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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2336/2021

ATAS/936/2022 du 26.10.2022 ( LAA ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2336/2021 ATAS/936/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 octobre 2022

8ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______, CHÂTELAINE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE

 

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant), né le ______ 1967, travaille en tant que mécanicien depuis le 1er janvier 2007 aux Services industriels de Genève (ci-après : les SIG) où il était occupé la plupart du temps à la station d'épuration d'Aïre (ci-après : STEP). À ce titre, il est assuré auprès de la Caisse nationale suisse en cas d'accidents (ci-après : la SUVA) contre le risque d'accidents et de maladies professionnelles.

2.        Le 29 avril 2014, la doctoresse B______, médecin du travail FMH, a informé le docteur C______, spécialiste en médecine interne FMH, que l'assuré était apte à son poste de travail sous condition du port systématique d'un masque (appareil respiratoire individuel complet) lors des activités dans les locaux de séchage de boues. Elle avait par ailleurs demandé à l'employeur de donner à l'assuré la priorité en cas de poste équivalent sur un site sans exposition aux poussières organiques.

3.        Selon la note du 24 avril 2016 de la Dresse B______ à la hiérarchie des SIG, l'assuré ne devait en aucun cas être exposé aux poussières de séchage des boues, même en portant un appareil respiratoire.

4.        Dans son rapport du 20 mai 2016, le docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne et pneumologie, a émis notamment les diagnostics de possible asthme professionnel, de parésie diaphragmatique droite avec syndrome restrictif et de suspicion d'un syndrome d'apnée du sommeil. L'assuré présentait des exacerbations respiratoires trois à quatre fois par an avec toux, expectorations jaunâtres, sibilances occasionnelles et oppression thoracique, très souvent après des activités de "séchage".

5.        Le 14 juin 2016, la Dresse B______ a attesté que l'assuré était apte à travailler à la STEP avec les limitations suivantes: absence d'exposition aux poussières de séchage des boues et à toute autre substance en provenant, de travaux en hauteur et de travail en espace confiné.

6.        Dans leur rapport du 26 juillet 2016, les docteurs E______, médecin du travail et pneumologue FMH, et F______, médecin assistant, de l'Institut universitaire romand de santé au travail (ci-après : IST) des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) ont retenu à titre de diagnostic principal, un possible asthme d'origine professionnelle, avec exacerbation d'allure infectieuse, dans le contexte d'une exposition professionnelle aux mâchefers et aux poussières d'incinération.

7.        Le 15 novembre 2018, la Dresse B______ a précisé que l'assuré ne devait pas travailler au séchage ni nettoyer des pièces utilisées au séchage ni être en présence de collègues nettoyant et/ou séchant des pièces (par ex. broyeur) venant du séchage. Cette limitation était définitive. Si elle ne pouvait être respectée, il faudrait changer l'assuré de poste.

8.        Selon rapport du 22 janvier 2019 du Dr D______, l'assuré a rapporté deux épisodes d'exacerbation respiratoire avec possible composante infectieuse suite à de nouvelles expositions avec de la poussière de séchage, alors qu'il était chargé de laver des pièces qui en étaient couvertes. Cela avait provoqué un arrêt de travail depuis novembre 2018. Pendant l'arrêt, l'assuré n'avait aucun symptôme. Ce médecin retenait ainsi un très vraisemblable asthme professionnel. Il y avait lieu d'adapter le poste de travail de l'assuré, afin qu'il ne soit plus exposé aux poussières de séchage ou, à défaut, d'envisager une reconversion. En cas de changement d'environnement de travail, la survenue de nouvelles manifestations respiratoires dues à d'autres poussières irritatives ou agents allergènes ne pouvait être exclue.

9.        Le 29 janvier 2019, l'assuré a requis les prestations de l'assurance-invalidité.

10.    À la demande de l'assuré, l'employeur a annoncé son cas à la SUVA le 18 juillet 2019, tout en précisant que la présence de poussières de séchage ne pouvait être exclue au poste de travail habituel, dès lors que d'autres collègues travaillaient parfois sur des objets utilisés pour le séchage de boues dans l'atelier. Afin de maintenir l'assuré en emploi, il effectuait actuellement des missions temporaires hors la STEP dans l'attente d'une solution pérenne.

11.    Dans son rapport du 9 août 2019 à la SUVA, le Dr D______ a indiqué que l'assuré souffrait d'un asthme professionnel dû à l'exposition à des substances lors de l'activité de séchage. La thérapie consistait en arrêt d'exposition à celles-ci.

12.    Le 12 novembre 2019, l'office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : l’OAI) a octroyé à l'assuré une orientation professionnelle du 9 décembre 2019 au 13 mars 2020.

13.    Selon le rapport de visite du 1er octobre 2019 du docteur G______, spécialiste en médecine de travail à la SUVA, il y avait parfois des pièces provenant du séchage des boues des eaux usées à l'atelier mécanique où étaient effectuées la maintenance du matériel et toutes les corrections mécaniques nécessaires. Dans le secteur du séchage des boues des eaux usées, les collaborateurs avaient toujours été équipés de façon adéquate.

