Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1220/2025 du 04.11.2025 ( FPUBL ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/792/2025-FPUBL ATA/1220/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 4 novembre 2025 |
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dans la cause
A______ recourante
représentée par Me Robert ASSAËL, avocat
contre
VILLE DE GENÈVE intimée
A. a. A______, née le ______ 1974, a été engagée le 1er juillet 2014 en qualité de cheffe d’unité au service de la sécurité et de l’espace publics de la Ville de Genève (ci‑après : la ville). Le 18 novembre 2015, elle a été nommée au poste de directrice du département de l’environnement urbain (devenu depuis lors le département de la sécurité et des sports [ci-après : le département ou DSSP]), avec effet au 1er février 2016.
b. Son cahier des charges, daté du 14 mars 2016, prévoit qu’elle doit notamment structurer et diriger le département de manière à développer un esprit d’équipe et de qualité, propre à assurer un fonctionnement performant et harmonieux.
B. a. Le 1er juin 2020, B______, conseillère administrative, a succédé à C______ à la tête du DSSP.
b. En avril 2021, A______ a contracté le Covid-19 et a développé un « Covid long ».
c. En 2021, elle a ainsi été en incapacité de travail totale du 18 avril au 23 mai. Par la suite, son incapacité de travail a été réduite à 50% du 24 mai au 30 juin, à 30% du 1er juillet au 8 août et du 21 au 29 août, et à 20% du 30 août au 5 septembre, du 11 septembre au 19 novembre et du 7 au 31 décembre.
d. Le 20 juillet 2021, B______ a attiré l’attention de A______ sur les difficultés relationnelles que celle-ci rencontrait avec elle et certains de ses collègues ainsi que sur l’exécution de son travail. Elle lui a notamment demandé de fournir des efforts pour améliorer l'ambiance et pour qu'elle s'investisse davantage dans l'exécution de ses tâches.
e. Le 14 octobre 2021, une altercation a eu lieu entre A______ et la magistrate concernant principalement la façon dont celle-là avait contracté le Covid-19 et en particulier la reprise des séances en présentiel dès avril 2021.
f. Par décision du 19 janvier 2022, déclarée exécutoire nonobstant recours, le Conseil administratif de la ville (ci-après : CA) a prononcé la suspension avec effet immédiat de A______ de son activité de directrice du DSSP jusqu’au prononcé d’une éventuelle sanction ou d’un licenciement et l’a informée qu’il avait décidé, dans un premier temps, de nommer un expert externe pour effectuer notamment un état des lieux de la situation au sein de la direction du DSSP.
La suspension se fondait, entre autres, sur « l’attitude » qui avait été adoptée peu avant par A______ dans le cadre de ses fonctions ainsi que sur « les graves accusations » qu’elle aurait proférées à l’encontre de la magistrate en charge du DSSP, lesquelles étaient entièrement contestées par celle‑ci, en lien notamment avec la transmission du Covid-19. Si ces agissements étaient avérés, ils pouvaient conduire à une rupture définitive du lien de confiance. De plus, en raison de ses comportement et positionnements, le DSSP avait été confronté à des « problèmes de fonctionnement et de communication ».
g. Le recours formé par A______ contre cette décision a été déclaré irrecevable par la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) par arrêt du 23 juin 2022.
h. Le CA a nommé D______ en tant qu'expert indépendant.
i. Le 21 février 2022, l’expert a rendu son rapport sur la base des auditions de la magistrate, du directeur adjoint du DSSP (E______), de la responsable des ressources humaines (ci-après : RH) du DSSP (J______), de deux juristes, d’une assistante personnelle de la magistrate et des chefs de service alors et anciennement subordonnés au DSSP, à l’exception de A______, qui a refusé d’être entendue.
Les éléments ressortant du rapport montraient qu’il existait de nombreuses difficultés entre la directrice et la magistrate, mais également avec le personnel. La situation était très tendue, et un retour de la directrice à son poste paraissait « inenvisageable humainement parlant ».
j. Par décision du 2 mars 2022, déclarée exécutoire nonobstant recours, le CA a ouvert une enquête administrative à l’encontre de A______, qu’il a confiée à G______, avocat.
k. Le recours interjeté par A______ contre l'ouverture de l'enquête administrative a été déclaré irrecevable par la chambre administrative par arrêt du 27 septembre 2022.
l. A______ a demandé à trois reprises la récusation de G______.
m. Les recours déposés successivement contre les refus de la ville de prononcer la récusation de G______ ont été rejetés par la chambre administrative par arrêts des 3 mai, 23 août et 29 novembre 2022.
C. a. Entre les 16 juin 2022 et 15 février 2023, G______ a convoqué trois audiences de comparution personnelle et procédé à l'audition de 22 témoins, soit E______ (ancien directeur adjoint et directeur du DSSP depuis le 1er janvier 2024), F______ (ancien chef de service des espaces verts et de l’environnement), H______ (collaborateur personnel de B______), I______ (adjointe administrative), B______, K______ (assistante de direction), L______ (conseillère juridique au DSSP), M______ (ancienne assistante de B______), N______ (cheffe du service des sports), O______ (chef du service logistique et manifestations), P______ (chef du service Voirie-Ville propre), Q______ (chef de service du service incendie et secours), J______, R______ (conseillère juridique au DSSP), S______ (responsable de la conduite de la politique publique au sein du DSSP), T______ (chargé de communication au sein du DSSP), U______ (directrice des RH du département des finances), V______ (directeur du contrôle financier de la ville), W______ (commandante et cheffe de service de la police municipale), X______ (assistante de direction au sein du DSSP), Y______ (cheffe du service de l'espace public) et Z______ (ancien conseiller juridique au sein du DSSP).
L’enquêteur a en revanche refusé d'entendre Aa______ (secrétaire général de la ville) et C______. Le premier ne pouvait être entendu en qualité de témoin. Le second avait exercé sa charge pendant une période antérieure à celle correspondant aux reproches du CA à l’égard de A______.
b. L'enquêteur a entendu J______ en l’absence des parties et de leur représentant, celle-ci ayant fourni un certificat médical établi le 21 juin 2022 par la docteure Ab______ à teneur duquel elle ne pouvait pas témoigner contre sa directrice le 29 juillet 2022 « en présentiel », en raison de troubles médicaux en lien avec ce qu'elle avait vécu avec cette personne, générant entre autres de fortes angoisses. La présence de l'avocat de A______ occasionnerait également des difficultés émotionnelles qui étaient alors médicalement contre-indiquées.
J______ a indiqué que l’ambiance de travail était désormais excellente. Elle n'était plus en état de supporter la présence de A______. Elle avait subi du mobbing et du harcèlement de sa part depuis plusieurs années. Les choses s'étaient bien passées jusqu'à fin 2018. À ce moment-là, la directrice avait totalement modifié son comportement à son égard. Une fois, elle était venue dans son bureau, avait hurlé et tapé contre celui‑ci. Elle avait pleuré après cet événement. Plus les semaines passaient, plus A______ avait continué à agir de manière agressive à son égard. Quoi qu'elle fît, rien n'allait ; c'était ordre et contre-ordre tout le temps. Elle avait cette pression constamment. Depuis qu'elle avait eu cette altercation et jusqu'à juin 2019, elle avait eu de fortes migraines et des nausées. Un jour, en juin 2019, elle avait fait un malaise. Elle avait été hospitalisée pendant une semaine. Elle était revenue au travail à la fin août 2019. Depuis son malaise, elle était suivie et devait prendre des médicaments. Son médecin avait posé des conditions à sa reprise. Selon lui, elle avait fait un burn-out en raison de « trop de pression professionnelle ». Elle était angoissée par l'idée du retour de A______. En octobre 2019, au retour de travail de celle-ci, elle lui avait indiqué que la ville avait perdu dans un dossier judiciaire. Sa directrice s'était à nouveau énervée contre elle. Elle lui avait crié dessus, en la critiquant et en disant qu'elle n'avait certainement pas donné les éléments pertinents pour connaître un traitement victorieux du dossier. Certains jours, A______ était « convenable » et, d'autres jours, J______ subissait ses sautes d'humeur. Elle n'était pas toujours la seule personne à subir les comportements de la directrice. « Elle avait par périodes des accalmies » pendant lesquelles sa directrice se tournait vers d'autres collaborateurs, dont certains avaient donné leur démission (M______, Ac______, Ad______, Ae______, Af______, Ag______ et Ah______). Plusieurs d'entre eux subissaient des pressions. Elle avait régulièrement accueilli M______ et d'autres collègues en pleurs dans son bureau. Tout le monde le savait mais personne n'en parlait. L'arrivée de B______ avait constitué un renouveau bienvenu pour tous. L'attitude de A______ avait changé après le retour de vacances de J______ en août 2021. Elle était toujours « derrière elle » mais n'avait plus le même ton agressif. Elle avait toutefois toujours des sautes d'humeur. Il arrivait encore à A______ de « passer ses nerfs » sur elle. D'autres collaboratrices (K______ et I______) lui avaient dit vivre des moments difficiles avec la directrice et envisager de partir. Lorsque celle‑ci était de mauvaise humeur, elle et ses collègues restaient dans leur bureau. Elle-même évitait de monter à l'étage lorsque la directrice était dans son bureau. Elle avait pu constater, en particulier lors des séances du lundi matin, que B______ était courtoise et ouverte au dialogue. En revanche, A______ avait un visage fermé, comme à son habitude. Ses réponses à la magistrate étaient sèches.
