, restant peu spécifique dans le contexte traumatique récent ;

-          un questionnaire préétabli par la Bâloise du 23 mai 2019 complété par le docteur F______, spécialiste en chirurgie orthopédique et médecin-conseil de la Bâloise, dans lequel il a indiqué que l'incapacité de travail de l'assurée dans son activité habituelle résultait de l'accident à une probabilité supérieure à 50% et qu'une reprise du travail selon son taux d'activité habituelle à mi-août devait être tentée, dans la mesure où l'intéressée l'envisageait et que son poste pourrait être adapté ;

-          un rapport médical du 1er juillet 2019 rendu par le service de radiologie des HUG suite à une radiographie du bassin du 27 février 2019 constatant la visualisation de l'épine ischiatique des deux côtés, une absence d'épaulement du col fémoral, de protrusion acétabulaire et de signes de coxa profunda, la présence d'os acetabuli bilatéralement, ainsi que des remaniements arthrosiques de la symphyse pubienne ;

-          une note de consultation du 1er juillet 2019 du Dr D______ qui mentionnait que l'assurée allait globalement bien, mais qu'elle ressentait toujours des douleurs au genou gauche dans le compartiment fémoro-tibial interne. Les lombalgies s'étaient bien améliorées par la prise en charge de Monsieur G______, chiropraticien spécialiste ASC/ECU. La position squat monopodal gauche était impossible et la position accroupie difficile. La patiente se trouvait toujours en arrêt de travail, avec une reprise à 50% prévue dès le 26 août 2019 et à 100% à partir du 2 septembre 2019 ;

-          un rapport de consultation du 24 juillet 2019 du docteur H______, médecin adjoint au service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des HUG, suite à une consultation du 19 juin 2019. L'évolution était tout à fait favorable, mais l’assurée présentait des douleurs lombaires basses, lombo-sacrées bilatérales et aux articulations sacro-iliaques. La douleur se trouvait en amélioration depuis quelques séances de chiropraxie débutée quatre semaines au préalable. L'assurée poursuivait la physiothérapie. Elle s'était également plainte d'une douleur antérieure du genou droit depuis qu'elle avait augmenté l'intensité de la marche et de quelques douleurs dynamiques au niveau du pli inguinal à droite. Elle se trouvait toujours en incapacité de travail dans le contexte de sa rééducation. L'examen clinique avait révélé un signe de « Mennel » positif bilatéral, une mobilisation des hanches sans particularité, un résultat au test de flexion, abduction et rotation interne (FADIR) de la hanche à droite de 2, ainsi qu'une absence de trouble sensitivomoteur des membres inférieurs. Une IRM avait confirmé un œdème sacro-iliaque bilatéral sans franche anomalie osseuse adjacente rentré dans le contexte traumatique récent. S'agissant des douleurs résiduelles en regard des articulations sacro-iliaques, le Dr H______ recommandait la poursuite des séances de physiothérapie. Quant aux douleurs coxo-fémorales droites avec un FADIR de 2, au vu du contexte traumatique, il recommandait d'investiguer une éventuelle lésion du labrum ;

-          une note de consultation du 27 août 2019 du Dr D______ qui faisait état d'une amélioration au niveau des genoux de la patiente. Toutefois, suite au port de talons lors de ses vacances, l'assurée avait présenté de nouvelles douleurs, avec une gêne permanente et des pics douloureux occasionnels. Le diagnostic retenu était une contusion du ménisque interne gauche. L'intéressée n'était pas retournée travailler comme initialement prévu, son arrêt de travail ayant alors été prolongé de dix jours.

j. Dans l’intervalle, la Bâloise a mis en place au mois de mai 2019 un
case management confié à la société All Client Care (ci-après : ACC), spécialisée notamment dans la réintégration de personnes malades et accidentées, en vue d'accompagner l'assurée. La case manager en charge du dossier de l'assurée a transmis les rapports d'assessment suivants à la Bâloise :

-          un rapport du 23 mai 2019 dans lequel elle avait indiqué que la situation semblait évoluer positivement, mais que l'assurée présentait des limitations au niveau des genoux, de la cheville et du dos, ainsi qu'un choc psychologique. Elle avait vu un psychiatre à deux reprises mais en avait tiré une mauvaise expérience. L'incapacité de travail restait totale ;

-          un rapport du 29 août 2019 dans lequel elle avait relevé que l'assurée présentait encore une limitation résiduelle importante au niveau de son genou gauche pour laquelle seule une infiltration lui avait été proposée. Une reprise de trois
demi-journées était prévue dès le 26 août 2019, mais celle-ci avait été reportée au 17 septembre 2019. Une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité avait été réalisée en février 2019 et, à titre de mesure d'intervention précoce, un coaching sous forme thérapeutique avait été mis en place jusqu’en septembre 2019.

k. Le 3 septembre 2019, l'assurée a bénéficié d'une infiltration du mur du corps méniscal interne gauche réalisée par la docteure I______, spécialiste FMH en radiologie.

l. L’assurée a pu reprendre son activité le 16 septembre 2019, à un taux de 50% de son nouveau taux de travail (60%), sur trois demi-journées.

m. Dans une note de consultation du 8 octobre 2019, le Dr D______ a indiqué que l'assurée présentait une excellente évolution durable depuis l'infiltration du mur méniscal début septembre 2019 et ne ressentait plus de douleurs, sauf lorsqu'elle se trouvait « longtemps à quatre pattes ». L'assurée avait repris son travail à 50%, mais se sentait rapidement limitée par son dos. Elle pouvait poursuivre son activité à 50% jusqu'au 30 novembre 2019 puis à 100% dès le 1er décembre 2019. Suite à une demande d'information complémentaire de la Bâloise du 11 octobre 2019, le Dr D______ a précisé que l'assurée avait retrouvé une capacité de travail de 50% d'un 100%, ce dernier n'étant pas au courant de la baisse du taux à 60%.

n. Le 5 novembre 2019, la Bâloise a adressé un courriel à l'employeur expliquant être dans l'obligation de verser la part d'indemnités relatives à la capacité de travail au prorata du salaire effectif au moment de l'accident, soit à un taux de 100% pour l'assurée, même si une modification du taux était survenue entretemps. Dans la mesure où le Dr D______ avait confirmé une reprise à 50% d'un 100% depuis mi-septembre 2019, l'intéressée devait reprendre ce pourcentage de travail sur deux jours et demi en novembre 2019, à moins que l'employeur et l'assurée renoncent aux 40% d'indemnisation en plus.

o. En décembre 2019, l'assurée a repris le travail sur deux jours et demi consécutifs par semaine, correspondant à un taux de 50% d'un 100%, conformément à l'exigence de son employeur.

p. Le docteur J______, spécialiste FMH en médecine interne, a délivré des certificats médicaux faisant état d'une incapacité de travail de 70% entre le 18 novembre 2019 et le 12 janvier 2020, puis de 50% à partir du 13 janvier 2020 et ce jusqu'au 24 janvier 2021 (certificats médicaux des 20 novembre,
13 décembre 2019, 14 janvier, 7 février, 9 mars, 6 avril, 1er mai, 12 juin, 13 juillet, 13 août, 14 septembre, 15 octobre, 30 octobre 30 novembre et 21 décembre 2020).

