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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1693/2023

ATAS/409/2024 du 06.06.2024 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1693/2023 ATAS/409/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 juin 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

représenté par Me Éric MAUGUÉ, avocat

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en ______ 1969, employé par la société B______ SA en qualité de maçon, a subi une incapacité de travail, pour raison de maladie, qui a débuté le 24 septembre 2019. Groupe Mutuel assurances, agissant en qualité d’assureur perte de gain maladie, a transmis une demande de prestations invalidité complétée par l’assuré, en date du 21 février 2020, à l’office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé).

b. La demande de prestations invalidité mentionnait que l’assuré souffrait d’une hernie discale, depuis la fin du mois d’août 2019. Son médecin traitant était le docteur C______, spécialiste FMH en médecine interne et en rhumatologie.

c. Lors de l’instruction, l’assuré a transmis à l’OAI une lettre de sortie des soins aigus, du département des neurosciences cliniques des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), signée par la docteure D______, médecin cheffe de clinique du service de neurochirurgie, dont il ressortait que l’assuré avait été admis le 9 octobre 2019 pour une lombosciatalgie gauche avec parésie du releveur du pied gauche. Le diagnostic principal posé était une hernie discale L4 – L5 avec compression de racine L5 à gauche. Une IRM du lombosacrée avait été préalablement effectuée, au centre Jean Violette, en date du 3 octobre 2019. Une intervention chirurgicale a été pratiquée le 9 octobre 2019 par la Dre D______ pour une microdiscectomie L4 – L5 gauche sous microscope. L’opération s’est bien déroulée et l’assuré a été renvoyé à son domicile le jour même.

d. À la demande de l’OAI, le Dr C______ a transmis un rapport médical daté du 9 mars 2020, dont il ressortait que l’assuré était en incapacité de travail à 100% depuis le 24 septembre 2019, jusqu’à présent. Le diagnostic ayant une incidence sur la capacité de travail était une sciatique L5 déficitaire sur hernie discale. S’agissant du potentiel de réadaptation et du nombre d’heures de travail par jour qui pouvait raisonnablement être atteint par l’assuré, le Dr C______ renvoyait à la neurochirurgienne, soit la Dre D______. Les limitations fonctionnelles indiquées étaient les suivantes : pas de port de charges égales ou supérieures à 10 kg et pas de marche sur une distance supérieure à un kilomètre.

e. Dans un rapport médical daté du 9 mars 2020 et transmis à l’OAI, la Dre D______ a mentionné la hernie discale et l’opération ainsi qu’une persistance des douleurs au niveau L5. Selon le médecin, une IRM datée du 16 janvier 2020 ne montrait pas de récidive claire. Elle avait proposé un traitement conservateur, avec des infiltrations, ainsi que de la physiothérapie, et mentionnait que les douleurs du pied gauche persistaient et qu’il était possible que le travail de maçon devienne « impossible » pour ce dernier. La situation devait être réévaluée dans les mois qui suivaient. Dans son rapport de consultation ambulatoire de suivi daté du 1er avril 2020 et adressé au Dr C______, la Dre D______ a mentionné que des douleurs résiduelles, après le traitement chirurgical, étaient toujours présentes mais qu’au vu de la bonne évolution, elle arrêtait le suivi neurochirurgical, le patient se disant très content et prêt à retravailler.

f. Le Dr C______ a transmis à l’OAI, en date du 21 septembre 2020, un rapport médical actualisé décrivant une amélioration de la situation depuis son rapport de mars 2020 et une reprise du travail à 100% par l’assuré, qui bénéficiait de restrictions, au bon vouloir de son employeur. Les restrictions et limitations fonctionnelles décrites étaient d’éviter les escaliers de manière répétitive, dès le troisième étage ainsi que le port de charges lourdes, supérieures à 10 kg, de manière répétitive.

g. Dans un questionnaire daté du 21 octobre 2020, l’employeur a confirmé à l’OAI la reprise du travail de l’assuré, dès le 23 mars 2020 à 100%.

h. Par projet de décision du 27 octobre 2020, l’OAI a refusé le droit à une rente d’invalidité. Le projet a été confirmé par une décision datée du 7 décembre 2020, qui est entrée en force.

