Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/4156/2021

ATAS/1190/2022 du 23.12.2022 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4156/2021 ATAS/1190/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 décembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

 

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née en ______ 1942, a déposé une demande de prestations complémentaires auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé), qui l’a reçue en date du 19 juin 2020.

b. Par courrier du 20 août 2020, le SPC a demandé à l’intéressée de lui fournir plusieurs pièces complémentaires, parmi lesquelles une déclaration des avoirs bancaires et postaux en Suisse, ainsi qu’une déclaration des biens immobiliers.

B. a. Après avoir examiné l’ensemble des documents transmis par l’intéressée, le SPC a rendu une décision datée du 3 mars 2021, par laquelle il a constaté que la fortune prise en compte dans le calcul du montant des prestations complémentaires était supérieure au seuil prévu pour avoir droit à des prestations. Dans le plan de calcul des prestations complémentaires, pour la période du 1er juin au 31 décembre 2020, qui était joint à la décision, il était mentionné des biens dessaisis, pour un montant de CHF 627’715.79 qui ressortait des pièces remises. Cette diminution du patrimoine était prise en compte dans le calcul du revenu déterminant, comme s’il n’y avait pas eu de dessaisissement. Dans le plan de calcul des prestations complémentaires, pour la période démarrant le 1er janvier 2021, il était mentionné des biens dessaisis pour un montant de CHF 617’715.79, qui ressortait des pièces remises. Cette diminution du patrimoine était prise en compte dans le calcul du revenu déterminant, comme s’il n’y avait pas eu de dessaisissement, étant précisé que le montant retenu était réduit de CHF 10'000.- par an, dès la deuxième année suivant la date du dessaisissement.

b. L’intéressée s’est opposée à la décision du 3 mars 2021, par passage au guichet du SPC en date du 9 mars 2021, et a demandé un rendez-vous afin de discuter de la question du dessaisissement.

c. Suite à un entretien avec l’un des employés du SPC, M. B______, l’intéressée a confirmé son opposition par courrier du 1er avril 2021. Par courrier du 22 avril 2021, le mandataire de l’intéressée a confirmé que sa fortune nette avait été établie de manière incomplète ou inexacte et a demandé que cette dernière soit mise au bénéfice de l’assistance juridique gratuite, dans le cadre de sa procédure d’opposition, en invoquant le fait que ses revenus actuels étaient inférieurs au minimum vital, que sa cause ne paraissait pas vouée à l’échec et que la complexité de l’affaire l’exigeait, ce d’autant plus que l’intéressée avait déjà un certain âge et souffrait de plusieurs et importantes pathologies. Par courrier du 10 mai 2021, le SPC a refusé d’octroyer l’assistance juridique gratuite à l’intéressée, au motif que la condition de la complexité de l’affaire n’était pas remplie, dès lors qu’il ne s’agissait que de la prise en compte de la fortune dans le cadre du calcul des prestations complémentaires, ce qui n’était pas une question de droit particulièrement difficile. Par courrier du 17 mai 2021, l’intéressée a demandé et obtenu un nouveau rendez-vous pour exposer son argumentation.

d. Par décision sur opposition du 3 novembre 2021, l’opposition a été rejetée. Après avoir effectué de nouveaux calculs, le SPC a expliqué qu’il avait pris en compte le nouveau mode de calcul des dessaisissements basé sur un montant d’entretien usuel admis (art. 11a al. 3 LPC) ; il en résultait une diminution du montant des biens dessaisis pris en compte, qui était ramené de CHF 627’715.79 à CHF 414'654.-. Ce nonobstant, ce nouveau montant ne permettait toujours pas à l’intéressée de bénéficier des prestations complémentaires, dès lors que ses revenus restaient supérieurs aux dépenses reconnues.

