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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3597/2020

ATAS/603/2021 du 10.06.2021 ( LPP ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3597/2020 ATAS/603/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 10 juin 2021

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______ B______, domicilié ______, à CESSY, France, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Philippe NORDMANN

 

 

demandeur

 

contre

D______ VORSORGESTIFTUNG FÜR DAS BODENPERSONAL, sise Geschäftsstelle, GLATTBRUGG

 

 

défenderesse

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ B______ (ci-après : l'assuré ou le demandeur), né le ______ 1978, a été engagé par C______SA, par contrat de travail du 10 juillet 2006, comme mécanicien sur avions. À ce titre, il était affilié pour la prévoyance professionnelle auprès de C______Vorsorgestiftung (ci-après : fondation de prévoyance C______).

2.        Le 19 février 2009, l'assuré a été victime d'un accident de travail, lequel a entraîné une fracture au niveau du bras droit : en voulant descendre d'une aile d'avion, il a mis le pied à côté de l'escabeau, dont il s'était servi pour monter sur l'aile, et a chuté d'une hauteur de 2 mètres environ.

3.        Les suites de cet accident ont été prises en charge par la SUVA, assureur-accident de C______SA.

4.        Le 31 juillet 2009, le contrat de travail entre l'assuré et C______SA a pris fin.

5.        Le 1er août 2009, l'assuré est devenu un employé à plein temps de la société D______AG (ci-après : D______), alors qu'il était encore en arrêt de travail jusqu'au 31 août 2009, pour les suites de l'accident du 19 février 2009. Au moment de la reprise de son activité, en septembre 2009, et avant d'être à nouveau apte à reprendre une activité lourde, l'assuré avait suivi divers cours mis en place par D______.

6.        Le 27 juillet 2010, l'assuré a été victime d'une rechute entraînant un arrêt de travail complet dont les suites ont également été prises en charge par la SUVA.

7.        Le 20 février 2011, l'assuré a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité (ci-après : l'OAI).

8.        Le 31 décembre 2011, son contrat de travail auprès de D______ a pris fin.

9.        Le 14 février 2012, l'assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d'une demande en paiement contre la fondation de prévoyance C______, concluant à ce que celle-ci soit condamnée à verser des prestations d'invalidité, selon le degré d'incapacité de travail, dès le 1er février 2010, sous forme de rente et de libération des primes, le tout avec intérêts à 5% dès l'échéance de chacune des prestations, mais au plus tôt dès la date d'ouverture de l'action.

10.    Par réponse du 15 mars 2012, la fondation de prévoyance C______a conclu au rejet de la demande en faisant valoir, en substance, que l'assuré avait pu reprendre une activité à plein temps le 1er septembre 2009 et qu'il n'avait connu de rechute qu'en juillet 2010, soit dix mois plus tard. Ainsi, il n'y avait pas de connexité matérielle et temporelle entre l'incapacité de travail découlant de l'accident du 19 février 2009 et l'invalidité alléguée.

11.    Le 23 septembre 2013, l'assuré a informé la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) qu'il retirait sa requête.

12.    Par arrêt du 14 octobre 2013, la chambre de céans en a pris acte et rayé la cause du rôle.

13.    Le 9 juin 2016, la SUVA a fait savoir à l'assuré qu'il remplissait les conditions donnant lieu à un ajustement du montant des indemnités journalières, dès le 1er janvier 2011. En principe, le montant des indemnités journalières était déterminé sur la base du dernier salaire perçu avant l'accident ou la rechute. Cependant, l'indemnité journalière devait être adaptée si le traitement médical avait duré au moins trois mois et si le salaire de l'assuré avait augmenté d'au moins 10% au cours de cette période. En l'espèce, le salaire déterminant au moment de la rechute du 27 juillet 2010 se montait à CHF 66'772.20 (incluant le salaire de base, le 13ème salaire et un complément salarial) et donnait droit à une indemnité journalière de CHF 146.35 (soit : CHF 66'772.20 x 80 / 100 = CHF 53'417.76 ; CHF 53'417.76 / 365 = 146.35). À partir du 1er janvier 2011, le salaire de l'assuré s'élevait à CHF 74'973.- (comprenant le salaire de base, le 13ème salaire et un complément de salaire), ce qui représentait une augmentation de plus de 10% par rapport à 2010. En conséquence, le montant de l'indemnité journalière, qui se montait à CHF 164.30 au 1er janvier 2011, devait faire l'objet, sur cette base, d'un décompte rectificatif entre 2011 et 2016. Pour le surplus, il y avait lieu de préciser qu'entre 2012 et 2016, le gain annuel du recourant avait, certes, connu une augmentation à CHF 75'623.- en 2012, CHF 76'273.- en 2013, CHF 76'923.- en 2014, CHF 78'223.- en 2015 et CHF 78'873.- en 2016. Cependant, dans la mesure où ces augmentations ne dépassaient pas 10%, elles étaient sans répercussion sur le montant des indemnités journalières, de sorte qu'il convenait de les maintenir à CHF 164.30 entre 2012 et 2016.

14.    Par communication du 12 septembre 2016, l'OAI a octroyé à l'assuré une mesure d'ordre professionnel, sous forme d'un reclassement en tant que chargé de sécurité MSST auprès de l'entreprise E______SA.

15.    Par décision du 21 octobre 2016, l'office de l'assurance-invalidité pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après : OAIE), a informé l'assuré qu'il avait droit à une indemnité journalière de CHF 164.25, pour la période du 1er septembre 2016 au 31 juillet 2017, durant son reclassement.

16.    Par projet de décision du 2 novembre 2018, l'OAI a fait savoir à l'assuré qu'il remplissait les conditions d'octroi d'une rente entière d'invalidité, limitée dans le temps (du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016). Il ressortait de l'instruction médicale que, dans son activité habituelle, son incapacité de travail avait été totale depuis le 27 juillet 2010 (début du délai d'attente d'un an), de 50% depuis le 21 janvier 2011 et de 100% depuis le 24 février 2011. En revanche, l'OAI était d'avis que, dans une activité adaptée à son état de santé, sa capacité de travail était entière, à tout le moins au terme des mesures professionnelles - assorties d'indemnités journalières - qui avaient commencé le 1er septembre 2016 et qui s'étaient conclues, avec succès, le 30 août 2018. Étant donné que la rente d'invalidité était supprimée, dès la fin du troisième mois qui suivait le début des mesures d'ordre professionnel, lorsque celles-ci étaient accompagnées d'indemnités journalières, le droit à la rente s'éteignait trois mois après le début desdites mesures, soit le 30 novembre 2016. En comparant le revenu que l'assuré aurait gagné en poursuivant son activité habituelle (CHF 68'965.-) à celui qu'il était en mesure de réaliser en étant titulaire d'un diplôme d'ingénieur/chargé de sécurité (CHF 69'326.-), la perte de gain était nulle et le degré d'invalidité ne l'était pas moins.

17.    Par décision du 5 février 2019, l'office AI pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après : OAIE) a alloué à l'assuré une rente entière d'invalidité d'un montant de CHF 1'152.- du 1er septembre 2011 au 31 décembre 2012, majorée dans un premier temps à CHF 1'161.- du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, puis à CHF 1'166.- du 1er janvier 2015 au 30 novembre 2016, soit un total de CHF 73'114.- sous forme d'arriérés de rentes, après déduction de CHF 3'028.60 perçus à titre d'indemnités journalières AI, du 1er septembre 2016 au 30 novembre 2016.

