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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3909/2024

ATA/1069/2025 du 30.09.2025 sur JTAPI/671/2025 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : LOI FÉDÉRALE SUR LES ÉTRANGERS ET L'INTÉGRATION;DROIT DES ÉTRANGERS;REGROUPEMENT FAMILIAL;AUTORISATION DE SÉJOUR;CONJOINT;ASSISTANCE PUBLIQUE;PRESTATION COMPLÉMENTAIRE;PERSONNE RETRAITÉE;RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO;INTÉRÊT PUBLIC;EXCÈS ET ABUS DU POUVOIR D'APPRÉCIATION
Normes : LPA.61; LEI.44.al1.letc; LEI.44.al1.lete; LEI.96.al1; CEDH.8
Résumé : Confirmation du rejet d’une demande de regroupement familial sollicitée par une ressortissante congolaise souhaitant s’établir en Suisse auprès de son mari titulaire d’un permis B. Retraité, son époux est au bénéfice d’une rente de vieillesse, complétée par des prestations complémentaires. La recourante ne produit aucun document permettant de démontrer ses efforts pour s’intégrer sur le marché du travail en Suisse. En outre, la recourante ne rend pas vraisemblable que, dans un avenir proche, elle serait à même de réaliser durablement un revenu suffisant, de sorte qu’elle ne dépendrait pas des prestations complémentaires versées à son époux. Les intérêts privés à pouvoir bénéficier d’une autorisation de séjour doivent s’effacer face à l’intérêt public à ce que les personnes auxquelles une telle autorisation est délivrée ne dépendent pas prestations complémentaires (cf. art. 44 al. 1 let. e LEI). Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3909/2024-PE ATA/1069/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 septembre 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 juin 2025 (JTAPI/671/2025)


EN FAIT

A. a. Ressortissant de la République démocratique du Congo (ci-après : RDC), B______, né le ______ 1956, est titulaire d’une autorisation de séjour depuis le 25 janvier 2011. Son permis B a été régulièrement renouvelé, pour la dernière fois jusqu’au 20 janvier 2027.

Il est au bénéfice d’une rente de vieillesse, qui est complétée de prestations complémentaires (ci‑après : PC) à tout le moins depuis le 1er janvier 2023.

B. a. Le 9 septembre 2019, à Kinshasa, B______ a épousé A______, ressortissante congolaise née le ______ 1979.

b. Le 28 septembre 2023, A______ a déposé auprès de l’Ambassade suisse de Kinshasa une demande de « visa pour regroupement familial ».

À l’appui de sa requête, elle a expliqué que son mari était malade et qu’elle souhaitait l’assister moralement et physiquement. Elle a produit un certificat médical établi le 3 mars 2022 par le docteur C______, spécialiste FMH en médecine interne générale. Son mari était « suivi pour des problèmes de santé » et « un regroupement familial lui serait favorable et nécessaire ».

c. Le 1er juillet 2024, l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a fait part de son intention de rejeter sa requête.

d. Faisant valoir son droit d’être entendue, A______, a précisé qu’après leur mariage, les époux avaient décidé d’élire domicile à Genève, lieu de résidence de son mari. Elle s’engageait à ne pas recourir à l’assistance publique en Suisse. En outre, les revenus issus de son activité lucrative suffiraient à ce que son époux ne bénéficie plus de PC.

e. Par courrier du 5 août 2024, B______, a précisé qu’il disposait d’un logement. Son épouse jouissait d’une bonne santé, était apte à travailler, communiquait essentiellement en français et s’engageait à ne pas solliciter l’assistance publique. Les époux, qui se devaient une assistance mutuelle, ne pouvaient concevoir leur mariage sous des toits séparés. L’OCPM était invité à prendre contact avec le Dr C______ afin de recueillir le maximum d’informations en vue de « justifier » la demande de regroupement familial.

f. Par décision du 14 octobre 2024, l’OCPM a rejeté la demande d’autorisation de séjour.

