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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3140/2023

ATAS/466/2024 du 17.06.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3140/2023 ATAS/466/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 juin 2024

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

représenté par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1968, originaire du Portugal, titulaire d’une autorisation d’établissement C, marié, père de quatre enfants, nés en 2003, 2008, 2011 et 2014, a exercé une activité d’aide de cuisine, à un taux de 100% depuis le 1er septembre 2011 au 30 juin 2021, à B______ SA.

b. Depuis le 6 octobre 2020, l’assuré a été en incapacité de travail totale en raison de pathologies des épaules. Il a bénéficié d’indemnités journalières versées par HELVETIA ASSURANCES, assurance maladie perte de gain, jusqu’au 31 août 2021.

B. a. Le 6 avril 2021, l’assuré a déposé une demande de prestations d’invalidité.

b. Le 3 mai 2021, la docteure C______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecine du sport, a attesté d’une bonne évolution de l’épaule droite et d’une reprise d’activité envisagée pour fin juin.

c. La docteure D______, spécialiste FMH en médecine générale, a rempli un rapport médical AI le 22 juin 2021 et attesté d’une incapacité de travail totale dans l’activité habituelle. Une activité qui tenait compte de l’état de santé devrait exclure un travail prolongé et répétitif avec les membres supérieurs au‑dessus du plan des épaules, de la force ou des mouvements répétitifs du bras à hauteur en position de porte-à-faux prolongée et être sans port de charge de plus de 5 kg. L’aptitude à la réadaptation était fixée au 30 juin 2021.

L’assuré présentait une capsulite rétractile et tendinopathie dégénérative du sus‑épineux à l’épaule droite, laquelle avait été douloureuse depuis octobre 2020. Dès mai 2021, l’assuré s’était plaint de l’épaule gauche qui avait montré une bursite discrète et une tendinopathie du sus-épineux et du long biceps.

d. Le 2 juillet 2021, la Dre C______ a estimé qu’une reprise du travail était possible dès le 1er juillet 2021, à un taux de 50%.

e. Le 9 juillet 2021, le docteur E______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, a conclu à la nécessité d’investiguer les lésions à l’épaule droite et a évoqué une surcharge tendineuse à l’épaule gauche. La capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans un poste adapté (pas de port de charge répété de plus de 5 kg avec le bras droit, pas de mouvements répétitifs du bras droit au-dessus des épaules).

f. Le 21 juillet 2021, le docteur F______, spécialiste FMH en médecine interne et médecin conseil d’HELSANA ASSURANCES, a considéré que l’assuré pouvait, de suite, exercer une activité ne sollicitant pas le bras droit (port de charge et mouvements répétitifs).

g. Le 7 novembre 2021, le docteur G______, spécialiste FMH en rhumatologie, du Centre médico chirurgical (SA), consulté à la demande du docteur H______, spécialiste FMH en médecine générale, a posé le diagnostic de tendinopathie de l’épaule droite et amyotrophie séculaire des supra et infra-épineux. L’assuré ne pouvait reprendre sa précédente activité professionnelle, ni une autre activité sollicitant de manière importante le membre supérieur droit. Dans une activité sollicitant peu l’épaule, la capacité de travail pouvait être de 50%.

h. Le 17 novembre 2021, l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) a pris en charge une mesure d’intervention précoce sous forme de coaching / orientation pour une durée de cinq - six mois.

i. Le 5 mai 2022, le Dr H______ a rempli un rapport médical AI, en attestant d’une incapacité de travail totale de l’assuré dans toute activité, en raison de lésions tendineuses au niveau de l’épaule droite. L’assuré avait été opéré le 6 décembre 2021. Il ne devait pas porter de lourdes charges.

j. Le 13 mai 2022, le docteur I______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a rempli un rapport médical AI, attestant d’une intervention par lui-même le 6 décembre 2021 (ténodèse de la longue portion du biceps), avec une lente évolution favorable. L’assuré pouvait avoir une activité de plongeur à temps partiel, avec adaptation du poste. La capacité de travail était de 50% dans l'activité habituelle dès septembre 2022 et de 80% dans une activité sédentaire de bureau dès juillet 2022.

k. Le 18 octobre 2022, le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci‑après : SMR) a retenu une incapacité de travail totale dans toute activité depuis octobre 2020 et une capacité de travail de 80% dès juillet 2022 dans une activité adaptée (pas de position des membres supérieurs au-dessus de l’horizontale et un port de charge limité à 3 kg, sans activité sollicitant de manière répétitive l’épaule droite et impliquant d’utiliser des escabeaux, escaliers et échafaudages). L’ancienne activité n’était plus exigible.