La directrice lui reprochait de ne pas proposer de bonnes solutions et elle la chargeait de tâches en dehors de son cahier des charges RH. Elle ne pouvait pas les accomplir correctement car A______ l'interrompait sans cesse, lui reprochant ensuite de manquer de hauteur et de sens stratégique dans sa vision professionnelle, alors qu'elle était submergée par ses exigences. Elle ne savait plus juger de l'urgence des dossiers car A______ n'était jamais contente. Celle-ci lui avait néanmoins témoigné de l'empathie et du soutien face à ses problèmes de santé et familiaux.
c. B______ a indiqué qu'initialement ses relations avec A______ se déroulaient normalement. Or, assez rapidement, elle avait observé des difficultés de savoir-faire et de savoir-être qui lui avaient été remontées d'abord par ses collaborateurs avant qu'elle ne les « expérimente » elle‑même. Un mois et demi après son entrée en fonction, elle avait l'impression d'avoir une directrice qui ne connaissait pas les marges de manœuvre que le DSSP pouvait avoir et qui se comportait plutôt « en mode panique ». En 2020, lors de la défense du budget devant la commission des finances, elle n'avait pas été soutenue par sa directrice. Le traitement du dossier des agents de la police municipale avait pris du retard alors qu'elle avait demandé qu'il avance. En juillet 2021, elle avait fait part à A______ de son insatisfaction sur le fait que les dossiers n'avaient pas progressé comme ils le devaient. La directrice avait rejeté la faute sur les autres. B______ lui avait dit qu'elles ne pouvaient pas continuer de cette façon. Or, elle n'avait pas constaté, par la suite, d'amélioration de l'attitude au travail de la directrice. Les relations s'étaient encore dégradées, jusqu'à une grave altercation en octobre 2021 dans son bureau en lien avec le Covid‑19, au cours de laquelle la directrice lui avait parlé sur un ton agressif et avec une posture de défi. Le vendredi suivant, elles avaient eu un entretien au cours duquel elles avaient repris une discussion sur les tensions entre elles, mais la directrice n'admettait aucune responsabilité. B______ lui avait alors dit que la confiance était rompue et A______ lui avait répondu qu'elle ne démissionnerait pas.
M______, son assistante personnelle, lui avait annoncé sa démission en raison des difficultés qu'elle rencontrait avec la direction, notamment avec la directrice, et lui avait expliqué qu’elle avait fait parfois l'objet de remarques cassantes de sa part. Ensuite, durant le début de l'automne 2021, ses collaborateurs personnels lui avaient dit qu'ils avaient été sollicités par une juriste de la direction et la gestionnaire RH, qui souhaitaient leur parler de difficultés rencontrées avec la directrice. Ces personnes disaient qu'il y avait des difficultés vécues par certains collaborateurs au sein de la direction, notamment par J______. Plusieurs personnes lui avaient dit que celle-ci était sous pression et pleurait régulièrement. Elle avait utilisé le terme « toxique » pour qualifier le management de A______.
Par ailleurs, durant la fin du dernier trimestre 2020 et au début 2021, elle avait été sollicitée par des chefs de service, notamment Q______. Il lui avait été dit de l'appeler car il était affecté par des échanges avec A______. Il lui avait alors indiqué avoir rencontré des difficultés avec elle au cours de la précédente législature et que ces situations se répétaient. N______ avait également rencontré des difficultés avec A______ ; elle lui avait dit que celle-ci était très cassante et « contrôlante ».
Elle avait eu des échos que certains collaborateurs dont les bureaux se trouvaient à l'étage en dessous de celui de A______ venaient à l'étage de la direction lorsque celle-ci était absente. Les séances de commission du personnel, auxquelles prenait part A______, se déroulaient normalement mais à une ou deux reprises, elle l'avait trouvée trop cassante à l'égard des membres des commissions. Celle-ci avait de la peine à gérer la pression lors de situations de stress. À une reprise, A______ avait hurlé tellement fort que cela avait « traversé les murs » de son bureau. Elle était au téléphone avec le secrétaire général. L'attitude de A______ provoquait une ambiance tendue au sein du service. Lorsqu'elle était absente, certaines personnes, notamment J______, retrouvaient le sourire, et l'ambiance était plus détendue. C'était du reste le cas depuis sa suspension. C'était un soulagement.
d. E______ a confirmé que des collaborateurs étaient venus lui parler depuis la suspension de A______ (mais pas avant) des difficultés qu’ils avaient rencontrées avec elle. Certains collaborateurs avaient dit que l’ambiance était meilleure depuis le départ de la directrice. Les tensions avaient commencé au départ de Aj______, qui était très appréciée. Au-delà du coaching que la directrice avait proposé à J______, il n'avait pas ressenti un soutien supplémentaire de la part de celle-là pour celle-ci. A______ était honnête et directe. Il n'avait pas constaté personnellement des comportements inadéquats de sa part. Il ne l'avait pas entendue crier. Il y avait eu des départs de certains collaborateurs « où la relation de travail n'était pas bonne » avec A______, notamment Ac______, Ad______, Ae______, M______ et Af______. Il y avait effectivement un lien avec une relation de travail qui ne fonctionnait pas bien. Le management de A______ était un management à l'écoute avec un contact rapproché, mais également une responsabilisation des chefs de service.
e. H______ a exposé que son entente avec la directrice n'avait pas été « des plus cordiales ». Il avait été quelque fois amené à s'interroger sur son savoir‑être et surpris par son comportement. Néanmoins, ses relations avec elle avaient toujours été empreintes de politesse. R______ et Ai______ étaient venues le voir pour exprimer leur mécontentement au sujet de la directrice et lui dire que J______ était en souffrance en raison du management de la directrice. Plusieurs fois par mois, fin 2020, il avait reçu des messages de N______ lui exprimant à quel point elle trouvait difficile de travailler avec elle et qui s'était plainte d'un manque de soutien de sa part. Il avait également eu un échange avec l'ancienne assistante personnelle de A______, qui lui avait dit qu'il n'était pas évident de collaborer avec elle. Lors de discussions avec R______, le thème récurrent était le style de management de A______, considéré comme cassant et faisant du mal à certaines personnes. Certains collaborateurs, notamment Ai______ et J______, lui avaient dit éviter de se rendre à l'étage du bureau de A______. Celle-ci avait de la peine à gérer son stress. Son comportement avait eu une incidence sur le fonctionnement de la direction du DSSP, en raison de son savoir-être et de son savoir-faire. L'ambiance était lourde en sa présence. Depuis son départ, elle était meilleure. Les réponses que la magistrate pouvait légitimement attendre de la directrice ne lui étaient pas apportées. Celle-ci avait toutefois contribué positivement aux réunions concernant la police municipale en apportant des informations. C'était lui qui avait suggéré la reprise des séances en présentiel et A______ ne s'y était pas opposée.
