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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3656/2022

ATAS/513/2023 du 27.06.2023 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3656/2022 ATAS/513/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 juin 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______

représenté par Syndicat UNIA, soit pour lui Mme Laura RUSSO, mandataire

 

recourant

 

contre

CAISSE DE CHÔMAGE UNIA

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Le 18 mars 2021, Monsieur A______ (ci-après : l'assuré, l'intéressé ou le recourant), né en 1965 et marié, carreleur de profession, s'est inscrit à l'assurance-chômage, auprès de l'office cantonal de l'emploi (ci-après: OCE), en vue d'un travail à temps plein, et, le 23 mars 2021, il a déposé auprès de la Caisse de chômage UNIA (ci-après: la caisse ou l'intimée) une demande d'indemnités de chômage à partir du 22 mars 2021.

b. Il a reçu des indemnités de chômage jusqu'au 31 août 2021, et son dossier d'assurance-chômage a été annulé avec effet au 1er septembre 2021, date à partir de laquelle il a été engagé par un nouvel employeur, B______ Sàrl (ci-après: l'employeur), active dans le domaine du carrelage et des revêtements, au taux de 100% (41 heures par semaine).

B. a. Le 1er mars 2022, l'assuré s'est à nouveau inscrit à l'assurance-chômage, auprès de l'OCE, en vue d'un travail à temps plein, et, le 3 mars 2022, il a déposé auprès de la caisse une demande d'indemnités de chômage à partir du 1er mars 2022.

Par lettre du 19 janvier 2022, l'employeur avait confirmé la résiliation de son contrat de travail avec effet au 31 janvier 2022, délai reporté au 28 février 2022 compte tenu du délai de préavis d'un mois.

b. Le 4 mars 2022, l'employeur a émis une "attestation de l'employeur".

c. Le dossier d'assurance-chômage de l'intéressé a été annulé avec effet au 7 mars 2022, date à partir de laquelle il a été engagé par une nouvelle entreprise, C______ SA. Il ressort d'un courriel du 14 juillet 2022 de cette société que l'assuré a été licencié pour des motifs économiques.

d. En parallèle, le 11 mars 2022, l'employeur a répondu par écrit à des questions de la caisse.

e. Le 16 mars 2022, l'assuré s'est réinscrit à l'assurance-chômage, en vue d'un travail à temps plein, et, le 22 mars 2022, il a redéposé auprès de la caisse une demande d'indemnités de chômage à partir du même jour.

f. En réponse à des questions complémentaires de la caisse, l'employeur a, par écrit du 24 mars 2022, complété ses explications déjà fournies.

g. Par décision" de sanction" du 15 juin 2022, l'OCE a prononcé à l'encontre de l'intéressé une suspension de 3 jours de son droit à l'indemnité de chômage, en raison d'une recherche personnelle d'emploi manquante en mai 2022 (il avait effectué neuf recherches sur les dix requises).

h. Le 23 juin 2022, l'assuré s'est déterminé sur les motifs de licenciement indiqués par l'employeur, à l'intention de la caisse. Le motif de son licenciement avait été le fait de ne pas avoir récupéré son permis de conduire, et il n'avait pas d'autres détails à fournir.

i. Le 6 juillet 2022, l'intéressé a répondu des questions complémentaires de la caisse relatives à la problématique du permis de conduire.

j. Par décision du 18 juillet 2022, la caisse a prononcé à l'encontre de l'intéressé une suspension de 31 jours (à partir du 1er mars 2022) de son droit à des indemnités de chômage, en raison d'un chômage fautif du fait de son comportement qui avait été de nature à conduire à son licenciement par l'employeur.

k. Par écrit du 18 août 2022 d'un syndicat, l'assuré a formé opposition contre cette décision, concluant principalement à son annulation, subsidiairement à la diminution de la suspension à 5 jours.

l. Par décision" de sanction" du 1er septembre 2022, l'OCE a prononcé à l'encontre de l'intéressé une suspension de 5 jours de son droit à l'indemnité de chômage, en raison de l'absence totale de recherches personnelles d'emploi en juillet 2022.

m. Par décision sur opposition rendue le 4 octobre 2022, la caisse a partiellement admis l'opposition du 18 août 2022 et a annulé sa décision – initiale – du 18 juillet 2022, le droit de l'assuré à des indemnités de chômage étant finalement suspendu pour une durée de 12 jours (au lieu de 31).