Pour la période entre le 7 février et le 3 mai 2020, il était mentionné que la capacité de travail de 50% était à répartir sur quatre jours, l'assurée ayant mal supporté une reprise du travail sur plus de deux jours consécutifs.

q. À la demande du Dr D______, la Dre I______ a réalisé le
28 février 2020 une arthrographie par injection lente intra-articulaire, ainsi qu'une IRM complémentaire de la hanche droite de l'assurée. Selon son rapport du 2 mars 2020, la Dre I______ a retenu des arguments arthro-IRM en faveur de lésions, s'intégrant dans un contexte de conflit fémoro-acétabulaire de type « Pincer » avec des lésions scléro-microgéodiques cervico-céphaliques antéro-supérieures du col fémoral, une hypertrophie labrale antéro-supérieure avec une image fissuraire en son sein et un amincissement des revêtements cartilagineux antéro-supérieur et postéro-inférieur.

r. Par formulaire du 3 avril 2020 destiné à la Bâloise, le Dr F______ a indiqué que les troubles à la hanche droite de l'assurée tels que décrits par l'IRM du
28 février 2020 étaient, avec un degré de vraisemblance prépondérante, au moins une suite partielle de l'accident.

s. Le 25 mai 2020, le docteur K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a rempli un questionnaire adressé à la Bâloise par lequel il a mentionné que l'assurée suivie depuis le 10 janvier 2020, souffrait d'un état de stress post-traumatique (code F43.1 de la 10e édition de la classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes de l'Organisation mondiale de la santé de 2008 (ci-après : CIM-10) et d'un épisode dépressif moyen sans syndrome somatique (code F32.1 CIM-10). Il retenait un sentiment de détresse important, une tristesse, une anhédonie partielle, une anxiété parfois massive, un sentiment de perte de contrôle lié à l'expérience de mort imminente durant l'accident. L'assurée présentait des flashbacks, des cauchemars et des reviviscences de l'accident. Elle possédait un bon réseau social, une excellente intégration et motivation dans la profession. La symptomatologie évoquée était uniquement en lien avec l'accident. En raison d'une symptomatologie massive et invalidante et de son impact sur le présent, le traitement de l'état de stress post-traumatique par thérapie de type EMDR (pour Eye Movement Desensibilisation and Reprocessing, soit la désensibilisation et le retraitement des informations par les mouvements oculaires) était indiqué. Une durée probable de trois à six mois pourrait permettre d'atteindre une résolution complète de l'accident et retrouver un fonctionnement adapté. La thérapie de type EMDR débutée par l'assurée le 10 janvier 2020 pouvait être poursuivie, le pronostic apparaissant favorable à terme. L’incapacité de travail était de 50% et résultait de l'accident subi. La récupération pouvait certainement être complète à long terme.

t. Dans un rapport médical intermédiaire du 25 mai 2020 destiné à la Bâloise, le
Dr J______ a retenu à titre de diagnostics un polytraumatisme sur AVP (pour accident de la voie publique) avec une lacération hépatique, une fracture de l'anneau pelvien, des fractures du sacrum et des branches ilio-pubiennes et un PTSD (pour Post-Traumatic Stress Disorder) secondaire. Il a noté une persistance des douleurs à la hanche droite avec une limitation fonctionnelle et douloureuse. Pour décrire les limitations physiques, il a indiqué « douleurs à la mobilisation, diminution du périmètre de marche ». Une incapacité de travail de 50% était retenue.

u. Après avoir examiné l'assurée, la docteure L______, spécialiste FMH en médecine physique et rééducation, a établi un rapport intermédiaire le 2 juin 2020. Elle a retenu à titre de diagnostics une limitation fonctionnelle douloureuse post-traumatique de la hanche droite, une fracture du cotyle bilatérale et une fracture du sacrum, avec un traitement conservateur au 24 octobre 2018. Le traitement suivi par l'assurée consistait en de la physiothérapie et une auto-rééducation. L'évolution était favorable suite à une prise en charge ciblée de physiothérapie couplée à des exercices d'auto-rééducation. Les limitations physiques concernaient les positions contraignantes pour la hanche, comme l'alternance de positions au sol, le port de charges lourdes, ainsi que les longs déplacements. Une incapacité de travail de 50% était retenue avec une reprise à 100% à partir du 17 juin 2020.

v. Le 16 juin 2020, le docteur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a examiné l’assurée. Dans son rapport du même jour, il a fait état d'une persistance des douleurs au niveau de la hanche droite qui apparaissaient surtout lors de la flexion de la hanche. Ces douleurs devenaient de plus en plus handicapantes. Il avait observé, au bilan radiologique (bassin de face et axiale de la hanche droite) et à l’arthro-IRM de la hanche droite, un remodelage d'une fracture du mur antérieur avec une discrète marche d'escalier intra-articulaire, celle-ci étant associée à des lésions micro-géodiques au niveau de la jonction cervico-céphalique du col fémoral, ainsi qu'une image fissuraire du labrum antéro-supérieur. Il a conclu à une persistance de douleurs intra-articulaires à une année et demie d'une fracture du mur antérieur.

w. Le 25 juin 2020, le docteur N______, spécialiste FMH en radiologie, a procédé à une arthrographie et à une coxométrie par CT-scan de la hanche droite. Dans son rapport du 10 juillet 2020 faisant suite à l'examen de coxométrie, le
Dr N______ a retenu un comblement de la jonction cervico-céphalique fémorale antéro-supérieure et une rétrotorsion du col fémoral pouvant prédisposer à un conflit fémoroacétabulaire de type « cam » s'accompagnant d'une rétroversion du cotyle supérieur pouvant prédisposer à un conflit associé de type « Pincer », ainsi qu'une épine iliaque antéro-inférieure de type II pouvant prédisposer à un conflit
extra-articulaire associé de type subspine.

Une infiltration à la hanche droite a également été réalisée.

x. Selon un rapport médical du 21 juillet 2020 du Dr M______, l'assurée avait décrit une nette amélioration au niveau des douleurs suite à l'infiltration de la hanche droite, lui permettant de reprendre la marche et la randonnée. S'agissant du côté gauche, elle commençait à ressentir des coxodynies localisées surtout au niveau du pli de l'aine. Le résultat de la coxométrie avait montré une rétroversion de l'acétabulum avec une rétroversion focale du fémur. Ces deux rétroversions étaient associées à un conflit subspine avec, comme observé à l'arthro-IRM, une déchirure du labrum. Un deuxième avis avait été demandé au docteur O______, médecin à la clinique de chirurgie orthopédique de l'hôpital cantonal de Fribourg (ci-après : HFR), pour un avis et une éventuelle prise en charge chirurgicale.

y. Dans un formulaire du 6 octobre 2020, le Dr F______ a retenu que la causalité entre les troubles à la hanche droite de l'assurée et l'accident du 24 octobre 2018 étaient probables s'agissant de la fracture bilatérale des cotyles. Il a indiqué que des circonstances étrangères à l'accident avaient contribué à l'atteinte de l'assurée, soit un conflit fémoro-patellaire droit. L'accident avait provoqué une aggravation décisive dans un contexte de fracture du cotyle. Il ne s'est pas prononcé sur la nécessité de la mise en place d'expertises orthopédique et psychiatrique.

B. a. Par courrier du 12 octobre 2020, la Bâloise a informé l'assurée qu'elle entendait la soumettre à une expertise médicale orthopédique qui serait confiée au
docteur P______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, spécialiste en chirurgie de la main. Était joint au courrier le questionnaire adressé à l'expert.

b. L'assurée a validé le choix de l'expert et fait parvenir à la Bâloise par courriel du 16 octobre 2020 des questions complémentaires à l'expert qui ont été transmises à ce dernier par courrier du 20 octobre 2020.

c. Un CT-scan des membres inférieurs a été effectué le 23 octobre 2020 par le service de radiologie de l'HFR qui a mis en évidence une calcification millimétrique unique dans la partie supérieure du labrum, bilatéralement, de discrets signes dégénératifs en faveur d'une coxathrose bilatérale débutante et une absence d'asymétrie de la trophicité musculaire, avec un dispositif intra-utérin en place et une absence d'hernie inguinale (rapport médical du 23 octobre 2020 du service de radiologie de l'HFR).

d. Le 2 novembre 2020, le Dr O______ a établi un rapport médical suite à la consultation et au bilan radiographique du 23 octobre 2020 et à des examens effectués le 28 octobre 2020. Il a relevé que l'assurée présentait des douleurs au niveau du grand trochanter lorsqu'elle se mettait sur le côté. Une infiltration de la hanche droite avait soulagé les douleurs pendant environ trois semaines mais celles- ci étaient réapparues peu à peu. Les activités sportives telles que la nage et la zumba étaient impossibles. L'assurée pouvait travailler au maximum à un taux de 50% en raison des douleurs de la hanche. Le résultat de la radiographie du bassin de face et du scanner du 23 octobre 2020 avait démontré une rétroversion crâniale du cotyle, une absence de signe pour une arthrose, une torsion de la jambe droite diminuée à 0° et une torsion fémorale du côté gauche à 10°. L'examen du
28 octobre 2020 avait révélé une lésion du labrum à la face latérale, sans signe de lésion cartilagineuse, et une réduction de l'offset au niveau antéro-supérieur fémoral avec des kystes. Il a conclu que l'assurée présentait un conflit fémoro-acétabulaire sur la base d'une torsion fémorale réduite du côté droit plus marqué qu'à gauche, avec une morphologie de type « cam » depuis l'accident avec des douleurs. La proposition de traitement discutée avec l'assurée pour réduire les douleurs était une source de correction de l'offset, une suture du labrum avec une luxation chirurgicale selon la mobilité de la hanche.