18.    Par décision du 25 mars 2019, l'OAIE a encore versé CHF 16'228.- à l'assuré, à titre d'intérêts moratoires sur la rente qu'il lui avait allouée rétroactivement, du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016.

19.    Le 15 avril 2019, D______ Vorsorgestiftung für das Bodenpersonal (ci-après : la fondation de prévoyance D______ ou la défenderesse) a établi un récapitulatif des prestations au 31 décembre 2011. Il en ressortait que la prestation de sortie à cette date se montait à CHF 30'115.90. S'y ajoutaient CHF 3'036.70 d'intérêts après le départ, ce qui représentait, au total, un montant de CHF 33'152.60 à fin avril 2019.

20.    Par courrier du même jour, la fondation de prévoyance D______ a demandé à l'assuré ce qu'il entendait faire de sa prestation de sortie au 31 décembre 2011.

21.    Par décision du 9 mai 2019, la SUVA a octroyé à l'assuré une rente d'invalidité de 17%, à partir du 1er septembre 2018, pour les séquelles de l'accident du 19 février 2009. Il ressortait des renseignements obtenus auprès de l'OAI que l'assuré avait terminé avec succès son reclassement professionnel et qu'il pouvait ainsi réaliser un salaire annuel de CHF 69'326.-. Comparé au gain de CHF 83'306.- réalisable sans l'accident, il en résultait une perte de 16.78% qui donnait droit à une rente d'invalidité de 17%.

22.    Le 27 juin 2019, l'assuré a indiqué qu'en l'état, le montant de CHF 33'152.60 pouvait être viré sur un compte de libre passage auprès de la Fondation institution supplétive LPP.

23.    Le 28 mai 2020, la fondation de prévoyance C______, soit pour elle Axa Pension Solutions SA, a fait savoir à l'assuré que lorsqu'il avait subi, le 27 juillet 2010, un « accident » (recte : une rechute) qui avait conduit, le jour même, à une incapacité de gain, puis à une rente d'invalidité entière du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016, ce n'était pas à la fondation de prévoyance C______qu'il incombait de verser des prestations, mais à l'institution de prévoyance auprès de laquelle Monsieur A______ (recte : B______) était assuré en date du 27 juillet 2010.

24.    Par pli du 10 juin 2020, l'assuré s'est adressé à la fondation de prévoyance D______ en vue du versement d'une rente d'invalidité. Se fondant sur l'argument de l'incompétence invoqué par la fondation de prévoyance C______, en particulier le courrier du 28 mai 2020 de cette dernière, il a invité la fondation de prévoyance D______ à établir son droit aux prestations, précisant qu'il serait prêt à demander le rapatriement du capital de couverture nécessaire à la rente temporaire d'invalidité sollicitée, laquelle devait se calquer sur la décision de l'OAIE du 5 février 2019.

25.    Le 22 juin 2020, la fondation de prévoyance D______ a informé l'assuré qu'elle renonçait à invoquer la prescription « pour toutes les revendications » jusqu'au 30 juin 2021, pour autant que celles-ci ne soient pas déjà prescrites.

26.    Le 9 novembre 2020, l'assuré, assisté de son conseil, a saisi la chambre de céans d'une demande en paiement contre la fondation de prévoyance D______, concluant, avec suite de frais et dépens, à ce que la défenderesse soit condamnée à lui payer une rente mensuelle d'au moins CHF 1'500.- par mois entre septembre 2011 et novembre 2016, soit la somme de CHF 94'500.- plus intérêts à 5% l'an, dès le dépôt de la demande, sous réserve d'amplification en cours d'instance.

À l'appui de ses conclusions, le demandeur a fait valoir, sans plus de précisions, que le règlement de prévoyance de la défenderesse, valable au 1er janvier 2015, prévoyait, au chapitre de la coordination avec d'autres prestations d'assurance, un plafonnement des prestations de la défenderesse à concurrence de 100% du gain présumé manqué. Comme le règlement de prévoyance en possession du recourant était postérieur au 31 décembre 2011, date de la fin de ses rapports de travail avec D______, il a requis la production du règlement applicable à son cas.

27.    Par réponse du 3 décembre 2020, la défenderesse a reconnu le droit aux prestations du demandeur sur le principe - eu égard à la décision de l'OAIE du 5 février - tout en le lui niant, pour cause de surindemnisation dans le cas particulier. Elle a indiqué que le « règlement applicable » prévoyait, d'une part, qu'en cas d'invalidité entière, la rente d'invalidité se montait à 60% du salaire considéré et, d'autre part, que les prestations prévues par le règlement étaient réduites, dans la mesure où ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte - parmi lesquels, en cas de droit à des prestations d'invalidité, le revenu de remplacement ou le revenu d'une activité lucrative qui continue à être versé ou qui pourrait raisonnablement être réalisé - elles dépassaient 100% de la perte de gain présumée.

De son point de vue, la perte de gain présumée se montait à CHF 66'573.- par an. Or, en additionnant le montant des indemnités journalières de la SUVA, à concurrence de CHF 59'987.75 (soit : 365 x CHF 164.35), et le montant de la rente de l'assurance-invalidité (CHF 13'824.- ; soit 12 x CHF 1'152.-), on obtenait un total de CHF 73'811.75, de sorte qu'il existait une surindemnisation à hauteur de CHF 7'238.75 (soit : CHF 73'811.75 sous déduction de CHF 66'573.-) qui faisait obstacle au versement de prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle.

28.    Par courrier du 10 décembre 2020, la chambre de céans a remis au demandeur une copie de ce courrier, en l'invitant à indiquer s'il retirait son recours.

29.    Par pli du 20 janvier 2021, le demandeur a relevé que la défenderesse reconnaissait désormais que le droit aux prestations était fondé sur le principe. S'agissant des montants, le demandeur ne pouvait pas se rallier au concept d'une perte invariable de CHF 66'573.-. En effet, dans sa lettre du 9 juin 2016 au demandeur, la SUVA retenait un salaire annuel supérieur, soit CHF 66'772.20 en 2010, CHF 74'973.- en 2011, CHF 75'623.- en 2012, CHF 76'273.- en 2013, CHF 76'923.- en 2014, CHF 78'223.- en 2015 et CHF 78'873.- en 2016. Comme la défenderesse l'avait relevé dans sa réponse du 3 décembre 2020, le plafonnement se situait à « 100% de la perte de gain présumée ». Pour ce qui était des périodes prises en compte pour la surindemnisation, la défenderesse avait retenu, dans son écriture du 3 décembre 2020, le laps de temps compris entre le 1er septembre 2011 et le 30 novembre 2016. Or, il ressortait d'un décompte d'indemnités journalières établi le 7 juillet 2016 par la SUVA que le demandeur avait perçu des indemnités journalières uniquement du 1er janvier 2012 au 30 juin 2016. Il semblait donc qu'il manquait la période du 1er septembre 2011 (début de la rente AI) au 31 décembre 2011, période où il n'y avait pas eu d'indemnités journalières de la SUVA, ainsi que la période postérieure au 30 juin 2016, où les indemnités journalières SUVA avait cessé (du moins selon le décompte en question). Compte tenu de ces éléments, il y avait lieu d'inviter la défenderesse à se déterminer à ce sujet et, éventuellement, à revoir ses calculs période par période.

