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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1695/2023

ATAS/369/2024 du 22.05.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1695/2023 ATAS/369/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 mai 2024

Chambre 4

 

En la cause

 

A______

représenté par Me Sarah BRAUNSCHMIDT SCHEIDEGGER, avocate

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant) est né le ______ 1975, originaire d’Argentine, au bénéfice d’un permis C et séparé depuis 2013. Il a été employé pour B______ SA avec un contrat de mission pour C______ SA, à Satigny, comme ouvrier de la construction, manœuvre, dès le 17 janvier 2022.

b. Selon un rapport initial LAA, établi par le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, du centre médical de la Servette, et reçu le 20 octobre 2022 par l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : l’OAI ou l’intimé), le 10 février 2022, l’assuré avait fait un faux mouvement en torsion en portant une lourde charge dans le cadre de son travail et a ressenti des douleurs au niveau du genou droit. Il avait eu une tuméfaction du genou avant les vacances de Noël, puis son état s’est amélioré. Après les vacances, il y avait eu une récidive d’un épanchement du genou droit et de douleurs lorsqu’il avait à nouveau eu des charges importantes à porter.

c. Selon un rapport établi le 24 mai 2022 par le docteur E______, du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur des hôpitaux universitaires de Genève (ci-après HUG), l’assuré souffrait d’une gonarthrose médiale, varisante du genou droit avec des œdèmes osseux tibial et fémoral. L’évolution était lentement favorable depuis l’évènement du 10 février 2022, avec moins de douleurs au repos, mais encore des douleurs à la marche.

b. Le 8 juin 2022, la SUVA a refusé de prendre en charge le cas, considérant que l’événement du 10 février 2022, ne pouvait pas être assimilé à un accident, car l’atteinte au genou droit était principalement maladive.

c. L’assuré a demandé les prestations de l’assurance-invalidité le 13 septembre 2022.

d. Selon un rapport établi le 19 septembre 2022 par le Dr D______, l’assuré avait subi lors de son accident du 10 février 2022 une déchirure de la corne postérieure du ménisque interne avec une extrusion du ménisque, une fracture sous-chondrale du plateau tibial médial non déplacée, une lésion ostéochondrale du condyle fémoral interne et une chondropathie grade IV de l’aileron médial de la rotule

e. Le 2 décembre 2022, le docteur F______, du département de chirurgie des HUG, a estimé que l’assuré était capable de travailler dans une activité adaptée dès ce jour.

f. Le 9 décembre 2022, l’assuré a informé l'OAI qu’il était totalement incapable de travailler depuis le 10 février 2022 et qu’il souhaitait obtenir des mesures d’ordre professionnel. Son médecin lui avait dit qu’il ne pouvait pas faire de travail physique. Il avait été licencié le 31 mars 2022.

g. Dans un avis du 11 janvier 2023, le service médical régional de l’assurance-invalidité (SMR) a considéré, au vu des rapports médicaux au dossier, que la capacité travail de l’assuré était nulle dans l’activité habituelle dès le 10 février 2022 et pleine dans une activité adaptée dès le 2 décembre 2022. Les limitations fonctionnelles étaient : éviter une activité avec une durée prolongée debout, marcher plus de 30 minutes par jour, les charges de plus de 2 kg, les escaliers, les escabeaux et les échelles et il devait travailler en position assise et alterner régulièrement les positions.

h. L’assuré a été expertisé par le docteur G______, spécialiste FMH en rhumatologie, à la demande du GROUPE MUTUEL ASSURANCE-MALADIE SA.

i. Dans son rapport du 22 février 2023, l’expert a retenu le diagnostic incapacitant de gonarthrose droite, devenue symptomatique depuis décembre 2022. L’assuré était totalement incapable de travailler dans une activité nécessitant des efforts physiques et capable de travailler à 100% dans une activité adaptée à ses limitations dès le jour de l’expertise. Une indication chirurgicale (ostéotomie) devait être discutée prochainement aux HUG.

j. Par décision du 14 avril 2023, l’OAI a rejeté la demande de l’assuré. À l’issue de l’instruction médicale, il lui reconnaissait une incapacité de travail de 100% dans son activité habituelle dès le 10 février 2022 et une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée à son état de santé, dès le 2 décembre 2022. Son taux d’invalidité s’élevait à 3%, ce qui ne lui ouvrait pas le droit à une rente d’invalidité. Les mesures de reclassement professionnel avaient pour but de réduire le dommage en procurant une nouvelle capacité de gain à peu près équivalente à celle de l’activité antérieure, pour autant que la perte de gain subie soit durable et de l’ordre de 20% environ entre son activité accoutumée et l’activité exigible sans profession. Dans son cas, la condition d’une perte de gain de 20% n’était pas remplie. Par ailleurs, d’autres mesures professionnelles n’étaient pas indiquées ni nécessaires dans sa situation.

