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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1889/2023

ATAS/326/2024 du 08.05.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1889/2023 ATAS/326/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 8 mai 2024

Chambre 4

 

En la cause

A______

représenté par Me Raphaël ROUX, avocat

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

A.           Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), est né le ______ 1970, originaire du Portugal, divorcé et père de deux enfants, nés en 1992 et 1995.

B. a. Le 15 février 2018 alors qu’il procédait à un déménagement avec un monte-meubles, il est tombé du 3ème étage. Il travaillait pour B______ Sàrl en occupation irrégulière à 20%.

b. Il a été hospitalisé aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : les HUG) du 15 au 18 février 2018, en raison d’un traumatisme crânio-cérébral et d’un polytraumatisme et été opéré le 18 février 2018.

c. Selon un rapport de police du 16 février 2018, il ressortait des premières déclarations recueillies sur les lieux que la personne qui se trouvait aux commande du monte-meubles avait entendu une personne se trouvant à proximité lui dire qu’il pouvait faire descendre la nacelle et qu’il se trouvait peut-être au téléphone à ce moment. Après avoir stabilisé l’état de l’assuré, les ambulanciers l’avaient transporté aux urgences avec un pronostic vital engagé. Selon l’enquête, l’assuré avait dû monter sur un radiateur puis enjamber le montant d’une fenêtre pour accéder aux cartons qui se trouvaient sur le monte-meubles et il avait chuté dans l’espace de 40 cm qui séparait le plateau de celui-ci et l’immeuble, d’une hauteur de 12 m.

d. Selon un rapport établi le 28 mars 2018 par les docteurs C______ et D______, des HUG, l’assuré a séjourné du 28 février au 28 mars 2018 à l’unité de médecine physique et réadaptation orthopédique. Au vu du traumatisme (chute de 10 m), il avait été vu par une psychologue, qui avait mis en évidence un trouble de l’adaptation de type anxieux. Certains critères pour un état de stress aigu étaient présents (anxiété, activation neurovégétative, hypervigilance, sursaut durant la nuit, présence d’évitement) au moment de l’évaluation. La perturbation n’entraînait pas une détresse cliniquement significative ni une altération du fonctionnement de l’assuré. Pour des critères temporels, un diagnostic de syndrome de stress post-traumatique (ci-après : PTSD) ne pouvait pas être posé.

e. Le cas a été pris en charge par la CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après la Suva), par décision du 10 avril 2018.

f. Le 19 juin 2018, l’assuré a demandé les prestations de l’assurance-invalidité.

g. Dans un rapport du 23 juillet 2018, trois médecins de la consultation ambulatoire de la douleur, dont la docteure E______, spécialiste FMH en anesthésiste, spécialiste en pharmacologie clinique, douleur SPS et ACF en hypnose médicale, ont indiqué que l’assuré se décrivait comme casanier, mais qu’il avait des ressources personnelles importantes. Il avait pu s’entourer de personnes le soutenant. Il indiquait encore éprouver du plaisir, notamment lorsqu’il visitait des brocantes. Depuis l’accident, il avait peur du vide et n’avait pas encore réussi à passer dans la rue où il avait eu l’accident. Il appréhendait le futur, surtout sur le plan professionnel, ce qui lui provoquait parfois des ruminations. Son score de dépression sur l’auto-questionnaire de Beck était de 24/63 et était compatible avec un épisode dépressif modéré. Les scores de qualité de vie du questionnaire SF36 montraient une diminution globale de tous les aspects de la qualité de vie, avec une diminution très importante des limitations physique et émotionnelle. L’assuré présentait des éléments en faveur d’un PTSD (terreurs nocturnes, peur du lieu d’accident) et des signes de surdosage aux opiacés (somnolence diurne, cauchemars, hallucinations diurnes). Il était proposé un sevrage progressif de la morphine et de poursuivre le traitement EMDR (intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires), au vu des résultats actuels et un suivi à long terme avec un soutien psychologique. La résilience de l’assuré était soulignée par les médecins ainsi que sa capacité à mobiliser ses ressources personnelles et à faire appel à son entourage dans le cadre de son accident.

h. Dans un rapport établi le 2 août 2018, le docteur F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a indiqué que l’assuré souffrait d’un PTSD avec les symptômes suivants : flashbacks, troubles du sommeil avec cauchemars, terreurs nocturnes et évitements. Il n’arrivait toujours pas à repasser dans le rue où il avait eu son accident. Il avait des ruminations anxieuses importantes, une anxiété, une anhédonie et une aboulie. Le rapport des HUG évoquait un trouble dépressif moyen, mais le Dr F______, qui n’avait vu l’assuré qu’une fois, ne pouvait se positionner sur ce diagnostic. Le traitement antidouleur de l’assuré était important pour l’instant et il faudrait à l’avenir évaluer si un traitement antidépresseur pourrait aussi diminuer ses douleurs. Il suivait une thérapie de type EMDR avec Madame G______, psychologue, spécialiste en psychothérapie FSP, et ses terreurs nocturnes étaient en phase d’amélioration grâce à celle-ci. Le Dr F______ ajoutait qu’il allait voir l’assuré une fois par mois pour évaluer son état psychique et adapter sa médication si besoin. Sans ces suivis, l’assuré serait très à risque de présenter une péjoration de ses symptômes.

i. Selon une appréciation établie le 29 août 2018 par le docteur H______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin d’arrondissement de la SUVA, en lien avec la nature de l’accident, sa gravité et la symptomatologie décrite, réactionnelle, et compatible avec un vécu traumatique, il fallait retenir la causalité naturelle dans cette situation.