30.    Le 4 février 2020 (recte : 2021), la défenderesse a versé au dossier le détail des indemnités journalières tel qu'il avait été établi le 24 juillet 2018 par la SUVA. Il en ressortait que le demandeur avait perçu des indemnités journalières de la SUVA, non seulement du 1er janvier 2012 au 30 juin 2016, mais aussi du 1er septembre 2011 au 31 décembre 2011, de même que du 1er juillet 2016 au 31 août 2018. Entre le 1er janvier 2011 et le 31 août 2018, leur montant, déterminé en fonction d'un salaire de CHF 74'973.-, avait été fixé à CHF 164.35 (soit : 74'973 x 80 / 100 = 59'978.40 ; 59'978.40 / 365 = CHF 164.324, arrondi à CHF 164.35). Par ailleurs, il ressortait de la décision de l'OAIE du 5 février 2019 que le demandeur avait également bénéficié d'indemnités journalières de l'assurance-invalidité du 1er septembre 2016 au « 31 juillet 2017 » (recte :  31 août 2018). Commentant les pièces transmises, la défenderesse a soutenu que « selon les dispositions légales », elle n'était pas liée par les bases de calcul de la SUVA, de sorte qu'elle maintenait ses conclusions.

31.    Le 22 février 2021, le demandeur a fait valoir en substance que la défenderesse se méprenait en employant les termes « bases de calcul de la SUVA » ; il ne s'agissait pas de bases de calcul. En effet, les montants mentionnés dans la lettre du 9 juin 2016 de la SUVA - annexée à la demande du 20 janvier 2021 -, étaient ceux que l'employeur, D______, avait transmis à la SUVA. Ils correspondaient aux salaires que l'assuré aurait réellement touchés sans l'accident. Le détail de l'indemnité journalière annexé à la détermination de la défenderesse du 4 février 2021, soit CHF 66'772.20 en 2010 et, par la suite, un montant fixe de CHF 74'973.-, ne représentait pas le salaire courant (dynamique). Il convenait, au contraire, de retenir que ce salaire, sans l'accident, aurait encore augmenté entre les années 2012 et 2016 dans la mesure ressortant de la lettre de la SUVA du 9 juin 2016, laquelle se référait aux informations communiquées par D______.

Sur la base de ces éléments, le demandeur a apporté une correction à son courrier du 20 janvier 2021, en ce sens qu'il reconnaissait qu'il avait bel et bien bénéficié d'indemnités journalières de la SUVA en 2011.

En admettant que le montant des prestations de la SUVA et de l'AI - tel qu'il figurait dans la réponse du 3 décembre 2020 de la défenderesse - était correct
(CHF 73'811.75), il y avait lieu de constater qu'en le comparant à l'évolution que le salaire aurait connue entre 2012 et 2016, on obtenait les résultats suivants :

Périodes

Salaire

SUVA et AI

Différence

2012
(12 mois)

CHF 75'623.-

CHF 73'811.75

CHF 1'811.25

2013

(12 mois)

CHF 76'273.-

CHF 73'811.75

CHF 2'461.25

2014

(12 mois)

CHF 76'923.-

CHF 73'811.75

CHF 3'111.25

2015

(12 mois)

CHF 78'223.-

CHF 73'811.75

CHF 4'411.25

 

2016

(8 mois)

CHF 78'873.-

CHF 73'811.75

CHF 3'374.15

 

(=5'061.25 : 12 x 8)

TOTAL : CHF 15'169.15

S'agissant de la production requise dans la demande, soit le règlement de prévoyance de la défenderesse dans sa teneur en vigueur à l'époque des rapports de travail du demandeur avec D______, son apport au dossier n'était plus nécessaire puisqu'il y avait accord des parties sur le plafonnement à 100% du gain présumé perdu.

Au bénéfice de ces explications, le demandeur a précisé ses conclusions du 9 novembre 2020, qu'il s'était réservé de modifier, comme suit : il concluait en définitive, avec suite de dépens, à ce qu'il soit jugé que la défenderesse devait lui payer un montant de CHF 15'169.15, avec intérêts à 5% l'an dès le 9 novembre 2020.

32.    Le 25 février 2021, une copie de ce courrier a été transmise, pour information, à la défenderesse.

33.    Le 5 mai 2021, la chambre de céans a ordonné à l'OAI la transmission du dossier AI du demandeur, et à la défenderesse la production d'une copie du règlement de prévoyance en vigueur à l'époque des rapports de travail du demandeur (soit du 1er août 2009 au 31 décembre 2011).

34.    Par courriel du 12 mai 2021, la défenderesse a transmis à la chambre de céans deux versions de son règlement de prévoyance ; la première étant applicable à partir du 1er janvier 2010 et la seconde à partir du 1er janvier 2011. Cet envoi contenait également deux pièces libellées en anglais, soit un « Amendment N° 2 to the Scheme Regulations effective since 1 January 2005 », daté du 10 décembre 2008, ayant pour objet une modification de l'art. 3.2.7 par. 1 du règlement de prévoyance, appelée à entrer en vigueur le 1er janvier 2009, ainsi que diverses précisions chiffrées, valables pour l'année 2009, consignées dans une annexe (« appendix »), concrétisant diverses dispositions du règlement de prévoyance.

35.    Le 12 mai 2021, la chambre de céans a encore reçu une copie du dossier du demandeur auprès de l'OAI.

Il en ressort en particulier

-          que le contrat de travail du 7 juillet 2009, passé entre D______ et le demandeur, prévoyait un engagement de durée indéterminée de ce dernier à compter du 1er août 2009 en tant que mécanicien sur avions sans permis (« Unlicensed Aircraft Mecanic »), pour un salaire de base brut de CHF 3'800.-, payable en treize mensualités, auquel s'ajoutaient d'autres suppléments (par ex. indemnités de permis [« license allowance »] et de travail en équipes) ;

-          qu'après avoir réussi les examens lui permettant de se voir délivrer, dans un proche avenir, le permis EASA B1/B2, le demandeur avait été informé par D______, par courrier du 19 janvier 2010, que son salaire de base brut serait revalorisé à CHF 4'200.-, payable en treize mensualités, avec effet au 1er janvier 2010. Il était précisé que l'horaire de travail était irrégulier, en fonction du plan de travail en équipes actuel ;

-          que le 17 février 2010, D______ et le demandeur avaient signé un nouveau contrat de travail de durée indéterminée, produisant ses effets dès le 1er février 2010. Le demandeur occupait désormais un poste de mécanicien titulaire d'un permis (« Licensed Aircraft Mecanic »), bénéficiant d'un salaire de base (« basic salary ») brut de CHF 4'752.-, payable en treize mensualités. Il était précisé que l'horaire de travail était irrégulier, en fonction du plan de travail en équipes actuel ;

-          que selon une annexe au contrat de travail, datée du 30 juin 2010, le demandeur pouvait bénéficier, chaque mois, à partir du 1er juillet 2010, d'une indemnité de permis (« license allowance ») de CHF 250.-, vu que l'autorisation dont il était titulaire était étendue aux avions de type BAE 146/RJ. Pour le reste, les droits et obligations découlant du contrat de travail en vigueur demeuraient inchangés ;