C. a. L’intéressée a obtenu un rendez-vous avec le SPC, après quoi, par courrier reçu par le SPC en date du 30 novembre 2021, elle a fait valoir un certain nombre de reconnaissances de dettes en faveur de tiers et a exposé sa situation de santé préoccupante. La lettre de l’intéressée, reçue le 30 novembre 2021, a été acheminée par le SPC à la chambre de céans, en annexe à un courrier du 3 décembre 2021, comme valant recours et étant l’objet de sa compétence.

b. Sur interpellation de la chambre de céans, le SPC a répondu au recours par courrier du 4 janvier 2022. Il s’est déterminé sur l’objet du litige, en considérant que celui-ci se résumait à la prise en considération des biens dessaisis amortis, de respectivement CHF 414'654.- au 1er juin 2020 (date de début de la période litigieuse), puis de CHF 404'654.- au 1er janvier 2021. À teneur de son recours, l’intéressée faisait valoir des dettes envers des tiers, pour un montant total de CHF 231’365.-. Toutefois, les documents qu’elle avait communiqués ne permettaient pas d’expliquer la totalité du montant en question, pas plus qu’il n’existait de preuve de réception des sommes qui lui auraient été prêtées par chacun des créanciers. Enfin, quand bien même l’intéressée aurait remboursé des prêts pour un montant total de CHF 231'365.-, encore fallait-il que les remboursements aient été effectués durant les années pendant lesquelles le dessaisissement de fortune avait été retenu, soit durant les années 2015, 2016 ou 2017, ce qui n’avait pas été clairement établi en l’état. Dans tous les cas, le SPC considérait que cette question pouvait rester ouverte, car même si l’on prenait en compte l’intégralité du montant de CHF 231'365.-, il n’en restait pas moins que le solde, qui représentait CHF 183'289.- (soit 414'654 - 231'365), ne permettait toujours pas à l’intéressée de prétendre à l’octroi de prestations complémentaires, car le revenu déterminant était supérieur aux dépenses reconnues. Il joignait à cet effet des simulations intitulées « Plan de calcul des prestations complémentaires favorable » pour les périodes allant du 1er janvier au 30 novembre 2021, puis du 1er au 31 décembre 2021, puis dès le 1er janvier 2022. S’agissant du droit intertemporel applicable, le SPC mentionnait, sous la rubrique « Dépassement du seuil de la fortune défavorable (selon réforme PC 2021) », que la fortune nette était supérieure aux seuils prévus par l’art. 9a al. 1 LPC entré en vigueur le 1er janvier 2021 également valable en matière de prestations complémentaires cantonales en vertu de l’art. 1A al. 1 LPCC ; il en résultait que le droit aux prestations complémentaires aurait été supprimé si le nouveau droit avait été appliqué. En fonction de l’ensemble de ces éléments, le SPC concluait au rejet du recours.

c. La chambre de céans a appointé une audience de comparution personnelle, en date du 10 mars 2022.

Lors de l’audience, l’intéressée a exposé son parcours qui avait débuté en Suisse en 1960, après quoi elle avait poursuivi des études en biologie et en psychologie, puis avait obtenu un diplôme d’architecte en planification hospitalière, avant de commencer à travailler à Bâle. Elle avait démissionné, en 1992, notamment en raison de plusieurs deuils qui l’avaient frappée et avait préféré stopper son travail et retirer son second pilier. Elle n’avait ni frère, ni sœur, ni aucune parenté, mais elle avait des amis très proches et de longue date à Genève et ce sont ces derniers qui l’avaient aidée financièrement lorsqu’elle avait connu des problèmes d’argent. Elle avait repris un mandat, en 1996, pour l’hôpital militaire C______, situé à en Grèce, puis avait travaillé à Genève, pour une société bâloise, et avait définitivement cessé de travailler en 2006. Elle était alors passée d’un revenu mensuel de CHF 10'500.- à une rente AVS mensuelle de CHF 1'537.-. Le montant de plus de CHF 600'000.- qui figurait sur son compte bancaire provenait d’un héritage de ses parents, soit une propriété immobilière située en Grèce qu’elle avait réussi à vendre, pour CHF 900'000.-, à mi-décembre 2014. Entre 2006 et 2014, elle avait pu vivre grâce à l’aide de ses amis, avant de vendre la maison, afin, notamment, de réduire ses charges et de rembourser ses dettes. Ce qui était le plus important pour elle, c’était de pouvoir demeurer dans son appartement qu’elle avait aménagé en fonction de ses troubles de la santé et pour lequel elle payait un loyer mensuel de CHF 1'435.-.