C. a. Par acte du 4 novembre 2022, l'assuré, toujours représenté par le syndicat, a, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), interjeté recours contre cette décision sur opposition, concluant à son annulation ainsi qu'à celle de la sanction prononcée, considérant qu'aucune faute ne lui était imputable.

b. Par réponse du 2 décembre 2022, l'intimée a conclu au rejet du recours.

c. Le 5 janvier 2023, le recourant a répliqué.

d. Le 9 janvier 2023, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger sur mesures d'instruction et au fond.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans la forme et le délai - de trente jours - prévus par la loi, l'acte de recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé et, subsidiairement, la durée de la suspension de l'indemnité de chômage en raison d'un chômage fautif.

4.              

4.1 Selon l'art. 30 al. 1 let. a LACI, il convient de sanctionner par une suspension du droit à l'indemnité de chômage celui qui est sans travail par sa propre faute.

Tel est notamment le cas de l'assuré qui, par son comportement, en particulier par la violation de ses obligations contractuelles de travail, a donné à son employeur un motif de résiliation du contrat de travail (art. 44 al. 1 let. a de l'ordonnance du 31 août 1983 sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité [OACI]). En d'autres termes, il n'est pas nécessaire que l'assuré ait violé ses obligations contractuelles de travail pour qu'une suspension de son droit à l'indemnité de chômage puisse lui être infligée (arrêt du Tribunal fédéral C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 4.2). Il suffit que le comportement à l'origine de la résiliation ait pu être évité si l'assuré avait fait preuve de la diligence voulue, en se comportant comme si l'assurance n'existait pas (ATF 112 V 242 consid. 1).

Pour qu'une sanction se justifie, il faut que le comportement de l'assuré ait causé son chômage. Un tel lien fait défaut si la résiliation est fondée essentiellement sur un autre motif que le comportement du travailleur. Il est par ailleurs indifférent que le contrat de travail ait été résilié de façon immédiate et pour de justes motifs ou à l'échéance du congé légal ou contractuel. Il suffit que le comportement à l'origine de la résiliation ait pu être évité si l'assuré avait fait preuve de la diligence voulue, comme si l'assurance n'existait pas. Le comportement reproché doit toutefois être clairement établi (ATF 112 V 242 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_370/2014 du 11 juin 2015 consid. 2.2 ; Thomas NUSSBAUMER, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Arbeitslosenversicherung, vol. XIV, 3e éd. 2016, p. 2515 n. 837). En outre, il est nécessaire que l'assuré ait délibérément contribué à son renvoi, c'est-à-dire qu'il ait au moins pu s'attendre à recevoir son congé et qu'il se soit ainsi rendu coupable d'un dol éventuel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_268/2015 du 6 août 2015 consid. 4.2 et les références). Le dol simple entraîne a fortiori une sanction (cf. Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 24 ad art. 30 LACI). Il doit y avoir un lien de causalité juridiquement pertinent entre le motif de licenciement, c'est-à-dire le comportement fautif de l'assuré, et le chômage (Bulletin relatif à l'indemnité de chômage [ci-après: Bulletin LACI IC] émis par le Secrétariat d'Etat à l'économie [ci-après: SECO], D15).

Il suffit que le comportement général de l'assuré, au travail, mais aussi en dehors des heures de service, ait donné lieu au congédiement, même sans qu'il y ait de reproches d'ordre professionnel à faire à l'assuré, ou aussi lorsque l'employé licencié présente un caractère, dans un sens large, qui rendait les rapports de service intenables. Le chômage est imputable à une faute de l'assuré notamment en cas de violation par celui-ci d'obligations découlant du contrat de travail (arrêt du Tribunal fédéral C 223/05 du 16 novembre 2005, publié in SVR 2006 ALV n° 15 consid. 1 p. 51).

4.2 S'agissant de la quotité de la sanction, l'art. 30 al. 3 LACI prévoit notamment que la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, 60 jours.

L'art. 45 al. 3 OACI prévoit trois catégories de fautes, soit les fautes légères, les fautes moyennes et les fautes graves, à sanctionner en principe d'une suspension du droit à l'indemnité de chômage pour une durée respectivement de 1 à 15 jours, de 16 à 30 jours et de 31 à 60 jours.