j. Selon un rapport établi le 7 janvier 2019, l’assuré a séjourné du 12 décembre 2018 au 16 janvier 2019 à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR) pour une rééducation intensive et une évaluation globale. Dans ce contexte, le diagnostic de trouble de l’adaptation avec symptômes de type PTSD en voie de résolution avait été posé. L’assuré disait avoir encore des réviviscences du traumatisme et des conduites d’évitement et que sa vie s’était arrêtée le jour de l’accident. Sur le plan psychiatrique, sa colère restait très importante. Il souhaitait retrouver au plus vite une vie normale, mais n’arrivait pas à se projeter dans le futur. Ses stratégies de gestion de la douleur semblaient limitées en dehors des traitements médicamenteux, mais il pouvait compter sur le soutien de sa famille et de son amie. Il n’avait pas été retenu de signe en faveur d’un PTSD. L’assuré avait indiqué avoir évité longtemps les lieux de l’accident et que lorsqu’il y était allé avec son amie, il n’avait finalement eu aucun signe (physique, comportement, flash, etc.). L’assuré avait indiqué qu’une dizaine d’années auparavant il avait été suivi par un psychologue ou un psychiatre suite à un divorce compliqué qui l’avait rendu irritable. Il avait eu du mal à gérer ses émotions et son comportement parfois. Il avait bénéficié pendant quelques mois d’un traitement par EMDR suite à son accident, mais l’avait interrompu en raison d’une amélioration de sa symptomatologie. Il ne prenait pas de psychotropes et ne signalait pas d’antécédents psychiatriques familiaux.

Le docteur I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, de la CRR, a précisé que depuis l’accident, l’assuré en voulait beaucoup à un collègue qu’il considérait responsable de son accident. Il ne se sentait plus le même, mais aucun trouble psychopathologique patent n’avait été constaté lors de son séjour à la clinique. Les symptômes de type PTSD présentés en début de séjour s’étaient considérablement améliorés sous le traitement par EMDR, même si des modifications de la personnalité et une tendance à l’évitement persistaient encore un peu, raison pour laquelle un trouble de l’adaptation avec symptômes de type PTSD en voie de résolution était retenu. La reprise d’un suivi psychothérapeutique était préconisée.

k. Dans une attestation du 6 juin 2019, G______ a indiqué que l’assuré lui avait été adressé en juin 2018 pour prise en charge concernant des symptômes de stress post-traumatique. Au cours des séances, son état général s’était amélioré et les réactions d’hypervigilance, les cauchemars ainsi que les flashbacks avaient presque totalement disparu. L’assuré avait décidé d’arrêter le suivi à la fin du mois de septembre 2018, estimant que son état s’était suffisamment amélioré. En janvier 2019, devant son humeur fragile, les médecins de la CRR l’avaient encouragé à reprendre un suivi. Certains comportements d’évitement persistaient actuellement et l’assuré présentait une humeur légèrement dépressive, avec une fatigue chronique, des douleurs quotidiennes mais aussi un isolement social à la suite de l’arrêt de son activité professionnelle. Il présentait également de l’anxiété quant à son futur, notamment professionnel et donc financier. Cependant, l’assuré restait positif et son état psychologique général était relativement stable et allait dans le sens d’une amélioration.

l. Le 18 septembre 2019, G______ a indiqué que les réactions d’hypervigilance, les cauchemars ainsi que les flash-backs avaient disparu. L’humeur de l’assuré s’était améliorée malgré la persistance des douleurs physiques importantes au quotidien. Il souffrait toujours d’un isolement social suite à l’arrêt de son activité professionnelle, mais faisait preuve d’une grande adaptation à ce sujet. Concernant son futur, notamment professionnel, les doutes et l’anxiété étaient encore présents. L’assuré se disait motivé à trouver des solutions pour l’avenir. Son état psychologique général s’était clairement amélioré et il avait été décidé d’espacer les séances, en vue d’une fin de prise en charge.

m. Dans un rapport du 20 mai 2020, le docteur J______, chef de clinique du service d’anesthésiologie des HUG, a indiqué avoir suivi l’assuré pour une prise en charge antalgique minimalement invasive de douleurs lombaires mécaniques. Celle-ci avait été effectuée selon plusieurs axes conservateurs. L’assuré décrivait des lombalgies mécaniques, exacerbées à la charge. Ses douleurs étaient en constante amélioration, quoique lente. Depuis plusieurs mois, il avait retrouvé une certaine qualité de sommeil, qui était à nouveau réparateur. En plus de la physiothérapie, à un rythme bi-hebdomadaire, un traitement par morphine, initialement à haute dose, avait été progressivement diminué jusqu’à se limiter à une prise matinale unique de 10 mg, à laquelle s’ajoutaient des prises ponctuelles d’AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens ; Celebrex 200 mg, en moyenne une à deux fois par jour). L’assuré avait bénéficié aussi d’une psychothérapie qui avait été fort utile pour traiter le PTSD et un travail motivationnel pourrait s’avérer bénéfique.

n. Le 3 juillet 2020, l’assuré a informé la SUVA qu’il avait chuté dans des escaliers en métal et qu’il avait tout de suite senti un craquement. Ses douleurs s’étaient intensifiées 10 minutes après l’événement. Suite à des examens radiologiques, on lui avait dit qu’il avait une fracture exactement au même endroit que la précédente. Il avait de fortes douleurs. Il avait été opéré le 26 juin 2020 par le Dr K______, qui lui avait mis une plaque dans le bras. Il avait encore des douleurs, mais moins qu’avant. Il prenait du Dafalgan, trois fois par jour et un anti-inflammatoire deux fois par jour. Actuellement, il ne voyait plus que les Drs L______ et K______.

