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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2423/2014

ATAS/155/2015 (3) du 29.01.2015 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

*** ARRET DE PRINCIPE ***
Descripteurs : PRESTATION COMPLÉMENTAIRE ; DROIT CANTONAL ; LOYER ; ALLOCATION DE LOGEMENT ; LÉGALITÉ ; ORDONNANCE ADMINISTRATIVE
Normes : LPC.11; LPCC.36D; LPCC.36E; RPCFam.15; RPCFam.21; LIASI.9.2; RIASI.3
Résumé : Dans la mesure où l'art. 47 LPCC prescrit uniquement que le Conseil d'Etat édicte le règlement d'application des prestations complémentaires familiales, il ne comporte pas de clause de délégation suffisante permettant à l'exécutif d'instaurer des règles nouvelles divergentes de celles prévues dans la LPCC. Selon l'art. 36E LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément à l'art. 11 LPC, moyennant des adaptations qui ne sont pas concernées dans le cas d'espèce. L'art. 11 al. 1 LPC ne tient pas compte, au titre du revenu déterminant, des allocations logement. En en tenant compte dans le calcul du revenu déterminant, l'art. 15 RPCFam a posé une règle nouvelle, qui va au-delà de la délégation confiée par le législateur au Conseil d'Etat. Partant, cette disposition réglementaire viole le principe de la légalité et n'est pas applicable. De surcroît, aucune loi fédérale ou cantonale ne prévoit l'imposition de l'allocation de logement. Celle-ci n'est donc pas non plus considérée comme un revenu par l'administration fiscale, mais comme un subside, au même titre que le subside d'assurance-maladie. En définitive, l'allocation de logement devait être déduite du loyer réel et non des montants maximaux admis, ainsi que le prévoit l'art. 3 al. 4 RIASI.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

pouvoir judiciaire

 

A/2423/2014 ATAS/155/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 janvier 2015

 

 

En la cause

Madame A______, domiciliée au PETIT-LANCY, représentée par CARITAS GENEVE

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

1.             Madame A______ (ci-après : l'intéressée ou la recourante) est née le ______ 1973, mariée et mère de deux enfants.

2.             Par décision du 19 mai 2014, le Service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC) lui a octroyé des prestations complémentaires familiales à hauteur de CHF 781.- par mois dès le 1er juin 2014, en prenant en considération, pour le calcul des prestations :

-          dans la rubrique des dépenses : un loyer annuel de CHF 19'800.- (en précisant que le loyer annoncé était de CHF 27'624.- et les charges de CHF 2'400.-);

-          et dans la rubrique du revenu déterminant : une allocation logement annuelle de CHF 9'000.-.

Il précisait, au sujet du calcul des prestations, que le loyer et les charges étaient pris en compte jusqu'au maximum des plafonds admis et que l'allocation logement était prise en compte à 100%.

3.             Par courrier du 4 juin 2014, l'intéressée, représentée par Caritas Genève, a demandé au SPC de reconsidérer sa décision du 19 mai 2014. Son loyer réel s'élevait à CHF 30'024.-, charges comprises, mais il n'était pris en charge qu'à concurrence de CHF 19'800.-, soit le montant maximum prévu pour un couple avec deux enfants à charge. Invoquant les dispositions cantonales, l'intéressée faisait valoir que l'allocation logement aurait dû être ajoutée au plafond, amenant ainsi ce dernier à CHF 28'800.-.

4.             Par décision sur opposition du 16 juin 2014, le SPC a confirmé sa décision précédente. Au vu du montant du loyer payé par l'intéressée (CHF 30'024.- charges comprises) et de la composition de son groupe familial, le montant du loyer pouvant être pris en compte au titre des dépenses dans le calcul des prestations complémentaires ne pouvait s'élever à plus de CHF 19'800.- l'an, selon les dispositions cantonales, et l'allocation logement devait être prise en compte dans le revenu. Sa décision du 19 mai 2014 était donc conforme à la législation en vigueur. Les dispositions légales applicables étaient claires.

5.             Le 18 août 2014, l'intéressée a formé recours contre cette décision auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, en reprenant les arguments qu'elle avait fait valoir dans son courrier du 4 juin 2014. Elle relevait encore que, dans une décision du 31 octobre 2013 concernant une autre famille, le SPC avait déduit du loyer réel l'allocation de logement que percevait cette famille. Le SPC créait, par sa décision du 16 juin 2014, une double inégalité car les allocations de logement destinées à alléger une charge estimée trop lourde lui fermaient le droit à des prestations complémentaires familiales. Elle concluait à l'annulation de la décision sur opposition du 16 juin 2014, au renvoi du dossier au SPC pour qu'il procède à un nouveau calcul des prestations et à la condamnation de ce dernier aux dépens.