e. Le 8 décembre 2020, le Dr P______ a rendu son rapport d'expertise médicale orthopédique sous forme de réponses aux questions qui lui avaient été soumises par la Bâloise et l'assurée. Il y a résumé certaines pièces du dossier et procédé à une anamnèse, ainsi qu’à un examen clinique de l'assurée. Il a retenu les diagnostics de malformation constitutionnelle des deux hanches plus symptomatique à droite qu'à gauche ; une absence de séquelle post-traumatique objectivable du bassin et du genou gauche ; un status après un écrasement du tronc le 24 octobre 2018 avec une lacération hépatique, des fractures non déplacées du mur antérieur des deux cotyles et de l'aileron sacré droit et une contusion bénigne du genou gauche. Il a considéré en synthèse que l'assurée présentait une malformation constitutionnelle
coxo-fémorale bilatérale prédominant à droite avec un conflit fémoro-acétabulaire de type « cam ». Ces troubles étaient restés asymptomatiques jusqu'à l'accident du 24 octobre 2018. Son bassin avait subi une fracture non déplacée du mur antérieur des deux cotyles et de l'aileron sacré droit qui avaient été traitées conservativement avec une guérison sans séquelle radiologique visible, notamment sans coxarthrose. Cet accident avait également causé une contusion du genou gauche, sans lésion anatomique objectivable. En 2020, l'évolution était défavorable avec l'apparition d'une limitation fonctionnelle douloureuse de la hanche droite et des douleurs de la hanche gauche, puis d'une tendinite de la patte d'oie au genou gauche. Les examens radiologiques avaient montré les troubles constitutionnels des deux hanches, prédominant à droite où une intervention chirurgicale était prévue. Aucune lésion post-traumatique n'avait pu être décelée. Les diverses fractures non déplacées du bassin et la contusion du genou gauche avaient guéri sans la moindre séquelle
post-traumatique objectivable et le statu quo sine avait dû être retrouvé au plus tard à la fin de l'année 2019. Les troubles résiduels, en péjoration depuis le début de l'année 2020, ne pouvaient plus être mis en lien de causalité naturelle pour le moins probable avec l'accident et étaient par conséquent uniquement liés à l'état pathologique préexistant de nature malformatif. Les premiers symptômes de cette malformation auraient pu survenir n'importe quand, soit en raison de la dynamique de la lésion elle-même, soit en réponse à des événements ordinaires ou extraordinaires de la vie telles que des contusions ou des fractures non déplacées du bassin. Quant à l'évolution de la problématique physique, celle-ci ne concernait plus les suites de l'accident, mais uniquement l'état pathologique préexistant pour lequel une intervention chirurgicale avait été retenue.

f. Le 13 décembre 2020, l'assurée a adressé un courrier à son employeur, sollicitant une autorisation pour la reprise d'une activité accessoire qui lui permettrait de reprendre une activité à 100%. Son incapacité de travail dans l'activité usuelle étant de 50%, cette activité accessoire lui permettrait de rester engagée contractuellement à 100%.

Était notamment jointe à sa demande une attestation médicale du 4 décembre 2020 du Dr K______ certifiant que l'assurée ne présentait pas de restrictions sur le plan psychique à exercer ses mandats externes et que cette activité n'était pas à même d'impacter négativement ses capacités physique et psychique dans le cadre de son activité actuelle à la crèche.

g. Le 14 décembre 2020, la Bâloise a adressé une copie de l'expertise du 8 décembre 2020 à l'assurée, ainsi qu'aux Drs K______, M______, L______ et J______. Ces derniers n'ont transmis aucune observation.

h. Le 20 janvier 2021, le Dr O______ a procédé à une luxation chirurgicale de la hanche droite de l'assurée avec une correction de l'offset.

i. La Bâloise a refusé de prendre en charge cette opération.

j. Par courrier électronique du 24 janvier 2021 adressé à la Bâloise, l'assurée a contesté les conclusions de l'expertise du 8 décembre 2020 et a fait part de diverses remarques, notamment des corrections sur ses anamnèses personnelle,
socio-professionnelle et actuelle, ainsi que sur ses plaintes. En substance, elle a expliqué que les premiers symptômes étaient apparus à la suite de l'accident du
24 octobre 2018 et avaient depuis fluctué en fonction de l'intensité des efforts fournis lors de l'augmentation de son taux de travail et de ses tentatives de reprises d'activités physiques. Les douleurs n'avaient pas été prises en considération jusqu'au diagnostic posé suite aux examens demandés par le Dr M______ en juin 2020. Elle estimait que l'hypothèse du médecin-conseil de la Bâloise était plus que plausible. Cet accident avait eu pour conséquence de détériorer un état maladif, toutefois cet état était équilibré et n'avait jusqu'alors jamais posé de problème. Cette maladie lui était d'ailleurs totalement inconnue. La violence du choc subie lors du sinistre pouvait sans aucun doute être le facteur déclencheur des symptômes et de l'aggravation de la maladie et, par conséquent, mettre en exergue l'existence d'une corrélation. Elle s'interrogeait également sur une éventuelle mise en œuvre d'une expertise psychique sur laquelle la Bâloise ne s'était pas prononcée, estimant qu'il était évident que l'accident et la manière dont sa souffrance avait été prise en considération avaient encore un impact sur son psychique.

k. Le 23 février 2021, la Bâloise a transmis les observations de l'assurée au Dr P______, suite à quoi l'expert a répondu, par complément d'expertise du
12 mars 2021, que lesdites remarques ne contenaient pas d'élément nouveau susceptible de faire changer les conclusions de son expertise médicale.

l. L'assurance perte de gains de l’employeur, soit la Bâloise, a versé des indemnités journalières à celui-ci dès le 25 janvier 2021.

m. Par réponses du 15 avril 2021 aux questions soumises par la Bâloise, le Dr K______ a indiqué que l'assurée souffrait d'un trouble de l'adaptation, réaction dépressive légère (code F 43.20 CIM-10), lequel s'inscrivait dans le cadre de la lourde opération subie à la suite de l’accident. Il a retenu une stabilisation globale du tableau psychique avec quelques épisodes de baisse thymique et d'anxiété résiduelle sans impact majeur sur le fonctionnement global. D'un point de vue psychiatrique, la capacité de travail était de 100%. L'assurée bénéficiait de bonnes ressources mobilisables, d'une motivation préservée et d'une bonne aptitude à la communication. Il avait vu la patiente le jour même et la prochaine consultation était prévue pour le 22 avril 2021.

n. Dans son rapport du 27 avril 2021, suite à la consultation de l'assurée du même jour pour un contrôle à trois mois post-opératoire, le Dr O______ a indiqué que l'assurée ressentait encore des douleurs, surtout nocturnes, ainsi que lors des passages de la position assise à la position debout. Elle se plaignait également d'un dérouillage matinal et se trouvait toujours en arrêt de travail à 100%. Des radiographies avaient montré une ostéotomie trochantérienne consolidée, une ostéotomie de rotation fémorale avec de bons signes de consolidation, ainsi qu'une absence de déplacement secondaire.