f. I______ a exposé que A______ avait rencontré des difficultés dans le cadre professionnel dès son retour d'arrêt maladie (qui avait commencé en 2019), mais pas avant. Elle avait repris le travail à taux partiel mais il était difficile de reprendre les dossiers avec ce taux d'activité. La qualité du suivi des dossiers n'était plus la même. Après sa période d'absence, A______ avait également rencontré des difficultés dans le savoir-être. Son management était très directif. Elle avait haussé fortement le ton envers Aa______. Lorsque I______ était son assistante personnelle, tout se passait bien. Toutefois, certaines personnes lui avaient fait part de certaines difficultés avec la directrice. Elle avait remarqué un changement d'attitude de sa part à son égard dès qu'elle avait accepté le poste d'adjointe administrative de la magistrate. Une certaine distance s'était installée dans leurs rapports. La directrice lui faisait des remarques et des reproches. Elle cherchait « la petite bête » et était plus « cassante ». Elle employait un ton qui l'avait affectée. À son retour, elle n'arrivait plus à gérer le stress de son travail. Sa façon d'être et de répondre pouvait heurter les gens, en particulier K______, qui lui avait dit avoir été affectée par ses propos. Elle avait vu parfois J______ en détresse, en raison des reproches que lui adressait A______ sur la qualité de son travail. Lors des séances, elle ne répondait pas aux questions que lui posait la magistrate et elle était « ailleurs ». L'ambiance était beaucoup plus détendue depuis sa suspension. Après avoir cessé d'être l’assistante personnelle de la directrice, elles avaient continué à avoir des discussions personnelles, puisqu'elles étaient proches. Il n'en demeurait pas moins que certains de ses comportements l'avaient heurtée. Elle ne lui en avait toutefois pas tenu rigueur. A______ n’était accessible qu’à certains moments.
g. K______ a indiqué que, dans l'ensemble, sa relation avec A______ se passait bien. En juin 2021, elle avait eu un échange de courriels avec elle sur une note de service. La directrice avait changé la mise en page. Sans « mettre les formes », K______ lui avait demandé les raisons de ce changement. Elle lui avait répondu qu'elle n'était pas une collègue du secrétariat et qu'elles devaient se voir pour une séance afin de redéfinir leurs rôles en présence de la responsable du secrétariat. Elle avait ressenti cela comme une pression et une intimidation. Elle était en pleurs et avait été affectée. Dans les échanges de courriels concernant cet évènement, A______ avait fini son courriel par : « je ne veux plus en entendre parler ». Ensuite, K______ lui avait expliqué que cette phrase n'était pas « sympathique » et la directrice lui avait répondu qu'elle s'était encore retenue. Elles s'étaient ensuite expliquées et avaient pu « mettre les choses à plat ». À la suite de cette réunion, leurs relations professionnelles avaient continué comme d'habitude, soit normalement. Même si elle avait changé depuis quelques temps, A______ se comportait convenablement avec elle ; c’était quelqu'un d'humain.
Un jour, elle avait assisté à un échange téléphonique houleux entre la directrice et le secrétaire général. Elle avait entendu crier. Désormais, l'ambiance était beaucoup plus apaisée, alors qu’elle avait été très tendue. Ac______ lui avait fait des confidences en 2018-2019 concernant des propos que A______ aurait tenus sur un ton inadéquat.
h. L______ a déclaré que ses relations avec A______ étaient bonnes et toujours courtoises. Aucun collaborateur ne s'était plaint directement auprès d'elle. En revanche, elle avait vu à une reprise J______ en souffrance et en larmes. « Ils » avaient eu une atmosphère pesante et électrique en automne et début d'hiver 2021, jusqu'à ce que A______ soit suspendue. C'était une période où « ils » évitaient de monter à l'étage supérieur si cela n'était pas nécessaire. Depuis la suspension de A______, l'ambiance était bonne.
i. M______ a indiqué qu'avec le temps, elle s'était de moins en moins sentie accompagnée par sa hiérarchie, notamment par A______. Le climat au sein de l'équipe du secrétariat était devenu de moins en moins bienveillant. Ses collègues remettaient en question son travail auprès de A______, qui leur donnait raison. Progressivement, sa position de gestionnaire avait été « démontée » par la directrice, en ce sens qu’elle n'avait plus aucune autorité. À l'arrivée de B______, elle était restée à son poste d'assistante et tout s'était bien passé avec la magistrate. Elle était tombée en arrêt maladie en raison d'un burn-out. L’« aspect pesant » et le manque de confiance dans le rôle de supervision du secrétariat lui avaient fait perdre confiance en elle. Elle avait reçu oralement des reproches injustifiés de A______. Elle avait dit à B______ qu’elle quittait la ville en raison de difficultés rencontrées avec la directrice. Celle-ci n'avait toutefois pas utilisé de propos inadéquats ou trop forts à son égard. Elle l'avait trouvée dure quelques fois avec certains de ses collègues. Il ne s'agissait pas de mots mais du ton employé, qui était cassant et tranchant. Les collègues concernés étaient J______ et Ad______, à qui elle avait adressé des reproches qui n'étaient pas justifiés. La première disait de A______ qu'elle était dure et cassante à son égard. M______ avait le même ressenti. A______ s'entendait très bien avec Aj______ ainsi qu'avec Ai______, qu'elle avait recrutées. Les affinités se ressentaient. La situation avec A______ lui avait fait perdre petit à petit confiance en elle, en raison de « petites choses cumulées ».
j. N______ a indiqué que le peu de relations qui existaient entre elle et la directrice était difficile. Il y avait eu des échanges de courriels avec une posture qu'elle avait trouvée dénigrante à l'égard de sa fonction. Elle avait essayé de lui en parler mais le dialogue n'avait pas pu s'établir. Quand elle lui soumettait une problématique, elle sentait tout de suite une réticence à entrer en matière sur un échange. Le 29 janvier 2021, elle avait reçu de A______ un courriel humiliant et dénigrant. Elle avait échangé avec la magistrate sur celle-là et lui avait fait part du manque de considération par rapport à la charge de travail. Elle n'avait pas souvenir de propos ou de paroles de la part de la directrice qui auraient été inappropriés. En revanche, elle pouvait donner le sentiment d'être très dénigrante. Elle avait discuté de A______ avec J______, O______, M______ et W______. Ce qui ressortait de ces discussions était un sentiment de peur et de peu de considération venant de A______. Désormais, les contacts étaient beaucoup plus fluides et naturels ; il n'y avait plus de sentiment de peur. Il lui était arrivé de prendre contact avec E______ pour éviter de devoir passer par A______. Les relations entre celle-ci et B______ étaient glaciales.
k. O______ a déclaré que A______ était engagée et extrêmement présente dans la partie RH. Il n'y avait pas eu de dossier qui avaient traîné ou dans lesquels il avait reçu des réponses évasives. Lui et A______ avaient des rapports professionnels extrêmement courtois. Elle ne s'était fâchée que deux fois en quatre ou cinq ans. Lors des séances avec B______, A______ ne disait pas « beaucoup de choses », ce qui était toutefois normal puisque les séances étaient préparées en amont. L'ambiance était bonne, voire très bonne. L'ambiance n'avait pas changé depuis la suspension de la directrice. Il « appréciait bien » B______.
l. P______ a indiqué que A______ n'avait pas tenu de propos trop durs à son égard. En revanche, à son arrivée, certains collaborateurs lui avaient dit qu'ils se considéraient victimes ou avaient rencontré des difficultés avec elle. Certains la trouvaient dure, sévère et exigeante. Il pensait à des discussions avec O______, J______ et M______. Selon lui, la directrice n'était pas responsable des dysfonctionnements du service. Elle était à l'écoute et disponible sur les problématiques RH.
