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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3614/2021

ATAS/1005/2022 du 17.11.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3614/2021 ATAS/1005/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 novembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______, GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Catarina MONTEIRO SANTOS

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né en ______ 1983, de nationalité brésilienne, s’est inscrit auprès de l’office régional de placement (ci-après : l’ORP), en date du 6 janvier 2020. Il a déclaré chercher un travail à plein temps et être titulaire d’une autorisation de séjour B, valide jusqu’au 29 octobre 2020.

B. a. Par décision du 16 juin 2021, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé) a prononcé l’inaptitude au placement de l’intéressé, dès le 2 décembre 2020, au motif qu’il n’était pas autorisé à travailler et qu’il avait un délai au 3 mars 2020 pour quitter la Suisse selon les informations transmises par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l'OCPM)

b. Par courrier du 21 juin 2021, l’intéressé s’est opposé à la décision de l’OCE expliquant qu’il avait préalablement travaillé au restaurant B______, au Grand Lancy, ainsi qu’à C______, au café D______ et auprès de l’entreprise E______. Il déclarait vivre en Suisse depuis l’âge de quatre ans et avoir été au bénéfice d’un permis B depuis 2007. C’était en raison de difficultés administratives que son permis de séjour n’avait pas pu être renouvelé en temps voulu mais une nouvelle demande d’autorisation de séjour était actuellement à l’examen, comme cela ressortait de l’attestation de l’OCPM datée du 17 février 2021, qui était jointe à l’opposition.

c. Ladite attestation de résidence mentionnait que l’intéressé « fait l’objet d’une décision de refus de renouvellement de son autorisation de séjour et de renvoi de Suisse définitive et exécutoire. Un délai de départ pour quitter la Suisse au 3 mars 2020 lui avait été imparti. L’intéressé a déposé une nouvelle demande d’autorisation de séjour, actuellement à l’examen auprès de nos services ( ) Cette attestation ne vaut pas titre de légitimation ».

d. Par courrier du 6 septembre 2021, l’intéressé a été informé par l’OCE de l’annulation de son dossier en qualité de demandeur d’emploi, pour le 31 août 2021.

e. Par décision sur opposition du 20 septembre 2021, l’OCE a rejeté l’opposition de l’intéressé et confirmé la précédente décision du 16 juin 2021 au motif qu’il n’était pas autorisé à travailler en Suisse.

C. a. Par écriture de son mandataire, postée le 21 octobre 2021, l’intéressé a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision sur opposition du 20 septembre 2021. Il a conclu, préalablement, à son audition puis à l’annulation de la décision querellée, qu’il soit dit et constaté que l’intéressé devait être déclaré apte au placement dès le 2 décembre 2020, le tout sous suite de frais et dépens. Il était allégué que la décision d’inaptitude au placement était principalement motivée par la décision définitive et exécutoire de l’OCPM de refus de renouvellement de l’autorisation de séjour de l’intéressé et de son renvoi de Suisse. Or, l’intéressé avait déposé une demande de reconsidération, laquelle n’avait pas encore conduit à une décision et ceci en raison des perturbations créées par la pandémie COVID-19. Le recourant alléguait que ce n’était qu’en raison de ladite pandémie qu’il avait perdu son emploi et qu’il était arbitraire de le considérer inapte au placement dès lors qu’il était domicilié en Suisse depuis plusieurs années et y avait exercé plusieurs activités et souhaitait y vivre. De surcroît, il avait déjà obtenu une promesse d’emploi de la société de déménagement E______, de sorte qu’il était en mesure d’exercer une activité lucrative dès qu’il en aurait l’autorisation. L’intervention de l’OCE était ainsi passagère.

b. Par réponse du 19 novembre 2021, l’OCE a considéré que le recourant n’apportait aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée et a persisté intégralement dans les termes de celle-ci.

c. Par réplique du 13 décembre 2021, le mandataire du recourant a rappelé qu’il était dans l’attente d’une décision concernant la demande de reconsidération de la décision de l’OCPM. Était joint, en annexe, un courrier du mandataire destiné à l’OCPM et daté du 10 décembre 2021 par lequel l’office était interpellé en vue de se prononcer, au plus vite, sur le statut des formulaires K et M déposés par l’intéressé.

d. Par observations du 28 janvier 2022, le mandataire du recourant a informé la chambre de céans qu’il avait interpellé à nouveau l’OCPM, par courrier du 26 janvier 2022, et qu’il attendait sa réponse.

e. Par observations du 25 février 2022, le mandataire du recourant a informé la chambre de céans de l’état de la procédure en cours devant l’OCPM, en produisant plusieurs documents confirmant que de nouvelles demandes d’autorisation de séjour, au cours de l’année 2020 et 2021, avaient été déposées, ainsi qu’une demande de reconsidération, qui était toujours en cours d’examen par l’autorité.

f. Par duplique du 18 mars 2022, l’OCE a réagi à la communication des observations du 25 février 2022 et a fait remarquer qu’il n’existait aucun élément nouveau permettant de revoir la décision sur opposition du 20 septembre 2021.

g. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

h. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 38 LPGA ; art. 56 ss LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l'intimé de déclarer inapte au placement le recourant, dès le 2 décembre 2020, en raison du défaut d’une autorisation de travailler.

4.              

4.1 L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. Conformément à l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, notamment être apte au placement (let. f) et satisfaire aux exigences de contrôle (let. g).

Les conditions de l'art. 8 al. 1, qui sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2), sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), ainsi que – dans les limites d'admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 et doctrine et jurisprudence citées) – par les instructions édictées par le Secrétariat d'État à l'économie (ci-après : SECO) en sa qualité d'autorité de surveillance de l'assurance-chômage chargée d'assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l'indemnité de chômage (Bulletin LACI IC).