Sur proposition du président de la chambre de céans, la recourante a accepté de lever le secret bancaire sur son compte no 1______ ouvert dans les livres de la banque cantonale de Genève (ci-après : BCG) de manière à pouvoir établir les flux d’argent, entre le moment où le montant de la vente de l’immeuble situé en Grèce avait été crédité sur son compte et jusqu’au 31 décembre 2017. De cette manière, il était plus facile d’établir quels créanciers avaient été remboursés, à quelles dates et pour quels montants. Le représentant du SPC s’est déclaré favorable à cette solution, car la recourante avait transmis un grand nombre de preuves de paiements à l’intimé, mais, dans la plupart des cas, ceux-ci avaient déjà été pris en compte dans le calcul du loyer, de l’assurance-maladie ou des frais médicaux. Il ajoutait qu’il était possible que, suivant les montants qui étaient démontrés, cela ne soit pas suffisant pour avoir une incidence sur l’octroi des prestations complémentaires.

Lors de la même audience, la chambre de céans a également demandé au SPC d’effectuer une simulation de calculs, afin de déterminer le seuil à partir duquel la diminution des biens dessaisis et retenus dans les plans de calculs permettait, éventuellement, l’ouverture d’un droit aux prestations pour la recourante.

d. Par demande d’information du 14 mars 2022, contresignée par la recourante, la chambre de céans a requis auprès de la BCG la production des relevés bancaires du compte de l’intéressée no 1______, pour la période allant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, ainsi que les avis de débit pour tous montants équivalant à CHF 10'000.- avec indication de la banque destinataire et du bénéficiaire. Les documents bancaires ont été reçus en date du 17 mars 2022, puis transmis aux parties.

e. Par courrier du 18 mars 2022, le SPC s’est déterminé sur le seuil à partir duquel la diminution des biens dessaisis retenus dans les plans de calcul permettrait l’ouverture d’un droit aux prestations pour la recourante. Il était établi que le bien résiduel au 1er juin 2020 devait être de CHF 41'586.- au maximum, pour que la recourante ait droit aux subsides partiels de l’assurance-maladie. Le SPC ajoutait que, même si aucune fortune n’avait été prise en compte dans le calcul des prestations, la recourante ne pourrait prétendre qu’aux subsides de l’assurance-maladie, dans la mesure où l’excédent des dépenses ne dépassait pas la prime moyenne cantonale, fixée à CHF 7'272.- en 2021 ; pour le surplus, il était renvoyé au plan de calcul simulé du 1er janvier au 31 décembre 2021.

f. Par courrier du 4 juillet 2022, la recourante a transmis à la chambre de céans diverses factures et preuves de paiements notamment, via Western Union, faisant état de versements effectués par elle en faveur de tiers, en Grèce, principalement de 2015 à 2017.

g. Appelé à se déterminer sur ces documents, le SPC a répondu, par courrier du 18 novembre 2022, que suite à l’examen des nouvelles dépenses que la recourante avait fait valoir, à l’appui de son écriture du 4 juillet 2022, ces dernières totalisaient un montant global de CHF 42’080.80 et étaient destinées à financer, notamment, les démarches administratives en Grèce pour son compte. L’intimé considérait que, bien que l’on ne puisse pas disposer de justificatifs qui permettaient de vérifier l’affectation des fonds, cette question pouvait rester ouverte, car même s’il fallait réduire le montant du dessaisissement en tenant compte intégralement des dépenses susvisées, par CHF 42’080.80, le solde du dessaisissement ferait toujours obstacle à l’ouverture d’un droit aux prestations.

h. Par courrier du 22 novembre 2022, la chambre de céans a transmis la détermination du SPC à la recourante et a informé les parties que la cause était gardée à juger.

i. En date du 23 novembre 2022, la recourante a déposé au guichet du greffe de la chambre de céans une écriture contenant, en annexe, un certificat médical établi le 22 novembre 2022 par le docteur D______, spécialiste en médecine interne, confirmant que la recourante souffrait de plusieurs pathologies et de douleurs chroniques invalidantes, mais qu’elle était en pleine possession de sa capacité de discernement.

j. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             La novelle du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Dans la mesure où le présent recours n’était pas pendant à cette date, il est soumis au nouveau droit (art. 82a LPGA).