m. Q______ a exposé que A______ avait été la première personne en ville à reconnaître son travail. Elle s'était pleinement investie pour lui obtenir une bonne classe salariale. Durant les premières années, ils avaient eu une collaboration parfaite. Elle était toujours à l'écoute et faisait preuve d'une grande disponibilité. Toutefois, après l'affaire des notes de frais et vers la moitié de la période de pandémie de Covid-19, il avait constaté chez elle un changement. Il avait senti s'instaurer une crispation dans sa relation avec elle, celle‑ci étant devenue plus distante et lui ayant fait parfois ressentir de la contrariété. Elle traitait davantage les griefs par courriels, ce qui constituait un changement quant à la manière de communiquer. Il y avait le caractère écrit mais aussi la virulence des propos dans quelques messages. Certes, il n'avait pas toujours été parfait mais à quelques reprises, ses courriels l'avaient attristé et particulièrement touché. Par la suite, ils s'étaient rencontrés, ce qui avait permis d'aplanir le problème. Il se rappelait avoir parlé à B______ d'un des courriels dans lequel A______ avait parlé d'atteinte à la confiance, en août ou septembre 2020. Ce courriel l'avait touché, dans la mesure où il avait trouvé ces propos injustes. Hormis ces courriels, A______ n'avait pas eu d'attitude dénigrante à son égard.
n. S______ a déclaré qu'elle voyait A______ tous les lundis à la séance de direction. Ses rapports professionnels avec elle se déroulaient très bien. Elle était disponible, juste, gentille, à l'écoute et soucieuse du bien-être des membres de la direction. Elle n'avait pas constaté que la directrice eût fait des remarques désobligeantes ou blessantes. Elle n'avait pas été surprise par sa suspension car l'ambiance n'était pas au « beau fixe » ; il y avait une mésentente entre B______ et la directrice.
o. T______ a indiqué que son interaction professionnelle avec A______ se déroulait bien. Il n'avait pas le souvenir de l'avoir entendue hurler ni d'avoir tenu des propos désobligeants envers des collaborateurs. Elle avait toujours veillé à ce que le climat de travail au sein de la direction soit bon. L'ambiance de travail était bonne.
p. R______ a indiqué que sa relation avec A______ s'était toujours bien déroulée. Lors du retour en présentiel, elle avait ressenti un état de mal-être chez J______ ainsi qu'une grande détresse. Celle‑ci lui avait parlé de ses difficultés relationnelles avec A______. Elle avait essayé d’approcher la directrice en automne 2020 mais elle avait senti qu'il n'y avait pas d’ouverture de sa part pour entendre certaines « choses » concernant J______, ni une capacité de remise en question. Elle avait alors discuté avec Ai______, qui était le bras droit de la directrice et était au courant de l'état de souffrance de J______. Ai______ avait essayé de discuter avec A______, mais sans succès également. Avec Ai______, elles ne voyaient pas d'autres solutions que d'interpeller les collaborateurs personnels de B______, soit H______ et Ak______. Elles avaient eu plusieurs échanges en octobre novembre 2020, notamment sur la charge de travail à la direction qui était « énorme », sur le management de A______ ainsi que sur son comportement à l'égard de J______. Ai______ décrivait elle aussi des relations de travail compliquées avec A______. Elle était aussi sous pression sur le plan RH mais également en raison du management de la directrice, qui était parfois désordonné avec des ordres et des contre-ordres créant beaucoup de confusion et générant du travail supplémentaire. Selon elle, il y avait une forme de micro-management de A______ qui était pesant. À son retour de congé maternité, les choses ne s'étaient pas améliorées avec A______. « Ils » évitaient de monter à l'étage supérieur où se trouvait le bureau de la directrice en raison des tensions. Les relations entre A______ et B______ n'étaient pas bonnes, selon ce qu'on lui avait rapporté. Les choses ne s'étaient pas non plus améliorées entre J______ et la directrice. La première se plaignait d'une attitude dénigrante et rabaissante de la directrice à son égard, laquelle lui aurait dit qu'elle était nulle, qu'elle ne comprenait rien et que c'était une menteuse. J______ avait laissé entendre que la directrice lui avait hurlé dessus à plusieurs reprises, en lui adressant des reproches dénigrants. Il y avait aussi eu des petits « couacs » avec I______. K______ avait également vécu un moment délicat avec A______. Depuis la suspension de celle-ci, ses collègues, notamment J______, étaient plus sereins. R______ avait l'impression que A______ était souvent stressée et qu’elle répercutait son stress et sa pression sur J______. L'intérim était assuré par E______, qui était plus à l'aise que ne l'était A______, plus au fait des dossiers et avait plus de facilité à les suivre. Elle n'avait pas entendu A______ crier ou hurler.
q. W______ a indiqué que ses (nombreux) contacts avec A______ se passaient très bien. Celle-ci avait toujours su trouver des solutions adaptées à chaque personne. Elle était à l'écoute et disponible et maitrisait les dossiers qui étaient essentiellement RH. Elle n'avait pas entendu la directrice faire de remarques désobligeantes à qui que ce soit.
r. X______ a exposé que ses relations professionnelles (contacts quotidiens) avec A______ se passaient très bien. C'était quelqu'un de très humain, à l'écoute et juste. Lorsque la charge de superviseur du secrétariat avait été retirée à M______, avec qui il y avait eu des problèmes, cela avait été un soulagement. Ae______ se contredisait lui-même quand il leur parlait. Il n'était pas resté très longtemps en poste. Son départ avait été un soulagement également. « On » pouvait ressentir plus facilement, par rapport à E______, que A______ était stressée selon les situations. Elle ne l'avait pas entendue hurler mais avait assisté à un échange « tumultueux » entre A______ et B______ sur le Covid-19.
s. U______ a indiqué qu'elle entretenait avec A______ les mêmes relations qu'avec les autres directeurs. C'était quelqu'un de très strict qui essayait de régler les problèmes de manière un peu abrupte. Elle ne l'avait pas entendue hurler ni tenir de propos blessants. La directrice avait été courtoise et elle l'avait sentie impliquée.
t. V______ a indiqué entretenir de très bonnes relations professionnelles avec A______. Celle-ci était très impliquée dans les différents mandats qu'ils avaient traités ensemble. Il n'avait pas constaté que la directrice se fût comportée de manière méprisante avec qui que ce soit.
u. Z______ a indiqué qu'il avait eu de très bonnes relations professionnelles avec A______. Elle gérait bien les réunions. Il ne l'avait pas entendue crier sur qui que ce soit. Toutefois, il avait trouvé qu'elle avait été dure et injuste avec Ac______P dans le cadre d'échanges de courriels (trois ou quatre). Celle-ci accomplissait pourtant son travail à satisfaction. Elle avait été affectée par l'attitude de la directrice à son égard, pas seulement en raison des courriels qu'il avait vus. Bien qu'il fût moins souvent au travail à cette période, il n'avait pas constaté de tension particulière en 2021.
v. F______ a indiqué que tout se passait bien avec la directrice.
w. A______ a contesté les reproches qui lui étaient adressés. Au début, sa relation avec B______ était bonne. Elle avait dû formuler des remarques sur le fonctionnement du DSSP et proposer des ajustements qui lui semblaient nécessaires pour préserver les intérêts de la ville. Au mois d'avril 2021, elle avait contracté le Covid-19 et c'était à partir de ce moment que les relations avec la magistrate s'étaient dégradées. Des reproches lui avaient été adressés notamment en raison de ses absences pour cause de maladie. En juillet 2021, la magistrate lui avait fait part de tensions entre elles sans lui faire part de plaintes de collaborateurs. Elle lui avait alors signalé qu'elle n'avait plus d'assistant ni d'administrateur à sa disposition et qu'elle faisait tout pour que les choses se passent bien.
Ses relations avec J______ était bonnes et constructives. Elle n'avait pas tenu de propos qui auraient pu l'affecter. Ses relations avec R______ étaient également très bonnes. Elle n'avait pas rencontré de problème avec les membres de « commissions de personnel ». Elle ne criait pas ni ne hurlait mais il lui était très probablement arrivé de hausser la voix, même si cela n'était pas dans sa nature. L'ambiance était très bonne au sein de la direction du DSSP ; des collaborateurs le lui avaient confirmé. Elle s'était impliquée dans le cadre de sa fonction de directrice. Néanmoins, la magistrate avait souhaité définir le cadre et le contenu des évènements. Personne, pas même B______, ne lui avait dit que ses prestations étaient insuffisantes. Ce grief ne lui avait été signifié qu'après qu'elle eût refusé d'accepter la convention qui lui avait été proposée le 9 novembre 2021. Lors de la réunion du 15 octobre 2021, elle n'avait proféré aucune accusation mais avait uniquement rappelé les circonstances qu'elle avait pu observer. Enfin, lors de son entretien de départ, M______ lui avait dit ne pas pouvoir envisager la poursuite de la collaboration avec la magistrate, ce qui motivait son départ.
