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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3663/2023

ATAS/302/2024 du 02.05.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3663/2023 ATAS/302/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 2 mai 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en décembre 1966, assistante sociale dans la commune B______, a déposé une demande de prestations invalidité, qui a été reçue par l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé) en date du 18 mars 2022.

b. Dans un rapport médical à destination de l’OAI daté du 29 avril 2022, la docteure C______, médecin interne au sein du service d’hématologie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), a certifié que l’assurée souffrait d’une leucémie et était en incapacité de travail, pour toute activité, à 100%. Un éventuel potentiel de réadaptation devrait être examiné selon l’évolution post greffe des cellules souches hématopoïétiques.

c. La docteure D______, spécialiste FMH en médecine générale, a décrit les limitations actuelles cliniques de l’assurée dans son attestation médicale du 20 mars 2023. En substance, elle a considéré que sa patiente pouvait reprendre une activité à 20% dans un domaine non soumis au stress et sans contact avec le public ; cette reprise thérapeutique partielle devait s’effectuer sous contrôle médical régulier et l’arrêt de travail à 100% se poursuivait en parallèle.

d. Selon la note de travail du 20 juin 2023 établie par le service de réadaptation de l’OAI, l’employeur ne pouvait pas offrir, à court terme, un poste de travail dans le cadre de mesures de réadaptation de l’assurée correspondant à ses limitations fonctionnelles. Il était toutefois envisageable de verser une rente d’invalidité et de garder le contrat de travail de l’assurée pour une évaluation à la fin de l’année 2024, dans le but d’une éventuelle reprise du poste habituel par cette dernière.

e. Dans son rapport du 29 juin 2023, sous la plume de la docteure E______, le service médical régional (ci-après : le SMR) de l’OAI a résumé le dossier et considéré qu’en raison des effets secondaires de la chimiothérapie en cours jusqu’en mars 2024 et de la fragilité psychique, une incapacité de travail totale dans toute activité lucrative, depuis le 16 août 2021, était justifiée. L’exigibilité médico-théorique était donc nulle depuis cette date. En cas d’octroi de prestations, une révision devait être effectuée dans une année, à l’issue des traitements. À la suite de cette détermination, le service de réadaptation de l’OAI a proposé de prendre en compte un degré d’invalidité de 100% dans un rapport final du 30 juin 2023.

f. Dans une note relative au choix de la méthode d’évaluation de l’invalidité, datée du 3 juillet 2023, un statut mixte de 80% pour l’activité lucrative et de 20% pour les travaux habituels du ménage a été retenu.

B. a. Par projet de décision du 4 juillet 2023, l’OAI s’est déterminé pour le droit à une rente entière, sur la base d’un degré d’invalidité de 80%, à partir du 1er septembre 2022. L’OAI a retenu un statut d’assuré d’une personne se consacrant à 80% à son activité professionnelle et à 20% à l’accomplissement de ses travaux habituels dans le ménage. À l’issue de l’instruction médicale, l’OAI reconnaissait une incapacité de travail totale dans toute activité, dès le 16 août 2021, correspondant au début du délai d’attente d’un an. Une enquête économique sur le ménage était considérée comme superflue dès lors qu’elle n’aurait aucune incidence sur le droit à une éventuelle rente puisqu’un degré d’invalidité de 80% était retenu, ce qui donnait droit à une rente entière.

b. Par courrier du 29 juin 2023 de son mandataire, l’assurée a demandé une copie intégrale de son dossier. Par courrier du 12 septembre 2023, l’OAI a informé l’assurée de la fin de la procédure d’audition et du fait qu’une décision sujette à recours allait lui parvenir.

c. Par décision du 5 octobre 2023, l’OAI a confirmé en tous points les termes du projet de décision.