C. a. Par décision du 5 novembre 2021, la Bâloise a, sur le plan somatique, mis fin à aux prestations au 31 décembre 2019, dit que l'incapacité de travail n'était plus du ressort de l'assurance-accidents dès le 1er janvier 2020 et, sur le plan psychiatrique, mis fin aux prestations au 30 avril 2021. Elle s'est entièrement fondée sur l'expertise du 8 décembre 2020 du Dr P______ et sur le rapport du 15 avril 2021 du Dr K______. Elle a considéré que, d'un point de vue somatique, dès la fin de l'année 2019, les troubles dont souffrait l'assurée n'étaient plus en relation avec l'accident du
24 octobre 2018 et que, d'un point de vue psychiatrique, au 15 avril 2021, les troubles présentés n'étaient plus dus à l'accident et n'avaient pas d'influence sur sa capacité de travail.

b. Le 6 décembre 2021, l'assurée, représentée par un conseil, a formé opposition à la décision précitée, concluant notamment que ses atteintes étaient en relation de causalité avec l'accident du 24 octobre 2018 et que le statu quo n'avait pas été atteint. Elle a également demandé la mise en œuvre d'une expertise, faisant valoir que les appréciations et les conclusions du Dr P______ étaient contestées, en raison d'erreurs et contradictions figurant dans son rapport. Sur le plan psychique, elle a relevé que le Dr K______ avait indiqué que le trouble de l'adaptation et la réaction dépressive légère s'inscrivaient dans le cadre de la lourde opération subie à la suite de son accident, de sorte que ce trouble était bien en relation de causalité avec le sinistre. Elle a ajouté que le suivi auprès du Dr K______ était encore en cours et lui permettait une amélioration de son état psychique.

Elle a joint un avis du 25 novembre 2021 du docteur Q______, spécialiste FMH en orthopédie et traumatologie, chirurgien orthopédiste, relevant qu’elle présentait une fracture articulaire des deux cotyles et des troubles dégénératifs préexistants. Il a conclu que, de l'avis du Dr M______, la fracture avait consolidé pour le côté droit avec une petite marche d'escalier ce qui témoignait d'une lésion violente qui avait déstabilisé cet état de façon définitive, ce que confirmait également l'anamnèse. Dans un courriel complémentaire du 25 novembre 2021, le Dr Q______ a précisé que l'assurée souffrait d'un trouble congénital aux deux hanches avec un syndrome fémoro-acétabulaire, état prédisposant à l'arthrose de la hanche. Sans l'accident, elle n'aurait pas souffert au moment présent de ses hanches. Il n'était pas prédictible que l’intéressée aurait souffert de manière certaine d'ici 10 ou 20 ans. La situation actuelle de l'assurée était la conséquence de l'accident en raison de la survenance d'une fracture de la paroi antérieure du cotyle, donc une fracture articulaire, pour les deux hanches. Les lésions cartilagineuses du cotyle avec un trouble dans le fonctionnement de l'articulation, associées au traumatisme de la fracture, provoquaient les douleurs.

c. Par courrier du 21 décembre 2021, l'employeur a résilié le contrat de travail de l'assurée au 31 mars 2022, mentionnant que suite au changement de position de la Bâloise et à l'interruption de travail depuis le 1er janvier 2020, les prestations de l'assurance perte de gains seraient épuisées le 31 mars 2022.

d. Par courrier du 18 février 2022, l'assurée a complété son opposition, persistant dans ses conclusions. Étaient joints à son courrier :

-          un rapport médical du Dr O______ du 11 janvier 2022 dans lequel il a indiqué avoir constaté chez l'assurée des déformations de la hanche présentes avant l'accident qui pouvaient potentiellement mais pas nécessairement entraîner des douleurs. Dans la mesure où il n'y avait aucune plainte avant l'accident, il partait du principe que les plaintes actuelles étaient apparues suite à l'accident et qu'il était possible qu'une problématique similaire ait pu apparaître sans accident mais il ne pouvait l'affirmer avec certitude ;

-          un rapport médical de la Dre L______ du 6 janvier 2022 dans lequel elle a indiqué avoir suivi l'assurée depuis le 19 mars 2020 et a conclu que si la morphologie de l'articulation coxo-fémorale sous-tendant à la problématique de conflit fémoro-acétabulaire était congénitale, il n'en était pas de même en ce qui concernait les lésions structurelles osseuses et labrales. Ces lésions étaient à l'origine des douleurs dont souffrait l'assurée. Elle a relevé une décompensation du conflit fémoro-acétabulaire qui était consécutive au traumatisme. Sans l'accident, il était très probable que cette symptomatologie douloureuse ne soit jamais survenue ou alors à un âge beaucoup plus avancé. Il existait un lien de causalité entre l'accident et la problématique de l'assurée.

e. Le 5 mai 2022, la case manager a rendu son rapport final dans lequel elle a conclu que l'assurée restait toujours limitée même si les douleurs avaient clairement diminué et que l'opération était considérée comme réussie. La modification de l'axe du fémur avait des conséquences handicapantes sur sa vie quotidienne. Elle s'entraînait à marcher droit ce qui lui provoquait des douleurs au genou. L'intervention chirurgicale pratiquée au niveau de la hanche droite devrait aussi être réalisée à moyen terme du côté gauche. Elle ne pouvait pas poursuivre dans son activité en raison de limitations mécaniques. Elle reprenait toutefois quelques heures dans son activité accessoire. Une mesure d'orientation de l'assurance-invalidité devrait se mettre en place de juin à septembre 2022.

f. Par courrier du 5 mai 2023, la Bâloise a transféré l'opposition de l'assurée au
Dr P______, lui demandant de se déterminer.

Par complément d'expertise du 10 mai 2023, l'expert a considéré que les rapports médicaux des Drs O______ et L______ ne fournissaient aucune preuve d'une aggravation anatomique objectivable de l'état pathologique préexistant. En retenant un lien de causalité naturelle avec l'accident, cela relèverait du syllogisme post hoc ergo propter hoc.

g. Par décision du 24 mai 2023, la Bâloise a rejeté l'opposition de l’assurée et mis fin à ses prestations, au 31 décembre 2019 sur le plan somatique et au 30 avril 2021 sur le plan psychiatrique. Elle a précisé que, sur le plan somatique, la date de la fin de prise en charge effective des frais médicaux correspondait au 5 janvier 2021 et celle des indemnités journalières au 31 décembre 2020 et, sur le plan psychiatrique, les frais de traitement thérapeutique avec le Dr K______ cessaient le 30 avril 2021.

En se fondant sur l'expertise du Dr P______, elle a considéré que, sur le plan somatique, les lésions causées par l'accident avaient évolué de façon favorable avec une guérison sans séquelle au plus tard à fin 2019. L'accident avait révélé et non causé la malformation constitutionnelle des deux hanches.

Sur le plan psychique, la Bâloise s'est basée sur le rapport du Dr K______ du
25 mai 2020 et a retenu que la thérapie nécessitée par l’assurée devait durer trois à cinq mois. En prenant en charge les prestations avec les frais de thérapie préconisée par le Dr K______ jusqu'à fin décembre 2021, elle avait excédé la durée de thérapie indiquée dans le rapport du 25 mai 2020. Aucun lien de « causalité adéquate » ne pouvait être retenu au-delà de cette date (« fin décembre 2021 »).

D. a. Le 26 juin 2023, l'assurée, représentée par un avocat, a interjeté recours contre cette décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle a conclu, sous suite de frais et dépens, préalablement, à la mise en œuvre d'une expertise afin de déterminer si, et dans l'affirmative quand, le statu quo sine avait été atteint, et si son état de santé s'était stabilisé. Principalement, elle a conclu à l’annulation de la décision litigieuse, à ce qu'il soit dit et constaté que son état de santé était en relation de causalité avec l'accident du 24 octobre 2018, que le statu quo sine n'avait pas été atteint et que son état de santé n'était pas stabilisé, que la Bâloise continue à prendre en charge ses traitements médicaux, dès le
1er janvier 2020 sur le plan somatique et dès le 1er mai 2021 sur le plan psychiatrique, et lui verse des indemnités journalières dès le 1er janvier 2020.

À l'appui de sa position, elle a fait valoir que l'expertise du 8 décembre 2020 du Dr P______, en plus de contenir des erreurs, lacunes et contradictions, présentait un défaut de motivation, l'expert n'ayant pas répondu à ses observations, et ne s'étant pas prononcé sur les arguments des médecins spécialistes dont les rapports médicaux avaient été produits à l'appui de son opposition. Elle a maintenu qu'il n'était pas possible de retenir au degré de la vraisemblance prépondérante que, sans son accident, elle aurait présenté les mêmes problématiques et que les troubles qu'elle présentait encore n'étaient plus en relation de causalité avec l'accident. Cela n'était tout au plus qu'une simple possibilité, ce qui était insuffisant. Sa situation n'était pas stabilisée et la situation médicale n'était pas claire au regard des affirmations contradictoires de l'expert et des avis divergents d'au moins
trois médecins spécialistes, notamment sur le prétendu manque de causalité entre les troubles somatiques et psychiques actuels et l'accident du 24 octobre 2018 et le statu quo sine.