D. a. L'enquêteur a rendu son rapport de 43 pages le 23 mars 2023.
De nombreux témoins avaient relevé un changement important dans le comportement de A______ qu'ils mettaient en lien avec le début de la pandémie de Covid-19 et son retour d'arrêt maladie. Avant ces événements, elle donnait entière satisfaction dans son travail et était appréciée de ses collaborateurs. Depuis ces événements, ils disaient avoir rencontré de nombreuses difficultés avec elle. À l'exception du grief relatif à l'absence de proactivité dans la gestion de la crise du Covid-19, les reproches formulés par la ville dans son courrier d'ouverture d'enquête du 2 mars 2022 étaient fondés.
b. Le 29 mars 2023, la ville a transmis à A______ un exemplaire du rapport d'enquête, en lui fixant un délai au 11 avril 2023 (prolongé au 20 avril 2023) pour déposer ses observations et solliciter son audition par une délégation du CA.
c. Le 20 avril 2023, A______ a sollicité son audition par une délégation du CA et a demandé une prolongation de délai pour produire ses déterminations.
d. Dans le délai prolongé au 26 avril 2023, A______ a transmis ses observations.
e. Le 7 juin 2023, A______ a été entendue par une délégation du CA, composée d'Al______, conseiller administratif, et d'Am______, secrétaire général adjoint.
f. Par pli du même jour, le CA a informé A______ avoir décidé de poursuivre le processus de licenciement. Toutefois, dans la mesure où elle était en incapacité de travail et sous une période de protection, la résiliation de son engagement interviendrait au terme de cette période.
g. Le 13 janvier 2025, A______ a communiqué à la ville un certificat médical attestant de sa pleine capacité à travailler dès le 1er février 2025.
h. Par décision du 3 février 2025, déclarée exécutoire nonobstant recours, la ville a résilié les rapports de service de A______ avec effet au 31 août 2025 et l'a libérée de son obligation de travailler jusqu'au terme de son délai de congé.
Il ressortait des conclusions du rapport d'enquête, qu’elle faisait siennes, que les prestations de A______ étaient insuffisantes et qu'elle avait contrevenu de manière répétée à ses devoirs de service. En particulier, elle avait rencontré des difficultés relationnelles multiples à l'égard de la magistrate en charge du DSSP, de l'équipe de direction du DSSP ainsi qu'envers plusieurs cadres du DSSP. Compte tenu de ces éléments notamment, le lien de confiance était rompu.
La ville a également adressé une dizaine d’autres reproches à la directrice.
E. a. Par acte remis à la poste le 5 mars 2025, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à son annulation et à sa réintégration, et sollicitant la restitution de l’effet suspensif. À titre préalable, elle a requis l'apport, par la ville, de plusieurs documents ainsi que l'audition de C______, Aa______ et J______.
Son droit d'être entendue avait été violé. Le 10 février 2023, elle avait transmis à l'enquêteur une détermination de 67 pages, avec un bordereau de 49 pièces. Or, ni le rapport d'enquête ni la décision querellée n'avaient pris position sur ses arguments. En outre, l'enquêteur avait refusé de réentendre J______ et d'entendre C______ et Aa______.
Il n’existait aucun motif de licenciement et la ville s'était contentée de se référer au rapport de l'enquêteur sans plus d'analyse. Elle n’avait pas rencontré de difficultés relationnelles avec ses collaborateurs. Il ressortait de l'ensemble des témoignages que seules J______ et B______ auraient directement essuyé, selon leurs dires, des propos inadéquats.
Les autres reproches de la ville étaient également infondés.
b. La ville a conclu au rejet de la requête de restitution de l'effet suspensif.
c. Après que la recourante a répliqué, la chambre administrative a refusé de restituer l’effet suspensif par décision du 17 avril 2025 (ATA/444/2025).
d. Dans sa réponse sur le fond, la ville a repris les arguments qu’elle avait développés dans sa décision de résiliation des rapports de service.
e. Dans sa réplique, la recourante a persisté dans son argumentation et ses conclusions.
f. Dans sa duplique, la ville a indiqué persister dans ses écritures et ses conclusions.
g. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
h. Les arguments des parties et le contenu des pièces seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).
2. Le litige porte sur la conformité au droit de la résiliation des rapports de service de la recourante pour motif fondé.
3. La recourante sollicite l’apport de plusieurs documents ainsi que l’audition de C______, Aa______ et J______.
3.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 145 I 167 consid. 4.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 144 II 427 consid. 3.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_452/2024 du 16 janvier 2025 consid. 2.1). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).
3.2 En l’espèce, la recourante estime d’abord que C______ doit être entendu à propos de sa lettre de recommandation, des griefs de la ville, de ses valeurs et moralité ainsi que sur les problématiques rencontrées avec J______ et les efforts pour améliorer la situation.
Or, premièrement, la lettre de recommandation rédigée par C______, qui fait l’éloge de la recourante, figure au dossier et porte au demeurant sur une période antérieure à celle à partir de laquelle la majorité des griefs adressés à la recourante ont été formulés. On ne discerne pas quel élément supplémentaire pertinent C______ pourrait apporter. Deuxièmement, le dossier contient de nombreux témoignages et quelques échanges de courriels qui permettent non seulement d’apprécier les griefs de la ville à l’encontre de la recourante mais également la question de ses valeurs, pour autant que celle-ci soit pertinente. Enfin, le témoignage de J______ a été produit et ses propos ont été confirmés par plusieurs témoins. Par conséquent, et par appréciation anticipée des preuves, le témoignage de C______ n’apparaît pas utile.
3.2.1 Ensuite, la recourante sollicite l’audition de Aa______ afin qu’il s’exprime sur les dossiers sur lesquels il a travaillé avec elle, sur la prétendue altercation qu’ils ont eue, sur le certificat intermédiaire de travail qu'il a cosigné ainsi que sur ses valeurs et sa moralité.
Or, comme cela sera vu ci-après, la question de la conduite des dossiers sur lesquels la recourante et Aa______ ont collaboré n’a aucune incidence sur la solution du litige. Il en va de même du certificat intermédiaire de travail qu’il a cosigné, celui‑ci portant sur une période (1er février 2016 au 31 mai 2020) antérieure à celle à partir de laquelle la majorité des griefs adressés à la recourante ont été formulés. Il figure au demeurant au dossier. Enfin, les nombreux témoignages produits permettent non seulement d’apprécier la question des valeurs de la recourante, pour autant que celle-ci soit pertinente, mais également d’établir les faits en lien avec l’altercation entre la recourante et Aa______, étant néanmoins relevé que cette altercation n’est pas déterminante pour la solution du litige.
3.2.2 Puis, la recourante estime que les réponses de J______ apportées lors de son témoignage appellent d’autres questions importantes qui justifieraient qu’elle soit à nouveau entendue.
Le témoignage de J______, dont les propos ont été confirmés par certains témoins, figure toutefois déjà au dossier. Ce témoignage et les autres déclarations de témoins suffisent pour établir la nature des rapports entre la recourante et J______.