o. Selon un examen final établi le 10 mars 2021, le docteur M______, spécialiste en chirurgie orthopédique, et médecin d’arrondissement de la SUVA, a procédé à un examen de l’assuré. En ce qui concernait la colonne dorsale, il n’y avait plus de progrès notables et on pouvait considérer le cas comme stabilisé. En ce qui concernait le membre supérieur droit, l’évolution était positive et on pouvait s’interroger sur les séquelles persistantes au niveau du poignet, qui pourraient avoir pour origine des lésions qui seraient passées inaperçues. Une IRM et un électromyogramme étaient prescrits dans le but d’éclaircir ce point.

p. Dans un rapport du 4 mai 2021, le docteur N______, du service de chirurgie orthopédique des HUG, a indiqué que l’évolution était favorable concernant le membre supérieur droit de l’assuré, sous réserve des examens encore en cours demandés par le Dr M______. Concernant le rachis, l’assuré ne se plaignait pas de douleur au niveau dorsal, hormis à la palpation du matériel d’ostéosynthèse lors de l’examen clinique. L’assuré présentait cependant toujours des lombalgies d’allure mécanique non déficitaire, sur probable arthrose postérieure bilatérale L4-L5, L5-S1, post-traumatique, pour laquelle il a déjà bénéficié d’une infiltration en décembre 2019, sans réel effet bénéfique selon lui. À noter cependant que le traitement d’opiacé en place à ce moment-là avait tout de même pu être sevré suite à l’infiltration. Actuellement, l’assuré semblait soulagé par la prise d’Ecofenac, 1 à 2 fois par jour, pour ses lombalgies, qui ne le limitaient pas au quotidien. L’assuré n’était pas preneur de poursuivre les exercices de renforcement de la sangle abdominale et dorsolombaire, et la symptomatologie restait similaire. La situation semblait avoir atteint la stabilité. Le pronostic de réinsertion dans l’activité de déménageur était plutôt défavorable.

q. Dans un rapport établi le 27 octobre 2021, le Dr M______ a indiqué que le cas était stabilisé et que l’assuré, qui avait été très collaborant, n’avait plus de prise en charge médicale. Les métiers de déménageur et de force n’étaient plus exigibles de lui. Dans un métier respectant ses limitations fonctionnelles, il pouvait travailler à 100%, sans perte de rendement. Les limitations étaient : la station debout prolongée, le porte-à-faux, la rotation du tronc rapide ou fréquente, le port de charges avec le membre supérieur droit supérieures à 15 kg et le port fréquent de charges de 10 kg. La manipulation d’objets fins ou en distalité était possible. La manipulation d’objets fragiles ou lourds devait se faire avec les deux mains. Il existait toutefois des limitations contextuelles à la recherche d’un travail dans le cadre des limitations fonctionnelles L’assuré parlait un français tout à fait intelligible et le comprenait, mais il n’avait pas de ressources pour un travail intellectuel avec l’utilisation de l’informatique. Les séquelles étaient essentiellement sur la colonne dorsale et le membre supérieur droit, au niveau de l’avant-bras.

Ce que le Dr N______ décrivait, dans l’apparition d’une arthrose lombaire basse, comme post-traumatique, ne pouvait être retenu en vraisemblance prépondérante, car l’assuré avait 50 ans et avait toujours fait des métiers de force. De plus, l’événement avait concerné majoritairement la colonne dorsale, qui était fixe. Il existait une adaptation par rééquilibrage de l’équilibre sagittal, sans que celui-ci n’ait provoqué d’atteinte, en vraisemblance prépondérante, sur la colonne lombaire. En ce qui concernait la colonne lombaire, le statu quo était acquis depuis longtemps. Au moment de la stabilisation, on était à 42 mois de l’événement. Il existait également une séquelle arthrosique au niveau du coude qui faisait, avec la colonne cervicale, l’objet d’une évaluation de l’atteinte à l’intégrité séparée.

r. Dans une appréciation du 8 novembre 2021, le Dr M______ a évalué l’atteinte à l’intégrité à 15%.

s. Par décision du 10 novembre 2021, la SUVA a informé l’assuré qu’elle mettait fin à ses prestations d’assurance au 10 novembre 2021 pour les troubles lombaires qui, selon l’appréciation de son médecin d’arrondissement, n’avaient plus de lien avec l’accident, dès lors, l’état de santé tel qu’il aurait été sans ce dernier pouvait être considéré comme atteint depuis le 10 novembre 2021.

t. Dans un avis établi par le SMR le 23 novembre 2021, il est mentionné que dans un rapport du 22 octobre 2019, le docteur L______, chirurgien orthopédique, médecin chef de clinique aux HUG, avait attesté d’une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée. En conclusion, l’assuré était totalement incapable de travailler dès le 15 février 2018 et totalement capable de travailler dans une activité adaptée dès le 22 octobre 2019.

u. Par projet de décision du 10 février 2022, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er février au 31 décembre 2019. Dès le 22 octobre 2019, sa capacité de travail était de 100% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles. À cette date, il ressortait de la comparaison de gains un taux d’invalidité de 9.55%, ce qui ne lui ouvrait pas le droit à une rente d’invalidité. Des mesures d’ordre professionnel n’étaient pas indiquées.

v. Par décision du 21 février 2022, la SUVA a informé l’assuré qu’il ressortait de ses investigations qu’en dépit des séquelles accidentelles, il était en mesure de déployer une activité adaptée à ses limitations. En prenant comme base les chiffres du niveau de compétence 1 de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS), un revenu de CHF 62'155.- pouvait encore être réalisé. Un abattement de 10% était justifié dans le cas d’espèce. Comparé au gain de CHF 65'586.- réalisable sans l’accident, il en résultait une perte de 5.23%. En conséquence, une diminution notable de la capacité de gain due à l’accident n’existait pas et il n’avait pas droit à une rente d’invalidité.