En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution (Bulletin LACI IC). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas d'espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

La faute est qualifiée de légère à grave en cas de licenciement du travailleur dans le respect des délais de congé en raison de son comportement, en particulier de la violation de ses obligations contractuelles de travail. Les avertissements de l'employeur peuvent entraîner un durcissement de la sanction ; leur nombre, leur intervalle, leur motif et le fait que le dernier avertissement précède ou non de peu la résiliation, sont des facteurs à prendre en compte (Bulletin LACI IC, D75).

La durée de la suspension est fixée en tenant compte de toutes les circonstances du cas particulier, telles que le mobile, les circonstances personnelles (l'âge, l'état civil, l'état de santé, une dépendance éventuelle, l'environnement social, le niveau de formation, les connaissances linguistiques, etc.), des circonstances particulières (le comportement de l'employeur ou des collègues de travail, le climat de travail, etc.), de fausses hypothèses quant à l'état de fait (par exemple quant à la certitude d'obtenir un nouvel emploi ; Bulletin LACI IC, D64).

4.3 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel il appartient au juge d'établir d'office l'ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d'administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires (cf. art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA). En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l'allégation ni celui de l'administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3; ATF 125 V 193 consid. 2). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 372 consid. 3; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3). Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

5.              

5.1 Les faits et explications des parties qui suivent ressortent du dossier.

5.1.1 Par lettre du 19 janvier 2022, l'employeur, conformément à un "entretien préalable" du 18 janvier 2022 de l'intéressé avec l'associé gérant, a confirmé la résiliation de son contrat de travail avec effet au 31 janvier 2022, délai reporté au 28 février 2022 compte tenu du délai de préavis d'un mois.

Le 11 mars 2022, l'employeur a répondu par écrit à des questions de la caisse. L'assuré avait été licencié car "[son profil] n'était plus compatible avec les évolutions des exigences du poste". "Lorsque [l'associé gérant] allait sur le chantier, il avait averti l'employé de la situation".

En réponse à des questions complémentaires de la caisse, l'employeur a, par écrit du 24 mars 2022, ajouté aux explications déjà fournies ce qui suit: lorsqu'il avait engagé l'intéressé en septembre 2021, celui-ci n'était plus en possession de son permis de conduire, mais il devait le récupérer en décembre 2021; l'employeur avait dans un premier temps accepté ce fait, car il avait un grand chantier où l'assuré pouvait se rendre en bus et où il pouvait laisser ses outils; malheureusement, en janvier 2022, celui-ci était toujours sans permis de conduire; l'employeur était une petite entreprise qui avait besoin que chaque ouvrier puisse avoir un véhicule afin de transporter le matériel, les outils, etc.

Le 23 juin 2022, l'assuré s'est déterminé sur les motifs de licenciement indiqués par l'employeur à l'intention de la caisse. Le motif de son licenciement avait été le fait de ne pas avoir récupéré son permis de conduire, et il n'avait pas d'autres détails à fournir.

À des questions complémentaires de la caisse relatives à la problématique du permis de conduire, l'intéressé a, le 6 juillet 2022, répondu ce qui suit: à la question "Est-il vrai que vous deviez récupérer votre permis au mois de décembre 2021 ou avez-vous indiquez (sic) cela pour augmenter vos chances d'engagement ?", était répondu "Oui, parce que je voulais m'engager. Je n'aurai plus le permis en Suisse"; à la question "Si cela est vrai, pour quel motif ne l'avez-vous finalement pas récupéré ? (retard de procédure administrative, récidive de votre part ?)", était répondu "pour raisons personnelles".

5.1.2 Selon la décision sur opposition querellée, l'assuré était sans travail par sa faute car il n'avait pas informé l'employeur depuis le début qu'il n'allait pas récupérer son permis de conduire. Le contrat de durée indéterminée avait ainsi été résilié car l'intéressé n'avait pas recouvré ce permis en décembre 2021 comme prévu. Le motif de la résiliation était par conséquent clairement établi, et c'était par sa faute que le recourant n'avait pas pu récupérer son permis de conduire et qu'il avait perdu son emploi. Néanmoins, la caisse prenait en considération comme circonstances atténuantes le fait que l'assuré ait diminué le dommage causé à l'assurance-chômage en travaillant durant plusieurs mois auprès de l'employeur, que ce dernier ait attendu jusqu'en janvier 2022 pour prononcer la résiliation et qu'il ait respecté le délai de congé. Il convenait de ne retenir qu'une faute légère, justifiant une suspension du droit à l'indemnité de chômage de 12 jours.