l. Le 23 mars 2023, l’OAI a fixé dès le 1er juillet 2022 le degré d’invalidité de l’assuré à 0%, le salaire sans invalidité étant de CHF 51'379.- et le salaire d’invalide (à un taux de 80%), de CHF 52'258.-.

m. Par projet de décision du 31 mars 2013, l’OAI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité (degré d’invalidité de 100%) du 1er octobre 2021 au 30 avril 2022, en raison de l’incapacité de travail totale de l’assuré du 6 octobre 2020 au 30 juin 2022. Dès le 1er juillet 2022, le degré d’invalidité était nul en raison d’une capacité de travail de 80% dans une activité adaptée.

n. Le 23 avril 2023, l’assuré s’est opposé au projet de décision.

o. Le 27 avril 2023, le Dr I______ a attesté d’une épaule droite toujours douloureuse, d’une difficulté à travailler les bras au-dessus du plan des épaules, à effectuer des gestes répétitifs et porter des charges supérieures à 2 kg. Une activité sédentaire était exigible d’abord à 50%, ensuite à 100%.

p. Le 22 mai 2023, le SMR a indiqué qu’il modifiait ses conclusions, compte tenu de l’avis de l’orthopédiste traitant, dans le sens que la capacité de travail était de 50% dès le 1er juillet 2022, dans une activité strictement adaptée, soit : éviter toute activité nécessitant la position des membres supérieurs en-dessus de l’horizontale, pousser / tirer / porter (max 2 kg), les activités sollicitant de manière répétitive l’épaule droite, ainsi que les activités impliquant monter / descendre des escaliers, escabeaux, échafaudages (risque de déséquilibre et chute).

q. Le 26 mai 2023, l’OAI a fixé le degré d’invalidité de l’assuré, dès juillet 2022, à 41,88% (salaire sans invalidité de CHF 51'079.- et avec invalidité de CHF 29'686.-).

r. Par décision du 28 août 2023, l’OAI a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er octobre 2021 au 30 septembre 2022 et une rente d’invalidité de 30% d’une rente entière dès le 1er octobre 2022.

C. a. Le 28 septembre 2023, l’assuré, représenté par un avocat, a recouru à l’encontre de la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, en concluant à son annulation et à l’octroi des prestations d’invalidité, notamment d’une rente entière d’invalidité. Il fait valoir que le rapport du 26 juin 2021 de la Dre C______ (sic) indiquait des atteintes à l’épaule gauche et celui du Dr E______, de juillet 2021, une surcharge tendineuse de l’épaule gauche. Quant au Dr H______, il retenait des douleurs aux deux épaules. Or, l’atteinte à l’épaule gauche n’avait pas été prise en compte par le SMR.

Il a communiqué un rapport du Dr H______ du 8 juillet 2023, attestant d’une incapacité de travail totale de l’assuré dans toute activité, vu les douleurs chroniques. Il suivait l’assuré en raison de douleurs aux deux épaules. Le diagnostic était celui de tendinopathie de l’épaule droite. Il était d’accord avec les limitations fonctionnelles retenues en avril 2023 par le Dr I______.

b. Le 27 septembre 2023, le Dr H______ a indiqué que depuis la décision de l’OAI, l’état de santé de l’assuré s’était aggravé.

c. Le 24 octobre 2023, l’OAI a conclu au rejet du recours, en relevant que les limitations fonctionnelles retenues concernaient les deux membres supérieurs.

d. Le 21 décembre 2023, l’assuré a répliqué, en requérant de la chambre de céans qu’elle sollicite l’avis du Dr H______, lequel n’avait pas répondu à sa demande de rapport médical complémentaire.

e. À la demande de la chambre de céans, le Dr I______ a rendu un rapport médical le 10 avril 2024. Le dernier examen de l’assuré datait d’avril 2023. L’assuré présentait une tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite (en post-opératoire) et une tendinopathie fissuraire du tendon de la longue portion du biceps gauche. Les activités manuelles étaient impossibles et une capacité de travail dans une activité adaptée était exigible, avec une reprise à 50% dans un premier temps. Le statut était définitif dès le 1er juillet 2022.

f. Le 3 mai 2024, le recourant a observé qu’il fallait tenir compte de son âge avancé (61 ans) et qu’aucun emploi n’était exigible au vu de ses nombreuses limitations fonctionnelles, lesquelles n’avaient pas été entièrement prises en compte par l’OAI qui ne considérait pas les affections à l’épaule gauche.