-          que le 19 janvier 2011, D______ avait informé le demandeur qu'en raison de
la nouvelle convention collective de travail pour le personnel au sol, son
salaire de base bénéficierait, avec effet au 1er janvier 2011, d'une augmentation à CHF 4'852.- par mois, majorée d'une indemnité de permis (« license allowance ») de CHF 250.-, portant son salaire mensuel brut à CHF 5'102.- ;

-          que le 7 mars 2011, D______ avait fait savoir au demandeur qu'après vérification des critères de la convention collective de travail pour le personnel au sol, son salaire de base se situait en dessous du montant prévu par celle-ci, de sorte qu'il convenait de lui accorder une augmentation de 2.5% avec effet rétroactif au 1er janvier 2011. Ainsi, le salaire de base se montait à CHF 4'871.-. S'y ajoutait une indemnité de permis (« Lizenzzulage ») de CHF 250.-, portant le salaire mensuel brut à CHF 5'121.-. Enfin, les autres indemnités (« die übrigen Zulagen ») demeuraient inchangées ;

-          que selon les informations fournies par D______ à l'OAI le 11 avril 2011, le salaire annuel du demandeur s'élevait à CHF 66'573.- en 2011 (cf. dossier AI, doc 24) ;

-          que par décision du 21 octobre 2016, l'OAIE a informé le demandeur qu'il avait droit, durant son reclassement, soit du 1er septembre 2016 au 31 juillet 2017, à une indemnité journalière de CHF 164.35 (cf. dossier AI, doc 157) ;

36.    Le 18 mai 2021, la chambre de céans a transmis aux deux parties un CD-ROM contenant le dossier AI du demandeur et à ce dernier une copie des dispositions règlementaires reçues le 12 mai 2021. Enfin, elle a accordé un même délai aux parties pour faire valoir leurs éventuelles observations en y joignant toutes pièces utiles.

37.    Par pli du 26 mai 2021, le demandeur a indiqué que le dossier AI n'appelait aucune observation de sa part.

38.    Par courrier du 31 mai 2021, la défenderesse a souligné en substance qu'entre le
1er septembre et le 30 novembre 2016, il existait une période de double perception pendant laquelle le demandeur avait perçu non seulement la rente AI, mais aussi une indemnité journalière de l'OAIE. Pour le surplus, la défenderesse a persisté dans ses conclusions.

39.    Le 1er juin 2021, la chambre de céans a transmis, pour information, une copie des dernières écritures de chaque partie à la partie adverse.

40.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        a. Selon l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP - RS 831.40), chaque canton désigne un tribunal qui connaît, en dernier instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droits. La voie à suivre est celle de l'action (ATF 115 V 224 consid. 2), étant précisé que le for de l'action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans laquelle l'assuré a été engagé (art. 73 al. 3 LPP).

Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu'aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40]; art. 142a du Code civil [CC - RS 210]).

b. Dans le cadre de contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droits, la compétence des autorités visées par l'art. 73 LPP est doublement définie. Elle l'est, tout d'abord, quant à la nature du litige : il faut que la contestation entre les parties porte sur des questions spécifiques de la prévoyance professionnelle, au sens étroit ou au sens large. Ce sont donc principalement des litiges qui portent sur des prestations d'assurance, des prestations de libre passage (actuellement prestations d'entrée ou de sortie) et des cotisations. Cette compétence est également limitée par le fait que la loi désigne de manière non équivoque les parties pouvant être liées à une contestation, savoir les institutions de prévoyance, les employeurs et les ayants droits (ATF 128 V 254 consid. 2a).

Savoir si le point litigieux est ou non l'objet d'une réglementation expresse de la LPP ou de ses dispositions d'exécution n'est toutefois pas déterminant, en ce qui concerne la recevabilité de l'action devant le tribunal cantonal ou du recours subséquent devant le Tribunal fédéral des assurances. Au contraire, les tribunaux institués par l'art. 73 LPP sont appelés à connaître aussi de litiges qui opposent une institution de prévoyance à un employeur ou à un ayant droit, même s'ils n'appellent l'application d'aucune disposition du droit public fédéral, quant au fond, et qui doivent être tranchés exclusivement au regard du droit privé, du droit public cantonal ou du droit public communal (ATF 117 V 50 consid. 1).

c. Le for de l'action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans laquelle l'assuré a été engagé (art. 73 al. 2 LPP).

En l'espèce, le demandeur est un éventuel ayant droit au sens de l'art. 73 al. 1 LPP et le litige relève manifestement du droit de la prévoyance professionnelle, puisqu'il concerne des prestations d'invalidité que la défenderesse aura à verser en cas d'admission de la demande, de sorte qu'il est régi par les art. 73 LPP et 134 al. 1 let. b LOJ. Par ailleurs, le lieu de l'exploitation dans laquelle le demandeur a été engagé se trouve à Genève. La chambre de céans est ainsi compétente pour connaître du litige, tant ratione materiae que ratione loci.

2.        L'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise, comme telle, à l'observation d'aucun délai (Vincent SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise, 1984, p. 19).

La demande respecte en outre la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Partant, elle est recevable.

3.        En l'espèce, il est admis par les parties que le demandeur pourrait en principe prétendre, de la part de la défenderesse, à une rente entière d'invalidité annuelle de CHF 25'327.80 pour la période du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016. Est seul litigieux le point de savoir si les prestations servies par d'autres assurances sociales au cours de ce laps de temps font obstacle au versement de cette rente, en tout ou partie.

4.        a. La novelle du 3 octobre 2003 modifiant la LPP (1ère révision) est entrée en vigueur le 1er janvier 2005 (sous réserve de certaines dispositions dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er avril 2004 et au 1er janvier 2006 ; RO 2004 1700), entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de la prévoyance professionnelle (RO 2004 1677).

L'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 18 avril 1984 (OPP 2 - RS 831.441.1) a fait l'objet de quelques modifications le 9 novembre 2016, entrées en vigueur le 1er janvier 2017. Celles-ci concernent notamment sa section 6, en particulier l'art. 24.

Sauf disposition transitoires particulières, l'interdiction de la rétroactivité des lois fait obstacle à l'application d'une norme à des faits entièrement révolus avant son entrée en vigueur (rétroactivité proprement dite). Dans ce cas, les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 56/04 du 11 octobre 2005 consid. 6.2 et les arrêts cités). En ce qui concerne le moment déterminant du calcul de surindemnisation, soit la question de savoir sur la base de quels éléments
le calcul doit être effectué du point de vue temporel, il y a lieu de prendre en considération les facteurs de calcul au moment où se pose (pour la première fois) la question de la réduction des prestations pour cause de surindemnisation. Cependant, dans la mesure où ces facteurs de calcul - en particulier les rentes de l'assurance-invalidité et de l'assurance-accidents qui sont adaptées périodiquement à l'évolution des salaires et des prix (art. 37 al. 1 LAI en relation avec l'art. 33ter LAVS, 34 LAA) - peuvent se modifier, le calcul de surindemnisation peut en principe être effectué en tout temps. C'est ce qu'exprime l'art. 24 al. 5 OPP 2, disposition selon laquelle l'institution de prévoyance peut en tout temps réexaminer les conditions et l'étendue d'une réduction et adapter ses prestations si la situation se modifie de façon importante, l'adaptation des prestations n'étant toutefois pas laissée à la libre appréciation de l'institution de prévoyance (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_48/2007 du 20 août 2007 consid. 6.1 et les références).

b. Étant donné que les faits déterminants se sont réalisés après l'entrée en vigueur de la novelle, mais avant l'entrée en vigueur de l'art. 24 OPP 2 révisé, cette disposition sera citée dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011 et du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2016 (ci-après : art. 24 aOPP 2). À noter que la modification de l'art. 24 aOPP 2 au 1er janvier 2012 ne concerne que la deuxième phrase de son alinéa 2, non pertinente pour la résolution du cas d'espèce.