Compte tenu de l’appréciation médicale, il avait une atteinte à l’intégrité de 15% et il avait droit de ce fait à une indemnisation à ce titre de CHF 22'230.-.

w. Le 10 mai 2022, l’assuré a formé opposition au projet de décision de l’OAI, faisant valoir que le dossier ne permettait pas de conclure qu’il était totalement capable de travailler dans une activité adaptée dès octobre 2019. Le seul élément au dossier allant dans cette direction était le rapport du SMR du 23 novembre 2021, qui se référait au rapport établi le 22 octobre 2019 par le Dr L______. Le Dr M______ n’avait mentionné une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée que dès le 28 octobre 2021 et sous toutes réserves. Le Dr L______ avait continué à délivrer des arrêts de travail au-delà d’octobre 2019. En effet, le suivi s’était finalement prolongé très au-delà d’octobre 2019. Une consultation en médecine de la douleur en mai 2022 faisait encore état d’infiltrations périarticulaires opérées en décembre 2019, de la poursuite du traitement morphinique et d’un suivi psychothérapeutique en raison d’un PTSD.

x. Dans un avis du 6 juillet 2022, le SMR a proposé la réalisation d’une expertise bidisciplinaire orthopédique et psychiatrique.

y. Par décision sur opposition du 21 juillet 2022, la SUVA a estimé que la jurisprudence dont l’assuré se prévalait (8C_175/2017) pour conclure à un abattement de 15% se rapportait à une situation qui n’était pas comparable à la sienne.

Sa situation ne justifiait pas l’application d’un taux d’abattement sur le gain hypothétique d’invalide supérieur à 10%. Ce taux tenait déjà suffisamment compte de sa situation. La valeur statistique retenue, le niveau de compétence 1, était suffisamment représentative de ce qu’il était en mesure de réaliser en tant qu’invalide à 52 ans, puisqu’il ne pouvait plus exercer de métiers physiquement trop contraignants. Quant à son âge, il n’apparaissait pas d’emblée qu’il soit susceptible de réduire ses perspectives salariales, ce d’autant plus que les activités adaptées envisagées ne requéraient ni formation ni expérience professionnelle spécifique et qu’elles étaient accessibles indépendamment de son âge.

L’indexation requise par l’opposant n’influençait pas le résultat, puisqu’elle devait être opérée tant sur les gains de valide que d’invalide, de sorte que la perte de gain, respectivement le degré d’invalidité, demeurait inchangé.

En conséquence, c’était à bon droit que la SUVA avait refusé à l’assuré le droit à une rente d’invalidité. S’agissant de l’IPAI, contrairement à ce que soutenait l’opposant, la SUVA avait tenu compte de la cyphose, qui se situait entre 10 et 20 degrés, et des douleurs résiduelles. Le Dr M______ avait retenu la fourchette correcte : 5.10% (+), relevant une prise en charge médicamenteuse modérée et choisissant finalement la valeur la plus haute de 10%. En outre, le Dr N______ avait confirmé le 4 mai 2021 l’absence de douleurs au niveau dorsal, hormis à la palpation du matériel d’ostéosynthèse. Les lombalgies d’ailleurs mécaniques avaient été qualifiées de non déficitaires. La SUVA confirmait donc également le taux de l’IPAI à 15%.

z. Les docteurs O______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, et P______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont rendu leur rapport d’expertise le 14 février 2023. Selon leur évaluation consensuelle, étaient posés sur le plan orthopédique les diagnostics de status après spondylodèse D3-D7, status après ostéosynthèse d’une fracture du cubitus diaphysaire D, status après plaie de la crête iliaque postérieure D de type Morel-Lavallée. Ces diagnostics conduisaient aux limitations fonctionnelles suivantes : les marches prolongées, les travaux en porte-à-faux, le port de charges répété et supérieures à 10 kg, les travaux nécessitant une importante force de préhension avec le membre supérieur droit. Sur le plan psychiatrique, il n’existait pas d’atteinte cérébro-organique. Sur le plan orthopédique, la capacité de travail était entière, moyennant le respect des limitations fonctionnelles. La capacité de travail était entière sur le plan psychiatrique. Dans l’activité de déménageur, la capacité de travail était nulle sur le plan orthopédique dès le 15 février 2018 et sur le plan psychiatrique, l’assuré pourrait soutenir le maximum d’horaire exigible quotidien.

aa. Dans un avis du 17 avril 2023, le SMR a proposé de suivre les conclusions de l’expertise.

bb. Par décision du 4 mai 2023, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er février 2019 au 31 mai 2021. Suite à l’audition, il avait procédé à une expertise. À l’issue de l’instruction, l’OAI retenait qu’à l’échéance du délai d’un an, soit au 15 février 2019, sa capacité de travail était nulle dans toute activité et que son taux d’invalidité était de 100%. Dès le 15 février 2021, sa capacité de travail était de 100% dans une activité adaptée. Son taux d’invalidité devait être établi en retenant un revenu sans invalidité CHF 68’057.- et un revenu avec invalidité CHF 58’795.-, ce qui donnait un taux de 13.61%. La rente entière était supprimée trois mois après l’amélioration de son état de santé intervenue le 15 février 2021, soit dès le 1er juin 2021, en raison d’un taux d’invalidité inférieure à 40%.

C. a. Le 5 juin 2023, l’assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente entière sans limite dans le temps, avec suite de dépens.

b. Dans un complément de recours du 13 juillet 2023, le recourant a fait valoir que l’expertise n’était pas probante.

c. Par réponse du 19 juillet 2023, l’intimé a conclu au rejet du recours.

d. Le recourant a répliqué le 15 août 2023.

e. Le 6 décembre 2023, les parties ont été entendues par la chambre de céans.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente entière d’invalidité au-delà du 31 mai 2021.