La recourante a dressé une liste de 99 questions à poser à J______. Elle ne conteste toutefois pas expressément les déclarations de celle-ci ni n’indique en quoi les réponses aux questions qu’elle a préparées auraient une incidence déterminante sur l’issue du litige. En outre, ces questions portent très majoritairement sur des déclarations de J______ qui ne sont pas déterminantes pour l’issue du litige (« depuis mon arrivée, rien ne laissait croire qu’elle était insatisfaite de mon travail »), sur des faits que les témoignages produits permettent déjà d’établir (notamment la question des ordres et contre-ordres ou l’organisation du séminaire avec les cadres et les chefs de service du département), sur des faits qui concernent uniquement le parcours de J______, ses compétences professionnelles et sa santé et qui sont ainsi exorbitants à l’objet du litige (notamment sur la question de savoir si elle a été entendue dans le cadre d’une procédure disciplinaire la concernant directement ou indirectement en lien avec le visionnage ou la mise en ligne de photographies à caractère pornographique, le contenu de tous ses entretiens périodiques à la ville, ses relations professionnelles avec Aj______, la raison pour laquelle elle n’a pas saisi un événement en particulier pour parler à la magistrate de ses problèmes avec la recourante ou encore la rédaction de documents institutionnels), sur des faits qui ne sont pas pertinents ou dont la réponse peut être apportée par la recourante elle-même (« la recourante participait-elle seule à vos entretiens statutaires ?» ; « quelles sont les procédures, en ville, en cas de burn‑out ? » ; les compétences de Ae______ ; la charge de travail au sein du département ; des faits concernant la période pendant laquelle C______ était magistrat ; une formation que la recourante aurait dû suivre ; le contexte de la reprise des réunions en présentiel) ou encore sur des appréciations personnelles non utiles à la résolution du cas (« n’est‑ce pas le rôle d’une directrice que de vouloir avancer dans les dossiers ? » ; « le respect de la santé des employés ne doit-il pas être au centre de vos préoccupations ? »). Ces questions ne sont donc pas pertinentes. Dès lors, une seconde audition de J______ ne se justifie pas.
3.2.3 Enfin, la recourante demande l’apport de 20 types de documents.
Or, certains de ces documents, pour autant qu’ils existent, n’ont aucune incidence sur la solution du litige (ceux qualifiant le travail de la recourante ; ceux attestant de problèmes de fonctionnement et de communication au sein du département ; ceux portant sur la nouvelle organisation du département à la suite de la prise de fonction de B______ ; ceux concernant les entretiens périodiques de certains collaborateurs, notamment J______ ; ceux concernant la période de la pandémie de Covid-19 et notamment les précautions sanitaires à adopter ; ceux concernant le recrutement du nouvel administrateur ; la première version officielle du procès-verbal d’une audition devant la commission des finances ; les documents échangés au sujet des APM ; les échanges concernant la convention de départ de la recourante ; la liste des mandats et des rétributions octroyées à D______). D’autres n’existent manifestement pas ou semblent poser une question qui peut déjà être résolue avec les pièces produites (courriers de reproches ou d’injonction adressés à la recourante ; tous documents attestant des efforts de la recourante pour soutenir J______). Enfin, les agendas de la recourante et de B______ indiquant la reprise des réunions avec la magistrate en présentiel n’apporteraient aucun élément nouveau ni même utile à la solution du litige.
Les documents dont l’apport est demandé ne sont donc pas nécessaires pour trancher le litige, et leur production ne sera pas ordonnée.
3.2.4 Pour le surplus, la recourante s’est vu offrir la possibilité de faire valoir ses arguments oralement et par écrit devant l’enquêteur ainsi que par écrit devant la chambre de céans. Elle s’est ainsi exprimée de manière circonstanciée sur l'objet du litige et a produit les nombreuses pièces auxquelles elle s’est référée dans ses écritures. Il en va de même de la ville, qui a fourni l’ensemble des témoignages notamment. La chambre de céans dispose dès lors d'un dossier qui lui permet de statuer en connaissance de cause.
Par conséquent, il ne sera pas procédé aux mesures d'instruction sollicitées.
4. La recourante se plaint de la violation de son droit d’être entendue, ni la ville ni l’enquêteur n’ayant pris en compte ses arguments et les pièces produites. En outre, l'enquêteur avait refusé de réentendre J______ et d'entendre C______ et Aa______.
4.1 Le droit d’être entendu comprend également le droit d’obtenir une décision motivée. L’autorité n’est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; 141 V 557 consid. 3.2.1). Il suffit, de ce point de vue, que les parties puissent se rendre compte de la portée de la décision prise à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; 138 I 232 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_226/2024 du 15 novembre 2024 consid. 3.2).
4.2 En ville de Genève, la procédure de licenciement est régie par les art. 96 ss du statut du personnel de la ville (LC 21 151 ; ci-après : le statut) ainsi que par la LPA (art. 37 du statut).
Les membres du personnel ont la possibilité de s'exprimer par écrit sur les motifs invoqués à l'appui de la décision. Les membres du personnel ont également droit à une audition orale devant l'autorité compétente pour rendre la décision, ou une délégation de celle‑ci s'il s'agit du Conseil administratif, avec le droit de se faire assister (art. 96 al. 2 du statut).
Selon l’art. 97 du statut, lorsque l'instruction d'une cause le justifie, le CA peut confier une enquête administrative à une ou plusieurs personnes choisies au sein ou à l'extérieur de l'administration municipale (al. 1). La personne intéressée est informée par écrit de l'ouverture de l'enquête administrative et de son droit de se faire assister et représenter conformément à l'art. 9 LPA (al. 2). Au terme de l'enquête, le CA communique le rapport à la personne intéressée et lui impartit un délai pour se prononcer (al. 3).
4.3 En l’espèce, pour les mêmes motifs qui ont été exposés ci-avant, l’enquêteur pouvait renoncer à réentendre J______ et à entendre C______ et Aa______.
La ville s’est expressément fondée sur le rapport d’enquête, de 43 pages, pour prendre sa décision. Ce rapport est circonstancié et expose de façon claire les griefs reprochés à la recourante, sur la base notamment des nombreux témoignages recueillis.
En outre, contrairement à ce que soutient celle-ci, la ville n’a ignoré ni ses arguments ni les pièces qu’elle a produites et s’est prononcée sur ceux-ci. Elle a notamment indiqué que si la recourante avait répondu aux attentes sous l’ancienne législature, tel n’était plus le cas et que les nombreux témoignages contredisaient sa version, si bien que celle-ci et les pièces produites n’étaient pas à même de modifier l’appréciation de la situation par le CA. Cette motivation permettait également à la recourante de se rendre compte de la portée de la décision prise à son égard. Elle a d’ailleurs recouru contre elle en connaissance de cause, en développant longuement ses griefs.
Pour le surplus, au terme de l'enquête, le CA a communiqué le rapport à la recourante, qui a pu se prononcer sur celui-ci, conformément à l’art. 97 al. 3 du statut. Elle a également été entendue par une délégation du CA, à sa demande (art. 96 al. 3 du statut), avant que la ville ne prenne la décision querellée. La procédure prévue par celle-ci a donc été respectée.
Le droit d'être entendu de la recourante n’a donc pas été violé. Le grief sera ainsi écarté.
5. La recourante conteste l’existence d’un motif fondé de résiliation de ses rapports de travail.
5.1 En sa qualité d’employé de la ville, la recourante est notamment soumise au statut et à son règlement d’application du 14 octobre 2009 (REGAP ‑ LC 21 152.0).
5.2 Conformément à l’art. 34 du statut, après la période d’essai, un employé peut être licencié, par décision motivée du Conseil administratif, pour motif objectivement fondé pour la fin d’un mois, moyennant un délai de préavis de six mois dès la onzième année de service (al. 1 let. c). Le licenciement est contraire au droit s’il est abusif au sens de l’art. 336 CO ou s’il ne repose pas sur un motif objectivement fondé. Est considéré comme objectivement fondé tout motif dûment constaté démontrant que les rapports de service ne peuvent pas se poursuivre en raison notamment de (al. 2) : l’insuffisance des prestations (let. a) ; un manquement grave ou répété aux devoirs de service (let. b) ; l’atteinte à la personnalité d’un ou d’une membre du personnel (let. f).
Les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la ville et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 82 du statut). Les membres du personnel doivent notamment, par leur attitude, entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieures et supérieurs et leurs subordonnées et subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 83 let. a du statut).
5.3 Les communes disposent d'une grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu'elles entretiennent avec leurs agents. Ainsi, l'autorité communale doit bénéficier de la plus grande liberté d'appréciation pour fixer l'organisation de son administration et créer, modifier ou supprimer des relations de service nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci (ATA/960/2024 du 20 août 2024 consid. 4.2). Les rapports de service étant soumis au droit public, leur résiliation est toutefois assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.), de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) et de la proportionnalité (art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. ; ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.3 et 5.4 et les arrêts cités). Il en découle que le juge doit contrôler que les dispositions prises se tiennent dans les limites du pouvoir d'appréciation de l'autorité communale et qu'elles apparaissent comme soutenables (ATA/979/2025 du 9 septembre 2025 consid. 3.4 ; ATA/354/2024 du 12 mars 2024 consid. 4.2 ; ATA/983/2018 du 25 septembre 2018 consid. 3d).
