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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1834/2022

ATAS/388/2023 du 01.06.2023 ( LAA ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1834/2022 ATAS/388/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 1er juin 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

représentée par Me Michael ANDERS, avocat

 

 

recourante

 

contre

HELSANA ACCIDENTS SA

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née
en ______ 1968, est arrivée en Suisse en décembre 1996. Après une
période de chômage entre 2010 et 2011, ponctuée par des remplacements dans l’enseignement secondaire, elle a commencé, le 1er novembre 2011, une période de « préformation » (non rémunérée) de monitrice de fitness auprès de la société B______ SA (radiée du registre du commerce le 29 juin 2018 après son absorption par C______ AG ; ci-après : l’employeur), en vue d’y donner des cours de fitness une fois cette période achevée.

b. Le 16 novembre 2011, alors qu’elle traversait la rue de Lyon en courant, elle
a été renversée par un motocycliste qui circulait sur la voie réservée aux bus. Grièvement blessée et inconsciente à la suite de ce choc, elle a été acheminée par ambulance au service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), puis transférée aux soins intensifs le 21 novembre 2011 pour réveil et suite de traitement. Les suites de cet accident ont d’abord été prises en charge par la ZURICH COMPAGNIE D’ASSURANCE SA (ci-après : la ZURICH), assureur responsabilité civile du détenteur du motocycle.

c. Lors de l’accident du 16 novembre 2011, HELSANA ACCIDENTS SA (ci-après : l’assureur ou l’intimée) était l’assureur de l’employeur, ce que HELSANA ASSURANCES SA a reconnu le 17 février 2020 dans le cadre de la procédure A/124/2019 (cf. ATAS/145/2021 du 25 février 2021) ayant opposé l’assurée à la SUVA caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la SUVA) – assureur-accidents des personnes affiliées à la caisse cantonale genevoise de chômage – et à HELSANA ASSURANCES SA, la première en qualité d’intimée et la seconde en tant qu’appelée en cause.

d. Dans un rapport daté du 1er décembre 2011, le professeur D______, le docteur E______ et le docteur F______, respectivement chef de service, médecin adjoint et médecin interne au service de neurochirurgie des HUG, ont posé les diagnostics de traumatisme crânio-cérébral (ci-après : TCC) sévère avec hématome sous-dural hémisphérique gauche et contusions hémorragiques minimes pariéto-occipitales bilatérales, associées à une fracture frontale gauche, du toit et du plancher de l’orbite, ainsi qu’une fracture du sinus sphénoïde. Ils ont précisé que dès le 21 novembre 2011, date du réveil de l’assurée, son évolution avait été favorable, permettant ainsi son transfert à l’hôpital de Beau-Séjour le 1er décembre 2011, pour la suite du traitement.

e. Le 10 août 2012, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), indiquant qu’elle bénéficiait actuellement d’un suivi médical (neurologique) pour les suites de l’accident du 16 novembre 2011, en raison de sa fatigue, de troubles de la mémoire, de l’attention et de la concentration, de maux de tête et de douleurs à la nuque. Elle a précisé qu’elle avait actuellement repris son activité de professeur de fitness à des fins thérapeutiques, à raison de deux heures par semaine.

f. Le 7 mars 2013, l’assurée a été victime d’un deuxième accident : en raison d’une crise d’épilepsie survenue pendant un cours – donné dans le cadre de sa reprise de travail thérapeutique –, elle avait chuté du vélo d’intérieur sur lequel elle se tenait, ce qui avait entraîné une entorse à la cheville gauche.

g. Le 31 mai 2013, la docteure G______, neurologue, a indiqué que l’assurée avait présenté deux crises épileptiques tonico-cloniques généralisées le 7 mars 2013. C’était la première d’entre elles qui avait entraîné une chute, suivie d’une entorse à la cheville gauche. Le 30 mai 2013, son status était toujours marqué par une nette tendance à la logorrhée, mais le discours était pertinent ; elle était nosognosique, mais n’arrivait que partiellement à élaborer des stratégies pour pallier ses difficultés quotidiennes. Même si on notait une lente amélioration des troubles cognitifs au fil des mois, le pronostic demeurait réservé. En effet, elle présentait, en plus desdits troubles cognitifs, une limitation sévère de son endurance physique et mentale qui se répercutait même sur ses activités quotidiennes. La capacité de travail était toujours nulle dans l’activité d’instructrice de fitness, malgré une reprise thérapeutique progressive, à raison de trois cours par semaine, depuis le 28 février 2013. Actuellement, cela représentait le maximum exigible.

h. Par avis du 14 août 2014, le service médical régional de l’assurance-invalidité (ci-après : le SMR) a considéré à la lumière des explications de la Dre G______ que depuis le 16 novembre 2011, la capacité de travail était nulle non seulement dans l’activité habituelle, mais aussi dans une activité adaptée au vu de la sévérité des troubles cognitifs encore présents. Au chapitre des limitations fonctionnelles, il convenait de retenir une fatigabilité physique et psychique sévère, des troubles cognitifs sévères (attentionnels et exécutifs), des troubles du comportement (logorrhée, désinhibition, irritabilité) et « l’absence » due aux crises d’épilepsie. S’y ajoutaient l’impossibilité de conduire, les troubles de la parole et de la mémoire, ainsi que la désorientation.

i. Dans un rapport du 23 septembre 2015, le docteur H______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a indiqué à propos de l’événement du 7 mars 2013, que l’assurée s’était violemment tordu sa cheville gauche, ce qui avait débouché sur une instabilité de la cheville externe qui, à ce stade, méritait une stabilisation des ligaments externes. Mais le Dr H______ souhaitait commencer par un programme de taping [NDR : bandage adhésif ayant pour fonction de réduire les symptômes d’instabilité de la cheville] que l’assurée maintiendrait pendant le sport. En conséquence, le Dr H______ avait orienté l’assurée vers un physiothérapeute « qui [faisait] le taping ».

j. Dans un rapport du 28 juin 2016, le docteur I______ (ci-après :
Dr I______) a informé l’OAI qu’il avait traité l’assurée du 5 mai 2015
au 27 juillet 2015, période durant laquelle celle-ci présentait des séquelles d’épilepsie/d’entorse de cheville grave entraînant une incapacité de travail complète du 5 mai 2015 au 27 juillet 2015 dans l’activité habituelle d’enseignante de yoga et fitness. Elle ressentait des douleurs à la cheville en marchant, la station debout était pénible et elle était fatigable. Au travail, ces restrictions faisaient qu’elle avait de la peine à montrer les exercices et qu’elle supportait mal une activité soutenue. Aussi, l’activité habituelle n’était plus exigible et il ne fallait pas s’attendre à une reprise de cette dernière. Dans cette activité, le rendement était diminué de 20% en raison d’une résistance à l’effort moindre. Ce spécialiste était également d’avis qu’il était fort peu probable que l’assurée puisse avoir une activité soutenue, même partielle. Une IRM de la cheville gauche du 25 juin 2015, annexée à son rapport, concluait à un discret hypersignal hétérogène des surfaces cartilagineuses tibio-taliennes, reflétant un probable phénomène dégénératif chronique.