Les conditions énoncées à l’art. 44 al. 1 let. e de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’étaient pas remplies, B______ étant au bénéfice de PC. Aucun élément du dossier ne permettait de constater une prochaine prise d’emploi de la part de son épouse, qui serait à même de sortir le précité du service des PC. Par ailleurs, le fait de refuser l’octroi d’une autorisation de séjour dans le cas d’espèce n’était pas contraire à l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), dès lors que l’une des conditions cumulatives de l’art. 44 LEI n’était pas satisfaite.

C. a. Par acte du 21 novembre 2024, A______ a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) à l’encontre de la décision précitée, concluant en substance à l’octroi d’une autorisation de séjour.

Elle avait mené une vie de couple avec B______, qu’elle avait épousé lorsqu’il avait effectué un séjour à Kinshasa. Il convenait de tenir compte de leur choix de vie, de leur logement, de leur capacité à communiquer dans une langue nationale, ainsi que de son propre engagement à ne pas dépendre de l’aide sociale. La décision lui portait préjudice, ainsi qu’à son mari, au vu de son état de santé, étant précisé que le certificat médical produit attestait de ses problèmes médicaux et que le médecin ayant établi ce document était délié du secret médical. Enfin, la décision attaquée violait l’art. 8 CEDH.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours. B______ bénéficiait de PC et d’une rente de vieillesse. Aucun document n’était produit permettant de démontrer l’imminence ou la vraisemblance d’une prise d’emploi de la part de son épouse susceptible d’amener des ressources financières complémentaires au ménage.

c. Par réplique du 21 février 2025, la recourante s’est prévalue d’une situation d’ordre humanitaire, à savoir la dégradation de l’état de santé de son mari, qui résidait licitement depuis plus de dix ans en Suisse.

L’OCPM insistait sur les revenus insuffisants. Toutefois, il pouvait conditionner le renouvellement de son autorisation de séjour à la signature d’un contrat de travail. L’autorité intimée ignorait la réalité pratique des conditions de travail en Suisse, laquelle nécessitait une présence physique sur le territoire pour trouver un emploi. En maintenant sa position, l’OCPM supprimait le droit de séjour durable dont bénéficiait son mari. En outre, elle présentait toutes les capacités pour exercer une activité lucrative en Suisse, ce qui devait permettre au couple de ne pas recourir à l’assistance publique.

d. Le 8 mars 2025, la recourante a complété sa réplique en produisant un certificat médical du Dr C______ daté du 7 mars 2025, rédigé en des termes identiques à ceux du certificat établi le 3 mars 2022. Son mari était « suivi pour des problèmes de santé » et « un regroupement familial lui serait favorable et nécessaire ».

e. Par jugement du 18 juin 2025, le TAPI a rejeté le recours.

B______ était au bénéfice de PC. Si son épouse était admise à séjourner en Suisse, les époux seraient vraisemblablement contraints de solliciter l’aide sociale, la recourante n’ayant pas rendu vraisemblables des perspectives de gain à brève échéance. Il n’était, au demeurant, pas établi que sa présence en Suisse était nécessaire en raison des problèmes médicaux rencontrés par son mari.

D. a. Par acte du 23 juillet 2025, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant principalement à son annulation. Subsidiairement, elle a conclu à ce que la cause soit renvoyée au TAPI pour nouvelle décision.

Elle a repris les arguments développés devant le TAPI. Il était précisé qu’elle avait hérité de biens immobiliers en RDC lui permettant de dégager des revenus mensuels supplémentaires pour le couple. Les pièces justificatives pouvaient être fournies sur demande. Quant aux recherches de promesses d’emploi, elles étaient toujours en cours. En tout état, il était reproché à l’instance inférieure d’avoir agi en connivence avec l’OCPM et en toute inégalité de traitement.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Les arguments soulevés par la recourante n’étaient pas de nature à modifier sa position, étant essentiellement les mêmes que ceux développés devant le TAPI.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

d. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10). 