g. Le 6 mai 2024, le SMR a constaté que les conclusions du Dr I______ rejoignaient celles retenues par le SRM le 22 mai 2023.

h. Le 7 mai 2024, l’OAI s’est rallié à l’avis du SMR précité.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

1.3  

1.3.1 Lorsqu’un droit à la rente a pris naissance antérieurement au 1er janvier 2022, un éventuel passage au nouveau système de rentes linéaire s'effectue, pour les bénéficiaires de rente qui n’avaient pas encore 55 ans à cette date, conformément à la let. b des dispositions transitoires de la LAI relatives à la modification du 19 juin 2020 (ci-après : dispositions transitoires de la LAI).

Pour ces assurés, l’ancien système de rente est maintenu jusqu’au moment où, lors d’une révision, le taux d’invalidité subit une modification d’au moins 5 points de pourcentage (cf. art. 17 al. 1 LPGA) et que cette modification comporte soit une augmentation du taux d’invalidité qui a pour effet une augmentation de la quotité de la rente, soit une diminution du taux d’invalidité qui a pour effet une diminution de la quotité de la rente (cf. let. b al. 1 et 2 dispositions transitoires de la LAI). Dans ce cas, la fraction de la rente est adaptée aux nouvelles dispositions et transférée dans le nouveau système de rentes linéaire. En revanche, si la modification du taux d’invalidité n’atteint pas 5 points de pourcentage, il n’y a pas révision ; le taux d’invalidité reste inchangé et l’assuré conserve son droit à la rente en l’état, à savoir soumis aux dispositions de l’ancien droit. Tel est également le cas si la modification du taux d’invalidité est supérieure ou égale à 5 points de pourcentage et que l’application du nouveau système conduit soit à une diminution de la quotité de la rente en cas d’augmentation du taux d’invalidité, soit à une augmentation de la quotité de la rente en cas de diminution du taux d’invalidité (OFAS, circulaire relative aux dispositions transitoires concernant le système de rente linéaire valable dès le 1er janvier 2022 [circ. DT DC AI], ch. 2004 à 2008 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023).

1.3.2 En l’occurrence, le recourant était âgé de moins de 55 ans au 1er janvier 2022 et son droit à la rente a pris naissance avant cette date. Conformément aux dispositions transitoires précitées et vu que la modification déterminante ayant justifié la révision de la rente d’invalidité est survenue postérieurement au 1er janvier 2022 (soit en l’espèce au 1er juillet 2022), les dispositions du nouveau droit sont applicables.

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la réduction, dès le 1er octobre 2022, de la rente entière d’invalidité allouée au recourant, à un taux de 30% d’une rente entière.

3.              

3.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

3.2 Selon l’art. 28b al. 1 LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière. Pour un taux d’invalidité de 42%, la quotité de la rente est de 30% (art. 28b al. 4 LAI).

3.3 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que la rente d'invalidité est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d'invalidité de l'assuré :

a.    subit une modification d'au moins 5 points de pourcentage, ou

b.    atteint 100%.

Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA (ATF 149 V 91 consid. 7.5 et les références). La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important. Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à l'accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et les références). Une amélioration de la capacité de gain ou de la capacité d'accomplir les travaux habituels de l'assuré n'est déterminante pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu'à partir du moment où l'on peut s'attendre à ce que l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre (art. 88a al. 1 RAI). Le fardeau de la preuve quant à cette amélioration de la capacité de travail incombe à l’administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.2 et les références).

3.4 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

3.4.1 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

3.4.2 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

3.4.3 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

3.5 Lorsqu'il s'agit d'examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s'ensuit que pour évaluer l'invalidité, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l'offre de la main d'œuvre (VSI 1998 p. 293). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Il est certes possible de s'écarter de la notion de marché équilibré du travail lorsque, notamment l'activité exigible au sens de l'art. 16 LPGA, ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existe quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait de l'employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (RCC 1991 p. 329 ; RCC 1989 p. 328 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.2). Le caractère irréaliste des possibilités de travail doit alors découler de l'atteinte à la santé – puisqu'une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d'une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2).

D'après ces critères, il y a lieu de déterminer dans chaque cas et de manière individuelle si l'assuré est encore en mesure d'exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Ni sous l'angle de l'obligation de diminuer le dommage, ni sous celui des possibilités qu'offre un marché du travail équilibré aux assurés pour mettre en valeur leur capacité de travail résiduelle, on ne saurait exiger d'eux qu'ils prennent des mesures incompatibles avec l'ensemble des circonstances objectives et subjectives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1066/2009 du 22 septembre 2010 consid. 4.1 et la référence).