k. Les 17 et 26 janvier 2017, Monsieur J______, psychologue, spécialiste FSP en neuropsychologie et psychothérapie, a reçu l’assurée sur mandat de l’OAI en vue de lui faire passer des examens neuropsychologiques dont il a présenté les résultats dans son rapport du 10 février 2017. Après avoir retracé son anamnèse neuropsychologique, recueilli ses plaintes et commenté les divers tests effectués, l’expert a indiqué que, même s’il observait la persistance de troubles mnésiques et attentionnels, marqués par un ralentissement tout à fait sévère, il y avait également des signes compatibles avec un défaut d’effort dans des tâches d’attention et de mémoire, sous la forme notamment d’une variabilité inhabituelle des modes de réponse à certaines tâches, ainsi qu’à une « tâche validée de détection du défaut d’effort, le TOMM ». Il y avait aussi une inconsistance à l’intérieur de certains domaines, comme par exemple en inhibition où, au plan clinique, c’était la tâche la plus simple qui était déficitaire tandis que les autres tâches ne montraient pas de signes de troubles de l’inhibition. Il y avait encore une discordance entre le ralentissement très sévère montré aux tests d’attention et l’allure générale de l’assurée, son mode de réponse en entretien, voire le fait qu’elle se déplaçât à vélo ; un tel ralentissement apparaissait peu compatible avec l’autonomie dont elle faisait preuve dans sa vie quotidienne. Enfin, l’incapacité de l’assurée de répondre, déjà en phase d’entraînement, aux tâches attentionnelles (TAP, d2-R), dont elle avait pourtant compris les consignes au plan verbal, posait aussi des questions quant à son investissement dans les tâches. À cet égard, l’expert a précisé qu’il n’avait jamais observé une telle difficulté, avec une telle constance, chez une personne ayant souffert d’un TCC sévère et manifestant le même degré d’autonomie au quotidien. Il a ajouté que, dans la mesure où il n’était pas neurologue, il ne pouvait répondre à la question de la cohérence entre les lésions cérébrales constatées en imagerie et l’intensité des troubles mise en évidence dans les tests, cet aspect étant du ressort d’un expert neurologue. Faute de pouvoir poser un diagnostic neuropsychologique précis
(incapacité qu’il expliquait par les signes de défaut d’effort et les discordances observées), l’expert ne s’est pas prononcé non plus sur la capacité de travail, les limitations fonctionnelles et les ressources personnelles (cognitives) de l’assurée.

l. Par avis du 10 mai 2017, le SMR a estimé, à la lecture du rapport d’expertise
de M. J______, qu’il n’était pas possible de se positionner de façon définitive sur la sévérité et les conséquences des troubles cognitifs de l’assurée. Aussi, il estimait nécessaire de confier une expertise neurologique (avec un nouveau bilan neuropsychologique) au docteur K______, neurologue.

m. Le Dr K______ a procédé à l’expertise médicale de l’assurée, le
16 janvier 2018, et rendu ses conclusions le 9 février 2018 en se fondant sur le dossier AI qui lui avait été transmis, les différents documents obtenus auprès des archives des HUG, les déclarations de l’assurée, le résultat de l’examen neurologique et de l’EEG (électroencéphalographie) pratiqués lors de l’expertise, ainsi que le résultat d’un bilan neuropsychologique pratiqué les 10 et 17 janvier 2018, sur délégation, par Madame L______, spécialiste en neuropsychologie.

Après avoir résumé le dossier et recueilli les déclarations de l’assurée, l’expert a constaté que l’examen neuropsychologique réalisé par Mme L______ révélait des résultats sévèrement déficitaires touchant les capacités cognitives de l’attention, de la mémoire et des fonctions exécutives. Toutefois, cet examen mettait aussi en évidence des observations contradictoires, une variabilité inhabituelle des modes de réponse à certaines tâches, un résultat insuffisant à une tâche validée de détection du défaut d’effort (le « TOMM ») et une discordance entre le ralentissement très sévère dans les tests d’attention et la présentation générale de l’assurée, son autonomie au quotidien (un tel ralentissement n’était, selon l’expert, pas compatible avec le fait que l’assurée se déplace à vélo), de sorte qu’au terme de son examen neuropsychologique, qu’elle qualifiait de « pas probant », la neuropsychologue n’avait pas retenu d’atteinte à la santé.

Renvoyant aux explications données plus haut, l’expert a laissé de côté ou déclaré sans objet les questions de l’OAI relatives à l’atteinte à la santé. S’agissant du contexte social, plus particulièrement la partie non médicale du dossier, relative par exemple à l’entraînement au travail et à la tenue du ménage, l’expert a indiqué qu’il considérait que l’assurée était capable de tenir son ménage, contrairement aux conclusions de l’enquête économique sur le ménage. Le status après TCC sévère du 16 novembre 2011 n’avait pas d’incidence sur la capacité de travail. Ainsi, sur le plan neurologique et neuropsychologique, il n’y avait actuellement aucun diagnostic ayant une incidence sur la capacité de travail.

L’expert a estimé, au terme de son analyse, et de celle de Mme L______, que l’assurée ne présentait de troubles incapacitants ni sur le plan neurologique, ni d’un point de vue neuropsychiatrique. Ainsi, la capacité de travail dans l’activité exercée jusqu’ici était complète sur le plan neurologique, au terme d’une période d’un an après le traumatisme. Sur le plan neuropsychologique, la situation était plus complexe puisque les plaintes étaient plus importantes et que les différents bilans neuropsychologiques ne permettaient pas d’apprécier valablement la capacité de travail. « Par défaut », le bilan neuropsychologique réalisé par
Mme L______ ne démontrait pas de façon probante l’existence d’une atteinte neuropsychologique permettant de retenir une incapacité de travail dans l’activité exercée jusqu’ici. Au vu de ces éléments, le Dr K______ a suggéré qu’il fût procédé, en premier lieu, à une enquête administrative plus poussée visant à déterminer exactement le type et le taux d’activité effectif de l’assurée et, en second lieu, à un bilan psychiatrique (« le comportement de l’assurée était dans tous les cas très particulier »), éventuellement complété par un bilan orthopédique de la cheville gauche (par exemple sous forme de co-expertise orthopédique).

Invité à se prononcer sur la capacité de travail de l’assurée dans une activité adaptée, l’expert a indiqué que dans une activité sédentaire, sans apprentissage mnésique important, relativement répétitive, bien encadrée, sa capacité de travail était complète (plein temps avec un rendement de 100%).

Sur le plan neurologique, la capacité de travail était entière (dans l’activité habituelle comme dans une activité adaptée) un an après l’accident du 16 novembre 2011. Sur le plan neuropsychologique, il n’était pas possible de se prononcer sur l’évolution de la capacité de travail effective dans l’activité antérieure. Cependant, dans une activité simple (c’est-à-dire sédentaire, sans apprentissage mnésique important, relativement répétitive, bien encadrée), cette capacité était redevenue entière deux ans après l’accident.

Interrogé sur les limitations fonctionnelles, l’expert a indiqué qu’il n’y en avait pas sur le plan neurologique, mais que d’un point de vue neuropsychologique, il était impossible de se prononcer, compte tenu des incohérences observées. Sur le plan orthopédique, il existait éventuellement des limitations dans la pratique du fitness, liées au status post-lésion de la cheville gauche.

Enfin, à la question de savoir quelles étaient les ressources personnelles de l’assurée, l’expert a répondu qu’elles restaient à déterminer, par un bilan psychiatrique.

n. Par avis du 28 mai 2018, le SMR a estimé, à la lumière du rapport d’expertise neurologique du 9 février 2018, qu’il fallait s’en tenir aux conclusions de l’expert K______ et considérer que la capacité de travail était nulle pour toute activité du 16 novembre 2011 au 31 décembre 2013, et pleine, en particulier dans l’ancienne activité, à partir du 1er janvier 2014.

o. Par pli du 2 juillet 2018, l’assurée s’est adressée à l’OAI pour qu’il instruise son droit à une rente. Même si l’expert neurologue estimait qu’elle pouvait reprendre une activité professionnelle, force était de constater qu’elle ne pouvait plus avoir le rendement qui était le sien avant l’accident et qu’elle subirait très certainement une perte économique et, partant, une invalidité. Il convenait également de lui accorder des mesures de reclassement professionnel, car il n’était pas envisageable, compte tenu des atteintes subies, qu’elle reprenne son ancienne activité de professeur de fitness. Pour étayer ces affirmations, l’assurée a annexé à son envoi :

-     un rapport du 1er mai 2018 de la Dre G______, dans lequel cette praticienne estimait que les symptômes neurologiques consécutifs au TCC
(qui, de son point de vue, permettaient d’exiger un taux d’activité inférieur à
10% dans une activité adaptée) se manifestaient notamment par :

•  des céphalées encore présentes en cas de fatigue mentale ou physique et de stress ;

•  une fatigue mentale marquée (accentuée par tout effort de concentration, d’attention, tout stress même mineur, tout imprévu ou toute tâche administrative, et se manifestant par un besoin de s’isoler en cas de surcharge d’informations) ;

•  une fatigue physique marquée (l’assurée devait toujours dormir douze heures par nuit et une sieste quotidienne d’une à deux heures était indispensable ; de plus, plusieurs jours de récupération étaient nécessaires en cas d’activité supplémentaire ou si le repos n’était pas possible) ;

•  des troubles de l’attention (oublis de rendez-vous, de choses à faire ou de casseroles sur le feu ; erreurs dans les chiffres ; manque son avion, car elle se présente à la mauvaise porte) ;

•  une sensibilité à l’interférence (si conversation avec tiers et interruption, l’assurée perd le fil ; elle ne peut pas faire plus d’une chose à la fois et l’environnement doit être calme) ;

•  des troubles exécutifs (difficultés de planification [organisation parfois non rationnelle]) ;

•  son comportement (tendance à l’irritabilité et à la logorrhée en cas de fatigue).