2.             Le litige porte sur le refus d’octroi d’une autorisation de séjour à A______.

2.1 En vertu de l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b) ; les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

2.2 La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour la RDC.

2.3 L’art. 44 LEI a été modifié avec effet au 1er janvier 2019. L’ajout de la condition selon laquelle la personne à l’origine de la demande de regroupement familial ne doit pas percevoir de PC constitue l’une des modifications nouvellement entrées en vigueur.

Selon l’art. 44 al. 1 LEI, le conjoint étranger du titulaire d’une autorisation de séjour ainsi que ses enfants étrangers de moins de 18 ans peuvent obtenir une autorisation de séjour et la prolongation de celle-ci aux conditions suivantes : ils vivent en ménage commun avec lui (let. a) ; ils disposent d’un logement approprié (let. b) ; ils ne dépendent pas de l’aide sociale (let. c) ; ils sont aptes à communiquer dans la langue nationale parlée au lieu de domicile (let. d) ; la personne à l’origine de la demande de regroupement familial ne perçoit pas de prestations complémentaires annuelles au sens de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30) ni ne pourrait en percevoir grâce au regroupement familial (let. e).

Cette disposition, par sa formulation potestative, ne confère pas un droit au regroupement familial (ATF 137 I 284 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_548/2019 du 13 juin 2019 consid. 4), l’octroi d’une autorisation de séjour étant laissé à l’appréciation de l’autorité (ATF 139 I 330 consid. 1.2).

2.4 Les PC sont des prestations des assurances sociales, qui ne relèvent pas de la notion d’aide sociale au sens strict (ATF 141 II 401 consid. 5.1 ; ATF 135 II 265 consid. 3.7; arrêts du Tribunal fédéral 2C_502/2020 du 4 février 2021 consid. 5.1 ; 2C_615/2019 du 25 novembre 2019 consid. 5.5 ; 2C_13/2019 du 31 octobre 2019 consid. 3.1).

Toutefois, de telles prestations représentent également des aides de l’État (arrêts du Tribunal fédéral 2C_ 615/2019 précité consid. 5.5 ; 2C_13/2019 précité consid. 3.1). C’est pourquoi il a été admis que l’on pouvait tenir compte, pour juger de la condition de l’absence de PC, des critères qui servent à évaluer la dépendance à l’aide sociale selon l’art. 44 al. 1 let. c LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_ 914/2020 du 11 mars 2021 consid. 5.10).

2.5  À teneur des directives et commentaire du Secrétariat d’État aux migrations (ci‑après : SEM), les moyens financiers doivent permettre aux membres de la famille de subvenir à leurs besoins sans dépendre de l’aide sociale (art. 44 al. 1 let. c LEI). Les moyens financiers doivent au moins correspondre aux normes de la Conférence suisse des institutions d’action sociale (ci-après : normes CSIAS). Les cantons sont libres de prévoir des moyens supplémentaires permettant de garantir l’intégration sociale des étrangers. Les éventuels revenus futurs ne doivent en principe pas être pris en compte. Ce principe ressort notamment du fait que les membres de la famille du titulaire d’une autorisation de séjour à l’année qui sont entrés en Suisse au titre du regroupement familial n’ont pas droit à l’octroi d’une autorisation de séjour. Lorsqu’une autorisation de séjour est malgré tout délivrée, les intéressés ont droit à l’exercice d’une activité lucrative. C’est pourquoi un éventuel revenu futur peut, à titre exceptionnel, être pris en compte lorsque ce revenu peut selon toute vraisemblance être généré à long terme (poste de travail sûr et réel et possibilité effective d’exercer une activité lucrative compte tenu de la situation familiale ; SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, état au 15 septembre 2025, ch. 6.4.1.3).

2.6 La personne qui demande le regroupement familial ne doit percevoir aucunes PC, ni en percevoir dans un proche avenir en raison de la réunion familiale (art. 44 al. 1 let. e LEI ; SEM, Directives et commentaires, op. cit., ch. 6.4.1.3).