5.        Selon l'art. 23 let. a LPP, ont droit à des prestations d'invalidité les personnes qui sont invalides à raison de 40% au moins au sens de l'assurance-invalidité, et qui étaient assurées lorsqu'est survenue l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité.

Conformément à l'art. 26 al. 1 LPP, les dispositions de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI - RS 831.20) s'appliquent par analogie à la naissance du droit aux prestations d'invalidité. Ainsi, si une institution de prévoyance reprend - explicitement ou par renvoi - la définition de l'invalidité dans l'assurance-invalidité, elle est en principe liée, lors de la survenance du fait assuré, par l'estimation de l'invalidité par les organes de cette assurance, sauf si cette estimation apparaît d'emblée insoutenable. Cette force contraignante vaut aussi en ce qui concerne la naissance du droit à la rente et, par conséquent, également pour la détermination du moment à partir duquel la capacité de travail de l'assuré s'est détériorée d'une manière sensible (ATF 123 V 269 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances 9C_122/2017 du 20 décembre 2017 consid. 2.3).

En matière de prévoyance plus étendue, il est loisible aux institutions de prévoyance, en vertu de l'autonomie que leur confère l'art. 49 al. 2 LPP, d'adopter dans leurs statuts ou règlements une notion de l'invalidité différente de celle de l'assurance-invalidité. C'est ainsi qu'elles peuvent accorder des prestations à des conditions moins strictes que dans l'assurance-invalidité (ATF 123 V 269 consid. 2d ; arrêt du Tribunal 9C_249/2016 du 1er mai 2017 consid. 3.2). Si l'institution de prévoyance adopte une définition de l'invalidité qui ne concorde pas avec celle de l'assurance-invalidité, il lui appartient de statuer librement, selon ses propres règles, sans être liée par l'estimation de cette dernière (arrêt du Tribunal fédéral 9C_866/2018 du 11 juin 2019 consid. 3.2).

6.        Selon la jurisprudence, la survenance du cas de prévoyance invalidité correspond au moment à partir duquel l'assuré a été mis au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité (art. 26 al. 1 LPP ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_629/2011 du 4 mai 2012 consid. 5.1). En vertu du règlement de prévoyance de la défenderesse en vigueur en 2011 (ci-après : RP 2011), l'invalidité correspond à la perte de gain présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une atteinte à la santé physique ou psychique découlant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident. La notion d'invalidité du RP est la même que dans l'assurance-invalidité fédérale (art. 3.3.1 RP 2011).

Le droit à la rente nait en même temps que le droit à la rente AI, mais au plus tôt à l'épuisement des indemnités journalières d'assurance-maladie versées par une assurance conforme aux critères fixés par l'art. 26 OPP 2 (art. 7.1.2 RP 2011).

Le droit à la rente d'invalidité s'éteint lorsque la personne assurée n'est plus invalide, décède ou atteint l'âge normal de la retraite (art. 7.1.3 RP 2011).

En cas d'invalidité totale, la rente d'invalidité s'élève à 60% du salaire considéré (art. 7.1.4 RP 2011).

Le salaire considéré correspond au salaire annuel diminué du montant de coordination. Le salaire considéré correspond, au moins, au montant déterminant selon la LPP (art. 3.2.3 RP 2011).

7.        a. Aux termes de l'art. 34a al. 1 LPP, le Conseil fédéral édicte les dispositions afin d'empêcher que le cumul de prestations ne procure un avantage injustifié à l'assuré ou à ses survivants.

Selon l'art. 24 al. 1 aOPP 2, l'institution de prévoyance peut réduire les prestations d'invalidité et de survivants dans la mesure où ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte, elles dépassent 90% du gain annuel dont on peut présumer que l'intéressé est privé.

En vertu de l'art. 24 al. 2, 1ère phase aOPP 2, sont considérées comme des revenus à prendre en compte les prestations d'un type et d'un but analogues qui sont accordées à l'ayant droit en raison de l'événement dommageable, telles que les rentes ou les prestations en capital prises à leur valeur de rentes provenant d'assurances sociales ou d'institutions de prévoyance suisses et étrangères, à l'exception des allocations pour impotents, des indemnités pour atteinte à l'intégrité et de toutes autres prestations semblables.

b. l'art. 24 al. 2 aOPP 2 vise aussi bien les prestations à caractère permanent, comme les rentes de l'assurance-invalidité, de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire que les prestations à caractère temporaire, comme les indemnités journalières de l'assurance-accidents, respectivement de l'assurance militaire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_711/2007 du 19 décembre 2008 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 93/01 du 12 septembre 2002 consid. 3.1).

Par « perte de gain présumée », au sens de l'art. 24 al. 1 aOPP 2, il faut entendre le revenu hypothétique que l'assuré pourrait réaliser, sans invalidité, au moment où la question de la réduction se pose (ATF 137 V 20 consid. 5.2.3.1 et les références). Selon la conception juridique des prestations d'invalidité des premier et deuxième piliers, les déterminations de l'office AI concernant l'origine, le montant et le début du droit à la rente font en principe foi et sont contraignantes pour la rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle obligatoire (ATF 143 V 91 consid. 3.2). En principe, la valeur du revenu sans invalidité, déterminée dans le cadre de la procédure de l'assurance-invalidité doit également être prise en compte dans le calcul de surindemnisation selon la loi sur la prévoyance professionnelle. Le point de départ est donc le principe de concordance entre le revenu sans invalidité et le manque à gagner présumé au sens de l'art. 24 al. 1 aOPP 2 (ATF 140 V 399 consid. 5.2.1 ; ATF 137 V 20 consid. 2.2). Dans le sens d'une présomption, il faut partir du principe que le revenu sans invalidité déterminé par l'office AI correspond au manque à gagner présumé au sens de l'art. 24 al. 1 aOPP 2. La prise en charge d'une évolution disproportionnée du revenu (c'est-à-dire dépassant l'évolution des salaires et des prix) doit se fonder sur des événements de vie qui ont déjà commencé dans la période précédant la survenance de l'événement assuré, sauf si l'augmentation du revenu, en raison de la nature de son motif sous-jacent, n'a pu se produire qu'après la survenance de l'événement assuré (ATF 143 V 91 consid. 3.2 et les arrêts cités).

c. En vertu de l'art. 24 al. 5 OPP 2, l'institution de prévoyance peut, en tout temps, réexaminer les conditions et l'étendue d'une réduction et adapter ses prestations si la situation se modifie de façon importante.