C. a. Par acte posté en date du 7 novembre 2023, l’assurée a recouru contre la décision du 5 octobre 2023 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), mentionnant qu’elle contestait partiellement la décision de l’OAI en ceci qu’aucune évaluation n’avait été faite concernant les empêchements dans la sphère des travaux habituels du ménage, ce qui péjorait le montant de la pension d’invalidité versée par sa caisse de pension CAP Prévoyance (ci-après : CAP). Elle concluait donc à une nouvelle évaluation par l’OAI du degré d’invalidité, mais uniquement en ce qui concernait les limitations dans la sphère des travaux habituels du ménage.

b. Par courrier du 5 décembre 2023, l’OAI a conclu au rejet du recours. Les institutions de prévoyance étaient tenues d’appliquer le taux d’invalidité déterminé par l’assurance-invalidité uniquement pour la part concernant l’activité lucrative et non dans les travaux habituels. En effet, l’assurance-invalidité couvrait non seulement l’incapacité de gain mais aussi les empêchements dans les travaux du ménage et déterminait le degré d’invalidité des personnes exerçant une activité lucrative à temps partiel selon la méthode mixte. Dans la prévoyance professionnelle, en revanche, seule la capacité de gain était assurée. Dès lors, le taux d’invalidité calculé par la prévoyance professionnelle pouvait différer de celui de l’assurance-invalidité car seules les limitations concernant l’activité lucrative étaient déterminantes pour cette dernière. Compte tenu de ces éléments, la recourante ne faisait valoir aucun intérêt à la poursuite de la présente procédure car son droit à une rente entière était reconnu. Par ailleurs, la caisse de pension pouvait confirmer à l’assurée que, selon les dispositions légales applicables, le taux d’empêchement dans les travaux habituels n’avait aucune influence sur le droit aux prestations dans le cas de la prévoyance professionnelle.

c. Par réplique du 25 janvier 2024, la recourante a transmis à la chambre de céans divers documents, notamment un échange de courriels datant de janvier 2024 avec CAP qui confirmait la prise en compte, dans le calcul de la rente LPP, du degré d’invalidité reconnu par l’OAI, sans distinction entre le volet professionnel et le volet ménager. Compte tenu de ces éléments, la recourante maintenait sa demande que les limitations dans la sphère des travaux habituels du ménage soient évaluées sur la base des pièces au dossier et des documents complémentaires qu’elle joignait à son courrier.

d. Par duplique du 6 mars 2024, l’OAI s’est déterminé en répétant que l’évaluation opérée par les organes compétents de l’assurance-invalidité ne liait pas l’institution de prévoyance lorsque l’assuré exerçait son activité lucrative à temps partiel. Dans un tel cas, le degré d’invalidité fixé par l’OAI était contraignant pour la prévoyance professionnelle, uniquement pour ce qui concernait la partie lucrative. En effet, la prévoyance professionnelle obligatoire et étendue avait pour but d’assurer seulement l’activité lucrative.

e. La duplique de l’OAI a été transmise à l’assurée, qui n’a pas réagi.

f. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

g. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2. À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

3. Le 1er janvier 2022 sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ‑ RS 831.201 ; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, la décision querellée porte sur l’octroi d’une rente dont le droit est né postérieurement au 31 décembre 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

4. Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l’OAI de ne pas avoir effectué d’enquête ménagère afin d’évaluer le degré d’invalidité de l’assurée dans la sphère du ménage.

6. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

7. En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; ATF 130 V 343 consid. 3.4). La détermination du taux d'invalidité ne saurait reposer sur la simple évaluation médico-théorique de la capacité de travail de l'assuré car cela revient à déduire de manière abstraite le degré d'invalidité de l'incapacité de travail, sans tenir compte de l'incidence économique de l'atteinte à la santé (ATF 114 V 281 consid. 1c et 310 consid. 3c ; RAMA 1996 n° U 237 p. 36 consid. 3b).