5.4 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et qu’ils ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, ce principe interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 145 I 297 consid. 2.4.3.1 et les références citées). Traditionnellement, le principe de la proportionnalité se compose des règles d'aptitude – qui exigent que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/1094/2025 du 7 octobre 2025 consid. 5.10).
5.5 Selon la jurisprudence rendue dans le cadre de la fonction publique cantonale, l'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant d’une éventuelle faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1066/2025 du 30 septembre 2025 consid. 7.1 ; ATA/68/2024 précité consid. 2.5 ; ATA/1471/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/1219/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4c et les références citées). Il faut que le comportement de l'employé – dont les manquements sont aussi reconnaissables pour des tiers – perturbe le bon fonctionnement du service ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2019 du 24 août 2020 consid. 4.1 et 4.2). De jurisprudence constante, le fait de ne pas pouvoir s'intégrer à une équipe ou de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration est difficile ou impossible est de nature à fonder la résiliation des rapports de travail, quelles que soient les qualités professionnelles de l'intéressé (ATA/980/2025 du 9 septembre 2025 consid. 4.1 ; ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.3 et l'arrêt cité). Tel a également été jugé comme étant le cas des difficultés relationnelles répétées avec les collègues et la hiérarchie, émaillées d’incidents et d’emportements, mis en évidence par les évaluations successives et ayant fait l’objet d’entretiens, de rappels et d’accompagnements (ATA/980/2025 précité consid. 4.1 ; ATA/726/2024 du 18 juin 2024 consid. 6.4 ; ATA/1521/2019 du 15 octobre 2019 consid. 6 et 7).
5.6 Selon la jurisprudence rendue dans le cadre de la fonction publique cantonale, lorsqu’un reclassement revient à reporter dans un autre service des problèmes de comportement, il paraît illusoire et il peut y être renoncé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_839/2014 du 5 mai 2015 consid. 7.1). Toutefois, seules les circonstances particulières, dûment établies, peuvent justifier une exception au principe légal du reclassement et faire primer l’intérêt public et privé de nombreux employés de l’État sur l’intérêt privé, pourtant important, de la personne licenciée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_609/2023 du 24 mai 2024 consid. 4.1 ; ATA/239/2025 du 11 mars 2025 consid. 10.4 ; ATA/726/2024 du 18 juin 2024 consid. 7.6 ; ATA/71/2024 du 23 janvier 2024 consid. 6.4 et les arrêts cités).
5.7 En l'espèce, la ville reproche notamment à la recourante ses difficultés relationnelles multiples avec les collaborateurs du DSSP et les plaintes y relatives. Ce reproche a été repris par l'enquêteur.
5.7.1 Il ressort de plusieurs témoignages que la recourante entretenait de bonnes, voire très bonnes, relations avec certains de ses collaborateurs. Tel était notamment le cas de F______, E______, L______, O______, P______, T______, X______, U______, V______, Z______ et Y______. Certains d’entre eux ont même relevé les qualités professionnelles et humaines de la recourante.
Cependant, et contrairement à ce que soutient celle-ci, l'enquête administrative demandée par la ville a révélé que l’intéressée a également rencontré des difficultés relationnelles avec plusieurs collaborateurs.
Premièrement, J______, qui a été, à teneur du dossier, la personne la plus touchée par le comportement de la recourante à son égard, a indiqué ne plus être en état de supporter la présence de celle-ci et avoir subi « du mobbing et du harcèlement » de sa directrice depuis plusieurs années. Elle a décrit des épisodes durant lesquels la recourante lui a « hurlé dessus » et a tapé contre son bureau. Elle a également précisé que la recourante n'était jamais contente d'elle, qu'elle lui donnait des « ordres et des contre-ordres » et qu'elle lui avait mis une pression constante, ce qui l'avait fortement déstabilisée. Cette situation a eu des incidences physiques et psychiques importantes sur J______. Il ressort de son témoignage qu’elle a notamment eu de fortes migraines et des nausées et a dû réapprendre à se lever, à marcher et à se doucher. Elle était également angoissée par l'idée du retour de A______, ce que le certificat médical produit le 21 juin 2022 tend à confirmer. Elle a pour le surplus indiqué qu'elle évitait de monter à l'étage lorsque la recourante était dans son bureau, ce que H______ a confirmé.
Divers témoins ont confirmé le mal-être de J______, dû notamment à sa relation difficile avec la recourante. H______ a indiqué que R______ et Ai______ étaient venus le voir pour lui dire que J______ était en souffrance en raison du management de la recourante. R______ a confirmé ces propos, expliquant que J______ lui avait parlé de ses difficultés relationnelles avec la recourante et qu'elle avait essayé sans succès d’en parler à la directrice. Elle a également indiqué que la recourante répercutait son stress et sa pression sur J______ et qu'elle craignait de parler avec celle-là car elle ne voulait pas qu’elle adopte avec elle le même comportement qu'elle adoptait avec J______.
Par ailleurs, I______ et L______ ont indiqué avoir parfois vu J______ en détresse, en raison des reproches que la recourante lui adressait sur la qualité de son travail. M______ a également rapporté que la recourante avait adressé à J______ des reproches injustifiés.
Il est donc établi que la recourante a eu, durant une longue période (de 2018 à 2021), un comportement inadéquat avec J______.
Deuxièmement, bien que I______ et la recourante entretinssent globalement de bonnes relations, y compris sur le plan privé, I______ a indiqué qu'après sa période d'absence, la recourante avait rencontré des difficultés dans le « savoir‑être ». Selon elle, celle-ci avait changé d'attitude à son égard lorsqu'elle avait accepté le poste d'adjointe administrative de la magistrate. Une certaine distance s'était alors installée dans leurs rapports. La recourante lui faisait des remarques et des reproches. Elle cherchait « la petite bête », était plus « cassante » et employait un ton qui l'avait affectée. J______ a confirmé les propos de I______, dans le sens où celle-ci lui avait indiqué vivre des moments difficiles avec la recourante et même envisager de partir. Aussi, R______ a évoqué des « petits couacs » entre I______ et la recourante.
Il sera donc retenu que le comportement adopté par la recourante envers I______ était inadéquat ou à tout le moins problématique.
Troisièmement, N______ s'est plainte de relations difficiles avec la recourante et en particulier d'échanges de courriels « avec une posture qu'elle avait trouvée dénigrante à l'égard de sa fonction ». La chambre de céans constate toutefois que les courriels en question, qui ont été produits, ne contiennent aucun élément permettant que retenir que les propos de la recourante auraient été dénigrants, bien qu'ils aient été directs. En revanche, H______ et B______ ont confirmé que N______ s'était plainte d'un manque de soutien de la recourante mais également du fait qu'il était difficile de travailler avec elle.
Il sera donc retenu que la recourante et N______ ont rencontré des difficultés relationnelles, quand bien même N______ serait, selon la recourante, décriée et « émotionnelle » et bénéficierait d'une position privilégiée auprès de B______.
Quatrièmement, M______ s’est plainte, devant l’enquêteur, d’avoir reçu des reproches injustifiés oralement de la recourante et du fait que celle-ci adoptait un ton dur et cassant envers elle notamment. J______ a confirmé le mal-être de M______ en indiquant qu’elle l’avait accueillie à plusieurs reprises en pleurs dans son bureau. B______ et E______ ont également indiqué que M______ avait démissionné en raison du comportement de la recourante à son égard. Certes, X______ a déclaré que le départ de M______ avait été un soulagement. Il n’en demeure pas moins que les relations entre la recourante et celle-ci étaient, compte tenu de ce qui précède, empruntes d’un ton dur de la recourante envers M______.