3.6 Lorsqu'il s'agit d'évaluer l'invalidité d'un assuré qui se trouve proche de l'âge donnant droit à la rente de vieillesse, il faut procéder à une analyse globale de la situation et se demander si, de manière réaliste, cet assuré est en mesure de retrouver un emploi sur un marché équilibré du travail. Cela revient à déterminer, dans le cas concret qui est soumis à l'administration ou au juge, si un employeur potentiel consentirait objectivement à engager l'assuré, compte tenu notamment des activités qui restent exigibles de sa part en raison d'affections physiques ou psychiques, de l'adaptation éventuelle de son poste de travail à son handicap, de son expérience professionnelle et de sa situation sociale, de ses capacités d'adaptation à un nouvel emploi, du salaire et des contributions patronales à la prévoyance professionnelle obligatoire, ainsi que de la durée prévisible des rapports de travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_366/2014 du 19 novembre 2014 consid. 5.2).

Pour apprécier les chances d'un assuré proche de l'âge de la retraite de mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché de l'emploi, il convient de se placer au moment où l'on constate que l'exercice (partiel) d'une activité lucrative est exigible du point de vue médical, soit dès que les documents médicaux permettent d'établir de manière fiable les faits y relatifs (ATF 146 V 16 consid. 7.1 ; 145 V 2 consid. 5.3.1 ; 138 V 457 consid. 3). Le fait que la capacité résiduelle de travail a été recouvrée à une date antérieure, toutefois sans avoir encore été établie par des documents médicaux fiables, n'est en revanche pas déterminant (arrêt du Tribunal fédéral 8C_305/2023 du 29 février 2024 consid. 5.4).

4.              

4.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

4.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).

5.              

5.1 En l’occurrence, l’intimé a retenu, sur la base de l’avis de l’orthopédiste traitant du recourant, le Dr I______, une capacité de travail nulle dans toute activité dès le 6 octobre 2020 et de 50% dans une activité adaptée, dès le 1er juillet 2022. Dès cette date, le degré d’invalidité était de 42%.

Le recourant conteste la capacité de travail de 50% retenue depuis le 1er juillet 2022, au motif que son état de santé n’a pas été correctement évalué, en particulier que l’atteinte à son épaule gauche n’a pas été prise en compte.

Le SMR s’est fondé sur l’avis du Dr I______, lequel a opéré le recourant de l’épaule droite le 6 décembre 2021. Ce médecin a retenu des limitations fonctionnelles excluant un travail les bras au‑dessus du plan des épaules, le port de charge de plus de 2 kg et les gestes répétitifs (rapports des 13 mai 2022 et 27 avril 2023). Questionné ensuite par la chambre de céans, le Dr I______ a considéré, le 10 avril 2024, que le recourant présentait également une inflammation des tendons de la coiffe de l’épaule gauche sans signe de déchirure de la coiffe des rotateurs. Compte tenu de l’atteinte bilatérale, les limitations fonctionnelles devaient être élargies, excluant toute activité manuelle. Le Dr I______ a néanmoins confirmé une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles dès le 1er juillet 2022.

Le SMR a suivi les limitations fonctionnelles retenues par le Dr I______ (avis du 22 mai 2023). Ces limitations peuvent être confirmées, étant cependant précisé qu’il convient, au vu du dernier rapport du Dr I______, de compléter celles-ci dans le sens que les activités sollicitant de manière répétitive également l’épaule gauche doivent être évitées.

Les rapports des autres médecins intervenant ne retiennent pas d’autre limitation pertinente, en particulier s’agissant de l’épaule gauche du recourant :

La Dre D______ a fait état le 22 juin 2021 de douleurs à l’épaule gauche survenues fin mai 2021 et d’un diagnostic de bursite discrète et de tendinopathie du sus-épineux et du long biceps. Elle n’a cependant mentionné aucun diagnostic avec répercussion sur la capacité de travail en lien avec l’épaule gauche ; par ailleurs, les limitations fonctionnelles qu’elle cite (limitation dans le travail prolongé et répétitif avec les membres supérieurs au-dessus du plan des épaules, pas de force ou de mouvements répétés des bras à hauteur de position de porte-à-faux prolongée et port de charge inférieur à 15 kg) ne sont pas plus importantes que celles retenues par le SMR.

Quant au Dr E______, il se limite à évoquer une surcharge tendineuse de l’épaule gauche, tout en excluant le diagnostic d’épaule gelée (rapport du 9 juillet 2021).