4.             Dans le cadre du développement continu de l’AI, la LAI, le règlement du 17 janvier 1961 sur l’assurance-invalidité (RAI - RS 831.201) et l'art. 17 LPGA notamment ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2022 (modifications des 19 juin 2020 et 3 novembre 2021 ; RO 2021 705 et RO 2021 706).

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence).

Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2).

Dans les cas de révision selon l'art. 17 LPGA, conformément aux principes généraux du droit intertemporel (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), il convient d’évaluer, selon la situation juridique en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, si une modification déterminante pour le droit à la rente est intervenue jusqu’à cette date. Si tel est le cas, les dispositions de la LAI et celles du RAI dans leur version valable jusqu'au 31 décembre 2021 sont applicables. Si la modification déterminante est intervenue après cette date, les dispositions de la LAI et du RAI dans leur version en vigueur à partir du 1er janvier 2022 sont applicables. La date de la modification se détermine selon l'art. 88a RAI (arrêts du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2 et 8C_644/2022 du 8 février 2023 consid. 2.2.3).

Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5; ATF 113 V 273 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

En l’occurrence, la décision querellée est postérieure au 1er janvier 2022, mais elle concerne le droit à une rente d’invalidité né le 1er février 2019, avec un changement de circonstance survenu, selon l’intimé, le 15 février 2021, avec le retour du recourant à une capacité de travail dans une activité adaptée de 100%, de sorte que c’est le droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 qui est applicable.

 

 

 

5.              

5.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

5.2 Dans un arrêt du 3 juin 2015 (ATF 141 V 281), le Tribunal fédéral a jugé que la capacité de travail réellement exigible des personnes souffrant d’une symptomatologie douloureuse sans substrat organique doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée et sur la base d’une vision d’ensemble, à la lumière des circonstances du cas particulier et sans résultat prédéfini. L’évaluation doit être effectuée sur la base d’un catalogue d’indicateurs de gravité et de cohérence. Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1).

Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1), au syndrome de fatigue chronique ou de neurasthénie (ATF 139 V 346; arrêt du Tribunal fédéral 9C_662/2009 du 17 août 2010 consid. 2.3 in SVR 2011 IV n° 26 p. 73), à l'anesthésie dissociative et aux atteintes sensorielles (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 9/07 du 9 février 2007 consid. 4 in SVR 2007 IV n° 45 p. 149), à l’hypersomnie (ATF 137 V 64 consid. 4) ainsi qu'en matière de troubles moteurs dissociatifs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4), de traumatisme du type « coup du lapin » (ATF 141 V 574 consid. 5.2 et ATF 136 V 279 consid. 3.2.3) et d’état de stress post-traumatique (ATF 142 V 342 consid. 5.2) et en cas de troubles psychiques En revanche, ils ne sont pas applicables par analogie à la fatigue liée au cancer (cancer-related Fatigue) (ATF 139 V 346 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_73/2013 du 2 septembre 2013 consid. 5).

La reconnaissance de l'existence d’une fibromyalgie suppose d'abord la présence d'un diagnostic émanant d’un rhumatologue s'appuyant lege artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 132 V 65 consid. 3.2).

La reconnaissance de l'existence de troubles somatoformes douloureux persistants suppose la présence d'un diagnostic émanant d'un psychiatre.

La reconnaissance d’un trouble psychique doit reposer sur un diagnostic posé par un psychiatre (ATF 130 V 396 consid. 5.3).

Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

5.3 Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références).

L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Il convient ici de relever que l’entrée en vigueur de l’art. 17 LPGA, le 1er janvier 2003, n’a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés sous le régime de l’ancien art. 41 LAI, de sorte que ceux-ci demeurent applicables par analogie (ATF 130 V 343 consid. 3.5).

Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 144 I 103 consid. 2.1 ; 134 V 131 consid. 3 ; 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; ATF 112 V 371 consid. 2b ; 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

5.4  

5.4.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

5.4.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références).

6.             Dans un premier grief, le recourant conteste la valeur probante de l’expertise administrative.

 

6.1  

6.1.1 Il a fait valoir en particulier que la conclusion de l’expertise psychiatrique, selon laquelle sa capacité de travail était entière depuis toujours, faisait totalement abstraction des nombreux diagnostics décrits par les Drs F______ et H______ ainsi que sa psychologue.

Le recourant a encore fait valoir que l’expert s’était prononcé sur sa capacité dans le passé en prenant en compte uniquement les constatations faites le jour de l’expertise.

6.1.2 Selon l’intimé, l’expertise devait se voir reconnaître une pleine valeur probante. Du point de vue psychiatrique, l’expert ne retenait pas de comorbidité psychiatrique ayant une influence sur la capacité de travail. L’examen des indicateurs permettait de retenir que l’examen clinique n’objectivait aucune atteinte psychiatrique invalidante.

De plus, l’absence d’un traitement antidépresseur et d’hospitalisation psychiatrique et un suivi de six mois seulement auprès d’une psychologue plaidaient indirectement contre un trouble incapacitant, une décompensation du trouble de la personnalité et des limitations fonctionnelles significatives.

Il ressortait du rapport d’expertise que le recourant était capable de s’adapter aux règles et routines, qu’il planifiait et structurait des tâches et qu’il avait la capacité de prendre des décisions. Il effectuait des tâches ménagères (rangements ou courses) et avait des relations proches avec sa famille. Il n’avait pas de difficultés particulières dans son environnement social. L’analyse de sa vie quotidienne indiquait qu’il n’existait pas de limitation uniforme dans toutes les activités de la vie quotidienne et que le recourant disposait de ressources personnelles préservées.