Est considéré comme un changement important de la situation une adaptation de la prestation d'au moins 10% en faveur ou au détriment du bénéficiaire de la rente (ATF 125 V 163 consid. 3b ; ATF 123 V 193 consid. 5d). Si cette condition est remplie, l'institution de prévoyance est tenue de recalculer la pension d'invalidité. Malgré la lettre de l'art. 24 al. 5 OPP 2, l'adaptation des prestations n'est pas
laissée à la libre appréciation de l'institution de prévoyance (ATF 125 V 163). Les circonstances pouvant conduire à une modification importante de la situation sont multiples ; il s'agit de prendre en compte tous les facteurs pouvant avoir une influence sur le calcul de surindemnisation. Hormis l'adaptation du gain présumé perdu au renchérissement et à l'évolution des salaires réels, peuvent notamment entrer en ligne de compte une modification ayant trait à l'activité hypothétique
de l'assuré (cf. ATF 129 V 150), l'adaptation au renchérissement des prestations versées par d'autres assurances (arrêt du Tribunal des assurances B 21/99 du 24 janvier 2000), la conversion d'une rente d'invalidité AI en indemnités journalières ou la suppression de rentes pour enfant (Marc HÜRZELER, in SCHNEIDER, GEISER, GÄCHTER [éd.], LPP et LFLP, 1ère éd. 2010, p. 501 n. 50). Lorsqu'un seul facteur de calcul subit une modification importante, à savoir qu'il entraîne une adaptation d'au moins 10% des prestations, l'institution de prévoyance examine en fait et en droit, sous tous ses aspects et sans être liée par les facteurs déterminés antérieurement, si et dans quelle mesure il y a surindemnisation (ATF 143 V 91 consid. 4.2).

d. Dans le domaine de la prévoyance professionnelle étendue, les institutions de prévoyance sont libres de reprendre les dispositions de la loi ou de l'ordonnance
ou, sous respect des exigences constitutionnelles minimales, de prévoir d'autres solutions, en particulier une autre limite de surindemnisation (par ex. 100% du gain annuel dont on peut présumer que l'intéressé est privé ; Marc HÜRZELER, in SCHNEIDER, GEISER, GÄCHTER [éd.], LPP et LFLP, 2ème éd. 2020, n. 10 ad art. 34a LPP; cf. ég. Hans-Ulrich STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2ème éd. 2012, p. 356, n. 971). Il importe de relever que la réglementation de l'art. 24 OPP 2, y compris dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2017, ne vaut que pour les prestations de la prévoyance professionnelle obligatoire ; pour ce qui est de la prévoyance étendue, les institutions de prévoyance restent libres de régler différemment la coordination avec d'autres assurances sociales (art. 49 al. 2 LPP ; ATF 122 V 151 consid. 3d et les références), pour autant qu'elles respectent certains principes, notamment celui de la concordance des droits (ATF 129 V 150 consid. 2.2). Exprimé de manière plus ou moins explicite à l'art. 24 al. 1 aOPP 2 (« prestations d'un type ou d'un but analogue »), le principe de concordance garantit qu'à l'image de la rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle, qui a pour seul but de compenser l'incapacité de gain de l'ayant droit, les autres prestations poursuivent la même finalité. Il en va ainsi en cas de concours avec des indemnités journalières de l'assurance-accidents et d'une rente de l'assurance-invalidité, à moins que cette dernière serve également à indemniser une invalidité en raison de l'incapacité d'accomplir des travaux habituels (ATF 124 V 279 consid. 2a). Lorsque le règlement de prévoyance prévoit une limite plus restrictive de surindemnisation que celle prévue par l'art. 24 al. 1 aOPP 2, il convient de procéder à un calcul séparé et comparatif, pour la prévoyance obligatoire, d'une part et pour la prévoyance plus étendue, d'autre part, afin de s'assurer qu'une éventuelle réduction des prestations justifiée au regard des dispositions statutaires et réglementaires de l'institution de prévoyance l'est aussi au regard des exigences minimales de la LPP, autrement dit si l'assuré bénéficie au moins des prestations légales selon la LPP (arrêt du Tribunal fédéral 9C_48/2007 du 20 août 2007 consid. 4.2 et les références).

e. Dans l'arrêt 9C_48/2007 précité, le Tribunal fédéral a considéré que dans la mesure où une disposition du règlement de prévoyance litigieux prévoyait une limite de surindemnisation équivalant à « 100% du traitement brut, allocations familiales comprises », ces termes du règlement, - qui, en tant que conditions générales du contrat de prévoyance liant les parties devaient s'interpréter selon les règles générales sur l'interprétation des contrats - ne faisaient pas appel à une notion variable ou hypothétique (au moyen d'expressions telles que : « salaire présumé perdu » ou « salaire hypothétique qu'aurait perçu l'assuré »), de sorte que seul était déterminant, selon la lettre claire de la disposition réglementaire, le revenu brut effectivement réalisé par l'assuré, sans qu'il soit tenu compte des augmentations possibles de salaire qu'il aurait pu réaliser par la suite si le risque assuré n'était pas survenu. En ce sens, l'institution de prévoyance avait prévu une réglementation plus restrictive que celle de l'art. 24 al. 1 aOPP 2 (arrêt du Tribunal 9C_48/2007 du 20 août 2007 consid. 6.2).

8.        a. Il convient d'examiner à présent si le règlement de prévoyance de la défenderesse prévoit, pour sa part, une règlementation s'écartant du régime de l'art. 24 aOPP 2. À titre liminaire, il sied de relever que l'hypothèse d'une modification du salaire après la survenance du risque assuré est réglée par deux groupes de dispositions. Le premier, régi par les art. 3.2.5 et 3.2.7 RP 2011, concerne les répercussions d'une telle modification sur le montant de la rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle, alors que le second, réglé par le titre 5.5 du RP 2011 (« Relations avec d'autres assurances »), concerne notamment la question d'une éventuelle « surassurance » (cf. la note marginale de l'art. 5.5.2 RP 2011). Dans la mesure où il n'est pas contesté (et n'apparaît pas contestable au regard de l'art. 3.2.7 al. 2 RP 2011) que le montant de la rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle s'est maintenu - à tout le moins de façon théorique - à CHF 25'327.80 par an pour la période du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016, les modifications du salaire que le recourant aurait connues sans son invalidité doivent être examinées uniquement sous l'angle de l'art. 5.5.2 RP 2011.

b. Selon l'art. 5.5.2 al. 1 RP 2011, les prestations selon le présent règlement sont réduites dans la mesure où, ajoutées aux autres revenus à prendre en compte et, en cas de droit aux prestations d'invalidité, à un salaire de remplacement ou à un salaire provenant d'une activité lucrative qui continue ou qui pourrait raisonnablement continuer à être versé, elles dépasseraient 100% de la perte de gain présumée.

Sont considérés comme des revenus à prendre en compte les prestations de l'AVS/AI, de l'assurance-accidents selon la LAA, de l'assurance militaire selon
la LAM ainsi que des autres assurances sociales ou institutions de prévoyance suisses et étrangères (à l'exception des allocations pour impotent, des indemnités pour atteinte à l'intégrité et d'autres prestations semblables) (art. 5.5.2 al. 2 let. a
RP 2011).