2.7 Le regroupement familial visant à réunir une même famille, il faut prendre en compte la disponibilité de chacun de ses membres à participer financièrement à cette communauté et à réaliser un revenu. Celui-ci doit toutefois être concret et vraisemblable et, autant que possible, ne pas apparaître purement temporaire (ATF 139 I 330 consid. 4.1 = RDAF 2014 I 447 [rés.] ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1019/2018 du 11 décembre 2018 consid. 3.2.2).

2.8 Les conditions prévues à l’art. 44 al. 1 let. c et e LEI, relatives respectivement au recours à l’aide sociale et aux PC, visent toutes deux à éviter une charge pour les finances publiques et à préserver le bien-être économique du pays (arrêts du Tribunal fédéral 2C_ 914/2020 précité consid. 5.10 et les références citées). Dès lors, la compatibilité de l’art. 44 al. 1 let. e LEI avec l’art. 8 CEDH doit être évaluée de la même façon que pour la condition de l’art. 44 al. 1 let. c LEI liée à l’aide sociale et peut être reconnue pour les mêmes raisons (arrêts du Tribunal fédéral 2C_ 914/2020 précité consid. 5.10).

2.9 Aux termes de l’art. 8 CEDH, toute personne a notamment droit au respect de sa vie privée et familiale. Un étranger peut se prévaloir de l’art. 8 CEDH pour s’opposer à l’éventuelle séparation de sa famille. Pour qu’il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, l’étranger doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; ATF 137 I 284 consid. 1.3).

2.10 Le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’art. 8 § 1 CEDH n’est toutefois pas absolu. Une ingérence dans l’exercice de ce droit est possible selon l’art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu’elle soit prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. La mise en œuvre d’une politique restrictive en matière de séjour des étrangers constitue un but légitime au regard de cette disposition conventionnelle (ATF 137 I 284 consid. 2.1; ATF 135 I 153 consid. 2.2.1).

L’art. 8 CEDH n’emporte pas une obligation générale pour un État de respecter le choix par des immigrants de leur pays de résidence et d’autoriser le regroupement familial sur le territoire de ce pays (arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme [ci-après : ACEDH] Ahmut c. Pays-Bas, 28 novembre 1996, Rec. 1996‑VI, req. n° 21702/93, § 67) ; il ne consacre pas le droit de choisir l’endroit le plus approprié à la poursuite de la vie familiale (DCEDH Adnane c. Pays-Bas, du 6 novembre 2011, req. n° 50568/99 ; Mensah c. Pays-Bas, du 9 octobre 2001, req. n° 47042/99). Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue un droit d’entrée et de séjour, ni non plus, pour un étranger, le droit de choisir le lieu de domicile de sa famille (ATF 142 II 35 consid. 6.1 ; ATF 139 I 330 consid. 2 et les arrêts cités). Ainsi, lorsqu’un étranger a lui‑même pris la décision de quitter sa famille pour aller vivre dans un autre État, ce dernier ne manque pas d’emblée à ses obligations de respecter la vie familiale s’il n’autorise pas la venue des proches du ressortissant étranger ou la subordonne à certaines conditions (arrêts du Tribunal fédéral 2C_207/2017 du 2 novembre 2017 consid. 5.1 ; 2C_1172/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.1 ; 2C_1075/2015 du 28 avril 2016 consid. 3.1).

Il n’est pas concevable que, par le biais de l’art. 8 CEDH, un étranger qui ne dispose, en vertu de la législation interne, d’aucun droit à faire venir sa famille proche en Suisse, puisse obtenir des autorisations de séjour pour celle-ci sans que les conditions posées au regroupement familial ne soient réalisées (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 précité consid.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1075/2015 précité consid. 3.1). Sur ce plan, la condition d’absence de dépendance à l’aide sociale prévue par la LEI correspond au but légitime d’un pays au maintien de son bien-être économique, qui peut justifier une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie familiale (art. 8 § 2 CEDH). Le critère de l’existence de moyens financiers suffisants et donc de l’allègement de l’aide sociale et des finances publiques est reconnu par le droit conventionnel comme une condition préalable au regroupement familial (ACEDH Konstantinov c. les Pays-Bas, du 26 avril 2007, req. n°16351/03, § 50 [« bien-être économique du pays »] et Hasanbasic c. Suisse, du 11 juin 2013, req. n°52166/09, § 59).