-     un rapport du 24 avril 2018 du docteur M______, spécialiste en médecine physique et réadaptation, cosigné par le Dr H______, indiquant que l’assurée n’avait pas de handicap fonctionnel dans les actes de la vie quotidienne, mais des douleurs et des handicaps fonctionnels significatifs lors de ses activités physiques professionnelles et extra-professionnelles. Les traitements encore à suivre consistaient en un « taping » latéral de la cheville et de l’acupuncture. Son incapacité de travail dans la profession de professeur de fitness était totale et définitive, mais dans une activité sédentaire, sa capacité de travail était entière. Elle présentait à ce stade, une arthrose talo-crurale débutante.

p. Dans un « rapport final » du 9 juillet 2018, le SMR a estimé que d’un point de vue neurologique, le rapport du 1er mai 2018 de la Dre G______
– qui reprenait des éléments médicaux déjà connus du SMR et de l’expert – ne lui permettait pas de modifier ses conclusions du 28 mai 2018. Toutefois, en tant qu’il ressortait du rapport du 24 avril 2018 des Drs H______ et M______ que l’assurée les avait consultés en juin 2016 pour une instabilité douloureuse externe de la cheville gauche, associée à une arthrose talo-crurale et une lésion ostéochondrale du dôme latéral du talus et du ligament de Basset et que de l’avis de ces médecins, elle présentait une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle, mais pleine et entière dans une activité adaptée, le SMR a considéré qu’au vu de cette atteinte incapacitante nouvelle (séquelles d’entorse de la cheville gauche), son activité de professeur de fitness n’était plus exigible. Ainsi, dans l’activité habituelle, sa capacité de travail était nulle du 16 novembre 2011 au 31 décembre 2013, entière du 1er janvier 2014 au 31 mai 2016 et à nouveau nulle dès le 1er juin 2016. Dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles (pas de sollicitation répétée de la cheville gauche, pas de travail en terrain instable, pas de sauts, pas de déplacements latéraux), la capacité de travail était entière depuis le 1er janvier 2014.

q. Dans un rapport du 5 novembre 2018, la Dre G______ a retenu, pour l’essentiel, qu’à presque sept ans du TCC sévère, l’évolution des séquelles était stationnaire (diminution de l’endurance mentale et physique ; troubles cognitifs avec atteinte mnésique et difficultés exécutives au premier plan ; récidive de céphalées en cas de fatigue).

B. a. Par décision du 21 mai 2019, l’OAI a refusé toute prestation à l’assurée.

b. Par arrêt ATAS/321/2020 du 30 avril 2020, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) a partiellement admis le recours interjeté par l’assurée contre cette décision et dit que l’assurée avait droit à une rente entière d’invalidité limitée dans le temps, soit du 1er février 2013 au 31 mars 2014.

c. Dans un rapport du 11 juin 2021, la Dre G______ a indiqué
qu’à neuf ans et demi du TCC sévère, l’assurée présentait toujours une diminution d’endurance physique qui l’obligeait à dormir 12h/j, et qui la rendait moins efficiente en fin de journée, une diminution d’endurance mentale avec traitement de tâches, par exemple administratives, possible uniquement par tranches de
30 minutes et au maximum 2 à 3x/j., une difficulté à traiter les multitâches, une limitation dans l’intégration et la gestion des tâches complexes, et une tolérance diminuée aux imprévus. Les troubles cognitifs séquellaires étaient extrêmement sensibles à la fatigue, au stress et aux contraintes horaires ; sur le plan comportemental, une irritabilité pouvait se développer. Actuellement, la période était calme sous ces aspects, et l’évolution stable, sans les fluctuations parfois observées. La patiente s’en trouvait d’autant plus sereine, ce qui lui permettait d’appréhender les difficultés au mieux. Sur le plan épileptique, le traitement, parfaitement efficace, était bien toléré.

d. Le 2 août 2021, le docteur O______ (ci-après : Dr O______), médecin conseil de l’assureur, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a répondu à une suite de questions de l’assureur.

Invité à lister tous les diagnostics dont le lien de causalité naturel avec les
suites de l’accident du 16 novembre 2011 était pour le moins probable, le
Dr O______ a indiqué que l’importance réelle des séquelles du TCC n’était
pas définissable en raison d’une incohérence manifeste du dernier bilan neuropsychologique de 2017. Le seul trouble démontré concernait un risque d’épilepsie, mais celui-ci était stable et sous traitement depuis la dernière crise, survenue en 2013.

Interrogé sur le point de savoir si, pour les diagnostics dont le lien de causalité naturel était, pour le moins probable avec l’accident du 16 novembre 2011, l’état médical était stabilisé, le Dr O______ a répondu que pour les troubles neurologiques, cela était le cas au moins depuis 2018, année de l’expertise du
Dr K______, car selon le dernier rapport, daté du 11 juin 2021, de la
Dre G______, les plaintes subjectives, qui étaient stables, étaient restées les mêmes. Pour les troubles somatiques de la cheville, le cas était aussi stabilisé, probablement depuis 2016, en l’absence de tout suivi depuis lors.

Invité à se prononcer sur la capacité de travail exigible de l’assurée dans une activité adaptée sur la base des rapports remis par la Dre G______ et le Dr H______, ainsi que sur le point de savoir si les conclusions de l’expertise du Dr K______ étaient toujours valables, le Dr O______ a répondu que, sur le plan neurologique, la capacité de travail de l’assurée était entière dans toute activité depuis le 1er janvier 2014. Sur le plan somatique, la capacité de travail était nulle comme professeur de fitness mais entière dans une activité adaptée, depuis la consultation auprès du Dr H______ « en 2016 ». Par « activité adaptée », il fallait comprendre tout travail sans effort physique et plutôt semi-assis. Pour le reste, il n’y avait pas lieu d’octroyer d’indemnité pour atteinte à l’intégrité (ci-après : IPAI). À cet égard, en effet, il n’y avait « rien d’objectif probant » sur le plan neurologique, en dehors de l’épilepsie stabilisée depuis 2013. Dans ce cadre, l’IPAI était nulle. Pour la cheville, la lésion ostéochondrale était stable depuis 2016 et sans traitement suivi. Cela n’entraînait également aucune IPAI en l’état (0%). Cependant, il y avait un risque d’arthrose secondaire au long cours, qui risquait de valoir 10 à 15%, mais qui n’était pas prévisible en l’état.

e. Contacté une deuxième fois par l’assureur, afin de déterminer la « date de stabilisation précise » des troubles neurologiques et des séquelles d’entorse de la cheville, le Dr O______ a indiqué le 9 août 2021 que pour les troubles neurologiques, cette date devait être située deux ans après l’accident selon le
Dr K______, soit au 1er janvier 2014, comme l’OAI l’avait reconnu sur le plan de la capacité de travail dans une activité adaptée. Également invité à mentionner la date de stabilisation pour les séquelles d’entorse de la cheville, le Dr O______ a répondu que, pour la cheville, il y avait eu une « complication tardive » du 23 septembre 2015 au 13 novembre 2017.