i. Dès le 24 septembre 2021, l’assuré a subi une nouvelle incapacité de travail pour raison de maladie, suite à de nouvelles douleurs du rachis qui l’ont conduit à consulter à nouveau le Dr C______. Une IRM de la colonne lombo-sacrée du 13 septembre 2021 a été effectuée, sous indication de récidive de sciatique type L4 – L5 gauche chez un patient connu pour une parésie du releveur du pied gauche, depuis 2019, avec opération pour une hernie L4 – L5 postéro latérale gauche migrée caudalement. Le docteur E______, spécialiste FMH en radiologie, a commenté l’IRM avant de conclure à un status post opératoire L4 – L5 gauche sans résidus ou récidive de hernie discale et anomalie de signal d’allure séquellaire de la racine L5 gauche au niveau de son segment récessal. Légère majoration de taille d’une hernie discale L3 – L4 postéro-latérale gauche, avec contact radiculaire L4 gauche ; diminution de la hernie discale L3 – L4 postéro latérale droite et de son effet de masse sur le segment récessal de la racine L4 droite. Par courrier du 19 octobre 2021, le Dr C______ a informé la Dre D______ que l’assuré avait développé, depuis janvier 2021, une cruralgie de plus en plus invalidante du côté gauche, ce qui avait motivé une nouvelle IRM mettant en évidence une aggravation d’une protrusion L3 – L4 avec conflit radiculaire, raison pour laquelle l’assuré devait être revu à la consultation de neurochirurgie.

j. La Dre D______ a examiné l’assuré, en date du 24 février 2022, après quoi elle a fait parvenir un rapport de consultation ambulatoire de suivi au Dr C______. Il en ressortait un diagnostic principal de hernie discale L3 – L4 postéro-latérale gauche avec contact radiculaire L4. Une IRM de la colonne lombaire avait été effectuée, le 17 février 2022, ainsi qu’une radiographie du membre inférieur gauche, le 24 février 2022. La proposition de prise en charge était la suivante : consultation avec la team hanche et arrêt du suivi neurochirurgical.

k. Dans le cadre de l’intervention précoce, et afin d’évaluer les éventuelles mesures à planifier dans sa situation, l’assuré a été convoqué par l’OAI pour un entretien fixé au 5 juillet 2022.

l. À la demande de l’OAI, le Dr C______ a soumis un nouveau rapport médical daté du 10 octobre 2022, dans lequel il indiquait que, depuis son dernier rapport du mois de décembre 2021, l’évolution de l’état de santé de l’assuré montrait la persistance de la parésie des releveurs du pied gauche, accompagnée de névralgies à l’effort de marche. Une prothèse totale de hanche gauche (ci‑après : PTH) avait été posée, par voie postérieure, en date du 15 juin 2022. Il mentionnait également le développement d’une épaule douloureuse droite, sur lésion de la coiffe des rotateurs. Il était interdit à l’assuré de marcher dans les escaliers, de marcher au-delà de 500 m et de porter des charges supérieures à 5 kg.

m. Par courrier du 5 décembre 2022, le Dr C______ a informé l’OAI de l’évolution de l’état de santé de l’assuré : les suites de la PTH gauche étaient progressivement favorables et l’assuré marchait actuellement presque sans boiter ; le problème de l’épaule gauche en lien avec une déchirure du sous-épineux restait présent, malgré la physiothérapie en cours et une récente infiltration sous échographie. Une éventuelle opération chirurgicale était envisagée. Néanmoins, selon le médecin traitant, le plus grand problème concernait les séquelles après cure de hernie discale L4 – L5 en octobre 2019. Bien que la parésie des releveurs du pied gauche ait bien régressé, l’assuré présentait des névralgies nocturnes et surtout à l’effort de marche, en particulier lorsqu’il empruntait des escaliers. Ses douleurs n’étaient pas permanentes mais malgré l’ensemble des moyens thérapeutiques et la rééducation de son membre inférieur gauche, le médecin considérait que les séquelles étaient invalidantes et permanentes et incompatibles avec le travail sur un chantier. Il précisait que le patient était fiable et très motivé et qu’il lui apparaissait justifié qu’une tentative de réadaptation, par exemple comme magasinier, lui soit proposée, si possible au sein de son entreprise.