B. a. Le 19 mai 2023, l’assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant, sous suite de dépens, à l’annulation de la décision litigieuse et au renvoi de son dossier à l’OAI pour mise en place d’une orientation professionnelle et d’une aide au placement.

b. Le 15 juin 2023, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Le 7 juillet 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. Le 15 août 2023, il a produit un certificat médical établi par le Dr F______, indiquant qu’il avait été inapte au travail à 100% du 1er mai 2022 au 30 juin 2023.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue postérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées ci-après dans leur nouvelle teneur (ATF 148 V 174 consid. 4.1).

4.             Le litige porte sur le droit du recourant à une mesure d’orientation professionnelle et à une aide au placement.

5.              

5.1  

5.1.1 Le recourant a fait valoir qu’il était âgé de 47 ans et avait toujours travaillé dans des activités physiques comme celle de serveur, coursier ou agent d’entretien. Il n’avait pas de formation ni de connaissances spécifiques à une branche d’activité. Il était extrêmement motivé à travailler et à se réinsérer professionnellement et avait encore de nombreuses années de carrière professionnelle devant lui.

Malheureusement, compte tenu de son absence de connaissances spécifiques à une branche d’activité et de formation, il n’avait que des connaissances limitées sur les aptitudes exigées et les possibilités disponibles d’activités adaptées. Il avait donc besoin d’une aide pour trouver une profession adaptée.

L’intimé n’avait pas instruit de manière approfondie la question d’une mesure, se contentant d’affirmer qu’un taux d’invalidité de 3% n’ouvrait pas le droit à des mesures. Or, en raison de ses limitations fonctionnelles, le recourant ne savait pas vers quelle profession il pouvait se tourner.

Il ne pouvait effectuer qu’un travail de type administratif au vu de ses limitations. Il n’avait pas effectué sa scolarité en Suisse et n’avait qu’une maîtrise imparfaite du français. Il n’avait en outre travaillé que dans des métiers physiques. C’était en raison de son invalidité qu’il ne pouvait plus effectuer son activité antérieure ou une activité professionnelle physique. Il avait dès lors le droit de la part de l’OAI à une aide pour déterminer une profession dans laquelle il pourrait encore exercer. Il invitait l’intimé à lui lister ses très nombreuses prétendues activités adaptées à sa situation.

5.1.2 L’intimé a conclu au rejet du recours.

5.1.3 Selon l’art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b).

Selon l’al. 1bis de cette disposition, le droit aux mesures de réadaptation n’est pas lié à l’exercice d’une activité lucrative préalable. La détermination des mesures tient notamment compte : de l’âge de l’assuré (let. a), de son niveau de développement (let. b), de ses aptitudes (let. c) et de la durée probable de la vie active (let. d).

5.2  

5.2.1 Aux termes de l’art. 15 LAI, l’assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d’une profession a droit à l’orientation professionnelle et à une mesure préparatoire à l’entrée en formation.

L’art. 4a al. 1 RAI précise qu’une orientation professionnelle peut consister en des entretiens de conseil, des analyses et des tests diagnostiques réalisés par des professionnels (let. a) ; des mesures préparatoires à l’entrée en formation au sens de l’art. 15 al. 1 LAI (let. b) et des mesures d’examen approfondi de professions possibles au sens de l’art. 15 al. 2 LAI (let. c).

Selon l’art. 4a al. 2 RAI, sont considérées comme mesures au sens de l’al. 1 let. b, les mesures proches du marché du travail se déroulant après l’école obligatoire, dans des entreprises du marché primaire du travail ou en institution et visant à déterminer les aptitudes et les envies de l’assuré en matière de formations et à initier celui-ci aux exigences du marché primaire du travail. Ces mesures sont limitées à douze mois.

Selon l’art. 4a al. 3 RAI, sont considérées comme mesures au sens de l’al. 1 let. c, les mesures se déroulant dans des entreprises du marché primaire du travail ou en institution et visant à déterminer les aptitudes et les envies de l’assuré concernant les professions et activités possibles. Ces mesures sont limitées à trois mois au total. En l’absence des connaissances nécessaires au choix de la profession ou de l’activité, les mesures peuvent être prolongées de trois mois au plus.