La législation sur les prestations complémentaires a connu des modifications également entrées en vigueur le 1er janvier 2021.

Néanmoins, les dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 (Réforme des PC) prévoient que, pendant un délai de trois ans, les anciennes dispositions continuent de s’appliquer si la réforme des prestations complémentaires, dans son ensemble, conduit à un résultat plus défavorable pour le bénéficiaire.

Selon les simulations effectuées et produites par le SPC, l’application du nouveau droit conduirait à un résultat plus défavorable pour l’intéressée. Dès lors, la présente espèce doit être examinée à l’aune des dispositions en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, qui seront ainsi citées dans leur teneur à cette date.

3.             Déposé dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable.

4.             S’agissant de l’objet du litige, il porte sur le montant des prestations complémentaires telles que calculées par le SPC, dès le 1er juin 2020, en tenant compte des dessaisissements imputés à la recourante.

5.             Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions (personnelles) prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-vieillesse et survivants, conformément à l'art. 4 al. 1 let. a LPC.

5.1 Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d'invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L'art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Au niveau fédéral, les revenus déterminants comprennent notamment les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi (art. 11 al. 1 let. g LPC).

5.2 Au plan cantonal, l'art. 4 LPCC dispose qu'ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable.

L'art. 5 LPCC renvoie à la réglementation fédérale pour le calcul du revenu déterminant, sous réserve notamment de l'ajout des prestations complémentaires fédérales au revenu déterminant et de la prise en compte de la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant d’un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse.

5.3 Aux termes de l’art. 19 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal - J 3 05), conformément aux art. 65ss de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), l’État de Genève accorde aux assurés de condition économique modeste des subsides destinés à la couverture totale ou partielle des primes de l’assurance-maladie. Les subsides sont notamment destinés aux assurés bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI (cf. art. 20 al. 1 let. b LaLAMal). L’art. 22 al. 6 LaLAMal dans sa teneur en force en 2015 disposait que les bénéficiaires d’une prestation annuelle, fédérale et/ou cantonale, complémentaire à l’AVS/AI versée par le service ont droit à un subside égal au montant de leur prime d’assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l’intérieur. Les personnes qui ont un excédent de ressources inférieur à la prime moyenne cantonale ont droit à un subside équivalent à la différence entre la prime moyenne cantonale et l’excédent de ressources.

S’agissant du subside d’assurance-maladie, en pratique, le SPC procède au calcul des dépenses du bénéficiaire, sans prendre en considération les primes d’assurance-maladie, puis il admet le droit au subside en fonction du montant de l’excédent de ressources (ATAS/1039/2013 du 29 octobre 2013 consid. 11a/cc).

En vertu de l’art. 25 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée lors de chaque changement survenant au sein d’une communauté de personnes comprises dans le calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1 let. a). En cas de changement au sein d’une communauté de personnes, sans effet sur la rente, la nouvelle décision doit porter effet dès le début du mois qui suit celui au cours duquel le changement est survenu (al. 2 let. a).

6. Il y a dessaisissement lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_22/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2 et les références). Pour vérifier s'il y a contre-prestation équivalente et pour fixer la valeur d'un éventuel dessaisissement, il faut comparer la prestation et la contre-prestation à leurs valeurs respectives au moment de ce dessaisissement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1). Pour que l'on puisse admettre qu'une renonciation à des éléments de fortune ne constitue pas un dessaisissement, il faut que soit établie une corrélation directe entre cette renonciation et la contre-prestation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2014 du 7 avril 2014 consid. 3.1). Une contre-prestation est réputée adéquate lorsqu’elle représente environ 90% de la valeur de la prestation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_157/2014 du 24 juin 2014 consid. 5.1).