14.    Selon l'appréciation médicale du 30 mars 2021 du docteur H______, spécialiste en médecine du travail à la SUVA, le diagnostic d'asthme n'était confirmé ni par les fonctions respiratoires de 2016 à 2019 qui ne retrouvaient pas de syndrome obstructif, ni par le test de provocation à la méthacholine réalisé en mai 2016 peu de temps après la fin de l'exposition en avril 2016. Il n'était dès lors pas possible de retenir une maladie professionnelle avec une vraisemblance nettement prépondérante.

15.    Par décision du 14 avril 2021, la SUVA a refusé à l'assuré ses prestations, niant une maladie professionnelle.

16.    Le 17 mai 2021, l'assuré a formé opposition à cette décision, par l'intermédiaire de son conseil, en concluant à son annulation et à ce que ses troubles respiratoires fussent reconnus comme maladie professionnelle.

17.    Par décision du 7 juin 2021, la SUVA a rejeté l'opposition, en se fondant sur l'appréciation médicale du Dr H______.

18.    Par acte du 8 juillet 2021, l'assuré a recouru contre cette décision, par l'intermédiaire de son conseil, en concluant à la constatation d'une maladie professionnelle résultant de l'exposition à des poussières de séchage et autres substances nocives sur son lieu de travail, et à la condamnation de la SUVA aux prestations y liées, sous suite de dépens.

19.    Dans sa réponse du 8 septembre 2021, l'intimée a conclu au rejet du recours, jugeant le rapport du Dr H______ convaincant. Par ailleurs, la caisse-maladie du recourant avait retiré son opposition provisoire, après examen du dossier par son médecin-conseil.

20.    Dans sa réplique du 5 octobre 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions.

21.    Le 26 avril 2022, le recourant a informé la Cour de céans que les SIG l'avait été transféré dans une nouvelle activité compatible avec ses limitations fonctionnelles avec effet au 1er février 2022. Il conservait néanmoins un intérêt juridique et de fait digne de protection à ce que sa maladie professionnelle soit reconnue, afin que l'intimée prenne en charge les frais médicaux s'y rapportant.

22.    Le 22 juin 2022, l'intimée a persisté dans ses conclusions.

23.    Lors de l'audience du 14 septembre 2022, le recourant a déclaré que le nouveau poste de travail aux SIG lui convenait parfaitement et qu'il n'avait plus souffert d'affection pulmonaire dans son nouveau travail.

24.    Par écritures du 14 octobre 2022, le recourant a maintenu son recours en tant qu'action en constatation de droit, étant dans l'impossibilité de chiffrer ses prétentions. Il a admis n'être plus soumis à l'exposition d'agents pathogènes dans son nouvel environnement professionnel. Cependant, il n'était pas exclu qu'il le soit à nouveau.

25.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le recours respecte la forme et le délai prévus par la loi.

4.        Se pose toutefois la question de la recevabilité de l'action en constatation de droit.

a. Selon la jurisprudence, la recevabilité d'une action en constatation est admise si le demandeur a un intérêt digne de protection à la constatation immédiate de rapports de droit litigieux et ne peut obtenir en sa faveur un jugement condamnatoire ou une action formatrice. Un intérêt de fait suffit, pour autant qu'il s'agisse d'un intérêt actuel et immédiat (ATF 132 V 18 consid. 2.2 p. 21 ; ATF 119 V 13 consid. 2a). De manière plus générale, l'intérêt digne de protection requis fait défaut, en règle ordinaire, lorsque la partie peut obtenir en sa faveur un jugement condamnatoire; en ce sens, le droit d'obtenir une décision en constatation est subsidiaire (ATF 119 V 13 consid. 2a et les références citées). Le juge retiendra un intérêt pour agir lorsqu'une incertitude plane sur les relations juridiques des parties et qu'une constatation judiciaire sur l'existence de l'objet du rapport pourrait l'éliminer. Une incertitude quelconque ne suffit cependant pas. Il faut bien plus qu'en se prolongeant, elle empêche le demandeur de prendre ses décisions et qu'elle lui soit, de ce fait, insupportable (ATF 122 III 282 consid. 3a ; 120 II 22 consid. 3).

b. En l'espèce, le recourant ne fait pas valoir qu'il subit un dommage en rapport avec son éventuelle maladie professionnelle, n'étant plus exposé à des agents pathogènes dans son nouveau poste de travail. Dans la mesure où il n'est pas exclu qu'il le soit de nouveau, il demande néanmoins la constatation d'une maladie professionnelle.

Cependant, selon la jurisprudence précitée, il faut que l'intérêt digne de protection à la constatation du rapport de droit soit actuel et immédiat. Cela n'est manifestement pas le cas in casu. Il ne peut pas non plus être considéré que l'incertitude par rapport à son éventuelle maladie professionnelle empêche le recourant de prendre des décisions.

Si le recourant devait être exposé à nouveau à des substances pathogènes dans le cadre de son travail et souffrir de ce fait de problèmes respiratoires, il aurait la possibilité de réitérer sa demande de prestations à l'intimée.

Aussi, sa demande en constatation de droit est irrecevable.

5.        La procédure est gratuite.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

GATTUSO Maryline

 

La présidente suppléante

 

 

Maya CRAMER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le