Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1076/2025 du 30.09.2025 ( DIV ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| 
 | POUVOIR JUDICIAIRE A/1345/2025-DIV ATA/1076/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 30 septembre 2025 2ème section | 
 | ||
dans la cause
A______ recourant
 
contre
DIRECTION DES FINANCES DE LA POLICE - DFP intimée
 
A. a. A______ était détenteur d’un motocycle de 125 cm2 de marque ______, n° de châssis 1______immatriculé GE 2______.
b. Le 29 octobre 2024, à 11h41, alors qu’il avait remonté par la gauche une file de véhicules à l’arrêt et s’était arrêté à la hauteur d’un camion, à cheval sur la ligne longitudinale continue, le feu était passé au vert et il avait démarré en même temps que le camion en observant une distance insuffisante, percutant le camion puis chutant et se blessant légèrement.
Il avait été ausculté par les ambulanciers, qui ne l’avaient pas pris en charge.
Une patrouille routière de la police était arrivée sur place à 12h35.
La mise en fourrière de la moto avait été ordonnée, une dépanneuse appelée, et la moto avait été emmenée au garage.
c. Le 11 novembre 2024 à 10h24, la moto a été acheminée au service de la fourrière des véhicules (ci-après : SFV), du département des institutions et du numérique (ci‑après : DIN).
d. Le ______ 2024, le SFV a invité par courrier A______ à reprendre son véhicule et les effets personnels s’y trouvant éventuellement dans un délai de 30 jours à compter de la notification. À l’échéance de ce délai, si le véhicule n’était pas repris, une sommation serait publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), et à l’échéance d’un nouveau délai de 30 jours, le véhicule serait détruit aux frais de son détenteur.
e. La sommation a été publiée dans la FAO le ______ 2024.
f. Le 19 février 2025, le SFV a établi un état des émoluments et frais qu’il a adressé à la direction des finances de la police, et a fait détruire la moto.
g. Par pli simple du 10 mars 2025, la direction des finances de la police a adressé à A______ une facture n° 3______ d’un montant de CHF 1'560.- correspondant aux frais de mise en fourrière, de garde et de dépannage de la moto.
B. a. Par acte remis à la poste le 15 avril 2025, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la facture, concluant à son annulation.
Il était diplomate et n’avait jamais causé aucun accident ni été impliqué dans aucun accident. L’accident avait failli lui coûter la vie, car il avait été percuté par un gros camion et traîné sur l’asphalte et s’était retrouvé coincé sous le véhicule entre les roues avant et arrière. Il saignait abondamment de la jambe gauche et des passants l’avaient extrait de dessous le camion. Il avait 80 ans et n’avait jamais été impliqué dans un accident. Il était dans un état de choc traumatique et avait été transporté dans l’ambulance pour recevoir des soins.
Un agent de police l’avait informé qu’un camion était en route pour enlever sa moto, laquelle devait être envoyée à la fourrière comme une perte totale destinée à la destruction. L’agent était cependant conscient que sa moto était assurée et il aurait pu lui suggérer d’appeler un dépanneur pour l’amener dans un centre de réparations. Au lieu de cela, il l’avait déclarée perte totale. Étant donné son état psychologique à ce moment-là, il aurait dû être informé que la proposition de l’agent n’était qu’une option parmi d’autres. Il contestait son jugement sur l’état de la moto, que seul un mécanicien qualifié aurait pu établir.
b. Le 22 mai 2025, le DIN a conclu au rejet du recours.
Le recourant n’avait été que légèrement blessé. Il avait été ausculté par les ambulanciers mais n’avait pas été pris en charge par l’ambulance. Le policier intervenu sur le lieu de l’accident n’avait jamais affirmé que la moto devait être envoyée à la fourrière « comme une perte totale destinée à la destruction », mais indiqué au recourant que son véhicule était complètement endommagé et n’était en l’état pas autorisé à circuler sur la voie publique. Il avait informé le recourant qu’une dépanneuse d’B______ (ci-après : B______) allait prendre en charge son véhicule et que celui-ci serait tenu à sa disposition dans le garage du dépanneur à la route du ______ à ______ pendant dix jours pour lui permettre de le récupérer et de mandater un expert pour le faire expertiser, ajoutant que passé ce délai le véhicule serait envoyé au SFV.
Comme le recourant était choqué par l’accident, le policier l’avait appelé quelques jours plus tard pour lui expliquer à nouveau la procédure et s’assurer qu’il avait bien compris les démarches à accomplir.
Le 14 novembre 2024, le recourant s’était présenté au SFV pour prendre des renseignements et indiquer qu’il allait prendre contact avec le policier intervenu le jour de l’accident pour lui demander ce qu’il devait faire.
Il n’avait accompli aucune démarche pour récupérer sa moto, que ce soit auprès d’B______ ou du SFV.
c. Le recourant n’a pas répliqué dans le délai imparti au 26 juin 2025.
d. Le 1er juillet 2025, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le recours porte sur le bien-fondé de la facture du 10 mars 2025.
2.1 Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas la compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d’espèce.
Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).