Cinquièmement, K______ a indiqué avoir été affectée par un échange de courriels avec la recourante, ce que I______, J______ et R______ ont confirmé, et avoir ressenti les propos de la recourante comme une pression et une intimidation. Certes, K______ a également précisé que, dans l'ensemble, sa relation avec la recourante se passait bien, qu’elle se comportait convenablement avec elle, qu’elle était quelqu'un d’humain et qu’elles avaient pu s’expliquer à la suite de leur différend. Il n’en demeure pas moins que leur relation a été marquée par au moins un épisode ressenti comme difficile par K______.
Sixièmement, Q______ a expliqué qu’après la période des notes de frais et la moitié de la période correspondant à la pandémie de COVID-19, il avait senti s'instaurer une crispation dans sa relation avec la recourante, qui était devenue plus distante et lui avait fait parfois ressentir de la contrariété. Elle s’exprimait davantage par courriels, dont les propos étaient virulents. Ses courriels l'avaient attristé et particulièrement touché. B______ a confirmé que Q______ lui avait rapporté avoir rencontré des difficultés avec la recourante. Certes, Q______ a indiqué que la recourante avait été la première personne en ville à reconnaître son travail, qu’elle s'était pleinement investie pour lui obtenir une bonne classe salariale, que, durant les premières années, ils avaient eu une collaboration parfaite et qu’il s’était expliqué sur leurs différends, ce qui avait permis « d’aplanir le problème ». Il n’en demeure pas moins que leur relation a été marquée par des épisodes ressentis comme difficiles par Q______, à l’instar de ce qui s’est passé avec K______.
Septièmement, K______ a rapporté que Ac______ lui avait fait des confidences, entre 2018 et 2019, concernant des propos que la recourante aurait tenus à son égard sur un ton inadéquat. J______ a également confirmé que la recourante avait pu avoir un comportement inapproprié envers Ac______. Si celle-ci n’a certes pas été interrogée par l’enquêteur, même Z______, qui a pourtant fait l’éloge de la recourante, a déclaré que celle-ci avait été dure et injuste avec Ac______ dans le cadre d'échanges de courriels. Sur la base de ces déclarations, il y a donc lieu de retenir que la recourante a rencontré des difficultés relationnelles avec Ac______ également, ce que E______ a aussi confirmé.
De façon plus générale, L______, J______, R______ et I______ ont expliqué qu’elles évitaient de monter à l’étage où se situait le bureau de la recourante lorsque celle‑ci s’y trouvait. Plusieurs témoins, en particulier H______, B______, K______, L______, S______ et J______ ont également indiqué que l’ambiance était tendue et pesante au sein du département. Certains d’entre eux, notamment B______ et J______, ont estimé que le comportement de la recourante en était la cause. Il ressort en outre des témoignages de E______, H______, B______, K______, L______, J______ et I______ que l’ambiance était meilleure et plus détendue depuis la suspension de la recourante. Dès lors, il convient de retenir que l’attitude de la recourante a entraîné des conséquences négatives sur la dynamique de groupe au sein du département, certains ayant adopté une stratégie afin d’éviter le contact direct avec elle.
Enfin, il n’est pas contesté que les relations entre la recourante et B______ n’étaient pas bonnes, à tout le moins quelques mois avant la suspension de la recourante. Des tensions sont notamment apparues à propos de la gestion de la pandémie de Covid‑19, du retour des séances en présentiel et du « covid long » de la recourante. B______ lui a notamment reproché de l’avoir accusée d’être responsable de sa maladie. Il ressort de plusieurs témoignages qu’une sérieuse altercation a eu lieu à ce propos en octobre 2021. Si le sujet est sensible et complexe au vu du caractère inédit de la situation provoquée par la pandémie de Covid-19, au vu des conséquences importantes qu’a pu avoir le « covid long » sur la recourante et dans la mesure où les versions des intéressées sur les propos qui ont été échangés sur ledit sujet divergent, il n’en demeure pas moins que cette altercation et les tensions avec la magistrate sont un indice supplémentaire que la recourante rencontrait des difficultés relationnelles avec plusieurs membres du personnel.
Pour le surplus, J______ et R______ ont relevé que la recourante pouvait se contredire dans ses instructions et donner des ordres et des contre-ordres créant de la confusion, ce qui ne contribuait pas à instaurer de bonnes relations avec les collaborateurs et avait même pu avoir un effet déstabilisant sur eux.
Dans ces conditions, pris dans leur ensemble à tout le moins, les agissements répétés de la recourante envers plusieurs collaborateurs, – lesquels ont entraîné des conséquences négatives sur leur moral –, fondés sur plusieurs témoignages concordants – et non pas uniquement sur des rumeurs – et ayant fait l’objet d’un rappel oral par B______ en juillet 2021, sont des comportements inadéquats et contraires à son obligation d’entretenir des relations respectueuses avec ses collègues (art. 83 let. a du statut). Sa conduite était ainsi propre à ébranler le rapport de confiance avec son employeur, ce d’autant plus qu’en sa qualité de directrice du département, il lui incombait, en vertu de son cahier des charges (ch. 2.5), de structurer et diriger le département de manière à développer un esprit d’équipe et de qualité, propre à assurer un fonctionnement performant et harmonieux. En outre, le fait d’entretenir de bons rapports avec certains collègues n'habilitait par la recourante à adopter un comportement inadéquat avec d’autres.
5.7.2 Sous l’angle de la proportionnalité, la résiliation des rapports de service de la recourante est apte à adapter la composition du service aux exigences relatives au bon fonctionnement de celui-ci. Certains témoins ont du reste indiqué que l’ambiance était meilleure et plus détendue depuis que la recourante ne travaillait plus au DSSP.
Vu les difficultés relationnelles rencontrées par la recourante avec plusieurs de ses collaborateurs, aucune autre mesure n’était envisageable, y compris un changement d’affectation (art. 94 du statut). En effet, cette mesure, bien qu’elle soit moins incisive que le licenciement, n’est pas apte à atteindre le but visé. Un éventuel changement d’affectation aurait eu non seulement pour effet de reporter dans un autre service les problèmes de comportement observés mais aurait également été difficile à mettre en œuvre compte tenu de la fonction de directrice de la recourante. La ville pouvait donc y renoncer, étant précisé que le statut ne prévoit pas de procédure de reclassement.
Enfin, dans la pesée des intérêts, il y a lieu de tenir compte de l'intérêt de la recourante à conserver son emploi à la ville et à continuer d'être rémunérée. À cela s'ajoutent ses bons états de service, à tout le moins jusqu’en 2020, la durée relativement longue de ses relations de travail avec la ville (7.5 ans) et son âge (50 ans).
L’intérêt de la ville réside dans la nécessité d’employer du personnel entretenant des relations dignes et respectueuses avec les collaborateurs et les supérieurs. Cela est essentiel afin d’assurer la bonne marche du service. Cet intérêt public fondamental doit primer celui de la recourante à conserver son emploi.
Au vu de ce qui précède, la ville n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en mettant fin aux rapports de travail de la recourante.
Dans la mesure où les reproches adressés à l’intéressée concernant des difficultés relationnelles qu’elle a rencontrées avec plusieurs de ses collaborateurs suffisent ainsi, au vu des circonstances, à justifier la fin des rapports de travail, il n'est pas nécessaire d'examiner le bien‑fondé des autres reproches qui lui ont été adressés par la ville ni ses autres griefs. En particulier, il n’y a pas lieu d’analyser la qualité de son travail ni son expérience professionnelle avant son entrée à la ville, puisque le fait de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration est difficile ou impossible est de nature à fonder la résiliation des rapports de travail, quelles que soient les qualités professionnelles de l'intéressée.
Le grief sera donc écarté et le recours rejeté.
6. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2’500.-, comprenant la décision sur effet suspensif, sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
La valeur litigieuse au sens des art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) est supérieure à CHF 15'000.-.
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 5 mars 2025 par A______ contre la décision de la Ville de Genève du 3 février 2025 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 2'500.- à la charge de A______ ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature de la recourante ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Me Robert ASSAEL, avocat de la recourante, ainsi qu'à la Ville de Genève.
Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| le greffier-juriste :
J. RAMADOO
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| le président siégeant :
J.-M. VERNIORY |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le
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| la greffière :
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