n. Le service médical régional (ci-après : le SMR) de l’OAI a rendu un rapport, sur deuxième demande de prestations invalidité, en date du 3 janvier 2023. Il a résumé la situation médicale et s’est déterminé en ce sens que la capacité de travail dans l’activité habituelle était nulle dès le 24 septembre 2021, mais elle restait entière dans une activité adaptée respectant l’ensemble des limitations fonctionnelles, dès le 5 décembre 2022. Il concluait comme atteinte principale et incapacitante à une hernie discale L4 – L5 séquellaire et une hernie discale L3 – L4 avec, comme autre atteinte, une coxarthrose gauche traitée par PTH gauche et une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche. Le début de l’incapacité de travail totale était fixé au 24 septembre 2021, ce qui coïncidait avec une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle de maçon, dès cette date. Dans une activité adaptée, le SMR considérait que l’assuré disposait d’une capacité de travail entière dès le 5 décembre 2022 et se déterminait en faveur d’une réadaptation de l’assuré afin qu’il puisse exercer une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, qui étaient les suivantes : pas de port de charges de plus de 5 kg, pas de positions en porte-à-faux du rachis lombaire, pas de vibrations, pas de rotations, pas de flexions ou extensions répétées du rachis lombaire, pas de montée et descente des escaliers, pas de station assise ou debout prolongée, pas de marche prolongée, pas de marche en terrain irrégulier, pas de travaux au-dessus de l’horizontale, pas de position accroupie ou à genoux et pas de travaux en hauteur.

o. En date du 3 janvier 2023, l’OAI a déterminé le degré d’invalidité de l’assuré et l’a fixé à 12.71% en se fondant sur un revenu annuel brut avec invalidité de CHF 65'322.- fondé sur l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) 2020, tableau TA1, niveau de compétence 1, pour un homme, avec une durée hebdomadaire de travail de 41.7 h, et indexation (ci-après : ISS9 du revenu pour l’année 2022. Le revenu sans invalidité, pour un plein temps, était fondé sur le salaire que percevait l’assuré en 2021, avec une indexation en 2022 qui aboutissait à un montant de CHF 74'830.-. Il en résultait une perte de gain de CHF 9'508.- équivalente à un taux d’invalidité de 12.71%, arrondi à 13%.

B.            a. Suite à l’avis médical du SMR, l’OAI a communiqué à l’assuré un projet de décision d’octroi d’une rente d’invalidité entière du 1er septembre 2022 au 31 mars 2023. Il était précisé que l’OAI considérait que l’état de santé avait commencé à s’améliorer dès le 5 décembre 2022, ce qui avait conduit à ce que l’assuré disposât d’une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, dès cette date. À la suite de la comparaison du revenu avant l’atteinte et du revenu après le 5 décembre 2022, dans une activité adaptée, il en résultait une perte de gain de 12.71% ce qui correspondait à un degré d’invalidité arrondi à 13% qui n’ouvrait pas de droit à des prestations invalidité.

b. Par courrier du 14 mars 2023, le mandataire de l’assuré a informé l’OAI qu’il se constituait pour la défense de ses intérêts et demandait une copie intégrale du dossier.

c. Par décision du 14 avril 2023, l’OAI a confirmé les termes du projet de décision ainsi que de la quotité de la rente entière qui serait versée du 1er septembre 2022 jusqu’au 31 mars 2023.

C. a. Par acte de son mandataire, remis au greffe universel en date du 17 mai 2023, l’assuré a interjeté recours contre la décision du 14 avril 2023 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci‑après : la chambre de céans). Il a conclu, préalablement, à ce que l’OAI produise l’intégralité de son dossier ; à ce qu’un délai soit octroyé à l’assuré pour compléter son recours ; à ce que des enquêtes soient ordonnées pour procéder à l’audition du Dr C______, ainsi qu’une audience de comparution personnelle, et enfin à ce qu’une expertise rhumatologique soit ordonnée. À titre principal, il a conclu à l’annulation de la décision du 14 avril 2023 et à ce que l’OAI soit condamné à verser à l’assuré une rente entière d’invalidité, rétroactivement au 1er avril 2023 et pour l’avenir, avec intérêts moratoires à 5% l’an sur les arriérés, le tout sous suite de frais et dépens. Selon l’assuré, les séquelles dont il souffrait étaient invalidantes, permanentes et incompatibles avec un travail sur un chantier. Son médecin traitant avait mentionné qu’une activité adaptée était possible au sein de son entreprise, notamment comme magasinier, mais cette possibilité n’avait pas pu se concrétiser, en raison des limitations fonctionnelles importantes dont il souffrait. Il était encore allégué que son médecin traitant n’avait jamais prétendu qu’il disposait d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée, ce qui ne ressortait que du rapport du SMR. De surcroît, on pouvait se demander si en fonction des importantes limitations fonctionnelles, le recourant disposait encore de possibilités de gain, au vu du marché équilibré du travail, ce qui semblait impossible.