Était joint au recours un bordereau de pièces, parmi lesquelles figurait notamment un rapport du 6 mars 2023 du Dr M______ qui indiquait avoir revu la recourante suite à son opération de janvier 2021 avec le Dr O______ d'un conflit fémoro-acétabulaire. Il était rappelé que la patiente gardait depuis des douleurs au niveau du pli de l'aine, ainsi que des douleurs au niveau de la bandelette iliotibiale. Une infiltration intra-articulaire avait été réalisée, donnant un effet positif pendant plusieurs heures, avec une reprise des douleurs par la suite. Une autre infiltration au niveau de la bandelette iliotibiale avait soulagé les douleurs pendant six semaines. Suite à l'arthro-IRM réalisée en octobre 2022, il avait relevé une lésion du labrum sans atteinte cartilagineuse. La patiente présentait des douleurs qui persistaient et qui ne s'étaient plus améliorées par la physiothérapie. Elle avait des douleurs notamment en fin d'amplitude lors de la marche. Au vu des douleurs persistantes à plus d'une année de l'intervention avec une infiltration
intra-articulaire ayant donné un effet positif, il proposait de faire un
second look
arthroscopique afin de s'assurer de la stabilité du labrum.

b. Par réponse du 22 août 2023, l'intimée a conclu au rejet du recours, retenant que le statu quo sine des troubles somatiques résultant de l'accident avait été atteint le 31 décembre 2019, étant rappelé que les indemnités journalières avaient été versées à l'employeur jusqu'au 31 décembre 2020 et que la prise en charge effective des frais médicaux avait pris fin le 5 janvier 2021.

En substance, sur le plan somatique, l'intimée a fait valoir que l'expertise du 8 décembre 2020 du Dr P______ avait été réalisée dans le strict respect de la loi et aboutissait à des résultats convaincants de sorte qu'il convenait de lui accorder pleine valeur probante. Les rapports médicaux des Drs D______, I______, L______, M______ et O______ avaient été expressément examinés par l'expert et ce dernier n'avait pas retenu que la fracture consolidée pour le côté droit avec une petite marche d'escaliers témoignait de l'accident qui aurait déstabilisé l'état de façon définitive. Au contraire, il avait relevé une absence de toute séquelle post-traumatique objectivable et les lésions structurelles osseuses et labrales ne résultaient aucunement d'une aggravation anatomique objectivable de l'état pathologique préexistant.

Sur le plan psychiatrique, elle s'était notamment fondée sur le rapport du
15 avril 2021 du Dr K______ qui avait retenu une capacité de travail totale, de sorte qu'à tout le moins dès le 30 avril 2021, la recourante ne souffrait plus de troubles psychiques en relation de causalité naturelle avec l'accident. S'agissant du lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l'accident, ce dernier devait être qualifié de gravité moyenne et seul le critère du caractère particulièrement impressionnant de l'accident pouvait éventuellement être retenu, sans toutefois présenter une importance particulièrement marquante. Les rapports médicaux du Dr K______ des 25 mai 2020 et 15 avril 2021 permettaient d'établir que le caractère impressionnant de l'accident n'avait aucunement occasionné des troubles psychiatriques qui se seraient manifestés de manière particulièrement marquante. Les autres critères jurisprudentiels n'étant pas remplis, le lien de causalité adéquate ne pouvait légitimement plus être retenu, à tout le moins, postérieurement au
30 avril 2021.

c. Dans sa réplique du 19 octobre 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions. Elle a rajouté que, suite à l'intervention chirurgicale du
20 janvier 2021, il n'avait pas été procédé à la suture du labrum, qui était donc resté endommagé, comme l'avait révélé le Dr M______ dans son avis médical du 6 mars 2023. Cette intervention n'avait pas permis d'éliminer ses douleurs et elle était toujours suivie à la clinique de chirurgie orthopédique de l'HFR. Elle subissait régulièrement des infiltrations, qui n'amélioraient toutefois pas son état. Un suivi au centre antalgique à Genève avait été organisé et débuterait le 18 décembre 2023.

À l'appui de sa réplique, la recourante a produit trois nouvelles pièces :

-          le protocole opératoire définitif du 20 janvier 2021 du Dr O______ qui indiquait notamment qu'il avait été procédé à une luxation chirurgicale de la hanche droite avec une correction d'offset cervico-céphalique et une ostéotomie de rotation fémorale. Il est précisé « au niveau du cotyle, mise en évidence d'une lésion à la jonction chondro-labrale entre 01h00 et 03h00, avec un labrum qui reste toutefois stable » ;

-          un rapport de consultation du 19 septembre 2023 du Dr O______ qui retenait comme diagnostic principal une persistance des douleurs à la hanche droite suite à la luxation chirurgicale de la hanche avec une correction d'offset
cervico-céphalique et une ostéotomie sous-trochantérienne de rotation pour un conflit fémoro-acétabulaire mixte sur une morphologie de type « cam » et une torsion fémorale diminuée. Des infiltrations intra-articulaires de la hanche droite avaient été effectuées les 4 avril et 27 juin 2023. L'anamnèse indiquait que le Dr O______ revoyait la patiente pour un contrôle à six mois post infiltration intra-articulaire de la hanche droite. Elle avait décrit une diminution des douleurs pendant une période d'un mois, comme lors de la précédente infiltration, mais présentait à nouveau des douleurs au niveau du pli de l'aine, descendant jusqu'à la face antérieure du genou, avec une gêne à la marche. Elle était également suivie à Genève pour des douleurs à la hanche gauche. Elle avait bénéficié d'une infiltration par « PRP » en mai 2023 et, six jours avant la consultation, d'une infiltration au niveau du tenseur fascia lata, sans effet. En raison de la persistance des douleurs, il avait procédé à une nouvelle infiltration intra-articulaire de la hanche droite. La prochaine étape serait une prothèse de la hanche par voie antérieure, toutefois une nouvelle infiltration était nécessaire afin de juger des effets potentiels de l'opération ;

-          une convocation au centre d'antalgie des HUG pour le 18 décembre 2023.

d. Dans sa duplique du 6 novembre 2023, l'intimée a maintenu sa position. Elle a notamment fait valoir qu'à teneur du protocole opératoire du 20 janvier 2021, le
Dr O______ ayant constaté un labrum qui restait stable, c'était vraisemblablement pour ce motif que le chirurgien n'avait pas procédé à une suture du labrum qui n'était aucunement resté endommagé. Le Dr P______ avait discuté de la question du labrum dans son expertise du 8 décembre 2020 et avait retenu, après analyse et interprétation des examens radiologiques, l'absence de toute séquelle post-traumatique objectivable du bassin ou du genou gauche, à savoir que la lésion du labrum n'était pas en relation de causalité naturelle avec l'accident.

e. Par courrier du 21 mai 2024, la chambre de céans a informé les parties de son intention de confier une expertise orthopédique au professeur
R______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

f. Le 13 juin 2024, la recourante a exposé ne pas avoir de motif de récusation. Elle a sollicité qu’une question complémentaire soit soumise à l’expert et que celui-ci soit invité à s’entourer de l’avis d’un spécialiste en psychiatrie et psychothérapie.

g. Par pli du 20 juin 2024, l’intimée a relevé que l’expert n’était pas titulaire d’une certification de l’association Médecine d’assurance suisse et indiqué ne pas avoir de motif de récusation. Elle a requis des modifications de la mission d'expertise.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du
20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

1.3 Selon l’art. 58 LPGA, applicable par renvoi de l’art. 1 al. 1 LAA, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du recours (al. 1). Si l’assuré ou une autre partie sont domiciliés à l’étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse; si aucun de ces domiciles ne peut être déterminé, le tribunal des assurances compétent est celui du canton où l’organe d’exécution a son siège (al. 2).

1.4 En l'occurrence, la recourante, domiciliée en France, a travaillé en dernier lieu pour un employeur sis à Genève.

La compétence de la chambre de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

Le recours ayant été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

3.             La modification du 25 septembre 2015 de la LAA est entrée en vigueur le
1er janvier 2017.

Dans la mesure où l'accident est survenu après cette date, le droit de la recourante aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci- après dans leur nouvelle teneur.