6.2  

6.2.1 En l’espèce, si le rapport de l’expert psychiatre est assez succinct et s’il n’a pas commenté les rapports des médecins traitants du recourant, celui-ci a néanmoins indiqué que l’examen psychiatrique auquel il avait procédé était sans particularité et qu’il ne trouvait pas de psychopathologie spécifique chez le recourant. Il a expliqué qu’il ne retenait pas un PTSD chez le recourant, parce qu’il n’avait pas connu de phénomènes de guerre, de mort violente, de torture, de terrorisme, de viol ou d’autres crimes, et qu’il ne mentionnait pas de reviviscences répétées de l’événement traumatique, de phénomènes de flashbacks, ni de cauchemars, mais seulement des réveils algiques nocturnes. Il n’y avait pas d’anesthésie psychique chez le recourant, qui était correctement affecté, notamment à l’endroit de sa famille. Il n’y avait pas d’émoussement émotionnel, ni d’insensibilité à l’environnement chez le recourant, qui avait de bonnes relations avec ses anciens collègues de travail. Il n’existait pas d’anhédonie, car il s’intéressait au sport mécanique. On ne retrouvait pas d’attaque de panique ou de réaction agressive, d’état d’hypervigilance, ni de dépression ou d’abus d’alcool. L’expert relevait encore que le recourant n’avait pas de traitement psychiatrique et psychothérapeutique intégré et qu’il ne prenait pas de traitement psychopharmacologique.

Pour l’expert, le recourant ne souffrait à l’évidence pas d’épisodes dépressifs caractérisés, car il avait une modulation affective efficace. Il était sthénique et ne mentionnait pas d’inflexion thymique constante supérieure à deux semaines. L’expert a relevé, sous « Évaluation médicale », que l’état du recourant s’était prétérité en 2018 alors qu’il était déménageur et qu’il avait effectué une chute du troisième étage, qu’il n’avait jamais été hospitalisé en milieu psychiatrique et qu’il avait rencontré une psychologue durant six mois et conclu que sa santé psychiatrique était sans particularité.

Les conclusions du Dr P______ sont ainsi assez motivées pour que l’on comprenne pour quels motifs, il n’a pas retenu un PTSD, ni un état dépressif. Ses conclusions rejoignent celles du psychiatre de la CRR, qui mentionnait, le 5 février 2019, que les symptômes de type PTSD s’étaient considérablement améliorés sous traitement EMDR depuis l’entrée en clinique du recourant et qu’aucun trouble psychopathologique patent n’avait été constaté pendant son séjour.

Par ailleurs, le Dr F______ ne s’est pas prononcé sur le diagnostic de trouble dépressif, dans son rapport du 2 août 2018, au motif qu’il n’avait alors vu le recourant qu’à une reprise.

Quant à la psychologue G______, elle a indiqué le 6 juin 2019, qu’entre juin et septembre 2018, les symptômes de stress post-traumatique du recourant s’étaient améliorés, précisant que les réactions d’hypervigilance, les cauchemars ainsi que les flashbacks avaient presque totalement disparu, si bien que le recourant avait décidé d’arrêter le suivi à la fin du mois de septembre 2018, ce qui confirme également l’analyse du Dr P______.

6.2.2 La chambre de céans constate encore que le Dr P______ a pris en compte l’état du recourant avant son examen, du moins partiellement, dès lors qu’il a notamment indiqué dans son rapport que celui-ci n’avait pas d’antécédents familiaux et qu’il n’avait jamais été hospitalisé en psychiatrie. Il a également mentionné que le recourant avait rencontré une psychologue pendant six mois, qu’il n’avait pas de traitement psychiatrique et psychothérapeutique intégré, ni de traitement psychopharmacologique, ce qui n’apparaît pas contraire aux pièces du dossier. Par ailleurs, le rapport d’expertise contient un résumé des pièces médicales du dossier, en particulier celles relatives à l’état psychique du recourant. On peut certes reprocher à l’expert de ne pas avoir nuancé ses conclusions en ne se prononçant pas sur l’éventuelle existence d’un PTSD en 2018, mais cette lacune ne remet pas sérieusement en cause ses conclusions, étant relevé qu’est déterminante, dans le cas d’espèce, la situation au 15 février 2021, l’intimé ayant admis un totale incapacité de travail du recourant jusqu’à cette date sur le plan orthopédique.

6.2.3 La chambre de céans constate qu’il ressort des pièces du dossier que sur le plan psychiatrique, la situation du recourant s’est améliorée, puisqu’il a cessé son suivi avec la psychologue G______ en septembre 2018, estimant qu’il n’était plus nécessaire. Il a certes repris un suivi psychothérapeutique, en 2019, sur la recommandation des médecins de la CRR, mais le 18 septembre 2019, sa psychologue a indiqué que les réactions d’hypervigilance, ses cauchemars ainsi que ses flashbacks avaient disparu et que son humeur s’était améliorée malgré la persistance des douleurs physiques importantes au quotidien. Il souffrait toujours d’un isolement social suite à l’arrêt de son activité professionnelle, mais faisait preuve d’une grande adaptation à ce sujet. Concernant son futur, notamment professionnel, les doutes et l’anxiété étaient encore présents. Le recourant se disait motivé à trouver des solutions pour l’avenir. Son état psychologique général s’était clairement amélioré et de ce fait il avait été décidé d’espacer les séances en vue d’une fin de prise en charge.

Dans son rapport du 20 mai 2020, le Dr J______, du service d’anesthésiologie, a indiqué que les douleurs du recourant étaient en constante amélioration, quoique lente, et que depuis plusieurs mois, il avait retrouvé une certaine qualité de sommeil, qui était à nouveau réparateur. Ce rapport confirme l’amélioration de l’état du recourant, tant sur le plan somatique que psychologique.