b. Par réponse du 19 juin 2023, l’OAI a persisté dans les termes de sa décision et a conclu au rejet du recours en ce sens que le recourant, malgré ses limitations fonctionnelles, pouvait prétendre à de nombreuses activités qui ne requéraient pas de formation particulière. De surcroît, il estimait que l’instruction du dossier était complète et qu’une expertise rhumatologique n’était pas nécessaire.

c. Par réplique du 13 juillet 2023, le mandataire de l’assuré a transmis à la chambre de céans un nouveau rapport médical établi par le Dr C______ et daté du 19 juin 2023. Dans ce document, le médecin traitant résumait les atteintes à la santé et confirmait que la fonction de magasinier n’avait pas pu être retenue dès lors que ce dernier devait monter plusieurs escaliers et que le poste était considéré comme « trop lourd ». Les limitations fonctionnelles, dès décembre 2022, étaient rappelées et le médecin concluait que l’assuré, qui était un maçon fiable et très volontaire, avait une possibilité de travailler dans une activité adaptée, comme par exemple de petites manutentions ne nécessitant que de petites marches et permettant des changements de position. Néanmoins, malgré le fait que son patient souhaitait reprendre une activité adaptée à 100%, le médecin doutait que cela soit réaliste, compte tenu de l’ensemble des troubles et séquelles qui persistaient. Il concluait en précisant qu’il retenait en tous points les conclusions du SMR de janvier 2023, hormis le taux retenu dans une activité adaptée, qui ne lui paraissait pas être possible au-delà de 50%.

d. Par duplique du 18 juillet 2023, l’intimé a persisté dans ses conclusions en joignant un avis du SMR daté du 17 juillet 2023, qui se prononçait sur le rapport du 19 juin 2023 du Dr C______ et concluait qu’il n’existait pas de raison médicale objective pour modifier sa prise de position, soit l’existence d’une capacité de travail médico-théorique dans une activité adaptée de 100%, dès le mois de décembre 2022.

e. Par courrier du 30 août 2023, la chambre de céans a informé les parties qu’elle avait l’intention de confier une mission d’expertise au docteur F______, spécialiste FMH en rhumatologie ; les parties n’ont fait valoir aucun motif de récusation.

f. Par courrier du 26 septembre 2023, la chambre de céans a transmis aux parties un projet de mandat d’expertise ; ces dernières n’ont fait valoir aucune remarque, ni demandé de modifications du mandat d’expertise.

g. Le Dr F______ a rendu son rapport d’expertise en date du 15 avril 2024. Il a retenu comme diagnostics ayant une répercussion sur la capacité de travail : un syndrome radiculaire déficitaire L5 gauche ; un status post-microdiscectomie L4 – L5 gauche sous microscope, dès le 9 octobre 2019 ; un status post-pose d’une PTH gauche pour une coxarthrose sévère, dès le 15 juin 2022 ; un status post-suture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, dès le 13 octobre 2023 et enfin un status post-chute de 6 m avec une petite hémorragie sous-arachnoïdienne au niveau de la citerne interpédonculaire, une fracture de l’os nasal droit et une fracture des processus transverses droits de L2, L3 et L4, dès le 17 avril 2010. Pour l’ensemble de ces troubles de la santé, l'expert a retenu les limitations fonctionnelles suivantes : pas de port de charges de plus de 5 kg ; ne pas devoir monter ou descendre d'une échelle ou d'un échafaudage ; ne pas devoir marcher sur un terrain irrégulier ; ne pas devoir faire des mouvements répétés du rachis ; ne pas devoir marcher plus de 800 m sur un terrain régulier et enfin, ne pas devoir faire des mouvements de l’épaule gauche au-dessus de 100°. En se fondant sur ces limitations fonctionnelles, l’expert a estimé que la capacité de travail dans son activité habituelle de maçon était de 0% de façon définitive, dès le 24 septembre 2021 et de 50%, dans une activité adaptée aux restrictions fonctionnelles énumérées, dès le 1er avril 2024.