C. a. Par décision du 13 août 2021, l’assureur a octroyé à l’assurée des arrérages d’indemnités journalières du 19 novembre 2011 au 31 décembre 2012 à hauteur de CHF 9’472.20. Ce montant correspondait à un total de CHF 25’537.20 (soit 408 indemnités journalières de CHF 62.15) sous déduction des revenus inscrits au compte individuel AVS (ci-après : CI), réalisés du 1er janvier au 31 décembre 2012 (CHF 15’885.-). En principe, l’assurée avait droit à d’autres indemnités journalières jusqu’à ce qu’il n’y ait plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de son état de santé. Étant donné que ce moment – qui correspondait à la stabilisation de son état de santé –, avait été fixé au 1er janvier 2014 par le Dr O______, l’assurée pouvait prétendre à 365 indemnités journalières de CHF 62.15 (soit CHF 22’684.75) du 1er janvier au 31 décembre 2013. Cependant, compte tenu de revenus inscrits au CI pour un montant supérieur du 1er janvier au 31 décembre 2013 (CHF 36’041.-), l’assurée ne pouvait prétendre à des indemnités journalières au-delà du 31 décembre 2012. En outre, l’assureur a retenu qu’au vu d’un taux d’invalidité de 1.88%, l’assurée ne pouvait bénéficier d’une rente à partir du 1er janvier 2014. En revanche, les complications tardives des séquelles de l’entorse de la cheville gauche justifiaient que l’assureur prenne en charge le traitement médical associé à ces complications, du 28 août 2015 au 13 novembre 2017 exclusivement. Enfin, il n’existait pas de droit ouvert à une IPAI.

b. Le 15 septembre 2021, l’assurée a formé opposition à la décision du 13 août 2021 en faisant valoir qu’elle présentait de nombreuses séquelles de l’accident du 16 novembre 2011 (douleurs de nuque et de tête/céphalées sévères, troubles mnésiques, troubles de la concentration, fatigabilité cérébrale élevée, capacité respiratoire nasale non retrouvée, préjudice esthétique, instabilité permanente de la cheville et douleurs). À ces éléments de nature somatique s’ajoutait une importante détresse psychique, accompagnée de symptômes dépressifs, de sorte qu’un avis psychiatrique sur les effets psychopathologiques de l’accident et les limitations fonctionnelles en découlant était nécessaire. Enfin, les prestations de l’Hospice général ne lui permettaient pas, entre autres, d’accéder à un traitement de physiothérapie conservatrice.

Aussi l’assurée a-t-elle conclu à l’annulation de cette décision, à l’octroi d’une rente d’invalidité « fondée sur des limitations fonctionnelles et une diminution
de rendement selon opinions médicales pluridisciplinaires, notamment psychiatrique », à l’octroi d’une IPAI « fondée sur un taux d’atteinte selon opinions médicales pluridisciplinaires » et à la prise en charge d’un traitement de physiothérapie, au-delà du 31 décembre 2013.

c. Par décision du 3 mai 2022, l’assureur a rejeté l’opposition et confirmé sa décision du 13 août 2021 vu notamment l’absence d’avis médical divergent sur la question de l’IPAI, et d’avis contraire sur le taux d’invalidité de 1.88%.

D. a. Le 3 juin 2022, l’assurée, assistée d’un conseil, a saisi la chambre de céans d’un recours contre cette décision. Elle a conclu à son annulation, a réitéré les conclusions déjà formulées dans son opposition et a demandé que l’intimée fût condamnée à prendre en charge les honoraires de son conseil pour la procédure d’opposition, le tout sous suite de frais et dépens.

b. Par réponse du 26 juillet 2022, l’intimée a conclu au rejet du recours.

À l’appui de sa position, elle a fait valoir que, même si une atteinte psychique était donnée, le lien de causalité naturelle et adéquate de celle-ci avec l’accident du 16 novembre 2011 ferait défaut. En conséquence, une instruction complémentaire sur le plan psychiatrique semblait inutile.

c. Le 30 janvier 2023, la recourante a versé au dossier une expertise neurologique, réalisée, à sa demande, par le docteur P______, spécialiste FMH en neurologie et médecin adjoint agrégé auprès du département des neurosciences cliniques des HUG. Dans son rapport du même jour, cet expert a fait mention d’investigations nouvelles depuis l’expertise neurologique du Dr K______, dont une IRM cérébrale du 22 septembre 2022, révélant des lésions cérébrales sous-corticales, et un bilan neuropsychologique effectué les 21 septembre, 2 novembre et 19 décembre 2022 par la docteure Q______. Le Dr P______ a indiqué, en synthèse, que l’accident du 16 novembre 2011 avait occasionné des séquelles cérébrales objectives, responsables de troubles cognitifs sévères, que ces derniers avaient une incidence claire sur les activités basiques du quotidien (réalisation de la plupart des tâches ménagères, possible de manière autonome, mais en l’absence de contrainte de temps majeure) et que la recourante n’avait pas été en mesure d’effectuer une activité rémunérée, avec rendement, depuis son accident, l’activité thérapeutique d’environ 10% (4h/semaine) n’entrant pas dans cette catégorie. À plus de dix ans de l’accident, la situation pouvait être considérée comme stabilisée. En attestait notamment l’évolution naturelle d’un tel accident qui, généralement après deux-trois ans, permettait de considérer que les symptômes étaient stables.

La nature et la sévérité des troubles présentés par la recourante entraînait une incapacité de gain totale, que ce soit dans la profession de monitrice de fitness qu’elle exerçait avant son accident, dans l’activité actuelle exercée à titre thérapeutique (monitrice de yoga) ou dans toute activité adaptée.

Se prononçant également sur la question de l’IPAI, le Dr P______ a estimé que le TCC était constitutif d’une atteinte moyenne (50%) au sens de la table 8
de la SUVA (atteinte à l’intégrité pour les complications psychiques de lésions cérébrales), à diminuer de 10% en raison du possible manque d’effort constaté lors des trois évaluations neuropsychologiques de 2017, 2018 et 2022, conduisant ainsi à une IPAI de 40%. Dans la mesure où la recourante présentait également une épilepsie structurelle fronto-temporelle droite (sous traitement permanent de valproate [Depakine®] depuis 2013), vraisemblablement consécutive à la lésion frontale droite, elle pouvait prétendre à une IPAI de 30% à ce titre, l’annexe 3 de l’ordonnance sur l’assurance-accidents prévoyant une IPAI à ce même taux en cas d’épilepsie post-traumatique avec crises ou sous médicamentation permanente sans crise. En ce qui concernait les céphalées de tension, il n’existait pas de table spécifique, raison pour laquelle il convenait d’effectuer une comparaison avec la table 7 de la SUVA (atteinte à l’intégrité dans les affections de la colonne vertébrale), car celle-ci contenait, entre autres, une échelle d’appréciation des douleurs fonctionnelles. Dans le cas particulier, les céphalées étaient apparentées à des douleurs modérées après mobilisation, rares ou nulles au repos, disparaissant complètement ou rapidement (un-deux jours). Dans la mesure où l’assurée présentait ce symptôme jusqu’à 20 jours par mois, soit 2/3 du temps, on pouvait estimer le taux d’IPAI à 10%.

Au total, l’atteinte à l’intégrité s’élevait à 80% (40% pour le traumatisme crânio-cérébral, 30% pour l’épilepsie post-traumatique et 10% pour les céphalées de tension).

d. Par écriture du 14 février 2022, l’intimée a estimé que pour les répercussions neurologiques de l’accident du 16 novembre 2011, il convenait de se référer à l’expertise administrative du Dr K______ et non pas à l’expertise privée du Dr P______. Pour le surplus, elle a maintenu son point de vue quant à l’inutilité d’une éventuelle expertise psychiatrique.

e. Par pli du 20 février 2023, la recourante a soutenu que de par ses circonstances et la durée du traitement médical qui en avait découlé, l’accident du 16 novembre 2011 était suffisamment grave pour que l’on examinât les troubles psychiques apparus à sa suite.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

g. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA – RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

2.3 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d’invalidité, une indemnité pour atteinte à l’intégrité et à la prise en charge d’un traitement de physiothérapie au-delà du 31 décembre 2013.

4.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015
de la LAA. Dans la mesure où les accidents des 16 novembre 2011 et 7 mars 2013 sont survenus avant cette date, le droit de la recourante aux prestations d’assurance est soumis à l’ancien droit (cf. al. 1 des dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral
8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2016.

5.              

5.1 Aux termes de l’art. 6 al. 1 LAA, les prestations d’assurance sont allouées
en cas d’accident professionnel, d’accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort
(art. 4 LPGA ; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références ; ATF 129 V 402 consid. 4.3.1 et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et la référence ; ATF 129 V 402 consid. 2.2 et les références).