Aux termes de l'art. 15 al. 1 LACI, est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d'intégration et qui est en mesure et en droit de le faire.

4.2 L'aptitude au placement suppose, logiquement, que l'intéressé soit au bénéfice d'une autorisation de travail qui lui permette, le cas échéant, d'accepter l'offre d'un employeur potentiel. À défaut d'une telle autorisation, il s'agit de déterminer – de manière prospective sur la base des faits tels qu'ils se sont déroulés jusqu'au moment de la décision sur opposition – si l'intéressé, ressortissant étranger, pouvait ou non compter sur l'obtention d'une autorisation de travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_654/2019 du 14 avril 2020 consid. 2.1 et les références). Dans cette dernière éventualité, l’administration ou le juge ont le pouvoir de trancher préjudiciellement le point de savoir si, au regard de la réglementation applicable, le ressortissant étranger serait en droit d’exercer une activité lucrative. Lorsqu’ils ne disposent pas d’indices concrets suffisants, ils doivent s’informer auprès des autorités de police des étrangers pour savoir si la personne intéressée peut s’attendre à obtenir une autorisation de travail (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 72 ad art. 15). Un renseignement donné dans un cas concret par l’autorité compétente, selon lequel un étranger peut compter sur l’octroi d’une autorisation de travail, est suffisant à cet effet (ATF 126 V 376 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_479/2011 du 10 février 2012 consid. 3.2.4). Si l’instance du marché du travail a émis un préavis négatif concernant le permis de travail, l’aptitude au placement doit être niée (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 258/00 du 6 août 2001 consid. 2b, Bulletin LACI IC publié par le SECO, ch. B 230).

5. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

6. Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l'objet du litige et de nature à influencer l'appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités).

7.             En l'espèce, il n’est pas contesté que le recourant a fait l’objet d’une décision de refus de renouvellement de son autorisation de séjour et de renvoi de Suisse définitive et exécutoire, avec un délai de départ fixé au 3 mars 2020.

Dans ces conditions, l’OCE était bien-fondé à prendre une décision d’inaptitude au placement, vu la décision de l’OCPM de refus de renouvellement de l’autorisation de séjour et le renvoi de Suisse de l’intéressé.

Le recourant fait valoir qu’il a déposé une demande de reconsidération de la décision de l’OCPM, ce qui, selon lui, compte tenu des nombreux emplois qu’il occupait en Suisse et de son intégration, rend la décision de l’OCE « arbitraire ».

Selon les pièces produites par le mandataire du recourant, en annexe à son courrier daté du 20 octobre 2021, l’intéressé aurait déposé une demande de reconsidération auprès de l’OCPM - à une date qui n’est pas établie - et serait au bénéfice d’une promesse d’emploi de la part de la société E______ SA, qui a complété un formulaire de « Demande d’autorisation de séjour avec ou sans activité à Genève pour ressortissant étranger M », en date du 14 octobre 2021.

7.1 Il appartient au juge de trancher de manière préjudicielle le point de savoir si, au regard de la réglementation applicable (droit des étrangers et de l’asile, traités internationaux conclus par la Suisse), le ressortissant étranger serait en droit d’exercer une activité lucrative. Lorsqu’il ne dispose pas d’indices concrets suffisants, le juge doit s’informer auprès des autorités de police des étrangers ou de marché du travail au sens de l’art. 40 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI – RS 142.20) pour savoir si la personne intéressée peut s’attendre à obtenir une autorisation de travail (ATF 120 V 385, 392 consid. 2c p. 396, Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage 2014, p. 169 n. 72). Si l’instance du marché du travail a émis un préavis négatif concernant le permis de travail, l’aptitude au placement doit être niée (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 258/00 du 6 août 2001).

7.2 En l’état, l’attestation délivrée par l’OCPM en date du 17 février 2021 établit clairement que le recourant fait l’objet d’une décision de refus de renouvellement de son autorisation de séjour et de renvoi de Suisse définitive et exécutoire avec un délai échu au 3 mars 2020 qui lui avait été imparti pour quitter la Suisse. Il n’est donc pas nécessaire de demander à l’OCPM de plus amples informations.

Aucun élément du dossier ne permet d’escompter le succès de la demande de reconsidération présentée par le recourant auprès de l’OCPM. Au contraire, malgré les efforts de son mandataire et ses nombreuses tentatives, aucun courrier de l’OCPM ne permet de rendre vraisemblable que la demande de reconsidération sera prise en compte. Aucun autre élément, dans les courriers successifs adressés par le mandataire du recourant à l’OCPM, ou à la chambre de céans, ne permet de prévoir une issue favorable aux démarches menées par le recourant, son mandataire reconnaissant lui-même qu’il attend toujours des nouvelles et que la demande est toujours en cours d’examen auprès de l’OCPM.

Depuis le mois de mars 2022, la situation ne semble pas avoir changé et aucun courrier du recourant, ou de son mandataire, n’est parvenu à la chambre de céans en vue de l’informer d’une éventuelle évolution de la situation.

Dès lors, la chambre de céans considère qu’il n’est pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante, ni même rendu vraisemblable, que le recourant obtiendra prochainement une autorisation de travail en Suisse.

7.3 Compte tenu de ces éléments, la demande préalable du recourant, visant à la tenue d'une audience de comparution personnelle, peut être écartée par appréciation anticipée des preuves, la chambre de céans considérant que les faits retenus présentent un degré de vraisemblance prépondérante (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

8.             Au vu de ce qui précède la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.

9.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le