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestations pour accident au-delà du 31 décembre 2019 pour ses atteintes somatiques et au-delà du 30 avril 2021 pour ses atteintes psychiatriques, en particulier sur le bien-fondé de la décision du
24 mai 2023 par laquelle l'intimée a considéré que les troubles présentés au-delà de ces dates n’étaient plus en relation de causalité avec l'accident du 24 octobre 2018.

6.              

6.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, si la loi n'en dispose pas autrement, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle.

Est réputée accident toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA ; cf.
ATF 142 V 219 consid. 4.3.1 ; 129 V 402 consid. 2.1).

6.2 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

6.2.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 et 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335
consid. 2b/bb). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

6.2.2 En vertu de l’art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l’atteinte à la santé n’est que partiellement imputable à l’accident.

Lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consécutivement à un accident, le devoir de l'assurance-accidents d'allouer des prestations cesse si l'accident ne constitue pas la cause naturelle (et adéquate) du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui existerait même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine).
A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il s'est manifesté à l'occasion de l'accident ou a été aggravé par ce dernier (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) sur le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales
(ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.2).

À cet égard, le Tribunal fédéral a rappelé dans un arrêt récent qu'à supposer l'implication chez l'assuré de troubles dégénératifs préexistants, si leur origine exclusivement maladive n'a pas été établie, même s'il existait un état maladif antérieur, l'assureur-accidents est tenu de prendre en charge les suites de l'accident aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli (arrêt du Tribunal fédéral 8C_461/2023 du 8 février 2024 consid. 4.3.1.1).

6.2.3 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 ; 125 V 456 consid. 5a et les références).

6.2.4 En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a ;
117 V 359 consid. 5d/bb ; arrêt du Tribunal fédéral U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

En revanche, il en va autrement lorsque des symptômes, bien qu'apparaissant en relation de causalité naturelle avec un événement accidentel, ne sont pas objectivables du point de vue organique. Dans ce cas, il y a lieu d'examiner le caractère adéquat du lien de causalité en se fondant sur le déroulement de l'événement accidentel, compte tenu, selon les circonstances, de certains critères en relation avec cet événement (ATF 117 V 359 consid. 6 ; 117 V 369 consid. 4b ;
115 V 133 consid. 6 ; 115 V 403 consid. 5). En présence de troubles psychiques apparus après un accident, on examine les critères de la causalité adéquate en excluant les aspects psychiques (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa ; 115 V 403
consid. 5c/aa).

En application de la pratique sur les conséquences psychiques des accidents
(ATF 115 V 133), l’examen de ces critères doit se faire au moment où l'on ne peut plus attendre de la continuation du traitement médical en rapport avec l'atteinte physique une amélioration de l'état de santé de l'assuré, ce qui correspond à la clôture du cas selon l'art. 19 al. 1 LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_683/2017 du 24 juillet 2018 consid. 5). L’amélioration de l’état de santé se détermine notamment en fonction de l’augmentation ou de la récupération probable de la capacité de travail réduite par l’accident, étant précisé que l’amélioration attendue par la continuation du traitement médical doit être significative. Des améliorations mineures ne suffisent pas. Cette question doit être examinée de manière prospective. La clôture séparée d’un cas d’assurance-accidents pour les troubles psychiques d’une part et les troubles somatiques d’autre part n’entre pas en ligne de compte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3 et les références).

Dans la mesure où le caractère naturel et le caractère adéquat du lien de causalité doivent être remplis cumulativement pour octroyer des prestations
d'assurance-accidents, la jurisprudence admet de laisser ouverte la question du rapport de causalité naturelle dans les cas où ce lien de causalité ne peut de toute façon pas être qualifié d'adéquat. En revanche, il n'est pas admissible de reconnaître le caractère adéquat d'éventuels troubles psychiques d'un assuré avant que les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle avec l'accident en cause soient élucidées au moyen d'une expertise psychiatrique concluante (ATF 147 V 207 consid. 6.1 et les références).

Par conséquent, si le juge des assurances sociales - saisi d’un examen du lien de causalité adéquate à l'égard de troubles psychiques alors que la question de la causalité naturelle a été laissée ouverte -, parvient à la conclusion que l'appréciation de l'assureur-accidents est erronée sur un ou plusieurs critères et que l'admission du lien du causalité adéquate pourrait entrer en considération, il doit, avant de statuer définitivement sur ce dernier point, instruire ou faire instruire par
l'assureur-accidents les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle (ATF 148 V 138 consid. 5.5).

 

7.              

7.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b).

7.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450
consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

7.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux
(ATF 125 V 351 consid. 3b).

7.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; 125 V 351 consid. 3b/bb).

7.3.2 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

7.3.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

7.3.4 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; SVR 2008 IV n. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 2.3 et les références).

8.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

9.              

9.1 La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n'est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

9.2 Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations d'assurance sociales, le fardeau de la preuve incombe en principe à l'assureur-accidents
(ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). À cet égard, est seul décisif le point de savoir si, au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 146 V 271
consid. 4.4), les causes accidentelles d'une atteinte à la santé ne jouent plus aucun rôle, ne serait-ce même que partiel (ATF 142 V 435 consid. 1), et doivent ainsi être considérées comme ayant disparu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_343/2022 du
11 octobre 2022 consid. 3.2 et les références).

Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a précisé qu'avant que la question du fardeau de la preuve ne se pose, les faits doivent être clarifiés correctement et complètement dans le cadre du principe inquisitoire de l'assureur-accident (arrêt du Tribunal fédéral 8C_379/2023 du 9 janvier 2024 consid. 4.3.2).

10.         Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

11.          

11.1 En l'espèce, la décision litigieuse du 24 mai 2023 met un terme aux prestations d'assurance tant sur le plan somatique que psychiatrique, qui avaient été accordées à la recourante suite à son accident du 24 octobre 2018.

À titre liminaire, il n'est pas contesté qu'il y a eu un accident, au sens de
l'art. 4 LPGA, ayant causé de multiples lacérations hépatiques et des fractures du sacrum droit et des cotyles bilatéraux et une contusion au genou gauche, entraînant une incapacité de travail complète de la recourante à partir du 24 octobre 2018, puis de 50% à partir du 16 septembre 2019. Le lien de causalité entre ces atteintes et l'accident du 24 octobre 2018 a été admis par l'intimée qui a pris en charge le cas, versant des indemnités journalières et prenant en charge les frais médicaux et de traitement tant sur le plan somatique que sur le plan psychiatrique. Demeure litigieuse la question de savoir si c'est de bon droit que l'intimée a mis un terme à ces prestations.

S'agissant des troubles somatiques, l'intimée a mis fin aux prestations au
31 décembre 2019, prenant en charge toutefois les frais médicaux jusqu'au
5 janvier 2021 et le versement des indemnités journalières jusqu'au
31 décembre 2020. Elle s'est entièrement fondée sur le rapport d'expertise orthopédique du 8 décembre 2020 du Dr P______, ainsi que sur ses compléments d'expertise des 12 mars 2021 et 10 mai 2023, qui concluaient que le statu quo sine des troubles somatiques résultant de l'accident avait été atteint le 31 décembre 2019. La recourante présentait une malformation constitutionnelle des deux hanches, plus prédominante à droite, qui était restée asymptomatique jusqu'à l'accident du
24 octobre 2018, celui-ci lui causant une fracture non déplacée du mur antérieur des deux cotyles et de l'aileron sacré droit, et entraînant une contusion du genou gauche. Ces lésions ayant été traitées conservativement avec une guérison sans séquelle radiologique visible, le statu quo sine avait dû être retrouvé au plus tard à la fin de l'année 2019 et les troubles résiduels ne pouvaient plus être mis en lien de causalité naturelle pour le moins probable avec l'accident et étaient, par conséquent, uniquement liés à l'état pathologique préexistant de nature malformatif.