h. Par courrier de son mandataire, du 7 mai 2024, le recourant a considéré que le rapport d’expertise devait être suivi ; en revanche, il contestait le calcul de comparaison des revenus effectué par l’intimé, qui aboutissait à un résultat erroné en ne prenant pas en compte la déduction forfaitaire de 20% qui découlait de la réduction de la capacité fonctionnelle de l’assuré à un pourcentage de 50%.

i. Dans sa détermination du 21 mai 2024, l’OAI s’est rallié à l’appréciation de l’expert judiciaire en suivant le préavis de son SMR daté du 16 mai 2024 qui estimait l’expertise convaincante et concluait que seule une activité adaptée à temps partiel aux limitations fonctionnelles des trois atteintes pouvait être envisageable, six mois après l’opération de l’épaule gauche. L’OAI s’est déterminé en considérant que les conclusions de l’expert sur la capacité de travail pouvaient être suivies, que la capacité de travail était nulle dans toute activité du 24 septembre 2021 au 31 mars 2024 et qu’elle était de 50% dans une activité adaptée dès le 1er avril 2024. Par conséquent, il se justifiait d’octroyer une rente entière d’invalidité fondée sur un degré de 100% d’invalidité dès le 1er septembre 2022, puis 65% d’une rente entière d’invalidité dès le 1er juillet 2024 en se fondant sur une feuille de calcul de comparaison des revenus qui était jointe à la détermination. Le salaire avec invalidité avait été établi en se fondant sur le tableau ESS 2020, TA1 tirage skill level, pour un homme, tous domaines confondus, avec une durée hebdomadaire de 41.7 h et en indexant le montant du salaire selon l’ISS. Il en résultait un salaire après indexation de CHF 65'969.-, dont il fallait retrancher 50%, au vu de la capacité de travail retenue par l’expert, puis appliquer une réduction forfaitaire de 20%, ce qui aboutissait à un revenu annuel brut avec invalidité de CHF 26'388.-. Le salaire sans invalidité à 100% était fixé à CHF 74'830.-. La perte de gain subie s’élevait à CHF 48’442.-, ce qui équivalait à un taux d’invalidité de 64.74% arrondi à 65%.

j. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

k. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2. Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision du 14 avril 2023, octroyant une rente entière ordinaire du 1er septembre 2022 jusqu’au 31 mars 2023, puis mettant fin à cette rente au motif que le recourant dispose à nouveau d’une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée.

4. La LPGA s’applique par renvoi de l’art. 1 al. 1 LAI.

Le 1er janvier 2022 sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ;

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, les faits déterminants sont postérieurs au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur teneur actuelle.

 

5.

5.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

5.2 En vertu de l’art. 28b al. 1 LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière. Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2) ; pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70%, l’assuré a droit une rente entière (al. 3).

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

5.3 En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

6.

6.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; ATF 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

6.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 143 V 269 consid. 6.2.3.2 et les références ; ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201] ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références). 

7.

7.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

7.2 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

8.

8.1 En l’espèce, les parties s’accordent à considérer que l’expertise du Dr F______ est convaincante et que ses conclusions doivent être retenues. L’OAI a appliqué le taux de capacité retenu par le Dr F______ et a produit de nouveaux calculs de comparaison des revenus, aboutissant à l’octroi d’une rente selon un taux d’invalidité de 65%, qui avait été nié dans la décision querellée.