5.2 L’exigence afférente au rapport de causalité naturelle est remplie lorsqu’il y a lieu d’admettre que, sans l’événement dommageable de caractère accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière. Il n’est pas nécessaire, en revanche, que l’accident soit la cause unique ou immédiate de l’atteinte à la santé ; il suffit qu’associé éventuellement à d’autres facteurs, il ait provoqué l’atteinte à la santé, c’est-à-dire qu’il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l’événement assuré et l’atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l’administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d’ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l’appréciation des preuves dans l’assurance sociale. Ainsi, lorsque l’existence d’un rapport de cause à effet entre l’accident et le dommage paraît possible, mais qu’elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l’accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; ATF 119 V 335 consid. 1 ; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le seul fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu’après la survenance d’un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident. Il convient en principe d’en rechercher l’étiologie et de vérifier, sur cette base, l’existence du rapport de causalité avec l’événement assuré (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408 consid. 3b).

5.3 En matière de lésions du rachis cervical par accident de type « coup du lapin », de traumatisme analogue ou de traumatisme crânio-cérébral sans preuve d’un déficit fonctionnel organique, l’existence d’un lien de causalité naturelle entre l’accident et l’incapacité de travail ou de gain doit en principe être reconnue en présence d’un tableau clinique typique présentant de multiples plaintes (maux de têtes diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral U 471/06 du 5 novembre 2007 consid. 4.1). Si la jurisprudence relative aux lésions de type « coup du lapin » exige que les troubles à la nuque ou à la colonne cervicale se manifestent dans la période de 72 heures suivant l’accident pour qu’un lien de causalité naturelle puisse être admis, il n’est pas nécessaire, en revanche, que les autres troubles caractéristiques du tableau clinique apparaissent dans ce laps de temps (SVR 2007 UV n° 23 p. 75 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral U 471/06 du 5 novembre 2007 consid. 4.1).

5.4 Le droit à des prestations suppose en outre l’existence d’un lien de causalité adéquate. La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Lors de troubles d’ordre psychique consécutifs à un accident, l’appréciation de
la causalité adéquate se fonde sur des critères différents selon que l’assuré a été victime ou non d’un traumatisme de type « coup du lapin », d’une lésion analogue à une telle atteinte ou d’un traumatisme crânio-cérébral. À la différence des critères valables en cas d’atteinte à la santé psychique non consécutive à un traumatisme de type « coup du lapin », il n’est pas décisif de savoir, en cas de traumatisme de ce type, si les troubles dont est atteint l’assuré sont plutôt de nature somatique ou psychique (ATF 117 V 359 consid. 6a ; RAMA 1999 no U 341 p. 408 s. consid. 3b).

Lorsque des lésions appartenant spécifiquement au tableau clinique des séquelles d’un accident de type « coup du lapin » ou d’un traumatisme analogue (maux de tête diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, fatigabilité, dépression, etc.), bien qu’en partie établies, sont reléguées au second plan en raison de l’existence d’un problème important de nature psychique, le lien de causalité adéquate doit être apprécié à la lumière des principes applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident (ATF 123 V 98 consid. 2a et les références ; RAMA 2002 n° U 470 p. 531 ; arrêt du Tribunal fédéral U 471/06 du 5 novembre 2007 consid. 5.1).

Dans la mesure où le caractère naturel et le caractère adéquat du lien de causalité doivent être remplis cumulativement pour octroyer des prestations d’assurance-accidents, la jurisprudence admet de laisser ouverte la question du rapport de causalité naturelle dans les cas où ce lien de causalité ne peut, de toute façon, pas être qualifié d’adéquat (ATF 135 V 465 consid. 5.1). En revanche, il n’est pas admissible de reconnaître le caractère adéquat d’éventuels troubles psychiques d’un assuré avant que les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle avec l’accident en cause soient élucidées au moyen d’une expertise psychiatrique concluante (arrêts du Tribunal fédéral 8C_192/2018 du 12 mars 2019 consid. 6 ; 8C_685/2015 du 13 septembre 2016 consid. 4.2). Ainsi, on ne peut pas retenir qu’un accident est propre, sous l’angle juridique, à provoquer des troubles psychiques éventuellement incapacitants sans disposer de renseignements médicaux fiables sur l’existence de tels troubles, leurs répercussions sur la capacité de travail et leur lien de causalité avec cet accident (ATF 147 V 207 consid. 6.1).

6.             L’assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l’accident (art. 10 al. 1 LAA). S’il est totalement ou partiellement incapable de travailler
(art. 6 LPGA) à la suite d’un accident, il a droit à une indemnité journalière
(art. 16 al. 1 LAA). Le droit à l’indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l’accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (art. 16 al. 2 LAA).

7.             Les prestations d’assurance sont également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives (art. 11 de l’ordonnance sur l’assurance-accidents, du 20 décembre 1982 [OLAA - RS 832.202]). Selon la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu’elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c’est la même atteinte qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu’une atteinte apparemment guérie produit, au cours d’un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 137 consid. 3a, ATF 118 V 293 consid. 2c et les références).

Les rechutes et suites tardives se rattachent donc par définition à un événement accidentel effectif. Corrélativement, elles ne peuvent faire naître une obligation de l’assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s’il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l’intéressé et l’atteinte à la santé causée à l’époque par l’accident assuré (ATF 118 V 296
consid. 2c et les références ; RAMA 2006 n° U 570 p. 74 consid. 1.5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 80/05 du 18 novembre 2005 consid.1.1).

8.              

8.1 Si l’assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d’invalidité (art. 18 al. 1 aLAA). Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).

Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain ; de plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

8.2 Aux termes de l’art. 19 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu’il
n’y a plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de l’assuré et que les éventuelles mesure de réadaptation de l’assurance-invalidité ont été menées à terme (al. 1) ; le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente (al. 2). Cette disposition règle le moment de la liquidation du cas d’assurance. L’assureur-accidents ne doit – pour autant que les éventuelles mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité aient été menées à terme – accorder des prestations provisoires, telles que des indemnités journalières et un traitement médical, qu’aussi longtemps qu’une sensible amélioration de l’état de santé peut être attendue de la poursuite du traitement médical. Si tel n’est plus le cas, la cessation des prestations provisoires et la liquidation du cas avec examen des conditions du droit à une rente d’invalidité et/ou à une indemnité pour atteinte à l’intégrité (art. 24 al. 2, 1ère phr. LAA) doivent être examinées en même temps (arrêt du Tribunal fédéral 8C_243/2021 du 11 octobre 2021 et les références).

9.              

9.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l’accident, l’incapacité de travail, l’invalidité, l’atteinte à l’intégrité physique ou mentale) supposent l’instruction de faits d’ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l’assuré à des prestations, l’administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

9.2 L’existence d’un traumatisme de type « coup du lapin » (ou assimilé ; cf. ci-après : consid. 9.2.2) et de ses suites doivent être dûment attestées par des renseignements médicaux fiables (ATF 119 V 335 consid. 1 ; ATF 117 V 359 consid. 4b).

9.2.1 Le Tribunal fédéral a précisé qu’il est indispensable, pour examiner le lien de causalité, de mettre en œuvre, déjà dans les premiers temps qui suivent l’accident, une instruction médicale approfondie (sous la forme d’une expertise pluri- ou interdisciplinaire), lorsqu’il existe des motifs de craindre une persistance ou une chronicisation des douleurs. Par ailleurs, une expertise apparaît indiquée dans tous les cas où les douleurs se sont déjà maintenues durant une assez longue période, sans que l’on puisse augurer une amélioration décisive dans un proche délai. En principe, une telle mesure devrait être ordonnée six mois environ après le début des plaintes (ATF 134 V 109 consid. 9.4).