8. Tant lors de l'examen initial du droit à la rente qu'à l'occasion d'une révision de celle-ci (art. 17 LPGA), il faut examiner sous l'angle des art. 4 et 5 LAI quelle méthode d'évaluation de l'invalidité il convient d'appliquer (art. 28a LAI, en corrélation avec les art. 27 ss RAI). Le choix de l'une des trois méthodes entrant en considération (méthode générale de comparaison des revenus, méthode mixte, méthode spécifique) dépendra du statut du bénéficiaire potentiel de la rente : assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel, assuré non actif. On décidera que l'assuré appartient à l'une ou l'autre de ces trois catégories en fonction de ce qu'il aurait fait dans les mêmes circonstances si l'atteinte à la santé n'était pas survenue. Lorsque l'assuré accomplit ses travaux habituels, il convient d'examiner, à la lumière de sa situation personnelle, familiale, sociale et professionnelle, si, étant valide il aurait consacré l'essentiel de son activité à son ménage ou s'il aurait exercé une activité lucrative. Pour déterminer le champ d'activité probable de l'assuré, il faut notamment prendre en considération la situation financière du ménage, l'éducation des enfants, l'âge de l'assuré, ses qualifications professionnelles, sa formation ainsi que ses affinités et talents personnels (ATF 144 I 28 consid. 2.3 ; ATF 137 V 334 consid. 3.2 ; ATF 117 V 194 consid. 3b ; Pratique VSI 1997 p. 301 ss consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_722/2016 du 17 février 2017 consid. 2.2). Cette évaluation tiendra également compte de la volonté hypothétique de l'assuré, qui comme fait interne ne peut être l'objet d'une administration directe de la preuve et doit être déduite d'indices extérieurs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2015 du 11 mai 2015 consid. 2.3 et l'arrêt cité) établis au degré de la vraisemblance prépondérante tel que requis en droit des assurances sociales (ATF 126 V 353 consid. 5b).

Selon l’art. 27bis RAI en vigueur depuis le 1er janvier 2018, pour les personnes qui exercent une activité lucrative à temps partiel et accomplissent par ailleurs des travaux habituels visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, le taux d'invalidité est déterminé par l'addition des taux suivants : a. le taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative ; b. le taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels (al. 2). Le calcul du taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative est régi par l'art. 16 LPGA, étant entendu que : a. le revenu que l'assuré aurait pu obtenir de l'activité lucrative exercée à temps partiel, s'il n'était pas invalide, est extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps ; b. la perte de gain exprimée en pourcentage est pondérée au moyen du taux d'occupation qu'aurait l'assuré s'il n'était pas invalide (al. 3). Pour le calcul du taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels, on établit le pourcentage que représentent les limitations dans les travaux habituels par rapport à la situation si l'assuré n'était pas invalide. Ce pourcentage est pondéré au moyen de la différence entre le taux d'occupation visé à l'al. 3, let. b, et une activité lucrative exercée à plein temps (al. 4).

Sous l’empire de l’art. 27bis al. 2 à 4 RAI modifié, le calcul du taux d’invalidité pour la partie concernant l’activité lucrative demeure régi par l’art. 16 LPGA. L’élément nouveau est que le revenu sans invalidité n’est plus déterminé sur la base du revenu correspondant au taux d’occupation de l’assuré, mais est désormais extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps. La détermination du revenu d’invalide est, quant à elle, inchangée. La perte de gain exprimée en pourcentage du revenu sans invalidité est ensuite pondérée au moyen du taux d’occupation auquel l’assuré travaillerait s’il n’était pas invalide.

Le taux d’invalidité en lien avec les travaux habituels est, comme c’était le cas auparavant, déterminé au moyen de la méthode de comparaison des types d’activités prévue à l’art. 28a al. 2 LAI. De même que pour les assurés qui accomplissent des travaux habituels à plein temps, l’invalidité est calculée en fonction de l’incapacité de l’assuré à accomplir ses travaux habituels. La limitation ainsi obtenue est pondérée au moyen de la différence entre le taux d’occupation de l’activité lucrative et une activité à plein temps. Le taux d’invalidité total est obtenu en additionnant les deux taux d’invalidité pondérés (cf. Ralph LEUENBERGER, Gisela MAURO, Changements dans la méthode mixte, in Sécurité sociale/CHSS n° 1/2018 p. 45).

9. Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 130 V 97).

L'évaluation de l'invalidité des assurés pour la part qu'ils consacrent à leurs travaux habituels nécessite l'établissement d'une liste des activités que la personne assurée exerçait avant la survenance de son invalidité, ou qu'elle exercerait sans elle, qu'il y a lieu de comparer ensuite à l'ensemble des tâches que l'on peut encore raisonnablement exiger d'elle, malgré son invalidité, après d'éventuelles mesures de réadaptation. Pour ce faire, l'administration procède à une enquête sur place et fixe l'ampleur de la limitation dans chaque domaine entrant en considération. En vertu du principe général de l'obligation de diminuer le dommage, l'assuré qui n'accomplit plus que difficilement ou avec un investissement temporel beaucoup plus important certains travaux ménagers en raison de son handicap doit en premier lieu organiser son travail et demander l'aide de ses proches dans une mesure convenable. La jurisprudence pose comme critère que l'aide ne saurait constituer une charge excessive du seul fait qu'elle va au-delà du soutien que l'on peut attendre de manière habituelle sans atteinte à la santé. En ce sens, la reconnaissance d'une atteinte à la santé invalidante n'entre en ligne de compte que dans la mesure où les tâches qui ne peuvent plus être accomplies le sont par des tiers contre rémunération ou par des proches et qu'elles constituent à l'égard de ces derniers un manque à gagner ou une charge disproportionnée (ATF 133 V 504 consid. 4.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_191/2021 du 25 novembre 2021 consid. 6.2.2 et les références).

10.

10.1 En l’espèce, la recourante ne conteste pas le taux d’invalidité retenu par l’intimé, pas plus que le montant de la rente entière ou la date du début de versement de cette dernière.

Elle ne remet pas en question les prestations versées par l’OAI mais reproche à l’intimé de n’avoir pas effectué une enquête économique du ménage, au motif que cette dernière permettait d’évaluer son degré d’invalidité dans la sphère du ménage.

Selon la recourante, l’absence d’enquête économique dans les travaux du ménage a pour conséquence que sa caisse de pension CAP a limité le versement de ses prestations à la part concernant l’activité lucrative, les empêchements dans les travaux du ménage n’étant pas déterminés au vu de l’absence d’enquête économique.

À l’appui de son argumentation, la recourante produit, notamment, l’échange de courriels suivants :

dans son courriel du 12 janvier 2024 adressé à CAP, la recourante mentionne que selon ce qui lui aurait été dit par un employé de CAP, si l’OAI lui reconnaissait un degré d’invalidité de 100%, comprenant les sphères d’activité lucrative et non lucrative, la rente LPP allouée correspondrait à 100% de la rente d’invalidité LPP assurée, indépendamment de son taux d’activité professionnel de 80% ;

dans son courriel de réponse du 17 janvier 2024, CAP confirme que conformément à l’art. 25 al. 1 et 2 du règlement « Ville de Genève et les autres communes genevoises », le degré d’invalidité reconnu par CAP est celui reconnu par l’OAI. Les dispositions réglementaires qui relèvent de la prévoyance surobligatoire ne font aucune distinction entre le volet professionnel et ménager et la rente invalidité est, dès lors, allouée proportionnellement au degré d’invalidité reconnu par l’OAI.