Le rapport établi le par la Dre E______, confirme que le recourant bénéficiait de ressources, puisqu’elle relevait sa résilience après son traumatisme et sa capacité à mobiliser ses ressources personnelles et à faire appel à son entourage. Quant à la psychologue G______, elle a constaté, le 18 septembre 2019, que le recourant souffrait toujours d’un isolement social suite à l’arrêt de son activité professionnelle, mais qu’il faisait preuve d’une grande adaptation à ce sujet, ce qui confirme les ressources du recourant.

Les déclarations du recourant à la chambre de céans confirment qu’il disposait de ressources, échangeant et s’entendant bien tant avec la personne avec laquelle il habitait, qu’avec sa mère, qu’il avait deux fois par semaine au téléphone. S’il a indiqué qu’il n’avait pas d'amis pour des raisons qui lui étaient propres, il a précisé voir régulièrement ses enfants, avec lesquels il avait de bonnes relations, ce qui l’aidait moralement. Il s’occupait parfois de sa petite-fille de 4 ans et depuis son accident, il parlait de nouveau à son ex-femme.

L’analyse des indicateurs de gravité fait par l’expert psychiatre n’apparaît en outre pas contraire au dossier. Aucun rapport médical au dossier ne remet sérieusement en cause la conclusion de l’expert psychiatre, selon laquelle la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était de 100%, à tout le moins dès le 15 février 2021, et cette appréciation est convaincante.

6.3  

6.3.1 Le recourant a encore fait valoir que la partie orthopédique de l’expertise souffrait également de carences. Ses douleurs au dos et au membre supérieur droit n’avaient pas été suffisamment prises en compte. Elles étaient mentionnées et jugées plausibles et cohérentes, mais lorsqu’il s’agissait de motiver leur impact sur la capacité de gain, l’expert orthopédiste s’était contenté de conclure à des limitations fonctionnelles. Or, il était requis dans les mandats d’expertise de justifier plus précisément des capacités, des ressources et des difficultés en lien avec les douleurs. L’expert n’avait pas non plus traité de leur évolution sur la durée ou de leur effet combiné sur sa situation.

6.3.2 Selon l’intimé, les experts avaient tenu compte des avis des médecins traitants lors de leur expertise. Aucun élément objectivement vérifiable – de nature clinique ou diagnostique – qui aurait été ignoré dans le cadre de l’instruction et de l’expertise et qui serait suffisamment pertinent pour remettre en cause le bien-fondé des conclusions des experts n’avait été apporté par le recourant. Il ne suffisait pas de prétendre que l’expert aurait dû présenter des conclusions différentes.

6.4 La chambre de céans constate que l’expert orthopédiste a retenu les diagnostics incapacitants de status après fractures du rachis dorsal et de l’avant-bras droit et comme limitations fonctionnelles, la marche prolongée, les travaux en porte-à-faux, le port de charge répété et supérieure à 10 kg et les travaux nécessitant une importante force de préhension avec le membre supérieur droit. Il a relevé que le recourant n’avait plus de suivi médical et que sa situation était stabilisée. Il ne se souvenait plus à quand remontait son dernier rendez-vous avec son généraliste. Les douleurs lombaires n’irradiaient pas dans les membres inférieurs dans lesquels il n’y avait ni paresthésies ni parésie. Les douleurs rachidiennes dont se plaignait le recourant étaient cohérentes et plausibles avec les fractures subies. Il indiquait prendre du Dafalgan et du Cebrelex en alternance, précisant pouvoir parfois rester une semaine sans consommer d’antalgiques. Il n’avait pas l’impression que ces médicaments lui procuraient une réelle amélioration.

Il ressort du rapport de l’expert que l’intensité des douleurs du recourant doit être relativisée par rapport à ses plaintes. Par ailleurs, faute de diagnostic d’une symptomatologie douloureuse sans substrat organique, la capacité de travail n’avait pas à être examinée selon les indicateurs de gravité développés par le Tribunal fédéral. Même si l’on considérait qu’une telle analyse devait être faite, il faudrait conclure que les atteintes du recourant n’étaient pas invalidantes, en se référant à l’analyse et aux conclusions de l’expert psychiatre qui a examiné ces indicateurs. Le recourant n’invoque enfin pas d’éléments médicaux remettant sérieusement en cause les conclusions de l’expert orthopédiste. Les conclusions de ce dernier sont donc probantes.

6.5  

6.5.1 Le recourant a fait valoir que la partie consensuelle de l’expertise s’apparentait plus à un résumé de chacune des expertises sans que l’on puisse saisir comment les experts avaient croisé leurs constatations pour arriver à une analyse globale de la situation.

6.5.2 La chambre estime que les conclusions consensuelles des experts sont suffisantes et convaincantes. En l’absence de psychopathologie incapacitante, il n’y avait pas lieu à une analyse globale de la situation très poussée.

6.6 En conclusion, l’expertise administrative doit se voir reconnaître une pleine valeur probante.

7.             En conséquence, la décision querellée doit être confirmée en tant qu’elle retient que le recourant a retrouvé une pleine capacité de travail dans une activité adaptée dès le 15 février 2021.

8.              

8.1  

8.1.1 Le recourant a contesté l’abattement sur le revenu avec invalidité retenu par l’intimé en raison des limitations fonctionnelles, faisant valoir que son âge et le fait que ses limitations fonctionnelles ne lui permettaient plus d’effectuer aucune des activités qu’il avait effectuées ces trente dernières années justifiaient un abattement plus élevé que 10%. Si son âge n’était pas un critère à lui tout seul, il devait être pris en considération de manière globale tout comme les nombreuses années de service dans l’activité habituelle. En omettant tous les facteurs étrangers aux limitations fonctionnelles, l’intimé avait injustement limité son pouvoir d’examen.