9.2.2 Le Tribunal fédéral a également précisé les conditions de validité d’une
telle expertise pluri- ou interdisciplinaire. Celle-ci doit non seulement satisfaire aux exigences relatives à la valeur probante des expertises et rapports médicaux, mais elle doit encore émaner de médecins spécialisés, particulièrement au fait de ce genre de traumatismes. Il s’agit en priorité d’effectuer des investigations dans les domaines neurologique/orthopédique (dans la mesure du possible à l’aide d’appareils appropriés), psychiatrique et, au besoin, neuropsychologique.
Pour trancher des questions spécifiques et exclure des diagnostics différentiels,
il est indiqué de procéder aussi à des investigations otoneurologiques, ophtalmologiques, etc. L’expert doit disposer d’un dossier fiable. Cela souligne encore une fois l’importance d’une documentation détaillée du déroulement de l’accident et des premières constatations médicales, mais également du développement ultérieur jusqu’à la mise en œuvre de l’expertise. En ce qui concerne le contenu, il faut que l’on dispose de conclusions convaincantes pour déterminer si les plaintes sont crédibles et, le cas échéant, si, en dépit de l’absence d’un déficit organique consécutif à l’accident, ces plaintes sont – au degré de la vraisemblance prépondérante – au moins partiellement en relation de causalité avec un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale (distorsion), un traumatisme analogue à la colonne cervicale ou un traumatisme crânio-cérébral. En raison des spécificités de la jurisprudence applicable en matière de traumatisme du type « coup du lapin », l’expertise doit, en cas de confirmation du diagnostic, contenir également des renseignements permettant de déterminer si une problématique d’ordre psychique doit être considérée comme une partie du tableau clinique typique de tels traumatismes, dont les aspects somatique et psychique sont difficilement séparables, ou si cette problématique représente une atteinte à la santé psychique propre, distincte du tableau clinique (cf. ci-dessus : consid. 5.4). C’est seulement dans le cas où l’expertise établit de manière convaincante que cette atteinte ne constitue pas un symptôme du traumatisme qu’une autre origine peut être envisagée. Il ne suffit pas de relever les circonstances sociales et socio-culturelles défavorables dans lesquelles se trouve l’assuré. Ensuite, il y a lieu d’établir dans quelle mesure la capacité de travail dans l’activité habituelle ou (en cas d’octroi d’une rente) dans des activités adaptées est limitée par les plaintes considérées comme étant en relation de causalité naturelle avec l’accident (ATF 134 V 109 consid. 9.5).

Une expertise pluri- ou interdisciplinaire répondant aux exigences ci-dessus exposées doit notamment permettre de trancher la question de savoir quels sont les principes applicables pour examiner le caractère adéquat du lien de causalité entre un accident et des plaintes (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb ; ATF 123 V 98 consid. 2a et les références ; RAMA 2002 n° U 470 p. 531).

9.3 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art.61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

9.3.1 Ainsi, le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d’un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu’aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l’assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l’objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l’égard de l’assuré. Ce n’est qu’en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l’impartialité d’une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l’importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l’impartialité de l’expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l’octroi ou le refus de prestations d’assurances sociales, lorsqu’une décision administrative s’appuie exclusivement sur l’appréciation d’un médecin interne à l’assureur social et que l’avis d’un médecin traitant ou d’un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l’un ou sur l’autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

9.3.2 Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d’un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d’un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d’appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l’assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

9.3.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

10.          

10.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.2 La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d’après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d’office par l’assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n’est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire. Celui-ci comprend en particulier l’obligation de ces dernières d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences, sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s’applique toutefois que s’il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d’établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

10.3 Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu’il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu’ils n’auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu’il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985
p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu’une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu’il considère que l’état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l’expertise administrative n’a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu’ici, lorsqu’il s’agit de préciser un point de l’expertise ordonnée par l’administration ou de demander un complément à l’expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

11.          

11.1 En l’espèce, il ressort en synthèse du dossier qu’après avoir été renversée
par un motocycliste le 16 novembre 2011 en traversant la rue de Lyon en courant, la recourante a subi notamment un TCC sévère et, le 7 mars 2013, deux crises d’épilepsie tonico-cloniques dont la première a été à l’origine d’une chute d’un vélo d’intérieur, ayant entraîné une entorse de la cheville gauche. Il est également constant qu’après le dépôt d’une demande de prestations d’assurance-invalidité
du 10 août 2012 et d’une expertise neurologique initiée par l’OAI, le SMR a
estimé, le 28 mai 2018, que la capacité de travail était nulle dans toute activité du
16 novembre 2011 au 31 décembre 2013, et entière – notamment dans l’ancienne activité de monitrice de fitness – à partir du 1er janvier 2014, puis a considéré, le
9 juillet 2018, qu’au vue d’une atteinte incapacitante nouvelle (séquelles d’entorse de la cheville gauche en juin 2016), la nouvelle appréciation de la capacité de travail qui s’imposait pour l’activité habituelle de monitrice de fitness (capacité nulle du 16 novembre 2011 au 31 décembre 2013, entière du 1er janvier 2014 au 31 mai 2016 puis à nouveau nulle dès le 1er juin 2016) ne changeait rien à la pleine exigibilité d’une activité adaptée dès le 1er janvier 2014, soit une activité n’impliquant ni sollicitation répétée de la cheville gauche, ni travail en terrain instable, ni sauts, ni déplacements latéraux. Il ressort en outre de la procédure A/2309/2019 que la chambre de céans, après avoir reconnu la valeur probante du rapport d’expertise neurologique du 9 février 2018 du Dr K______, a confirmé – dans son principe – la décision de refus de rente du 21 mai 2019 de l’OAI mais néanmoins admis (très) partiellement le recours en retenant que la recourante avait droit à une rente entière d’invalidité, limitée dans le temps, du
1er février 2013 au 31 mars 2014 (cf. l’arrêt ATAS/321/2020 du 30 avril 2020, entré en force).

Après que l'intimée a reconnu, le 17 février 2020, qu’elle était l’assureur de l’employeur et demandé au Dr O______ de donner son appréciation, ce dernier a estimé que les diagnostics présentant un lien de causalité naturel avec l’accident du 16 novembre 2011 concernaient, sur le plan neurologique, les séquelles du TCC mais qu’en raison de « l’incohérence manifeste » du bilan neuropsychologique de 2017, le seul trouble démontré consistait dans les risques d’épilepsie qui étaient maîtrisés – car sous traitement depuis la dernière crise de 2013 –, de sorte qu’il n’y avait ni atteinte à l’intégrité, ni incapacité de travail, celle-ci étant entière dans toute activité depuis le 1er janvier 2014, le rapport d’expertise du 9 février 2018 du Dr K______ étant toujours d’actualité. Sur le plan somatique, les suites de l’entorse de la cheville gauche du 7 mars 2013 n’empêchaient pas l’exercice d’une activité adaptée (travail sans effort physique et plutôt semi-assis) dès le 1er janvier 2014 et n’entraînaient pas non plus d’atteinte à l’intégrité en dehors d’un risque d’arthrose secondaire au long cours qui n’était toutefois pas prévisible en l’état.

La décision litigieuse se fonde sur l’avis du Dr O______ et l’expertise du
Dr K______ pour mettre fin aux prestations provisoires (indemnités journalières et traitement médical) au 31 décembre 2013 et nier le droit à toutes autres prestations, hormis le traitement médical associé aux complications tardives de la cheville du 28 août 2015 au 13 novembre 2017.

Pour sa part, la recourante s’appuie sur le rapport d’expertise neurologique du 20 janvier 2023 du Dr P______ pour conclure à l’octroi, non seulement d’une rente, mais aussi d’une IPAI.

Dans ces conditions, il convient d’examiner tout d’abord la valeur probante des rapports sur lesquels l’intimée se fonde pour nier le droit à une rente d’invalidité (ci-après : consid. 11.2) et à une IPAI (consid. 11.3), notamment en confrontant ceux-ci au rapport d’expertise privée du 30 janvier 2023 du Dr P______.

L’expertise privée de ce médecin – qui se fonde sur des éléments partiellement nouveaux (bilan neuropsychologique dès septembre 2022, IRM cérébrale du 22 septembre 2022) - étant postérieure à la décision litigieuse du 3 mai 2022, elle sort en principe de l’objet du litige.

En effet, de jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement et ayant modifié cette situation doivent faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 131 V 242 consid. 2.1 ; 121 V 362 consid. 1b).