10.2 L’OAI de son côté allègue que, selon une jurisprudence constante, l’évaluation opérée par les organes compétents de l’assurance-invalidité ne lie pas l’institution de prévoyance lorsque l’assuré exerce une activité lucrative à temps partiel. Le degré d’invalidité fixé par l’OAI est contraignant pour la prévoyance professionnelle, uniquement pour ce qui concerne la partie lucrative. L’OAI souligne encore que l’assurance-invalidité couvre non seulement l’incapacité de gain, mais aussi les empêchements dans les travaux du ménage et que le degré d’invalidité des personnes exerçant une activité lucrative à temps partiel est déterminé selon la méthode mixte. En revanche, dans la prévoyance professionnelle, seule la capacité de gain est assurée. Dès lors, l’OAI constate que le taux d’invalidité calculé par la prévoyance professionnelle peut ainsi différer de celui de l’assurance-invalidité, car cette limitation concernant l’activité lucrative est déterminante pour l’OAI. Dès lors que le droit à une rente entière lui est reconnu, la recourante ne fait valoir aucun intérêt à la poursuite de la procédure en matière d’assurance-invalidité.

10.3 Dès lors que l’intérêt au recours ne provient pas de la violation des dispositions sur l’assurance-invalidité, il sied d’examiner, de plus près, l’intérêt invoqué par la recourante afin de déterminer si elle dispose de la qualité pour recourir, au sens de l’art. 59 LPGA, qui énonce que la qualité pour recourir appartient à quiconque est touché par une décision et a un intérêt digne d’être protégé à ce qu’elle soit annulée ou modifiée.

Il est admis qu’un recourant ne peut pas se prévaloir d’un intérêt digne de protection à la rectification du taux d’invalidité fixé dans la décision litigieuse, si la rectification n’entraîne aucun changement du droit à la rente (cf. Jean METRAL, in DUPONT/ MOSER-SZELESS [éd.] Commentaire romand de la LPGA, 2018, n. 15 ss ad art. 59 et les références).

Le Tribunal fédéral s’est prononcé, par arrêt du 17 mai 2011 (9C_858/2010), sur le cas particulier d’un recourant qui ne contestait pas la quotité de la rente octroyée par l’OAI, mais uniquement le degré d’invalidité retenu ; il s’est déterminé comme suit (traduction libre du consid. 1) : « lors d'une décision concernant des prestations d'assurance, seule la prestation fait en principe l'objet du dispositif. La réponse à la question de savoir quel degré d'invalidité a servi de base à l'octroi de la rente ne sert en revanche en règle générale qu'à motiver la décision de prestation. Elle ne pourrait faire partie du dispositif que si et dans la mesure où elle fait l'objet d'une décision de constatation. Étant donné que, dans tous les cas, seul le dispositif est attaquable, il convient d'examiner, en cas de contestation des motifs d'une décision de prestation, si la modification du dispositif n'est pas ainsi sollicitée par analogie. Il convient ensuite d'examiner si le recourant a éventuellement un intérêt digne de protection à la constatation immédiate concernant l'élément contesté de la décision (SVR 2009 LPP n° 27 p. 97, arrêt 8C_539/2008 consid. 2.2 ; SVR 2007 IV no 3 p. 8 consid. 1.3 avec référence arrêt I 808/05 du 9 juin 2006) ».

Le Tribunal fédéral a poursuivi (même arrêt, traduction libre du consid. 2.3.2) : « le degré d'invalidité déterminé dans la procédure AI ne déploie toutefois pas d'effet contraignant pour la prévoyance professionnelle, et il n'existe pas non plus d'intérêt digne de protection à une contestation (indépendante), lorsqu'il ne doit pas être déterminé de manière exacte (« précise »), car une estimation grossière suffit pour fixer l'étendue du droit ou pour nier un droit (arrêt 9C_909/2010 du 15 décembre 2010 consid. 2.2.2 ; arrêt 9C_345/2008 du 25 juillet 2008 consid. 2.2 avec renvois ; cf. aussi SVR 2007 IV no 3 p. 8, I 808/05 consid. 4.2). Dans ce cas, l'institution de prévoyance éventuellement tenue de verser des prestations devra déterminer d'office le degré d'invalidité avec toute la diligence requise (arrêt 9C_345/2008 du 25 juillet 2008 consid. 2.3 avec référence). Pour ce faire, elle peut s'appuyer sur les investigations médicales et relatives à l'acquisition du revenu effectuées dans le cadre de la procédure AI (ATF 118 V 35 consid. 2b/aa p. 40) ».