Le docteur J______, spécialiste FMH en neurologie, mentionne des plaintes à l’épaule gauche depuis avril 2021, sans toutefois indiquer de limitation de mobilité ou de force (rapport du 22 septembre 2021).

Enfin, le Dr H______, outre qu’il ne dispose pas d’une spécialisation en orthopédie ou rhumatologie, a rendu des avis médicaux très succincts. Le 11 mai 2022, il ne mentionne pas de diagnostic en lien avec l’épaule gauche et ne retient, comme limitations fonctionnelles, que le port de charges lourdes ; le 8 juillet 2023, il ne donne aucune explication quant à l’incapacité du recourant à exercer une activité adaptée et ne pose un diagnostic que pour l’épaule droite ; le 27 septembre 2023, il évoque une aggravation de l’état de santé du recourant, laquelle est mentionnée comme étant toutefois postérieure à la décision litigieuse.

Dans ces conditions, selon l’avis du Dr I______, suivi par le SMR, le recourant est apte, dès le 1er juillet 2022, à exercer une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles.

La situation médicale étant clairement établie, la chambre de céans renoncera, par appréciation anticipée des preuves, à l’ordonnance d’une expertise bidisciplinaire rhumatologique et orthopédique, telle que demandée par le recourant.

5.2 Le Dr I______ a émis des doutes sur l’exigibilité d’une activité lucrative, en considérant que le recourant ne maitrisait pas la langue et nécessitait un reclassement. Ces considérations sortent cependant du champ médical.

Quant au recourant, il fait valoir son âge avancé (61 ans). Or, le recourant, né le 1er janvier 1968, avait, au jour de la décision litigieuse du 28 août 2023 non pas 61 ans mais 55 ans. De surcroit, le moment déterminant pour prendre en compte l’âge du recourant est celui où les documents médicaux permettent d’établir de manière fiable la capacité de travail résiduelle. En l’occurrence, celle-ci a été déterminée clairement le 13 mai 2022 par le Dr I______. À cette date, le recourant était âgé de 54 ans, soit un âge éloigné de celui de la retraite retenu par la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée.

5.3 Enfin, le recourant estime que l’activité adaptée à ses limitations fonctionnelles est irréalisable et non exigible, un tel emploi n’existant pas sur le marché du travail. Il relève que le Dr I______ lui-même, dans son dernier avis, estime que son aptitude à retravailler est très limitée, les douleurs étant réveillées par des mouvements répétitifs des bras.

À cet égard, le Tribunal fédéral estime que le marché du travail offre un éventail d’activités légères (arrêt du Tribunal fédéral 9C_303/2022 du 31 mai 2023), dont il convient d’admettre qu’un nombre significatif d’entre elles sont accessibles au recourant sans aucune formation préalable particulière et compatible avec ses limitations fonctionnelles même si celles-ci sont conséquentes, soit l’impossibilité d’élever les bras au‑dessus de l’horizontale, porter des poids de plus de 2 kg et faire des mouvements répétitifs avec les deux bras.

5.4 S’agissant du calcul du degré d’invalidité, d’un taux de 42%, il tient compte d’une capacité de travail du recourant de 50% depuis le 1er juillet 2022. Un abattement de 10% a été appliqué sur le revenu d’invalide en raison d’une activité exigible à un taux de 50%, conformément à l’art. 26bis al. 3 RAI, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2023.

Le recourant n’émet aucun grief à l’égard de ce calcul.

Le degré d’invalidité peut ainsi être confirmé.

Dans la mesure où elle subit une modification de plus de 5 points de pourcentage, la rente d’invalidité doit être révisée au 1er octobre 2022 (art. 17 al. 1 LPGA et 88a RAI), ce qui n’est pas contesté par le recourant.

Un degré d’invalidité de 42% donne droit à une quotité de rente de 30% (art. 28b al. 4 LAI).

Au surplus, on peut relever que dès le 1er janvier 2024, l’abattement sur le revenu d’invalide issu de l’ESS, pour les assurés dont l’activité exigible est d’un taux de 50% ou moins, est de 20% (art. 26bis al. 3 dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2024) et que les dispositions transitoires de cette modification (du 18 octobre 2023) prévoient une procédure de révision pour les cas, comme en l’espèce, où une déduction de 20% n’a pas déjà été appliquée, avec effet au 1er janvier 2024.

6.             Au vu de ce qui précède, le recours ne peut qu’être rejeté.

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner le recourant au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1 bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le