Toutefois, pour des motifs d’économie de procédure, la procédure juridictionnelle administrative peut être étendue à une question en état d’être jugée qui excède l’objet de la contestation, c’est-à-dire le rapport juridique visé par la décision, lorsque cette question est si étroitement liée à l’objet initial du litige que l’on peut parler d’un état de fait commun, et à la condition que l’administration se soit exprimée à son sujet dans un acte de procédure au moins (ATF 130 V 501
consid. 1.2 ; ATF 122 V 34 consid. 2a et les références). Les conditions auxquelles un élargissement du procès au-delà de l’objet de la contestation est admissible sont donc les suivantes : la question (excédant l’objet de la contestation) doit être en état d’être jugée ; il doit exister un état de fait commun entre cette question et l’objet initial du litige ; l’administration doit s’être prononcée à son sujet dans un acte de procédure au moins ; le rapport juridique externe à l’objet de la contestation ne doit pas avoir fait l’objet d’une décision passée en force de chose jugée (Fritz GYGI, Bundesverwaltungsrecht, 2e éd., 1983, p. 43) et les droits procéduraux des parties doivent être respectés (Ulrich MEYER/ Isabel VON ZWEHL, L’objet du litige en procédure de droit administratif fédéral, in Mélanges Pierre MOOR, 2005, n° 27 p. 446). Ces principes, développés en premier lieu en lien avec un élargissement matériel du procès, sont en principe également valables lorsque la contestation a pour objet un état de fait qui produit des effets au-delà de la période délimitée par la décision litigieuse (élargissement temporel ; ATF 130 V 138 consid. 2.1).

En l’occurrence, ces conditions sont toutes remplies : on constate en effet que les questions sur lesquelles le Dr P______ s’est prononcé se recoupent avec celles – relatives à la capacité de travail et à l’IPAI – auxquelles le Dr O______ a répondu à la demande de l’intimée, de sorte que l’on peut parler d’un état de
fait commun malgré la présence d’éléments nouveaux (bilan neuropsychologique dès septembre 2022 et IRM cérébrale du 22 septembre 2022) qui s’y ajoutent et apportent un éclairage nouveau sur des éléments préexistants au moment de la décision litigieuse (examens neuropsychologiques de 2017 et 2018 ; cf. ci-après : consid. 11.2).

Comme par ailleurs, l’intimée s’est prononcée non seulement sur le droit à la rente et l’IPAI (dans la décision sur opposition litigieuse) mais aussi
sur l’expertise privée du Dr P______ en soutenant, le 14 février 2023, que celle-ci n’apportait rien de nouveau par rapport à celle réalisée en 2018 par l’expert K______, il y a lieu de considérer que la cause est en état d’être jugée et que l’intimée a eu l’occasion de se déterminer sur un élargissement temporel de l’objet du litige.

11.2 Il ressort en synthèse du rapport d’expertise neurologique du 9 février 2018 du Dr K______ et de l’examen neuropsychologique que celui-ci a délégué à Mme L______ que les quelques plaintes neurologiques formulées encore actuellement et le résultat de l’examen neurologique – qui était sans anomalie significative – ne pouvaient être considérés comme la cause d’une incapacité de travail significative au terme d’une période d’un an maximum après l’événement accidentel et, sur le plan neuropsychologique, deux ans après cet événement, sans qu’il y ait de limitations fonctionnelles neurologiques ou neuropsychologiques au terme de cette période d’un an, respectivement deux ans. Dans son arrêt ATAS/321/2020 du 30 avril 2020, la chambre de céans avait relevé que l’expert K______ motivait cet écart d’un an par le fait que tant Mme L______ que M. J______ concluaient à des incohérences et éléments atypiques qui rendaient l’examen neuropsychologique non probant et ne permettaient donc pas de retenir une atteinte à la santé. Bien qu’elle ait reconnu la valeur probante de l’expertise du Dr K______ dans le cadre de l’arrêt du 30 avril 2020 précité, la chambre de céans n’en constate pas moins que le rapport d’expertise neurologique privée du 30 janvier 2023 du Dr P______ évoque, lui aussi, un « défaut d’effort » lors des examens neuropsychologiques de 2017, 2018 et 2022. Cependant, cet expert précise également que si ce défaut d’effort « peut » expliquer la péjoration des troubles cognitifs attentionnels et de mémoire par rapport aux examens neuropsychologiques de 2011 et 2012, il existe aussi d’autres facteurs pouvant expliquer cette évolution, à savoir le traitement antiépileptique en cours depuis 2013, les séquelles cérébrales sous-corticales révélées par l’IRM cérébrale du 22 septembre 2022 – séquelles dont l’origine médicamenteuse (traitement antiépileptique) et/ou migraineuse serait possible de son point de vue –, ainsi que l’état dépressif sous-jacent (cf. rapport d’expertise du 30 janvier 2023, p. 15-16). Par ailleurs, l’examen neurologique et neurocomportemental que l’expert P______ a effectué lui-même met en évidence des « troubles attentionnels dans la sphère visuelle et verbale, ainsi que des troubles mnésiques antérogrades verbaux en apprentissage » (cf. rapport d’expertise du 30 janvier 2023, p. 13). En outre, cet expert se démarque du Dr K______ en justifiant une incapacité de gain totale de la recourante dans toute activité au moyen des limitations fonctionnelles neurologiques suivantes :

-     troubles sévères de la concentration ne permettant pas d’activité intellectuelle soutenue au-delà d’une heure consécutive ;

-     troubles sévères de la mémoire verbale avec difficultés à retenir les informations à utiliser à l’avenir (antérograde) ;

-     troubles modérés des capacités exécutives (planification, flexibilité) engendrant des difficultés à se positionner, à s’adapter à des situations nouvelles ou changeantes ;

-     fatigue mentale et physique avec baisse de performance constatée objectivement lors de séances de tests de trois heures ;

-     céphalées survenant 15-20 jours par mois.

Par opposition, l’expert K______ est d’avis que, malgré une capacité
de travail qu’il estimait à nouveau entière dans une « activité simple », (soit  une activité sédentaire, sans apprentissage mnésique important, relativement répétitive, bien encadrée) deux ans après l’accident du 16 novembre 2011, les incohérences observées lors des tests neuropsychologiques l’empêchaient de retenir une quelconque limitation fonctionnelle neurologique. La chambre de céans constate ainsi que, même si une « activité simple » (au sens précité) était une activité adaptée aux dires du Dr K______, le recouvrement d’une capacité de travail entière au 1er janvier 2014 par la recourante ne dépendait pas, de l’avis de cet expert, du caractère simple d’une telle activité.

Étant donné que les expertises des Drs K______ et P______ ont
été établies – chacune à leur époque – sur la base d’un dossier complet, qu’elles tiennent compte des plaintes de l’expertisée, comportent une anamnèse, un examen clinique et que leurs conclusions sont motivées, la chambre de céans
ne saurait départager les avis divergents de ces experts sur la base des critères formels évoqués, de sorte que la question de savoir si – et, le cas échéant, quand et dans quelle mesure – la recourante a recouvré une capacité de travail à la suite de l’accident du 16 novembre 2011 nécessite une surexpertise. Le point de savoir quel devra en être l’étendue fera l’objet de plus amples développements (ci-après : consid. 11.3 et 11.4).

11.3 En ce qui concerne l’octroi d’une IPAI, le Dr O______ a examiné
la question au regard des séquelles neurologiques et orthopédiques du cas, soit des crises d’épilepsie, respectivement du « risque d’arthrose » à la cheville. En ce qui concerne la première de ces atteintes, la chambre de céans constate qu’il existe une divergence entre le Dr O______ et le Dr P______. Alors que le premier de ces médecins estime que les conditions d’octroi d’une IPAI ne seraient pas remplies (dans la mesure où les crises d’épilepsie ne se seraient plus déclarées après 2013), le second considère au contraire, en référence à l’annexe 3 OLAA, que même une épilepsie post-traumatique, sous médicamentation permanente
sans crise, justifie l’octroi d’une IPAI de 30%. Par ailleurs, contrairement au
Dr O______ qui, sans être neurologue, ne voit « rien d’objectif probant » sur le plan neurologique, le Dr P______ considère que le TCC et les céphalées de tension justifient aussi l’octroi d’une IPAI de 50%, respectivement 10%. Sur le plan orthopédique, la chambre de céans constate que dans son rapport du 23 septembre 2015 (pièce M5 intimée), le Dr H______ mentionne non pas un simple risque d’arthrose mais une « certaine arthrose post-traumatique déjà présente ». Or, le Dr O______ n’explique à aucun moment les raisons qui le poussent à s’écarter des constatations du Dr H______. Dans ces circonstances, l’expertise à mettre en œuvre ne saurait porter sur la seule question de l’incapacité de travail découlant des troubles présentant un lien de causalité avec l’événement du 16 novembre 2011 (ci-dessus : consid. 11.2). Elle devra comporter, outre un volet neurologique, un volet orthopédique et porter également sur la question de l’IPAI.