Sur la question de l’aspect contraignant de la décision de l’OAI, le Tribunal fédéral a précisé, dans un arrêt du 7 mars 2018 (9C_426/2017), l’absence de liens entre la rente d’invalidité versée dans le cadre de la prévoyance professionnelle et la rente d’invalidité fixée par l’OAI, en cas d’activité lucrative à temps partiel.

Alors que l’OAI avait alloué à la recourante une rente entière, puis trois quarts de rente (reconnaissant un taux d’invalidité de 68%), l’institution de prévoyance avait retenu un taux d’invalidité de 46.67% donnant droit à un quart de rente d’invalidité selon les dispositions de la prévoyance professionnelle. Comme dans le cas d’espèce, la recourante exerçait une activité à temps partiel, soit un taux d’occupation de 60% dans la sphère professionnelle et 40% dans la sphère ménagère.

Notre Haute cour a rappelé sa jurisprudence constante, selon laquelle l'évaluation opérée par les organes compétents de l'assurance-invalidité ne lie pas l'institution de prévoyance lorsque l'assuré exerce son activité lucrative à temps partiel. Dans ce cas, le degré d'invalidité fixé par l'OAI est contraignant pour la prévoyance professionnelle, uniquement en ce qui concerne la partie lucrative. En effet, la prévoyance professionnelle obligatoire et étendue a pour but d'assurer seulement l'activité lucrative (ATF 120 V 106 consid. 4b p. 109 ; voir aussi art. 331a de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations - RS 220]). Dans le cadre de la prévoyance professionnelle, le droit aux prestations est donné seulement s'il existe une couverture d'assurance lors de la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité. Le Tribunal fédéral s'est exprimé en ce sens à plusieurs reprises depuis l'ATF 120 V 106 (arrêts B 47/97 du 15 mars 1999 consid. 2, in PJA 1999 p. 872 ; 9C_161/2007 du 6 septembre 2007 consid. 2 ; 9C_634/2008 du 19 décembre 2008 consid. 5.1 et 5.1.1 ; 9C_821/2010 du 7 avril 2011 consid. 4.2 et 9C_342/2015 du 21 octobre 2015 consid. 3 ; voir également ATF 141 V 127 consid. 5.3.2 p. 134 ; 136 V 390 consid. 4.2 p. 394).

Les juges ont souligné que la prévoyance professionnelle n'avait pas vocation à assurer la part qui n'est pas consacrée à une activité professionnelle, ce qui explique pourquoi, lors de l'évaluation du degré d'invalidité, on ne prend en considération que le taux d'activité effectivement exercé et non pas sa projection à plein temps.

Le Tribunal fédéral a encore expliqué que, contrairement à l’assurance-accidents, qui ne connaît que la méthode générale pour évaluer l’invalidité, l’assurance-invalidité applique d’autres méthodes de calcul et notamment les méthodes spécifiques ou mixtes. Par ailleurs, les motifs qui peuvent amener un assuré à travailler à temps partiel ne sont pas déterminants dès lors que la prévoyance professionnelle n'assure que la partie consacrée à l'activité lucrative (sur cette question, voir arrêts B 47/97 consid. 2 et 9C_821/2010 consid. 4.2 précités).

10.4 À l’aune de ce qui précède, il sied de constater que la recourante ne bénéficie pas d’un intérêt digne de protection à ce que l’OAI établisse son degré d’invalidité dans la sphère ménagère. Dès lors que l’assurée exerce une activité à temps partiel, l’institution de prévoyance n’est aucunement liée par le taux d’invalidité qui serait retenu par l’OAI dans la sphère ménagère.

11. Partant, la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.

12. La contestation ne portant pas sur des prestations de l’assurance-invalidité, elle n’est pas soumise à des frais judiciaires (art. 69 al. 1bis LAI a contrario).

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le