Aux termes de l’art. 17 OPC-AVS/AI, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile.

7. 7.1 La procédure est régie par le principe inquisitoire, d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Car si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences (ATF 117 V 261 consid. 3), sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à l'adverse partie (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3).

7.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

8. En l’espèce, l’intimé a nié tout droit à des prestations complémentaires à l’intéressée, au motif que même si l’on tenait compte des justificatifs communiqués par cette dernière, y compris les ultimes justificatifs de paiement effectués via Western Union, pour un total de CHF 42'080.80, le montant résiduel ferait toujours obstacle à l’ouverture d’un droit aux prestations.

La recourante, quant à elle, ne remet pas en question les calculs effectués par le SPC, mais considère que sa bonne foi doit être reconnue et l’ensemble des pièces justificatives qu’elle a fournies doit être pris en compte et déduit du montant du dessaisissement retenu par le SPC.

8.1 Dans sa réponse au recours, le SPC a tenu compte de l’ensemble des montants que la recourante a fait valoir. Il est arrivé à la conclusion que, même si cette dernière avait remboursé des prêts pour un montant total de CHF 231'365.-, encore fallait-il que les remboursements aient été effectués durant les années pendant lesquelles le dessaisissement de fortune avait été retenu, soit durant les années 2015, 2016 ou 2017, ce qui n’avait pas été clairement établi en l’état.

Dans tous les cas, le SPC considérait que cette question pouvait rester ouverte, car même si l’on prenait en compte l’intégralité des remboursements, pour un montant de CHF 231'365.-, il n’en restait pas moins que le solde, qui représentait CHF 183'289.- (soit 414'654 - 231'365) ne permettait toujours pas à l’intéressée de prétendre à l’octroi de prestations complémentaires, car le revenu déterminant était supérieur aux dépenses reconnues.

À ce montant de CHF 231'365.-, préalablement invoqué par la recourante, est venu s’ajouter le montant supplémentaire de CHF 42’080.80, transmis par la recourante le 4 juillet 2022.

8.2 Dans un souci d’économie de procédure et afin d’éviter de devoir qualifier chaque montant, il convient d’examiner quelle serait la situation, dans le meilleur des cas, à savoir s’il fallait admettre l’ensemble des montants allégués par la recourante comme étant des remboursements de prêts ou de dépenses ayant fait l’objet d’une contre-prestation.

Dans un tel cas il conviendrait de soustraire les montants de CHF 231'365.- et CHF 42'080.80 du montant total de CHF 414'654.-, ce qui aboutirait à un solde de CHF 141'208.20, représentant la fortune après déduction de l’intégralité des sommes dont la recourante a allégué qu’il ne s’agissait pas de dessaisissements.

Il apparaît que l’on peut s’épargner le réexamen des sommes dépensées afin de déterminer s’il s’agit oui ou non d’un dessaisissement, dès lors que, comme le montre le calcul du SPC, même l’admission de tous les montants allégués par la recourante ne suffirait pas à ouvrir le droit aux prestations complémentaires.

En effet, selon le calcul du SPC, qui n’est pas critiqué, le bien résiduel au 1er juin 2020 devrait être de CHF 41'586.- au maximum, pour que la recourante ait droit, non pas aux prestations complémentaires, mais aux subsides partiels de l’assurance-maladie.

Or, le montant de CHF 141'208.20 auquel on parvient en tenant compte de l’ensemble des déductions alléguées par la recourante est encore bien supérieur à CHF 41'586.-.

Il convient encore de préciser qu’en aucune manière il n’a été prétendu que la recourante aurait dissimulé une partie de ses avoirs, dès lors que cette dernière a accepté immédiatement le dépôt de ses relevés bancaires afin de pouvoir établir les flux de fonds, après que le produit de la vente de son bien immobilier en Grèce ait été crédité sur son compte bancaire.

9. Compte tenu de ce qui précède, la décision du SPC de refuser l’octroi de prestations complémentaires est bien fondée et la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.

10. Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le