6.             A l'appui de son recours, l'intéressée a produit la décision sur opposition du SPC invoquée dans son recours. Il en résulte que ce dernier avait rectifié son premier calcul et déduit les allocations du loyer net. Cette décision est très brièvement motivée et ne mentionne pas de base légale.

7.             Dans sa réponse du 8 septembre 2014, l'intimé a conclu au rejet du recours, en relevant qu'en matière de prestations complémentaires familiales, le loyer était une dépense et l'allocation de logement une ressource. Tous deux étaient indépendants l'un de l'autre dans leurs plans de calculs des prestations complémentaires familiales.

8.             Par courrier du 15 octobre 2014, la recourante a maintenu sa position.

9.             Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur depuis le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25) concernant les prestations complémentaires cantonales familiales (PCCFam), au sens de l'art. 36A LPCC en vigueur dès le 1er novembre 2012.

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), en vigueur depuis le 1er janvier 2003, s'appliquent aux PPCFam (- art. 1A al. 2 let. c LPCC).

En matière de PCCFam, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de 30 jours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (art. 43 LPCC ; voir également art. 56 al. 1, 58 al. 1 et 60 al. 1 LPGA).

Déposé dans les formes (art. 61 let. b LPGA) et délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur la question de savoir si c'est à juste titre que le SPC a considéré le montant de l'allocation logement touchée par la recourante comme faisant partie du revenu déterminant.

4.             a. Les PCCFam ont été introduites à Genève le 1er novembre 2012 (PL 10600 modifiant la LPCC du 11 février 2011). Elles visent une catégorie de bénéficiaires de prestations complémentaires cantonales qui ne sont pas des rentiers AVS/AI, mais des familles pauvres dont les parents travaillent. L'exposé des motifs du PL 10600 explique que : "Ce projet de loi vise précisément à améliorer la condition économique des familles pauvres. La prestation complémentaire familiale qui leur est destinée, ajoutée au revenu du travail, leur permettra d'assumer les dépenses liées à leurs besoins de base. Grâce au caractère temporaire de cette aide financière et aux mesures d'incitation à l'emploi qu'elle associe, le risque d'enlisement dans le piège de l'aide sociale à long terme et de l'endettement sera largement écarté. En effet, le revenu hypothétique étant pris en compte dans le calcul des prestations, il constitue un encouragement très fort à reprendre un emploi ou augmenter son taux d'activité" (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009 et rapport de commission du 15 novembre 2010).

Aux termes de l'art. 1 al. 2 LPCC, les familles avec enfant (s) ont droit à un revenu minimum cantonal d'aide sociale, qui leur est garanti par le versement de PCCFam.

Les PCCFam sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC, les dispositions de la loi fédérale auxquelles la LPCC renvoie expressément, les dispositions d'exécution de la loi fédérale désignées par règlement du Conseil d'Etat ainsi que par la LPGA et ses dispositions d'exécution (art. 1A al. 2 LPCC).

b. En vertu de l'art. 36D LPCC, le montant annuel des PCCFam correspond à la part des dépenses reconnues au sens de l'art. 36F qui excède le revenu déterminant au sens de l'art. 36E, mais ne doit pas dépasser le montant prévu à l'art. 15 al. 2 (al. 1). Les dépenses reconnues et les revenus déterminants des membres du groupe familial sont additionnés (al. 2).

c. Le revenu déterminant est calculé conformément à l'art. 11 de la loi fédérale [sur les prestations complémentaires AVS/AI - LPC (art. 1A al. 1 let. a LPCC)], moyennant notamment les adaptations suivantes :

a) les ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative sont intégralement prises en compte;

b) le revenu déterminant est augmenté d'un cinquième de la fortune calculée en application de l'art. 7 de la présente loi (art. 36E al. 1 LPCC). Lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative, il est tenu compte d'un gain hypothétique qui correspond à la moitié du montant destiné à la couverture des besoins vitaux de deux personnes selon l'article 36B al. 2 (art. 36E al. 3 LPCC).

Selon l'art. 15 du règlement relatif aux prestations complémentaires familiales du 27 juin 2012 (RPCFam - J 4 25.04), les allocations de logement versées en vertu du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 24 août 1992, sont prises en compte dans le revenu déterminant.

d. Les dépenses reconnues sont celles énumérées par l'art. 10 de la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion des montants suivants :

a) le montant destiné à la couverture des besoins vitaux est remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'article 36B;

b) le loyer ainsi que les charges sont fixés par règlement du Conseil d'Etat (art. 36F LPCC).

Le loyer et les charges locatives sont pris en compte, par année, jusqu'à concurrence du montant maximum de CHF 19'800.- pour un couple avec deux enfants (art. 21 al. 1 let. b in fine RPCFam).