Selon l’art. 4a al. 4 RAI, les objectifs et la durée des mesures visées aux al. 2 et 3 sont fixés individuellement en fonction des aptitudes de l’assuré. La mesure est interrompue en particulier : lorsque le but est atteint ou ne peut pas être atteint (let. a), lorsqu’une mesure de réadaptation plus appropriée s’impose (let. b) ou lorsque la poursuite de la mesure ne peut, pour des raisons d’ordre médical, être raisonnablement exigée (let. c).

Le Tribunal fédéral a rappelé que l'orientation professionnelle se démarque des autres mesures d'ordre professionnel (art. 16 ss LAI) par le fait que, dans le cas particulier, l'assuré n'a pas encore fait le choix d'une profession. L'art. 15 LAI suppose que l'assuré soit capable en principe d'opérer un tel choix, mais que seule l'invalidité l'en empêche, parce que ses propres connaissances sur les aptitudes exigées et les possibilités disponibles ne sont pas suffisantes pour choisir une profession adaptée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_882/2008 du 29 octobre 2009 consid. 5.1 et les références).

Selon la Circulaire sur les mesures de réadaptation professionnelle de l’AI (CMRPr) de l'office fédéral des assurances sociales (OFAS), état au 1er janvier 2023, les mesures préparatoires durant l’orientation professionnelle n’ont pas pour objet de combler des lacunes scolaires mais visent à vérifier dans la pratique les formations possibles, à tester l’aptitude de la personne assurée, et à l’accoutumer aux exigences du marché du travail afin de faciliter son entrée en formation. À cette fin, une convention d’objectifs est passée entre la personne assurée, l’office AI et le fournisseur de prestations, destinée à fixer des objectifs à atteindre par la personne assurée tant d’un point de vue qualitatif (tester les types de formations possibles dans un environnement de travail réel, etc.) que quantitatif (capacité de présence et de rendement permettant à la personne assurée de participer à des mesures d’ordre professionnel de l’assurance-invalidité ou à des offres adéquates de formation professionnelle ou de l’assurance-chômage ; ch. 1009-1014 CMRPr).

5.2.2 Aux termes de l'art. 18 al. 1 LAI, l’assuré en incapacité de travail (art. 6 LPGA) et susceptible d’être réadapté a droit à un soutien pour rechercher un emploi approprié ou, s’il en a déjà un, pour le conserver.

Cette disposition a été modifiée avec effet au 1er janvier 2022, mais il s’agit d’une adaptation purement formelle, les conditions d’octroi d’un placement restent inchangées selon le Message concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité (Développement continu de l'AI - FF 2017 2363).

Une mesure d'aide au placement se définit comme le soutien que l'administration doit apporter à l'assuré qui est entravé dans la recherche d'un emploi adapté en raison du handicap afférent à son état de santé. Il ne s'agit pas pour l'office AI de fournir une place de travail, mais notamment de soutenir une candidature ou de prendre contact avec un employeur potentiel. Il n'y a en revanche pas d'invalidité au sens de l'art. 18 al. 1 LAI (et donc aucun droit à une aide au placement) lorsque l'assuré dispose d'une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée et qu'il ne présente pas de limitations particulières liées à son état de santé, telles que mutisme, cécité, mobilité limitée, troubles de comportement, qui l'entraveraient dans sa recherche de travail, par exemple pour participer à des entretiens d'embauche, pour expliquer ses limites et ses possibilités dans une activité professionnelle ou pour négocier certains aménagements de travail nécessités par son invalidité (arrêt du Tribunal fédéral I 595/02 du 13 février 2003 consid. 1.2).

5.3  

5.3.1 En l’espèce, une mesure d’orientation professionnelle, au sens de l’art. 15 LAI, ne se justifie pas, en raison de l'existence de nombreux emplois compatibles avec les limitations fonctionnelles du recourant. Par ailleurs, ses limitations fonctionnelles ne l’empêchent pas, ni ne rendent difficile le choix d’une profession adaptée.

5.3.2 Le recourant n’est pas entravé dans la recherche d'un emploi adapté en raison du handicap afférent à son état de santé et ne remplit ainsi pas non plus les conditions pour obtenir une aide au placement au sens l'art. 18 al. 1 LAI. L’aide au placement réclamée par le recourant relève en conséquence des compétences de l’assurance-chômage ou de l’Hospice général.

6.             Vu ce qui précède, la décision querellée est conforme au droit et le recours doit être rejeté.

La procédure n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge du recourant.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le