5.1.3 Selon ses allégations formulées en procédure de recours, l'intéressé ne s'est pas vu communiquer, lors de son engagement par l'employeur avec effet au 1er septembre 2021, qu'un permis de conduire était indispensable. Cette question n'avait d'ailleurs pas posé problème pendant plusieurs mois. L'employeur avait toutefois sollicité par la suite du recourant un permis de conduire, et celui-ci a dûment répondu qu'il n'en avait pas à ce jour mais qu'il était possible qu'il le récupère en décembre 2021. L'assuré n'a jamais garanti à l'employeur qu'il récupérerait son permis de conduire. En décembre 2021, il n'a pas récupéré ce dernier; il a toutefois pu travailler durant trois mois auprès de l'employeur. Ce dernier n'a jamais démontré que la possession d'un permis de conduire était une condition sine qua non pour travailler dans son entreprise en qualité de maçon. Cela étant, l'employeur l'a licencié au motif qu'il n'avait pas récupéré ledit permis.

À teneur de la réponse au recours de l'intimée, le motif du retrait du permis de conduire et la durée de ce retrait ne concernaient certes pas la relation de travail résiliée avec effet au 28 février 2022, mais c'était par la faute du recourant que ce dernier s'était fait retirer son permis et qu'il n'avait pas été en mesure de le récupérer jusqu'à fin décembre 2021, ce qui avait conduit à son licenciement. Selon les réponses fournies le 6 juillet 2022 par l'intéressé à la caisse, il n'aurait plus de permis de conduire en Suisse pour des raisons personnelles.

D'après la réplique du recourant, l'employeur savait pertinemment qu'il n'avait pas de permis de conduire et l'avait engagé dans ces conditions.

5.2 Selon la jurisprudence et la doctrine – auxquelles l'intimée se réfère dans sa réponse au recours –, les comportements évitables susceptibles d'être sanctionnés lorsqu'ils débouchent sur une résiliation du contrat de travail peuvent concerner tout d'abord les rapports de travail (mauvaise exécution du travail; prestations insuffisantes dues à un manque de rendement fautif ou à de la mauvaise volonté; non-respect des instructions de l'employeur [dans certaines limites : ATF 112 V 242; DTA 2010 p. 222]; comportement inadéquat sur le lieu de travail, à l'égard des collègues ou de la hiérarchie; incompatibilités caractérielles; manque d'aptitude à résoudre les conflits à l'amiable; manque de ponctualité; utilisation du temps de travail à des fins non professionnelles [DTA 1988 p. 91]). Mais ils peuvent aussi concerner des aspects qui ont trait à la vie privée du travailleur, pour autant que les aspects en cause aient une influence soit sur la décision de l'employeur de le garder ou au contraire de se séparer de lui, soit sur la possibilité ou non, pour l'employé, de continuer à exécuter le travail demandé (Boris RUBIN, op. cit., n. 26 ad art. 30 LACI).

Selon un arrêt de la Haute Cour, la détention d'un permis de conduire est, pour une personne qui exerce la profession de chauffeur, une condition sine qua non d'un engagement puisqu'elle ne peut remplir la mission prévue par son contrat de travail qu'en ayant son permis de conduire. En conduisant en état d'ébriété élevée, la personne assurée n'a pas seulement pris le risque d'un retrait de permis, mais aussi celui de perdre son emploi. Il y a dès lors lieu de prononcer une suspension du droit à l'indemnité pour faute grave. Le fait qu'elle se soit comportée de telle sorte en dehors de son travail ne diminue pas sa faute (arrêt du Tribunal fédéral C 221/01 du 7 novembre 2001 = DTA 2002 p. 121; dans le même sens, arrêt du Tribunal fédéral C 215/05 du 29 novembre 2005 consid. 2.3; Boris RUBIN, op. cit., n. 26 ad art. 30 LACI).

De cette jurisprudence, le recourant déduit a contrario qu'un maçon, soit un métier qui ne nécessite pas la possession d'un permis de conduire, ne peut pas être sanctionné parce qu'il perd ce permis, ce d'autant s'il a pu travailler pendant plusieurs mois sans en faire usage, ce pas plus qu'un employé ne peut être sanctionné par l'assurance-chômage à la suite d'un licenciement en fonction des nouveaux besoins de son employeur.