La chambre de céans est d’avis que le rapport de l’expert F______ correspond en tous points aux exigences en la matière. Il a été établi en parfaite connaissance du dossier médical, dont les pièces sont énumérées et commentées. Le rapport contient, en outre, une anamnèse familiale, psychosociale et professionnelle complète et l’expert a rapporté ses observations cliniques de manière détaillée à la suite d’un entretien approfondi avec l’assuré, par le biais d’un traducteur en langue portugaise. Les diagnostics retenus sont soigneusement motivés et le Dr F______ a établi les limitations fonctionnelles en classant les diagnostics en trois catégories, soit premièrement les troubles somatiques liés à une coxarthrose gauche sévère, deuxièmement les troubles du rachis et troisièmement les troubles liés à la rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche. L’expert bien analysé la capacité de gain du recourant à la lumière des indicateurs développés par la jurisprudence. Il a, en outre, exposé de manière convaincante pour quelles raisons il se ralliait aux avis des autres intervenants ou au contraire s’en écartait, exposant notamment qu’il était d’accord avec les limitations fonctionnelles retenues par les médecins du SMR (avis du SMR du 3 janvier 2023) mais qu’il n’en tirait pas les mêmes conclusions quant à l’estimation de la capacité de travail ; en effet, le SMR n’avait pas tenu compte de la relation clinique entre les trois diagnostics que l’expert explicitait dans sa propre appréciation clinique. Les conclusions du rapport sont, elles aussi, claires et motivées.

Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans fait siennes les conclusions du rapport d’expertise, qui présente une pleine valeur probante, soit une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle, dès le 24 septembre 2021 et de 50% dans une activité adaptée aux restrictions fonctionnelles, dès le 1er avril 2024, étant précisé que cette conclusion n’est pas contestée par les parties.

8.2 Le recourant conteste le calcul qui est effectué par l’OAI au motif qu’une déduction forfaitaire de 20% doit s’ajouter à la réduction de 50% due à la capacité de travail partielle, ce qui aboutit, selon ses calculs, à une perte de gain équivalent à un taux d’invalidité de 73%, donnant droit à une rente entière.

Cette déduction de 20% découle d’une modification de l’art. 26 bis al. 3 RAI, qui prévoit que : « une déduction de 10% est opérée sur la valeur statistique visée à l’al. 2. Si, du fait de l’invalidité, l’assuré ne peut travailler qu’avec une capacité fonctionnelle au sens de l’art. 49, al. 1bis, de 50% ou moins, une déduction de 20% est opérée. Aucune déduction supplémentaire n’est possible ».

La modification de l’art. 26 bis al. 3 RAI fait suite à la mise en œuvre de la motion CSSS-n 22.3377 « utiliser des barèmes de salaires correspondant à l’invalidité dans le calcul du taux d’invalidité ».

La motion a été introduite après constatation, d’une part, que les barèmes salariaux ESS reflètent dans une large mesure le niveau de salaire des personnes sans atteintes à la santé et, en comparaison, les salaires des personnes atteintes dans leur santé sont systématiquement très inférieurs et d’autre part, que d’importants facteurs ayant un impact sur le salaire tels que le niveau de formation, l’âge, la nationalité, le nombre d’années de service, la branche économique et la grande région ne sont pas pris en considération.

Le nouveau calcul du taux d’invalidité a fait l’objet d’une fiche d’information de l’office fédéral des assurances sociales (ci-après : OFAS) du 18 octobre 2023 qui expose, notamment, ce qui suit :

L’abattement de 10% de l’art. 26 bis al. 3 RAI est entré en vigueur le 1er janvier 2024. S’y ajoute un second abattement de 10% tenant compte de la moins-value du salaire, en cas de travail partiel, qui n’est applicable que si la capacité de travail est égale ou inférieure à 50%.

À partir du 1er janvier 2024, cette nouvelle déduction forfaitaire est appliquée à tous les nouveaux cas de rente dans lesquels un revenu hypothétique doit être pris en compte, faute de revenu effectif.

En l’occurrence, il y a lieu d’appliquer le premier abattement de 10% découlant d’un calcul fondé uniquement sur l’ESS et d’y ajouter le second abattement de 10% découlant d’une capacité de travail égale à 50%. Le droit à la rente étant postérieur au 1er janvier 2024, cette déduction forfaitaire globale de 20% s’applique au cas d’espèce.