Les prestations ou parties de prestations qui ne doivent pas être versées en vertu des dispositions du présent article, ou parce que le salaire entier continue d'être perçu, sont acquises à la fondation (art. 5.5.2 al. 5 RP 2011).

c. La chambre de céans constate qu'en tant que l'art. 5.5.2 du RP 2011 fixe une limite de surindemnisation à 100% de la perte de gain présumée, il s'écarte de la limite de 90% de l'art. 24 al. 1 aOPP 2 et relève par conséquent de la prévoyance étendue. Pour le reste, l'art. 5.5.2 al. 2 let. a RP 2011 reprend le régime prévu par l'art. 24 al. 2 aOPP 2 s'agissant des revenus à prendre en compte.

d. Il convient de rappeler que même si pour le moment déterminant du calcul
de surindemnisation, il y a lieu de prendre en considération les facteurs de calcul
au moment où se pose (pour la première fois) la question de la réduction des prestations pour cause de surindemnisation, cette réduction peut en principe être effectuée en tout temps (ci-dessus : consid. 4a), soit à la lumière des dispositions réglementaires alors applicables (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances
B 60/99 du 25 avril 2000 consid. 3c). Dans le cas concret, la question de savoir sur quelle version du règlement de prévoyance de la défenderesse il convient de se fonder n'a toutefois pas de portée pratique : on constate en effet que ce règlement n'a pas connu de modification des dispositions pertinentes après la naissance du droit à la rente d'invalidité du deuxième pilier. Cela concerne notamment les
art. 3.2.7 et 5.5.2 précités, demeurés inchangés dans le RP 2015 également versé
au dossier. Pour ces motifs, les dispositions du RP seront citées, ci-après, sans précision quant à l'édition du règlement auxquelles elles se rapportent.

e. Étant donné que la défenderesse a déclaré suspendre la rente d'invalidité du demandeur dès la naissance du droit au 1er septembre 2011, il y a lieu d'examiner le calcul de surindemnisation tel qu'il se présentait en 2011, étant rappelé que l'incapacité de gain du demandeur était également compensée, d'une part, par la rente d'invalidité de l'OAIE s'élevant à CHF 1'152.- par mois, respectivement
CHF 13'824.- par année (soit : 12 x CHF 1'152.-), d'autre part, par les indemnités journalières de la SUVA à hauteur de CHF 164.35, correspondant à CHF 59'987.75 par année (soit : 365 x CHF 164.35)

Selon le calcul exposé par la défenderesse dans sa réponse du 3 décembre 2020,
la perte de gain présumée se monte invariablement à CHF 66'573.- ; en comparant ce montant à celui résultant de l'addition des indemnités journalières de la SUVA (CHF 59'987.75) et de la rente AI (CHF 13'824.-), on obtient un total de
CHF 73'811.75, de sorte qu'il existe une surindemnisation à hauteur de
CHF 7'238.75 (soit : CHF 73'811.75 sous déduction de CHF 66'573.-), laquelle fait obstacle au versement de prestations d'invalidité du deuxième pilier.

Dans ses conclusions précisées du 22 février 2021, le demandeur ne conteste pas les bases de calcul pour 2011, mais à partir de 2012, en tirant argument des hausses de salaire que D______ a communiquées à la SUVA pour 2012 à 2016, afin que cette dernière puisse adapter le montant des indemnités journalières revenant au demandeur sur cette période.

La chambre de céans constate que contrairement à ce qui est le cas pour la disposition réglementaire examinée dans l'arrêt 9C_48/2007 précité (ci-dessus : consid. 7e), l'art. 5.5.2 RP fait précisément appel à la notion hypothétique de
« perte de gain présumée » - qui traduit fidèlement les termes de « mutmasslich entgange[r] Verdienst » de la version allemande faisant foi (cf. RP 2011, p. 33 in fine) - et qu'ainsi, le règlement de prévoyance de la défenderesse tient compte des augmentations possibles de salaire qu'un assuré aurait pu réaliser par la suite si le risque assuré n'était pas survenu. Sur ce point, le RP ne prévoit donc pas de régime différent des art. 24 al. 1 aOPP 2 et 24 al. 5 OPP 2, de sorte que la question d'un éventuel réexamen de la réduction des prestations de l'institution de prévoyance se pose nécessairement. Cependant, en l'absence de toute disposition du règlement de prévoyance régissant un tel réexamen, la chambre de céans appliquera, par analogie les principes jurisprudentiels applicables à l'art. 24 al. 5 OPP 2 (sur l'admissibilité de cette méthode : cf. Thomas GÄCHTER / Kaspar SANER, in SCHNEIDER, GEISER, GÄCHTER [éd.], LPP et LFLP, 2ème éd. 2020, p. 840, n. 24).

9.        a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré et le défaut de preuve va au détriment de la partie qui entendait tirer un droit du fait non prouvé (ATF 126 V 319 consid. 5a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.339/03 du 19 novembre 2003 consid. 2).

b. Si l'administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d'office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d'autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d'administrer d'autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d'être entendu selon l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b; ATF 122 V 157 consid. 1d).

10.    a. À la lumière des informations que D______ a transmises à la SUVA, la chambre de céans constate qu'il existe une divergence entre le salaire annuel que D______ a communiqué à l'OAI le 11 avril 2011 pour 2011 (CHF 66'573.-) et celui que cet employeur a transmis à la SUVA, pour la même année, le 20 mai 2016
(CHF 74'973.- ; cf. pce 37 demandeur). En étendant la comparaison des données salariales à 2010, il s'avère que, selon les informations en possession de la SUVA, le gain annuel du demandeur, composé du salaire (CHF 57'024.-), du treizième salaire (CHF 4'752.-, soit 1/12 de CHF 57'024.-) et d'un complément de salaire
(CHF 4'996.20), représentait un total de CHF 66'772.20, déjà supérieur au revenu annuel 2011 communiqué le 11 avril 2011 à l'OAI. Dans la déclaration de sinistre (rechute) LAA du 23 juillet 2010, il est précisé que le montant de CHF 57'024.- correspondait au salaire de base contractuel brut, auquel s'ajoutait le treizième salaire (CHF 4'752.-) et le montant de CHF 4'996.20.- pour les autres compléments de salaires « p. ex à la tâche/commission/inc. pour trav. par équipes » (cf. dossier AI, doc. 19). Force est de constater que ces mêmes composantes du revenu se retrouvent en 2011 puisqu'il est fait mention, sur la base des informations que D______ a transmises à la SUVA (cf. pce 37 demandeur), d'une augmentation du salaire à CHF 74'973.-, prenant effet au 1er janvier 2011, se répartissant entre le salaire annuel (CHF 58'452.-), le treizième salaire (CHF 4'871.-) et le complément de salaire (CHF 11'650.-).

