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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1055/2022

ATAS/1142/2022 du 20.12.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1055/2022 ATAS/1142/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 décembre 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Ghita DINSFRIEND-DJEDIDI

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le ______ 1965, s’est inscrite, le 16 mars 2020, auprès de l’office régional de placement (ci-après : ORP) lequel dépend de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) en raison d’une perte d’emploi, afin de faire valoir son droit à une indemnité de chômage. Elle a indiqué être apte au placement pour une disponibilité à 40% à partir du 16 mars 2020.

b. Le 27 novembre 2021, l’assurée a été victime d’un accident de scooter. Elle a été en incapacité de travail dès le 28 novembre 2021, ce dont elle a informé sa conseillère en placement le 5 décembre 2021 en ajoutant qu’elle ferait parvenir ses recherches d’emploi dès sa mobilité retrouvée.

c. Le 13 décembre 2021, l’assurée a fait parvenir ses dix recherches d’emploi relatives au mois de novembre 2021 à sa conseillère.

B. a. Par décision du 11 janvier 2022, l’OCE a prononcé une sanction de 11 jours, à compter du 1er décembre 2021, à l’encontre de l’assurée qui avait remis la preuve des recherches d’emploi entreprises au mois de novembre 2021 en date du 13 décembre 2021, soit tardivement puisqu’après le délai imparti pour ce faire (au 6 décembre 2021, le 5 décembre 2021 tombant un dimanche). Si les certificats médicaux confirmaient que l’assurée était en incapacité totale de travail dès le 28 novembre 2021, cette dernière aurait néanmoins pu remettre ses recherches d'emploi à l’ORP via la plateforme Job-Room, soit exceptionnellement par courriel, ou encore charger une tierce personne de les envoyer par courrier postal à sa place.

b. Le 8 février 2022, l’assurée s’est opposée à la décision datée du 11 janvier 2022, en exposant que l’OCE avait pris sa décision sur la base de suppositions et avait porté un jugement sur sa capacité à remettre ses recherches d’emploi sans connaître le préjudice physique et moral que l’accident lui avait causé. L’OCE s’était en outre permis de supposer qu’elle avait une tierce personne à disposition pour effectuer un travail administratif concernant la remise desdites recherches. Cette décision relevait donc d’une maltraitance morale envers une assurée et portait préjudice au recouvrement de sa santé physique et mentale.

c. L’opposition du 8 février 2022 a été rejetée par décision du 1er mars 2022. L’OCE relevait qu’il ressortait du formulaire récapitulatif des recherches du mois de novembre 2021 que l'intéressée avait fait dix recherches entre les 3 et le 27 novembre 2021, avait signé le formulaire le 28 novembre 2021 et l’avait posté le 13 décembre 2021. Il rappelait qu’à teneur de la directive du Secrétariat d'État à l'économie (SECO) concernant la remise de la preuve des recherches personnelles d'emploi, chaque assuré est tenu de remettre la preuve de ses recherches d'emploi au plus tard le 5 du mois suivant et est informé par le biais du formulaire intitulé « Preuves de recherches personnelles effectuées en vue de trouver un emploi » qu'à l'expiration de ce délai, les recherches d'emploi ne peuvent pas être prises en considération et qu’aucun délai supplémentaire ne peut être accordé, sauf en cas d'empêchement objectivement valable (SECO, Bulletin LACI IC/B324a). L’OCE a en outre rappelé qu'en vertu de l'art. 41 LPGA, si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans faute de sa part, d'agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les 30 jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l'acte omis. S'agissant de la maladie et de l'accident, le moment où ils surviennent conditionne le droit d'obtenir ou non une restitution, que si le requérant est malade ou accidenté durant une grande partie du délai dans lequel il était censé agir, aucune restitution du délai n'est possible, sauf si la maladie ou l'accident intervient vers la fin du délai, que la gravité de la maladie ou de l'accident a également son importance, que lorsque la maladie ou l'accident est si grave que le requérant ne peut même pas se faire représenter, la restitution du délai est accordée et que les circonstances du cas d’espèce sont déterminantes. La loi n'autorise la restitution que si aucun reproche ne peut être adressé à la partie ou à son mandataire. La maladie pouvant être un obstacle non fautif conduisant à la restitution si elle est telle qu'elle empêche le justiciable d'agir lui-même dans le délai imparti et de confier l'acte de procédure à une tierce personne. Le Tribunal fédéral des assurances a accordé la restitution d’un délai à un assuré de 60 ans, hospitalisé et souffrant d'une grave pneumonie, de même qu’à un assuré qui, en raison de graves hémorragies postopératoires, présentait des altérations cérébrales massives, était intellectuellement très atteint et n'était donc pas en mesure, pendant tout le délai de recours, d'introduire lui-même un recours et de se rendre compte qu'il devait confier la défense de ses intérêts à quelqu'un mais qu’en revanche, le tribunal n'a pas accordé la restitution dans les cas d’immobilisation du bras droit ou de grippe grave, où il n'y avait pas d'indices objectifs ni n’était prouvé que le justiciable n'aurait pas été en mesure d'agir dans les délais malgré son handicap ou, si nécessaire, de charger un représentant de ses intérêts. Eu égard à ces exemples, les arguments de l’assurée ne constituaient pas un motif d’empêchement valable, dans la mesure où elle avait pu adresser un courriel à sa conseillère le 5 décembre 2021 et aurait dès lors pu envoyer ses preuves de recherches en annexes ou utiliser la plateforme créée à cet effet ou encore mandater un tiers pour déposer ses recherches à la Poste. Il s’agissait du troisième manquement de l’assurée, de sorte que la sanction était conforme au barème du SECO (qui prévoit en cas de remise tardive des recherches d’emploi une suspension d'une durée de 5 à 9 jours la première fois, de 10 à 19 jours en cas de récidive, et dès la troisième fois, l’examen de l’aptitude au placement de l’assuré) et proportionnée.

d. En parallèle, l’OCE a prononcé une sanction de 10 jours à l’égard de l’assurée qui n’avait pas apporté la preuve de recherches d’emploi entreprises au mois de décembre 2021, par décision du 22 février 2022. Sur opposition de l’assurée, cette décision a été toutefois annulée (décision du 21 mars 2022), au motif qu’elle avait fait parvenir des certificats médicaux attestant de son incapacité de travail du 28 novembre 2021 au 8 janvier 2022.