8.1.2 L’intimé a répondu que l’abattement de 10% était conforme au droit et qu’hormis les limitations fonctionnelles, il n’y avait pas d’autres éléments déterminants justifiant une réduction supplémentaire du revenu avec invalidité. Il s’était fondé sur les données économiques statistiques, singulièrement sur le revenu auquel pouvaient prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives (niveau 1 de qualification). Cette valeur statistique s’appliquait en principe à tous les assurés qui ne pouvaient plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle était physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservaient néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique était suffisamment représentatif de ce qu’ils seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides, dès lors qu’il recouvrait un large éventail d’activités variées et non qualifiées, n’impliquant pas de formation particulière et compatibles avec les limitations fonctionnelles présentées

L’âge du recourant au moment de la survenance de l’hypothétique invalidité était encore éloigné du seuil à partir duquel la jurisprudence parlait d’un âge avancé, l’assuré étant alors âgé de 53 ans. L’intimé n’avait ainsi pas abusé de son pouvoir d’appréciation.

8.2 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximale de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Le point de savoir s’il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d’autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral; en revanche, l’étendue de l’abattement à opérer sur le salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d’appréciation, qui est soumise à l’examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d’appréciation de manière contraire au droit (ATF 137 V 71 consid. 5.1; 132 V 393 consid. 3.3).

S'agissant des limitations fonctionnelles, il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d'une pleine capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2013 du 22 août 2013 consid. 5.3).

Bien que l'âge soit inclus dans le cercle des critères déductibles depuis la jurisprudence de l'ATF 126 V 75 – laquelle continue de s'appliquer (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_470/2017 du 29 juin 2018 consid. 4.2) – il ne suffit pas de constater qu'un assuré a dépassé la cinquantaine au moment déterminant du droit à la rente pour que cette circonstance justifie de procéder à un abattement. Selon le Tribunal fédéral l'effet de l'âge combiné avec un handicap doit faire l'objet d'un examen dans le cas concret, les possibles effets pénalisants au niveau salarial induits par cette constellation aux yeux d'un potentiel employeur pouvant être compensés par d'autres éléments personnels ou professionnels tels que la formation et l'expérience professionnelle de l'assuré concerné (arrêt 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5). Il a considéré qu'un assuré ayant accompli plusieurs missions temporaires, alors qu'il était inscrit au chômage consécutivement à la cessation d'activité de son ancien employeur, disposait d'une certaine capacité d'adaptation sur le plan professionnel susceptible de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge (59 ans au moment déterminant), surtout dans le domaine des emplois non qualifiés qui sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l'âge de l'intéressé sur le marché équilibré du travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5; voir aussi arrêts du Tribunal fédéral 8C_403/2017 du 25 août 2017 consid. 4.4.1 et 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.4.3). À l'inverse, dans un autre arrêt récent rendu en matière d'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_470/2017 du 29 juin 2018 consid. 4.2), le Tribunal fédéral a retenu un taux d'abattement de 10% dans le cas d'un assuré âgé de 61 ans qui, durant de longues années, avait accompli des activités saisonnières dans le domaine de la plâtrerie et dont le niveau de formation était particulièrement limité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_103/2018 du 25 juillet 2018 consid. 5.2).

Dans un arrêt du 26 mai 2023 (8C_438/2022 consid. 4.3.4 à 4.3.6), le Tribunal fédéral a considéré que l’assuré n’exposait pas – et on ne voyait pas – en quoi ses perspectives salariales seraient concrètement réduites sur un marché du travail équilibré en raison de son âge. En outre, étant âgé de 53 ans au moment de la naissance du droit à la rente, respectivement de 54 ans au moment de la décision sur opposition, l’assuré n’avait pas encore atteint l’âge à partir duquel le Tribunal fédéral reconnaît généralement que ce facteur peut être déterminant et nécessite une approche particulière (arrêts du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.2; 8C_175/2020 du 22 septembre 2020 consid. 4.2). Comme les activités adaptées envisagées du niveau de compétence 1 ne requéraient ni formation, ni expérience professionnelle spécifique, les effets pénalisants au niveau salarial induits par l’âge ne pouvaient pas être considérés comme suffisamment établis. En outre, il fallait rappeler que ces emplois non qualifiés étaient, en règle générale, disponibles indépendamment de l’âge de l’intéressé sur un marché du travail équilibré (cf. ATF 146 V 16 consid. 7.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 8C_661/2018 du 28 octobre 2019 consid. 3.3.4.2; 8C_103/2018 du 25 juillet 2018 consid. 5.2).

En ce qui concernait la prise en compte d’un abattement lié aux années de service, elle n’est pas justifiée dans le cadre du choix du niveau de compétence 1 de l’ESS, l’influence de la durée de service sur le salaire étant peu importante dans cette catégorie d’emplois qui ne nécessitent ni formation ni expérience professionnelle spécifique (voir 8C_103/2018 précité consid. 5.2). En conclusion, seules les limitations fonctionnelles de l’assuré – prohibant les déplacements rapides ou prolongés au-delà de 15 minutes, l’utilisation répétée d’escaliers, le déplacement prolongé en terrain instable, le port de lourdes charges ainsi que les positions agenouillées ou accroupies – avaient une incidence sur les activités simples et légères qui restent exigibles de sa part. Dès lors que l’assurance avait tenu compte desdites limitations pour réduire le salaire statistique de 5%, il n’appartenait pas au Tribunal fédéral de s’en écarter.

8.3 En l’espèce, l’abattement de 10% fixé par l’intimé apparaît justifié pour tenir compte des limitations fonctionnelles du recourant, au vu la jurisprudence précitée, dès lors qu’il avait 50 ans au moment déterminant, soit en février 2021, et que seules des activités simples et répétitives étaient exigibles de lui, lesquelles ne nécessitent pas de compétences, ni de formations particulières.

9.             Infondé, le recours sera rejeté et un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge du recourant (art. 69 al.1bis LAI).

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Florence SCHMUTZ

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le