Partant, le calcul effectué par l’OAI est exact dans la mesure où le salaire avec invalidité est divisé par deux (50%), puis le montant obtenu fait l’objet d’une déduction supplémentaire de 20%, correspondant à la somme des abattements examinés supra (10% ESS + 10% travail partiel à 50%). Les trois exemples chiffrés qui figurent dans la fiche d’information de l’OFAS ne laissent d’ailleurs aucun doute sur le fait que les abattements ne s’appliquent qu’une fois que le salaire avec invalidité a été réduit, selon le taux de capacité fonctionnelle de l’assuré.

C’est ce salaire avec invalidité réduit (soit 50%) qui fait ensuite l’objet de l’abattement supplémentaire de 20%, contrairement aux calculs opérés par le recourant qui a additionné le taux d’abattement et le taux de capacité fonctionnelle puis a appliqué la somme de ces taux (soit 70%) au 100% du salaire avec invalidité.

Compte tenu de ces éléments, le taux d’invalidité retenu par l’OAI dans sa duplique, soit 64.74% arrondis à 65%, est bien-fondé au regard de l’art. 28b al. 2 LAI.

9. La chambre de céans réformera donc la décision querellée, selon la nouvelle détermination de l’OAI du 21 mai 2024, qui tient compte de l’amélioration de la capacité de travail de l’assuré dès le 1er avril 2024, soit l’octroi, dès le 1er septembre 2022, d’une rente d’invalidité entière, fondée sur un degré d’invalidité de 100%, puis l’octroi, dès le 1er juillet 2024, de 65% d’une rente d’invalidité entière.

10.

10.1 Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, l’art. 45 al. 1 LPGA constitue une base légale suffisante pour mettre les coûts d’une expertise judiciaire à la charge de l’assureur (ATF 143 V 269 consid. 6.2.1 et les références), lorsque les résultats de l'instruction mise en œuvre dans la procédure administrative n'ont pas une valeur probatoire suffisante pour trancher des points juridiquement essentiels et qu'en soi un renvoi est envisageable en vue d'administrer les preuves considérées comme indispensables, mais qu'un tel renvoi apparaît peu opportun au regard du principe de l'égalité des armes (ATF 139 V 225 consid. 4.3).

Cette règle ne saurait entraîner la mise systématique des frais d'une expertise judiciaire à la charge de l'autorité administrative. Encore faut-il que l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2). Tel est notamment le cas lorsque l'autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu’elle aura laissé ouvertes une ou plusieurs questions nécessaires à l'appréciation de la situation médicale ou lorsqu'elle a pris en considération une expertise qui ne remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la valeur probante de ce genre de documents. En revanche, lorsque l'autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d'une expertise qui répondait aux réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d'une expertise judiciaire ordonnée par l'autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d'une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 consid. 4.4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_580/2019 du 6 avril 2020 consid. 5.1).

Comme cela ressort de l’ordonnance d’expertise du 8 février 2024 de la chambre de céans, l’instruction menée par l’OAI n’avait pas permis d’établir au degré de la vraisemblance prépondérante la capacité de travail de l’assuré dès lors que l’appréciation du SMR était contestée par les médecins traitants, notamment le rhumatologue C______, de l’assuré. L’instruction effectuée par l’intimé présentait ainsi des lacunes ou des insuffisances caractérisées et l'expertise judiciaire ordonnée par la chambre de céans a permis de pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. Il existe ainsi un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2).

Il s’ensuit que les frais de l’expertise judiciaire par CHF 4'080.-, selon la facture du 15 avril 2024 du Dr F______, seront mis, pour la moitié, soit CHF 2'040.-, à la charge de l’intimé.

10.2 Le recourant, assisté par un mandataire professionnellement qualifié et obtenant partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 3'500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

10.3 Étant donné que, depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.-.

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision de l’intimé datée du 14 avril 2023, en ce sens que le recourant a droit à une rente entière ordinaire, du 1er septembre 2022 jusqu’au 30 juin 2024, puis à une rente correspondant à 65% d’une rente entière d’invalidité, dès le 1er juillet 2024.

4.        Alloue au recourant, à charge de l’intimé, une indemnité de CHF 3’500.- à titre de dépens.

5.        Met les frais de l’expertise judiciaire de CHF 4’080.-, selon la facture du 15 avril 2024 du docteur F______, par moitié, à la charge de l’intimé, soit CHF 2'040.-.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le