5.3 Cela étant, il ressort des déclarations de l'employeur (en particulier celles du 24 mars 2022) et de l'intéressé ce qui suit.

Au moment de l'engagement avec effet au 1er septembre 2021, l'employeur savait que l'assuré n'était plus en possession de son permis de conduire et ne lui a alors pas clairement demandé de le récupérer. C'est par la suite, selon toute vraisemblance un peu avant décembre 2021, qu'il lui a demandé la reprise dudit permis, ce à quoi le recourant a répondu qu'il était possible qu'il le récupère en décembre 2021, sans le garantir. C'est lors de l'"entretien préalable" du 18 janvier 2022 que la récupération du permis de conduire apparaît avoir été clairement fixée par l'employeur comme exigence et condition pour la continuation des rapports de travail.

Selon les allégations du recourant, c'est pour des "raisons personnelles" qu'il n'a pas donné une suite favorable à cette exigence de l'employeur. À cet égard, alors qu'il savait pertinemment que le reproche principal de l'intimée consistait en son refus de récupérer son permis de conduire comme cause de son licenciement, l'intéressé, au demeurant assisté d'un mandataire professionnellement qualifié (le syndicat), n'a aucunement cherché à préciser le contenu de ces "raisons personnelles" ou à justifier son refus. Ces raisons doivent dès lors être considérées comme relevant de sa convenance personnelle et comme n'excluant objectivement pas la reprise du permis de conduire si l'intéressé en avait eu la volonté.

Certes, si on considérait le souhait de l'intéressé de ne pas récupérer son permis de conduire comme ayant trait en premier lieu à sa vie privée, il n'en demeure pas moins que son choix à ce sujet avait une influence soit sur la décision de l'employeur de le garder ou au contraire de se séparer de lui, soit sur la possibilité ou non, pour l'employé, de continuer à exécuter le travail demandé. C'est en vain que le recourant semble prétendre que la récupération de son permis de conduire et la possibilité de conduire un véhicule n'auraient pas été en lien avec son emploi. En effet, comme expliqué de manière claire et crédible par l'employeur le 24 mars 2022 et sans que cela soit contesté par l'intéressé, cette petite entreprise avait besoin que chaque ouvrier puisse avoir un véhicule afin de transporter le matériel, les outils, etc.

5.4 Sous l'angle de l'art. 44 al. 1 let. a OACI, le recourant doit ainsi se voir imputer son choix de ne pas récupérer son permis de conduire, à tout le moins en janvier 2022, qui était de nature à conduire à son licenciement, ce qu'il n'ignorait aucunement.

Contrairement à ce que soutient l'assuré, il ne découle pas d'une comparaison des arrêts du Tribunal fédéral C 221/01 du 7 novembre 2001 = DTA 2002 p. 121 et C 215/05 du 29 novembre 2005 consid. 2.3 avec sa propre situation que son refus de récupérer son permis de conduire exclurait le prononcé d'une suspension, mais que ce comportement n'est pas à qualifier de faute grave mais de faute légère.

Or c'est précisément à cette qualification qu'est parvenue, à juste titre, la caisse dans sa décision sur opposition querellée.

5.5 La quotité de la sanction prononcée – 12 jours de suspension du droit à l'indemnité de chômage – a fait l'objet d'une appréciation et d'une motivation dans la décision sur opposition litigieuse et a donc fait suite à une prise en compte de l'ensemble des circonstances ainsi que de la situation de l'intéressé, d'une manière conforme au droit.

Au demeurant, à titre de comparaison, dans un cas relativement récent d'application – comme ici – de l'art. 44 al. 1 let. a OACI, où le reproche que l'on pouvait faire au recourant ne saurait être qualifié de faute grave ou moyenne, où celui-ci avait travaillé durant des années à l'entière satisfaction de son employeur, au vu des certificats de travail au dossier, où la résiliation des rapports de travail était principalement due au fait que l'employeur avait proposé une modification du contrat de travail à son employé en tous points défavorable à ce dernier, le comportement de l'assuré a été considéré comme faute légère au regard des circonstances du cas particulier et la durée de suspension a été réduite à 10 jours (ATAS/275/2022 du 22 mars 2022 consid. 2.13).

5.6 En définitive, la décision sur opposition querellée est en tous points conforme au droit.

6.             Vu ce qui précède, le recours sera rejeté.

7.             La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et vu l'art. 61 let. fbis LPGA).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le