2.2 Selon l’art. 54 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), lorsque la police constate que des véhicules sont en circulation sans y être admis, que leur état ou leur chargement présente un danger ou qu’ils causent une pollution sonore évitable, elle les empêche de continuer leur course. Elle peut saisir le permis de circulation et, s’il le faut, le véhicule.
2.3 Sous la note marginale « enlèvement, saisie et mise en fourrière », l’art. 11 let. i de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 (LaLCR - H 1 05) prévoit que sont enlevés, saisis ou mis en fourrière les véhicules n’étant plus autorisés à circuler en vertu du droit fédéral.
2.4 Selon l’art. 59 de la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05) et sous la note marginale « frais d’intervention », lorsqu’un administré, par son comportement contraire au droit, a justifié l’intervention de la police, celle-ci lui en facture les frais (al. 1) ; lorsque l’intervention résulte de circonstances qui la rendent nécessaire ou d’une demande particulière, la police peut en facturer les frais (al. 2) ; les frais d’intervention de la police font l’objet d’un tarif établi par le Conseil d’État (al. 3).
2.5 Selon l’art. 1 al. 2 du règlement sur les émoluments et frais des services de police du 24 août 2016 (REmPol - F 1 05.15), les frais et émoluments liés aux interventions et prestations des services de police peuvent être mis à la charge des personnes qui les ont provoquées ou sollicitées.
Selon l’art. 2 REmPol, En cas d'intervention ou de prestations, sur ordre de la police, d'une entreprise tierce, celle-ci adresse directement sa facture aux personnes qui les ont provoquées (al. 1). Les frais d'enlèvement de véhicules ordonnés par la police et exécutés par des dépanneurs privés sont facturés conformément au tarif annexé (al. 2).
L’art. 11 REmPol détaille les frais de fourrière pour ce qui concerne les véhicules.
2.6 En l’espèce, l’intimée réclame le paiement de CHF 1'560.- au recourant.
Ce dernier ne conteste pas le calcul du montant de cette facture, ni les différents postes la composant, soit le dépannage (CHF 710.-), la mise en fourrière (CHF 250.‑) et la garde de la moto durant 40 jours à CHF 15.- par jour (CHF 600.‑).
Les deux derniers postes de la facture (mise en fourrière et garde) correspondent à ceux prévus à l’art. 11 let. b et c ch. 3 REmPol, le troisième (dépannage) ayant été facturé par le prestataire privé mis en œuvre et répercuté par la police.
Il peut être observé qu’entre le 11 novembre 2024, date de la mise en fourrière, et le 19 février 2025, date de la destruction de la moto, plus de 40 jours se sont écoulés, de sorte que le décompte opéré pour établir la facture est favorable au recourant.
Le recourant se plaint de ne pas avoir été informé sur les lieux de l’accident qu’il pouvait appeler un dépanneur. Il ressort toutefois des explications de l’intimée, qu’il ne remet pas en cause, que le policier l’a informé de la procédure puis l’a rappelé quelques jours plus tard pour lui répéter les informations.
Le recourant se plaint que le policier lui aurait affirmé que sa moto avait subi une perte totale. Cette assertion est toutefois contestée par l’intimée. Toutefois, même si le policier avait émis cette opinion, celle-ci serait sans effet sur la conformité de la procédure suivie.
En effet, le recourant ne conteste pas la fixation du prix du dépannage. Il ne soutient pas s’être rendu au garage ni y avoir dépêché un expert pour évaluer l’état de sa moto. Il ne prétend pas non plus qu’il aurait ordonné des travaux sur son véhicule, repris celui-ci ou ordonné de le faire déplacer dans un garage de son choix.
Le recourant semble ensuite avoir réagi au courrier de l’intimée du 12 novembre 2024, puisqu’il s’est rendu au SFV pour y prendre des renseignements. Toutefois, il n’a pour autant pas donné suite aux indications du courrier du 12 novembre 2025, puisqu’il n’a alors ni repris ni fait reprendre son véhicule et ses effets personnels dans les 30 jours à compter de sa notification.
Enfin, le recourant ne soutient pas avoir réagi à la sommation publique parue dans la FAO le ______ 2024 – alors même qu’il été averti dans le courrier du 12 novembre 2024 qu’une sommation serait publiée dans cet organe en cas d’inaction de sa part. Il ne soutient pas qu’il aurait repris possession de sa moto ni tenté de le faire dans le délai imparti.
Ce n’est finalement qu’à réception de la facture que le recourant s’est manifesté, en formant un recours.
Il ressort des éléments qui précèdent que l’intimée a correctement appliqué la procédure et établi et notifié la facture de manière conforme à la loi et sans excès ni abus de son pouvoir d’appréciation.
Mal fondé, le recours sera rejeté.
3. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
 LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 15 avril 2025 par A______ contre la décision de la direction générale des finances de la police du 10 mars 2025 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 200.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à la direction des finances de la police.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| la greffière-juriste : 
 
 M. MARMY 
 | 
 | le président siégeant : 
 
 C. MASCOTTO | 
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le 
 
 
 
 
 | 
 | la greffière : 
 
 
 
 |