S'agissant des troubles psychiatriques, l'intimée a mis un terme à la prise en charge des prestations à compter du 30 avril 2021, avec une fin effective des frais liés au traitement thérapeutique préconisé par le Dr K______ au début du mois de
janvier 2022. Dans sa décision litigieuse, l'intimée s'est intégralement basée sur le rapport du 25 mai 2020 du Dr K______ qui concluait que l'état de stress
post-traumatique et l'épisode dépressif moyen sans syndrome somatique nécessitaient une thérapie pour une durée de trois à six mois pour une résolution complète de l'accident et retrouver un fonctionnement adapté, de sorte qu'à tout le moins, au-delà de la fin du mois de décembre 2021, aucun lien de causalité adéquate ne pouvait être retenu entre l'événement du 24 octobre 2018 et les troubles psychiques de la recourante. Dans sa réponse du 22 août 2023, l'intimée s'est fondée sur le rapport du 15 avril 2021 du Dr K______ qui indiquait une capacité de travail de 100%.

11.2 En l'occurrence, sur le plan somatique, la chambre de céans est d'avis que le rapport d'expertise orthopédique du 8 décembre 2020 et ses compléments des
12 mars 2021 et 10 mai 2023 ne peuvent pas se voir reconnaître une pleine valeur probante et ce, pour les raisons suivantes.

11.2.1 En premier lieu, le Dr P______ indique que les diverses fractures non déplacées du bassin et la contusion du genou gauche ont guéri sans la moindre séquelle post-traumatique objectivable et que le statu quo sine a dû être retrouvé au plus tard à la fin de l'année 2019. Les premiers symptômes de cette malformation auraient d'ailleurs pu survenir n'importe quand, soit en raison de la dynamique de la lésion elle-même, soit en réponse à des événements ordinaires ou extraordinaires de la vie telles que des contusions ou des fractures non déplacées du bassin (expertise p. 11). Il retient encore qu'indépendamment des fractures du bassin, la symptomatologie de la malformation constitutionnelle des deux hanches a été révélée et non pas causée dans les suites de l'accident du 24 octobre 2018 et que cette maladie doit être considérée comme l'unique cause des coxalgies résiduelles depuis le début 2020 (expertise, p. 12). S'agissant de l'évolution à prévoir de la problématique physique, l'expert répond qu'elle ne concerne plus les suites de l'accident, mais uniquement l'état pathologique « dont on connaît l'évolution lentement arthrogène pour lequel une intervention chirurgicale a été retenue » (expertise, p. 16).

Cette conclusion ne convainc toutefois pas la chambre de céans. En effet, lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou apparaît consécutivement à un accident, l'assureur-accident a le devoir d'allouer les prestations jusqu'à ce que l'accident ne constitue plus la cause naturelle (et adéquate) du dommage, notamment lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui existerait même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (cf. consid. 6.2.2 supra).

Or, l'expert ne donne aucune explication permettant de comprendre en quoi l'état de santé de la recourante est similaire à celui qui existerait par suite d'un développement ordinaire si l'accident du 24 octobre 2018 ne s'était pas produit. Il ne fait que constater les troubles d'origine maladive sans toutefois donner des explications sur cette maladie et les conséquences qu'elle peut avoir. Singulièrement, il ne répond pas à la question de savoir si cette malformation des hanches peut être à l'origine d'éventuelles douleurs invalidantes telles que celles présentées par la recourante. Il n'a fait que mentionner « l'évolution lentement arthrogène » de la maladie, sans commenter cet état pathologique.

Sans une explication probante à cet égard, l'on peine ainsi à comprendre comment l'expert a pu retenir un statu quo sine. Dans ce contexte, le seul fait que les lésions ont guéri sans séquelle post-traumatique objectivable ne suffit pas pour retenir un statu quo sine à partir de la fin 2019.

11.2.2 En deuxième lieu, la lésion du labrum qui a été mise en évidence par le rapport du 21 juillet 2020 du Dr M______, suite à la coxométrie réalisée le 25 juin 2020, n'a pas été investiguée par l'expert. Cette lésion était déjà suspectée en juin 2019, après la consultation du 19 juin 2019 du Dr H______, qui a recommandé d'investiguer une éventuelle lésion du labrum au vu du contexte traumatique et des douleurs coxo-fémorales à droite (cf. rapport de consultation du 24 juillet 2019). Devant la persistance des douleurs à la hanche droite, des investigations supplémentaires ont été effectuées et ont mis en lumière cette lésion labrale (cf. rapports des 16 juin et 21 juillet 2020 du Dr M______ et rapport du 10 juillet 2020 du Dr N______), qui a été confirmée par d'autres rapports médicaux versés au dossier (cf. rapports des 2 novembre 2020 du Dr O______ et 6 mars 2023 du Dr M______).

La question ayant été complètement omise par l'expertise, il n’est donc pas clair pour la chambre de céans si cette lésion est d'origine traumatique ou dégénérative et si elle est à l’origine des douleurs coxo-fémorales comme le suspectait le Dr H______ (rapport de consultation du 24 juillet 2019) et comme l’affirme la Dre L______ (rapport médical du 6 janvier 2022). Cela étant, quand bien même cette atteinte serait d'origine maladive, il y a lieu de déterminer si l'accident du 24 octobre 2018 a, au degré de la vraisemblance prépondérante, provoqué une aggravation de l'état antérieur et, dans l'affirmative, jusqu'à quelle date.

11.2.3 En troisième lieu, l’expert ne s’est pas non plus déterminé de manière satisfaisante sur les avis divergents figurant au dossier et sur ceux qui lui ont été soumis pour compléments d’expertise. Étaient notamment versés au dossier le rapport médical du 16 juin 2020 du Dr M______ qui a observé un remodelage d’une fracture du mur antérieur avec une discrète marche d’escalier intra-articulaire ; les rapports médicaux du Dr Q______ du 25 novembre 2021 qui a conclu à une fracture consolidée pour le côté droit avec une petite marche d’escalier témoignant d’une lésion violente qui avait déstabilisé de façon définitive l’état de la recourante et que sans l’accident, la recourante n’aurait pas souffert de ses hanches ; un rapport médical de la Dre L______ du 6 janvier 2022 qui a conclu que, bien que le conflit fémoro-acétabulaire était congénital, il n’en allait pas de même des lésions structurelles osseuses et labrales qui étaient à l’origine des douleurs dont souffrait la recourante, et qui a relevé une décompensation dudit conflit consécutive au traumatisme.

Le Dr P______ s'est contenté d'indiquer, par complément d'expertise du
10 mai 2023, que les Drs O______ et L______ ne fournissaient aucune preuve d’une aggravation anatomique objectivable de l’état pathologique préexistant et qu’en retenant un lien de causalité naturelle avec l’accident, cela relèverait du syllogisme du post hoc ergo propter hoc. Il était toutefois attendu de l’expert qu’il émette un avis précis sur les éléments soulevés par ces médecins spécialistes. Le remodelage de la fracture, la déstabilisation définitive de l'état de la recourante en raison d'une lésion violente, les lésions structurelles osseuses et labrales à l'origine des douleurs, ainsi que la décompensation du conflit fémoro-acétabulaire constituent des éléments objectivement vérifiables et a priori pertinents.

11.2.4 En dernier lieu, l'expert explique que la malformation constitutionnelle des deux hanches doit être considérée comme l'unique cause des coxalgies résiduelles depuis le début de 2020 (expertise, p. 12). Il explique de façon plus précise dans l'anamnèse actuelle de la recourante qu'à la fin de l'année 2019, les lombalgies et les gonalgies gauches avaient disparu (expertise p. 5) et qu'en 2020, l'évolution avait été défavorable avec l'apparition d'une limitation fonctionnelle douloureuse de la hanche droite et des douleurs de la hanche gauche, puis d'une tendinite de la patte d'oie au genou gauche (expertise p. 11).