Le montant annuel maximal reconnu au titre du loyer et des charges locatives est de CHF 32'400.- (art. 21 al. 2 RPCFam).

e. Selon l'art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent :

a) deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative, pour autant qu'elles excèdent annuellement 1000 francs pour les personnes seules et 1500 francs pour les couples et les personnes qui ont des enfants ayant droit à une rente d'orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l'AVS ou de l'AI; pour les personnes invalides ayant droit à une indemnité journalière de l'AI, le revenu de l'activité lucrative est intégralement pris en compte;

b) le produit de la fortune mobilière et immobilière;

c) un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse 37 500 francs pour les personnes seules, 60 000 francs pour les couples et 15 000 francs pour les orphelins et les enfants donnant droit à des rentes pour enfants de l'AVS ou de l'AI; si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire d'un immeuble qui sert d'habitation à l'une de ces personnes au moins, seule la valeur de l'immeuble supérieure à 112 500 francs entre en considération au titre de la fortune;

d) les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l'AVS et de l'AI;

e) les prestations touchées en vertu d'un contrat d'entretien viager ou de toute autre convention analogue;

f) les allocations familiales;

g) les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi;

h) les pensions alimentaires prévues par le droit de la famille.

Selon l'art. 11 al. 3 LPC, ne sont pas pris en compte dans le calcul du revenu déterminant :

a) les aliments fournis par les proches en vertu des art. 328 à 330 du code civil;

b) les prestations d'aide sociale;

c) les prestations provenant de personnes et d'institutions publiques ou privées ayant un caractère d'assistance manifeste;

d) les allocations pour impotents des assurances sociales;

e) les bourses d'études et autres aides financières destinées à l'instruction;

f) la contribution d'assistance versée par l'AVS ou par l'AI.

f. A teneur de l'art. 1 de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), cette loi a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (al. 1).

A ces titres, elle vise à soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle vise aussi à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d'existence conformes à la dignité humaine (al. 2).

Selon l'art. 9 al. 2 LIASI, les prestations d'aide financière versées en vertu de la loi sont subsidiaires à toute autre source de revenu, aux prestations découlant du droit de la famille ou de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, du 18 juin 2004, ainsi qu'à toute autre prestation à laquelle le bénéficiaire et les membres du groupe familial ont droit, en particulier aux prestations d'assurances sociales fédérales et cantonales, et aux prestations communales, à l'exception des prestations occasionnelles.

Le loyer et les charges locatives ainsi que les éventuels frais de téléréseau sont pris en compte intégralement, conformément au bail et à la convention de chauffage, jusqu'à jusqu'à CHF 1'650.- pour un groupe familial composé d'une ou de deux personnes et de deux enfants à charge (art. 3 al. 1 let. d RIASI).

Lorsque le loyer effectif est supérieur aux montants maximaux admis, il sera pris en charge, à concurrence d'un montant ne dépassant pas le 120% des montants maximaux admis, jusqu'à l'échéance contractuelle la plus proche, pour autant que le bénéficiaire mette tout en oeuvre pour trouver rapidement une solution de relogement dont le coût se situe dans les montants maximaux admis. A défaut de telles démarches avérées, le loyer pris en compte sera ramené aux montants maximaux admis (art. 3 al. 2 RIASI).

L'allocation de logement est déduite du loyer réel et non des montants maximaux admis (art. 3 al. 4 RIASI).

g. Aux termes de l'art. 39 A al. 1 et 2 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05), les locataires d'immeubles non soumis à la LGL peuvent bénéficier d'une allocation de logement aux mêmes conditions que ceux qui logent dans un immeuble admis au bénéfice de ladite loi, dans la mesure où le loyer constitue une charge manifestement trop lourde au regard de leurs revenus et si un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénient majeur.

5.             La loi s'interprète en premier lieu d'après sa lettre (interprétation littérale). Si le texte légal n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions légales, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique) (ATF 129 V 258 consid. 5.1 p. 263/264 et les références citées). Le Tribunal fédéral utilise les diverses méthodes d'interprétation de manière pragmatique, sans établir entre elles un ordre de priorité hiérarchique (ATF 125 II 206 consid. 4a p. 208/209). Enfin, si plusieurs interprétations sont admissibles, il faut choisir celle qui est conforme à la Constitution (ATF 119 Ia 241 consid. 7a p. 248 et les arrêts cités).

6.             En l'espèce, la prise en compte de l'allocation logement dont bénéficie la recourante dans le calcul du revenu déterminant est fondée sur l'art. 15 RPCFam.

Il sied d'examiner si cette disposition réglementaire est conforme au principe de la légalité.