11.4 Il reste à examiner si une telle expertise devrait également se voir adjoindre un volet psychiatrique. La recourante fait valoir à cet égard qu’à l’image du
Dr K______, qui appelait un bilan psychiatrique de ses vœux en 2018, le Dr P______ estime lui aussi, dans sa récente expertise, qu’une évaluation psychiatrique est recommandée, la recourante présentant en effet, lors d’un screening par une échelle auto-administrée de la dépression et anxiété, « un score suggestif pour une dépression qui peut ultérieurement contribuer à une atteinte à l’intégrité » (cf. rapport d’expertise du 30 janvier 2023, p. 17). D’avis contraire, l’intimée estime, en substance, que l’absence évidente de causalité adéquate entre l’accident du 16 novembre 2011 et d’éventuels troubles psychiques devrait de toute manière conduire à considérer ceux-ci comme un phénomène indépendant de cet accident.

Il est vrai que dans son arrêt ATAS/321/2020 du 30 avril 2020, la chambre de céans avait considéré, dans le cadre du litige opposant la recourante à l’OAI, que la seule mention, de la part du Dr K______, qui n’est pas psychiatre, d’un « comportement [ ] très particulier » n’apparaissait pas suffisamment circonstanciée pour mettre en lumière une instruction lacunaire. Cependant, dans le contexte particulier de l’examen de la causalité des suites d’un TCC avec un accident assuré (ci-dessus : consid. 9.2), il s’agit en priorité d’effectuer des investigations dans les domaines neurologique, orthopédique, psychiatrique et, au besoin, neuropsychologique par des médecins spécialisés particulièrement au fait de ce genre de traumatismes. Par ailleurs, l’intimée semble ne pas tenir compte du fait qu’en raison des spécificités de la jurisprudence applicable en matière de traumatismes de type « coup du lapin » (et assimilés), l’expertise doit, en cas de confirmation du diagnostic, contenir également des renseignements permettant de déterminer si une problématique d’ordre psychique doit être considérée comme une partie du tableau clinique typique de tels traumatismes, dont les aspects somatique et psychique sont difficilement séparables, ou si cette problématique représente une atteinte à la santé psychique propre, distincte du tableau clinique, étant souligné que la manière d’analyser la causalité adéquate n’est pas la même selon que l’on se situe dans la première ou la seconde hypothèse (ci-dessus : consid. 9.2.2). En effet, en présence de troubles psychiques apparus après un accident, on examine les critères de la causalité adéquate en excluant les aspects psychiques (ATF 115 V 133 consid. 6c/aa ; ATF 115 V 403 consid. 5c/aa), tandis qu’en présence d’un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale (ATF 117 V 359 consid. 6a), d’un traumatisme analogue à la colonne cervicale (SVR 1995 UV n° 23 consid. 2) ou d’un traumatisme crânio-cérébral (ATF 117 V 369 consid. 4b), on peut renoncer à distinguer les éléments physiques des éléments psychiques (sur l’ensemble de la question, ATF 127 V 102 consid. 5b/bb et SVR 2007 UV n° 8 p. 27 consid. 2 et les références). Nonobstant ce qui précède, même en présence d’un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale, d’un traumatisme analogue ou d’un TCC – si les symptômes (non psychiques) du tableau clinique sont réellement à l’arrière-plan par rapport
à l’importance des symptômes psychiques, ou si ces troubles psychiques apparaissent très tôt de manière prédominante, soit dans un délai maximum de
six mois, ou si l’accident n’a fait que renforcer des troubles psychiques qui étaient déjà présents avant cet événement, ou encore lorsque les troubles psychiques constituent plutôt une atteinte à la santé indépendante et non seulement l’un des éléments du tableau clinique type (ATF 123 V 98 consid. 2), il convient d’appliquer, dans les cas d’accidents de gravité moyenne, les critères objectifs tels que définis à l’ATF 115 V 133 consid. 6c/aa et à l’ATF 115 V 403 consid. 5c/aa, au regard des seules atteintes somatiques.

11.5 La chambre de céans relève, enfin, que la décision litigieuse prend en charge le traitement médical associé aux complications tardives du 28 août 2015 au 13 novembre 2017, exclusivement, ce laps de temps correspondant peu ou prou à celui déterminé par le Dr O______ dans un courrier du 9 août 2021 à l’intimée (« 23.09.2015 au 13.11.2017 »), lui-même en contradiction avec la précédente appréciation de ce médecin du 2 août 2021, faisant état d’une stabilisation des troubles somatiques de la cheville « probablement depuis 2016, en l’absence de tout suivi depuis lors ». Si la thèse d’une rechute est effectivement corroborée par le rapport du 28 juin 2016 à l’OAI du Dr I______, il n’en reste pas moins que ce médecin a été consulté par la recourante avant le 28 août 2015, soit du 5 mai 2015 au 27 juillet 2015, période durant laquelle la recourante présentait des séquelles d’entorse de cheville grave selon ce médecin, entraînant une incapacité de travail complète dans l’activité habituelle d’enseignante de yoga et fitness (cf. ATAS/321/2020, p. 10-11). Il apparaît donc douteux, en l’état de l’instruction, que le traitement des séquelles de l’entorse de la cheville gauche se limite aux consultations et traitements prescrits par le Dr H______ entre le 23 août 2015 et le 13 novembre 2017.

11.6 Il résulte de ce qui précède que, si l’on excepte les indemnités journalières - dont l’octroi du 19 novembre 2011 au 31 décembre 2013 n’est pas contesté en
tant que tel mais demeure fonction de la date de stabilisation de l’état de santé
au 1er janvier 2014, laquelle reste encore à confirmer par l’expertise à venir - les prestations accordées et refusées par l’intimée dans la mesure fixée par la décision litigieuse reposent sur les appréciations dépourvues de valeur probante du
Dr O______. Aussi est-il nécessaire, en application de l’art. 44 LPGA et des principes évoqués plus haut (consid. 11.4), que l’intimée mette en œuvre une expertise pluridisciplinaire dans les domaines neurologique, orthopédique, psychiatrique et, au besoin, neuropsychologique par des médecins spécialisés particulièrement au fait du genre de traumatisme subi (TCC grave) avant de rendre une nouvelle décision sur le droit aux prestations.

11.7 La recourante conclut également à ce que l’intimée soit condamnée à prendre en charge un traitement de physiothérapie au-delà du 31 décembre 2013.

C’est le lieu d’observer que la prise en charge d’un traitement suit en principe le sort des indemnités journalières (cf. art. 19 al. 1, 2ème phr. LAA). Or, au regard des explications données à propos des indemnités journalières (cf. consid. 11.6 in initio), il est prématuré, en l’état de l’instruction, d’apprécier le bien-fondé d’une éventuelle continuation de la prise en charge de séances de physiothérapie au-delà du 31 décembre 2013.

11.8 La recourante conclut, enfin, à la condamnation de l’intimée à prendre en charge les honoraires de son conseil pour la procédure d’opposition.

Selon l’art. 52 al. 3 LPGA, la procédure d’opposition est gratuite. En règle générale, il ne peut être alloué de dépens.

La seule exception retenue par la jurisprudence est celle de l’opposant qui, en cas de perte du procès, aurait pu prétendre à l’assistance judiciaire (ATF 140 V 116 consid. 3.3 ; 132 V 200 consid. 4.1 ; 130 V 570 consid. 2 ; Valérie DEFAGO-GAUDIN, in Dupont/Moser-Szeless [éd.], Commentaire romand de la LPGA,
n. 38 ad art. 52 LGPA), ce qui n’est pas le cas de la recourante. Il s’ensuit qu’elle ne peut se voir octroyer de dépens pour la procédure d’opposition.

12.         Le recours est donc partiellement admis, la décision sur opposition du 3 mai 2022 annulée et la cause renvoyée à l’intimée pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

13.         Étant donné que la recourante obtient partiellement gain de cause dans la procédure de recours, une indemnité de CHF 2’500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens, à charge de l’intimée (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA – E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

*****

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 3 mai 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimée pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Condamne l’intimée à verser à la recourante une indemnité de CHF 2’500.- à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF – RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le