C. a. Par acte posté le 1er avril 2022, l’assurée a recouru contre la décision sur opposition du 1er mars 2022, en concluant à son annulation et subsidiairement à la réduction de la sanction à 3 jours ou à une durée équitable.

b. L’OCE a persisté dans sa décision, par acte du 3 mai 2022, et a produit le dossier de l’assurée à teneur duquel cette dernière a été sanctionnée de 5 jours de suspension par décision du 15 septembre 2020 (pour avoir manqué un entretien conseil sans excuse) et de 3 jours de suspension par décision du 15 octobre 2020 (pour avoir remis tardivement, soit le 15 septembre 2020, ses recherches d’emploi de juillet et août 2020).

c. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté en temps utile et dans la forme prévue par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension pour une durée de 11 jours du droit à l'indemnité de la recourante.

3.1 Aux termes de l'art. 17 al. 1 LACI (RS 837.0), l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger; il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment; il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis. Le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (art. 30 al. 1 let. c LACI).

3.2 Selon l'art. 26 al. 2 OACI, l'assuré doit remettre la preuve de ses recherches d'emploi pour chaque période de contrôle au plus tard le cinq du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date; à l'expiration de ce délai, et en l'absence d'excuse valable, les recherches d'emploi ne sont plus prises en considération. Dans un arrêt publié aux ATF 139 V 164, le Tribunal fédéral a admis la conformité à la loi du nouvel article 26 al. 2 OACI (qui ne prévoit plus l'octroi d'un délai de grâce comme dans son ancienne version). Il a jugé que la loi n'impose pas de délai supplémentaire et que, sauf excuse valable, une suspension du droit à l'indemnité peut être prononcée si les preuves ne sont pas fournies dans le délai de l'art. 26 al. 2 OACI; peu importe qu'elles soient produites ultérieurement, par exemple dans une procédure d'opposition (cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 3).

3.3 Selon l’art. 30 al. 1 let. d LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente.

3.4 La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI). L'OACI distingue trois catégories de faute - légère, moyenne et grave - et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension : de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute moyenne et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI).

3.5 En tant qu'autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution à teneur duquel la remise tardive de recherches d’emploi est sanctionnée, pour la première fois, d’une suspension de 5 à 9 jours et pour la deuxième de 10 à 19 jours (SECO – Bulletin janvier 2014 LACI IC/D79).

3.6 Le Tribunal fédéral a jugé qu'un assuré qui remet ses recherches hors délai ne doit pas se voir imposer la même sanction que celui qui ne procède à aucune recherche d'emploi, surtout si le retard est léger et survient pour la première fois pendant la période de contrôle. Il a ainsi confirmé qu’un formulaire de recherches remis pour la première fois avec cinq jours de retard alors que l’assurée avait fait des recherches de qualité justifiait une sanction, non pas de cinq jours de suspension du droit à l’indemnité, mais d’un jour seulement (arrêt du Tribunal fédéral 8C_2/2012 du 14 juin 2012). Le Tribunal fédéral a jugé qu'une sanction s'imposait, même en cas de retard minime (soit un jour; 8C_604/2018 du 5 novembre 2018).

4.              

4.1 En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante a communiqué tardivement à l'OCE ses recherches de novembre 2021, soit le 13 décembre 2021 au lieu du 6 décembre 2021. Ses recherches ne peuvent donc plus être prises en compte (art. 26 al. 2 OACI).

Dans le cas d’espèce, le retard de 7 jours n’est pas minime.

Par ailleurs, comme le soutient l’intimé, l'état de santé de l'assurée, blessée lors d’un accident de scooter, ne l'empêchait pas de remettre ses recherches d'emploi en temps utile par courriel ou via la plateforme en ligne. L'assurée a accompli des démarches durant le mois de novembre et a écrit un courriel à sa conseillère le 5 décembre 2021, ce qui démontre qu’elle n’était pas totalement incapable d’adresser ses recherches en temps utile ou de demander à un ami ou un voisin d’agir pour son compte.

En conséquence, il y a lieu d'admettre qu’elle était apte, durant le délai légal, à satisfaire aux exigences posées à l'art. 26 al. 2 OACI par la remise en temps utile de ses recherches d'emploi à l'ORP ou, à tout le moins, en chargeant un tiers d'agir à sa place. Dans ces conditions, l’assurée ne peut pas se prévaloir d'un empêchement non fautif. La sanction se justifie dès le premier manquement et cela sans exception (arrêt du Tribunal fédéral 8C_885/2012 du 2 juillet 2013 consid. 5).

En l’occurrence, si les recherches d'emploi ont été dûment effectuées malgré l’accident de scooter, force est de constater que l’assurée en était à son troisième manquement, ce qui justifie une sanction plus lourde. Dans la mesure où elle avait déjà été sanctionnée pour avoir remis ses recherches tardivement, la sanction de 11 jours prononcée par l’intimé est conforme au barème précité et proportionnée à la faute (une sanction de 11 jours étant compatible avec une faute légère).

La décision de l'intimé n'apparaît pas critiquable.

4.2 Partant, le recours est rejeté et la décision litigieuse confirmée.

4.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le