7.             L'art. 2 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012, entré en vigueur le 1er juin 2013 (anciennement art. 130 de la Constitution du 24 mai 1847 ; Cst. gen. - A 2 00) consacre expressément le principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif incombe au Grand Conseil (art. 80 Cst. gen.). L'autorité exécutive genevoise est chargée de l'exécution des lois et prend à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 Cst. gen.). Elle peut donc disposer intra legem et non pas praeter legem. A moins d'une délégation expresse, le Conseil d'Etat ne peut pas poser de nouvelles règles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations (ATF 114 Ia 288).

Les ordonnances législatives d'exécution sont le complément d'une loi au sens formel. Elles sont des règles obligatoires, unilatérales, générales et abstraites permettant d'exécuter une loi formelle qui n'est pas directement applicable. Elles ne peuvent énoncer que des règles secondaires (ATF 104 Ib 209 ; AUER, MALINVERNI, HOTTELIER, Le droit constitutionnel suisse, 2013, vol. I, p. 540 ss, N. 1601 ss).

Les ordonnances législatives de substitution sont le substitut d'une loi au sens formel. Elles peuvent contenir des règles juridiques nouvelles ou règles primaires. L'exécutif qui les édicte ne tire pas sa compétence de la Constitution, mais d'un acte formel du législateur, qui se dessaisit de son pouvoir en faveur de l'exécutif.

Cette délégation se fait sur la base d'une clause de délégation (AUER, MALINVERNI, HOTTELIER, op. cit., p. 546 ss, N. 1614 ss).

Dans une jurisprudence constante, le Tribunal fédéral a posé trois conditions de validité des clauses légales de délégation, qui s'imposent aux cantons comme des exigences minimales (ATF 118 Ia 245). En premier lieu, la Constitution ne doit pas exclure la délégation. La clause de délégation doit figurer dans une loi au sens formel, lorsqu'elle a pour effet d'y soustraire la matière elle-même. Enfin, elle doit fixer la matière sur laquelle porte la délégation, son but et son étendue. Cette condition matérielle s'appréciera différemment selon les situations. Elle est appliquée strictement en matière fiscale, où la loi doit elle-même fixer le sujet, l'objet et la mesure de l'impôt, de même que pour les restrictions particulièrement graves aux libertés publiques, de manière plus générale lorsque l'ordonnance touche gravement la situation juridique des administrés. En d'autres mots, la précision de la norme de délégation doit être proportionnelle à la gravité de l'atteinte portée aux administrés (P. MOOR, Droit administratif, 2012, vol. I, p. 255ss). La loi doit contenir elle-même les principes de la réglementation pour autant qu'elle touche gravement la situation juridique des citoyens (ATF 118 Ia 245 = Sem. Jud. 1993 p. 76).

8.             En l'espèce, l'art. 47 LPCC prescrit uniquement que le Conseil d'Etat édicte le règlement d'application. Dans la mesure où cette clause de délégation ne précise pas son but et son étendue, il sied de considérer qu'elle permet seulement au Conseil d'Etat d'élaborer des ordonnances législatives d'exécution ne comportant pas de règles nouvelles.

Selon l'art. 36E LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément à l'art. 11 LPC, moyennant des adaptations qui ne sont pas concernées dans le cas d'espèce. L'art. 11 al. 1 LPC ne tient pas compte, au titre du revenu déterminant, des allocations logement. En en tenant compte dans le calcul du revenu déterminant, l'art. 15 RPCFam a posé une règle nouvelle, qui va au-delà de la délégation confiée par le législateur au Conseil d'Etat. Partant, cette disposition réglementaire viole le principe de la légalité et n'est pas applicable.

De surcroît, aucune loi fédérale ou cantonale ne prévoit l'imposition de l'allocation de logement. Celle-ci n'est donc pas non plus considérée comme un revenu par l'administration fiscale, mais comme un subside, au même titre que le subside d'assurance-maladie (cf. art. 23 et 24 let. d de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct - LIFD - RS 642.11; 26 et 27 let. e de la loi sur l'imposition des personnes physique - LIPP - RSG D 3 08).

Il résulte des considérations qui précèdent que l'intimé ne devait pas additionner le montant de l'allocation logement au revenu déterminant de la recourante. Comme le soutient cette dernière, l'allocation de logement doit être déduite du loyer réel et non des montants maximaux admis, ainsi que le prévoit l'art. 3 al. 4 RIASI.

9.             En conséquence, le recours sera admis, la décision en cause annulée et la cause renvoyée à l'intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

10.         La recourante obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 1'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 - RFPA ; RS/GE 5 10.03).

11.         La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA et 89H al. 1 LPA).

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.             L'admet.

3.             Annule la décision sur opposition du 19 mai 2014.

4.             Renvoie la cause à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.             Condamne l'intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 1'500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.             Dit que la procédure est gratuite.

7.             Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (articles 113 ss LTF) aux conditions de l'art. 116 LTF. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Brigitte BABEL

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le