2.11 Selon l’art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration.

2.12 En l’espèce, l’époux de la recourante est âgé de 69 ans et retraité depuis le 1er juillet 2021. Il ne dépend pas de l’aide sociale mais bénéficie d’une rente de vieillesse, complétée par des PC. En 2023, ses revenus s’élevaient à CHF 34’129.25, comprenant CHF 9’840.- de rente AVS et CHF 24’289.25 de PC.

Quant à la recourante, elle n’a produit aucun document permettant de démontrer ses efforts pour s’intégrer dans le marché du travail. Bien qu’elle affirme présenter toutes les capacités pour exercer une activité lucrative en Suisse, la recourante ne rend pas vraisemblable que dans un avenir proche, elle serait à même de réaliser durablement un revenu suffisant, de sorte qu’elle ne dépendrait pas des PC versées à son époux. L’argument selon lequel elle aurait hérité de biens immobiliers en RDC n’est pas plus convaincant, dans la mesure où celui-ci est mentionné en termes extrêmement vagues dans son écriture, sans davantage d’explications. Ainsi, la chambre de céans ne discerne pas en quoi ces biens, sis en RDC, ou les hypothétiques revenus qu’ils engendreraient, seraient suffisants pour lui permettre de ne plus dépendre des PC de son mari.

En outre, elle n’indique pas bénéficier d’une formation particulière qui lui permettrait de trouver rapidement un emploi en Suisse, ni même d’expériences professionnelles qu’elle pourrait valoriser et qui lui faciliteraient l’accès au marché de l’emploi. Enfin et surtout, elle indique que sa présence serait nécessaire pour prendre soin de son mari malade. Une telle occupation n’est pas compatible ou, en tout cas, compliquerait sa volonté d’exercer une activité lucrative.

Par ailleurs, comme l’a relevé à juste titre le TAPI, sans perspective de gain, le couple n’aurait vraisemblablement pas les moyens financiers suffisants pour subvenir à ses besoins sans dépendre de l’aide sociale, quand bien même la recourante s’est engagée par écrit à renoncer à cette éventualité.

Au regard de l’ensemble des circonstances du présent cas, les intérêts privés de la recourante à pouvoir bénéficier d’une autorisation de séjour doivent s’effacer face à l’intérêt public à ce que les personnes auxquelles une telle autorisation est délivrée ne dépendent ni de l’aide sociale ni de PC.

Dès lors que les conditions énoncées à l’art. 44 al. 1 let. e LEI ne sont pas réalisées, c’est à bon droit et sans abuser de son pouvoir d’appréciation que l’OCPM, dont la motivation est détaillée et conforme au dossier, a refusé de délivrer l’autorisation de séjour sollicitée.

3.             Sous l’angle de l’art. 8 CEDH, le raisonnement du TAPI est également exempt de défauts

En effet, la recourante n’a jamais disposé d’un quelconque droit de séjour en Suisse. Le couple n’y a jamais fait ménage commun. Ainsi, lors de la formation de l’union conjugale, le 9 septembre 2019, les époux ne pouvaient ignorer que le statut de la recourante, vis-à-vis des autorités migratoires suisses était précaire. En tout état, l’une des conditions cumulatives de l’art. 44 LEI, soit la non‑perception de PC, n’est pas remplie de sorte qu’elle ne saurait, par le biais de l’art. 8 CEDH, se voir délivrer une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

Mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

4.             Au vu de l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 juillet 2025 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 juin 2025 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, au Tribunal administratif de première instance, à l’office cantonal de la population et des migrations, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Siégeant : Michèle PERNET, présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MARMY

 

 

la présidente siégeant :

 

 

M. PERNET

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.