Il sied toutefois de constater que ces assertions sont fortement mises en doute et contredites par les pièces du dossier et l'état de fait retenu dans l'expertise. Durant l'année 2019, de nombreux rapports médicaux ont été établis et ont fait état des douleurs et limitations de la recourante : en juin 2019, le Dr H______ a relevé que l'évolution de la recourante était tout à fait favorable, mais que la patiente présentait des douleurs lombaires basses, lombo-sacrées bilatérales et aux articulations sacro-iliaques, une douleur antérieure du genou droit depuis qu'elle avait augmenté l'intensité de la marche, ainsi que quelques douleurs dynamiques au niveau du pli inguinal à droite (cf. rapport de consultation du 24 juillet 2019) ; le 1er juillet 2019, le Dr D______ a mentionné que bien que la recourante allait globalement bien et que les lombalgies s'étaient améliorées, elle ressentait toujours des douleurs au genou gauche dans le compartiment fémoro-tibial interne, la position squat monopodal gauche impossible et la position accroupie difficile
(cf. note de consultation du 1er juillet 2019) ; le 27 août 2019, le Dr D______ a retenu une amélioration au niveau des genoux qui s'était détériorée suite au port de talons de la recourante, avec de nouvelles douleurs, une gêne permanente et des pics douloureux occasionnels, et a diagnostiqué une contusion du ménisque interne gauche (cf. note de consultation du 27 août 2019) ; le 8 octobre 2019, le Dr D______ a certes noté une excellente évolution durable depuis l'infiltration du mur méniscal le 3 septembre 2019, mais il a également indiqué qu'avec la reprise de son activité professionnelle à un taux de 50%, la recourante s'était sentie rapidement limitée par son dos (cf. note de consultation du
8 octobre 2019).

Si l'évolution globale de l'état de la recourante semble favorable, celle-ci a toutefois signalé, en fin d'année 2019, une aggravation de son état en lien avec la reprise de son activité, notamment lorsqu'elle a commencé à travailler pendant deux jours et demi consécutifs dès le mois de décembre 2019. Il ne peut être retenu que la limitation fonctionnelle douloureuse de la hanche soit apparue en 2020, alors que l'expert lui-même fait état d'une intensification des douleurs résiduelles de l'aine droite le 16 décembre 2019 (expertise, p. 5), admettant que les coxalgies étaient persistantes, du moins les douleurs à l'aine droite. De plus, si les lombalgies avaient certes diminué, la recourante se trouvait encore limitée au niveau lombaire en décembre 2019, de sorte qu'il apparaît erroné de retenir la disparition des lombalgies à la fin de l'année 2019.

11.3 Il résulte des considérations qui précèdent que le rapport d'expertise du Dr P______ ne peut se voir reconnaître une pleine valeur probante, en raison des lacunes et contradictions qu'il comporte.

11.4 Dans ces circonstances, la chambre de céans n'est pas en mesure de se prononcer de manière définitive sur le rétablissement d'un éventuel statu quo sur le plan somatique.

Il se justifie dès lors de procéder à des investigations complémentaires par la mise en œuvre d'une expertise orthopédique.

11.5 Les parties n'ont pas récusé l'expert proposé. Compte tenu de la remarque de l’intimée, la chambre de céans relèvera que le Prof. R______ est un spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatique, qu’il dispose d’une grande pratique dans le domaine de l’orthopédie et qu’il a déjà été mandaté par la chambre de céans pour expertiser les atteintes à la hanche et leur lien de causalité avec un accident (cf. ATAS/323/2023 et ATAS/184/2023).

S'agissant des demandes d’ajouts ou de modifications des questions à poser à l'expert, il en sera tenu compte dans la mesure jugée nécessaire.

Enfin, la suite de la procédure est réservée s’agissant du volet psychique.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Préparatoirement :

I. Ordonne une expertise médicale orthopédique. La confie au professeur
R______.

Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A. Prendre connaissance du dossier de la cause.

B. Si nécessaire prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée, notamment de la docteure L______ et des docteurs D______, M______, J______ et O______.

C. Examiner la personne expertisée et, si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D. Etablir un rapport comprenant les éléments et les réponses aux questions suivants :

1. Anamnèse détaillée

2. Plaintes de la personne expertisée

3. Status et constatations objectives

Les troubles subjectifs (plaintes) sont-ils expliqués par les constatations objectives ?

4. Diagnostics précis

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1 Dates d'apparition

4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.1 Dates d'apparition

4.3 L’état de santé de la personne expertisée est-il stabilisé ?

4.3.1 Si oui, depuis quelle date ?

5. Causalité

5.1 Les atteintes constatées sont-elles, au degré de la vraisemblance prépondérante requis (probabilité de plus de plus de 50%) en rapport de causalité avec l’accident ?

5.1.1 Veuillez motiver votre réponse pour chaque diagnostic posé.

5.2 Le statu quo ante a-t-il été atteint pour chaque diagnostic (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui existait immédiatement avant l’accident) ?

5.2.1 Veuillez indiquer, cas échéant, la date du statu quo ante pour chaque diagnostic posé.

5.3 L’accident a-t-il décompensé un état maladif préexistant ?

5.3.1 Plus précisément, l'accident a-t-il décompensé une malformation constitutionnelle coxo-fémorale ?

5.4 Le statu quo sine a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui serait survenu tôt ou tard, même sans l’accident par suite d’un développement ordinaire) ?

5.4.1 Si oui, à partir de quel moment le statu quo sine a-t-il été atteint ?

5.4.2 Veuillez motiver précisément les raisons pour lesquelles un statu quo sine peut être retenu.

6. Limitations fonctionnelles

6.1 Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

6.2 Dates d'apparition

7. Capacité de travail

7.1 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans son activité habituelle, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50%) avec l’accident et comment cette capacité de travail a-t-elle évolué depuis l’accident ?

7.1.1 Si la capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

7.2 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans une activité adaptée, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50%) avec l’accident ?

7.2.1 Veuillez indiquer / décrire les types d’activités adaptées.

7.2.2 Si cette capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

7.2.3 La personne expertisée subit-elle une diminution de rendement dans l'exercice d'une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles ? Si oui, pour quelle raison et quel est le pourcentage de cette diminution de rendement ?

8. Traitement

8.1 Examen du traitement suivi et du traitement chirurgical subi ou à subir par la personne expertisée et analyse de son adéquation

8.1.1 En particulier, sur la nécessité de la luxation chirurgicale de la hanche droite avec correction de l'offset du 20 janvier 2021 subie par la personne expertisée pour le traitement de ses atteintes

8.2 Propositions thérapeutiques et/ou chirurgicales et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée

8.3 Peut-on attendre de la poursuite du traitement médical et/ou chirurgical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée ?

8.4 Si non, à partir de quel moment ne peut-on plus attendre de la continuation du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée (état final atteint) ?

8.5 Un traitement médical est-il nécessaire pour le maintien de l'état de santé actuel ? Le cas échéant, lequel ?

9. Atteinte à l’intégrité

Existe-t-il une atteinte importante et durable à l’intégrité physique, mentale ou psychique ? Dans l’affirmative, pouvez-vous déterminer le pourcentage de cette atteinte selon le barème des indemnités pour atteinte à l’intégrité (annexe 3 OLAA notamment) ?

10. Appréciation d'avis médicaux du dossier

10.1 Êtes-vous d'accord avec les avis de la Dre L______ et des
Drs M______, Q______, et O______ ? En particulier avec le fait que l'accident du 24 octobre 2018 a déstabilisé de façon définitive l'état de la personne expertisée et que sans cet accident cette dernière n'aurait pas souffert des hanches, et que les lésions structurelles et labrales sont à l'origine des douleurs dont souffre la personne expertisée ?

10.2 Êtes-vous d'accord avec l’avis du Dr P______, en particulier avec le fait que l’état de santé de la personne expertisée est influencé par des états maladifs antérieurs à l’accident, à savoir une malformation constitutionnelle des deux hanches, prédominant à droite, dont la symptomatologie a été révélée et non pas causée dans les suites de l’accident et que cette maladie doit être considérée comme l’unique cause des coxalgies résiduelles depuis le début de l’année 2020, avec pour conséquence que le statu quo sine a pu être retrouvé au plus tard à la fin de l’année 2019 ?

11. Autres facteurs

Suite à l’accident du 24 octobre 2018 :

11.1 Les lésions apparues sont-elles graves ?

11.2 Ces lésions sont-elles propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles psychiques ?

11.3 Ces lésions ont-elles nécessité des traitements continus spécifiques et lourds ? Si oui, lesquels ? Pendant quel intervalle de temps ?

11.4 Des difficultés et complications importantes sont-elles apparues au cours de la guérison ? Si oui, lesquelles et avec quelles conséquences ?

11.5 Existe-t-il des douleurs physiques persistantes ? Depuis quand ? Atteignent-elles une intensité particulière ?

12. Quel est le pronostic ?

13. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?

14. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles

E. Invite l’expert à déposer son rapport en trois exemplaires dans les meilleurs délais auprès de la chambre de céans.

F. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

 

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Joanna JODRY

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le