En y regardant de plus près, on constate que le salaire que D______ a communiqué à l'OAI pour 2011 (CHF 66'573.-) correspond en réalité aux informations que cet employeur a transmises à la SUVA, à ceci près qu'une partie du complément de salaire, à savoir l'indemnité de permis (« license allowance ») de CHF 250.- (cf. dossier AI, doc 15), versée en treize mensualités, a été classée dans le salaire de base retenu par l'OAI ; en additionnant le salaire annuel (CHF 58'452.-), le treizième salaire (CHF 4'871.-) et l'indemnité de permis (CHF 3'250.-), on obtient en effet CHF 66'573.-. Il s'ensuit que pour l'année 2011, la différence entre le salaire annuel de CHF 74'973.-, pris en compte par la SUVA, et celui de
CHF 66'573.-, sur lequel se fonde l'OAI (à titre de revenu sans invalidité), s'explique par un complément de salaire réduit à CHF 8'400.- (= CHF 74'973.-
sous déduction de CHF 66'573.-). À la lumière des contrats de travail et de leurs amendements successifs (cf. dossier AI, doc. 15), faisant mention, dès le départ, d'un horaire de travail irrégulier en fonction du plan de travail en équipes, on comprend que cette différence de CHF 8'400.- représente l'indemnité due pour ce type de travail. Les précisions apportées dans la déclaration de sinistre du 23 juillet 2010 vont dans le même sens. Aussi convient-il d'examiner s'il y a lieu de tenir compte d'un tel complément de salaire dans le revenu sans invalidité, en matière d'assurance-invalidité.

b. Le revenu sans invalidité de l'art. 16 LPGA, auquel renvoie l'art. 28a LAI, correspond au salaire brut, y compris le treizième salaire, et tous les éléments
de rémunération qui sont soumis à l'assurance-vieillesse et survivants. Il inclut notamment les indemnités versées pour un travail en équipes (arrêt du Tribunal fédéral U 182/04 du 25 novembre 2004 consid. 5.1 ; Margit MOSER-SZELESS, in Commentaire romand de la LPGA, n. 20 ad art. 16 LPGA et les arrêts cités ; cf. également les ch. 2001ss des Directives sur le salaire déterminant dans l'AVS, AI et APG [DSD]).

11.    a. Au vu de ce qui précède, la chambre de céans considère qu'il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que la présomption de concordance entre le revenu sans invalidité pris en compte par l'OAI (à hauteur de CHF 66'573.-) et le manque à gagner présumé des art. 24 al. 1 aOPP 2 et 5.5.2 RP est renversée par les
éléments de rémunération complémentaires pris en compte par la SUVA, à savoir l'indemnité de travail en équipes. L'OAI, s'il en avait été informé, aurait également dû inclure cette indemnité dans le revenu sans invalidité en 2011, même si ce point n'avait pas de portée pratique pour le droit à une rente entière d'invalidité dès le 1er septembre 2011 puisque la perte de gain se confondait alors avec l'incapacité totale de travail de l'intéressé (cf. dossier AI, doc 200).

Il s'ensuit qu'en 2011, la perte de gain présumée se montait à CHF 74'973.- et les autres revenus à prendre en compte à CHF 73'811.75 (CHF 59'987.75 pour les indemnités journalières de la SUVA et CHF 13'824.- pour la rente AI), ouvrant ainsi droit au versement d'une rente d'invalidité de la défenderesse à concurrence de la différence, soit CHF 1'161.25 par an. Pour le reste, force est de constater que ni la perte de gain présumée du demandeur, ni les indemnités journalières de la SUVA, ni la rente AI n'ont connu une adaptation d'au moins 10% de leurs montants entre 2012 et 2016. Aussi le montant dû par la défenderesse au demandeur s'est-il maintenu à CHF 1'161.25 par an, du 1er septembre 2011 au 30 novembre 2016, ce qui représente, sur 63 mois, la somme de CHF 6'096.55.

Il ressort cependant de la décision de l'OAIE du 5 février 2019, plus précisément du complément d'information qu'elle comporte (cf. p. 4) que lorsque l'indemnité journalière succède à la rente AI, celle-ci est accordée sans réduction, en plus de l'indemnité journalière, au plus tard jusqu'à la fin du troisième mois civil entier qui suit le début des mesures d'instruction ou de réadaptation. Toutefois, durant la période de double perception (du 1er septembre 2016 au 30 novembre 2016), l'indemnité journalière est réduite d'un trentième du montant de la rente (art. 47 al. 1ter LAI).

En l'espèce, il résulte de la décision d'indemnité journalière du 21 octobre 2016 de l'OAIE que le demandeur avait droit, durant son reclassement, à une indemnité journalière de CHF 164.35, pour la période du 1er septembre 2016 au 31 juillet 2017. Après application de la réduction d'un trentième du montant de la rente AI (CHF 38.85, soit CHF 1'166.- / 30), mentionnée dans la décision du 5 février 2019 de l'OAIE, le montant de l'indemnité journalière AI s'élève encore à CHF 125.50, ce qui représente CHF 45'807.50 par an. En y ajoutant les autres revenus à prendre en compte dans le cas particulier, soit les indemnités journalières de la SUVA ainsi que la rente de l'OAIE, la somme des prestations reçues par le demandeur dépasse sa perte de gain présumée du 1er septembre 2016 au 30 novembre 2016, faisant ainsi obstacle au versement de la rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle sur cette période de trois mois. Il s'ensuit que la durée de versement de cette rente est réduite de 63 à 60 mois et la somme due au demandeur à CHF 5'806.25.

b. Si l'institution de prévoyance ne s'acquitte pas dans les délais de son obligation de verser la prestation, se pose alors la question du versement d'intérêts moratoires. Conformément à la jurisprudence constante du Tribunal fédéral rendue dans le domaine de la prévoyance professionnelle, il y a lieu d'appliquer aux prestations de rente l'art. 105 al. 1 CO, qui prévoit que les intérêts moratoires commencent à courir qu'à partir du jour de la mise en poursuite ou de la demande en justice. Sauf disposition réglementaire dérogeant à l'art. 104 al. 1 CO, le montant des intérêts moratoires s'élève à 5% (Marc HÜRZELER, in op. cit., n. 8 ad art. 26 LPP).

En l'espèce, aucune poursuite n'a été initiée à l'encontre de la défenderesse. La demande en justice ayant été formée le 9 novembre 2020, la somme de
CHF 5'806.25 porte intérêts, dès cette date, au taux de 5% l'an, vu l'absence de disposition réglementaire contraire à ce sujet.

c. Selon la jurisprudence relative à l'art. 3 al. 3 de la loi fédérale sur le libre
passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du
17 décembre 1993 (LFLP - RS 831.42), l'ancienne institution de prévoyance obligée de verser des prestations d'invalidité après avoir transféré la prestation de sortie à une institution de libre passage ne peut, ni ne doit, obtenir de l'institution de libre passage la restitution de la prestation de sortie. Elle n'a que la possibilité de sanctionner le défaut de restitution (de la part de l'assuré ou des survivants qui bénéficient des prestations en cas de décès de celui-ci) en réduisant les prestations dans la mesure correspondante (ATF 141 V 197 consid. 5.3).

Compte tenu de ce qui précède, le montant des prestations d'invalidité déterminées ci-dessus (consid. 11a) sera fonction, s'il y a lieu, de la restitution préalable de la prestation de sortie par le demandeur.

12.    Le demandeur, qui obtient partiellement gain de cause, a droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens que la chambre de céans fixera en l'espèce à CHF 1'500.- (art. 89H al. 3 LPA et art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - RS E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).

 

*****

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        Préalablement :

Invite le demandeur, s'il y a lieu, à restituer à la défenderesse la prestation de sortie déjà versée.

3.        Cela fait :

Condamne la défenderesse à verser au demandeur la somme de CHF 5'806.25 avec intérêts à 5% l'an, à compter du 9 novembre 2020.

4.        Condamne la défenderesse à verser au demandeur une indemnité de procédure de CHF 1'500.-.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le