Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/503/2025 du 06.05.2025 ( FORMA ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/3862/2024-FORMA ATA/503/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 6 mai 2025 1ère section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Me Alexandre ALIMI, avocat
contre
UNIVERSITÉ DE GENÈVE intimée
A. a. A______, né le ______ 1979, de nationalité algérienne et de langue maternelle arabe, a été admis à participer au programme « B______ académique » (ci-après : programme B______) de l’Université de Genève (ci-après : l’université) lors des années académiques 2021/2022 à 2023/2024.
Le programme vise à valoriser et renforcer les compétences des personnes réfugiées, des personnes titulaires d’un permis B et liées au regroupement familial et des Suisses de retour de l’étranger en leur facilitant l’accès au monde académique. Il est proposé en partenariat avec le bureau de l’intégration des étrangers du canton de Genève.
Il s’agit d’une passerelle dans le cadre de laquelle les participants sont inscrits en tant qu’auditeur libre pour effectuer une mise à niveau en français (module 1 et une partie du module 2) et/ou poursuivre des cours dispensés par ses facultés (une partie du module 2 et module 3).
Les auditeurs du programme B______ sont admis à suivre des cours et à passer des évaluations. Des équivalences peuvent être obtenues, à certaines conditions.
b. A______ a suivi, dans le cadre du module 3, durant l’année académique 2023/2024, le cours de « traduction, révision et post-édition FR/AR » (ci-après : le cours), dispensé au semestre de printemps par la faculté de traduction et d’interprétation (ci-après : FTI).
Le cours est évalué par un travail de séminaire à rendre pendant le semestre, représentant 30% de la note finale, et un examen écrit de trois heures à effectuer sur un ordinateur institutionnel, valant 70% de l’évaluation finale. Si le résultat obtenu au travail de séminaire est inférieur à 4, seul l’examen écrit est pris en compte lors de la session de rattrapage (100% de la note finale).
c. Le 20 mai 2024, l’étudiant a transmis à C______, chargé d’enseignement suppléant, son travail de séminaire, lequel a été sanctionné d’une note de 3.5.
d. Le 10 juin 2024, l’étudiant a envoyé un message WhatsApp sur le groupe des étudiants du cours précisant avoir « reçu aujourd’hui la correction de [s]on travail de séminaire, mais [il devait] avouer qu’[il] ne compren[ait] pas bien la méthode de correction de [leur] professeur. Pour y voir plus clair, [il l’avait] contacté par courriel en lui demandant de partager avec [lui] un modèle de traduction correcte de l’article de presse qu’il a[vait] pris comme référence, ainsi que [leurs] travaux corrigés. Cela [l]’aiderait à mieux comprendre sa méthode de correction et à identifier [s]es erreurs. [Il] demand[ait] à [leur] enseignant de bien vouloir partager toutes les corrections ici dans le groupe, afin qu’[ils] puiss[ent] tous en bénéficier ».
En parallèle, par courriel, A______ a demandé à C______ les corrigés des copies des autres étudiants et la traduction type du texte de séminaire.
e. Par réponse du même jour, l’enseignant a précisé ne pas être autorisé à partager avec lui les corrections des autres étudiants. Il transmettait la grille d’évaluation de l’unité arabe. Les corrections avaient été revues et validées par sa collègue, la professeure D______. La même grille avait été appliquée tout au long de l’année pour les devoirs des étudiants et serait également utilisée lors du prochain examen.
Il précisait : « je n’ai pas apprécié le ton agressif, accusateur et rude que vous avez utilisé sur le groupe WhatsApp, ce qui m’a obligé à le quitter. Vous avez tenté de monter les étudiants contre moi à des fins personnelles ce qui est indigne d’un étudiant universitaire. Je ne répondrai plus à aucun e-mail de votre part directement. Vous devrez passer par l’administration si vous avez d’autres questions ».
f. Par courriel du 10 juin 2024 adressé à D______, l’étudiant a relevé que « la réponse de C______ à mon courriel a été très agressive et contenait des accusations infondées. D’ailleurs, recevoir son courrier à la veille de l’examen m’a causé un stress considérable (…). Il a réussi à me mettre dans un état psychologique lamentable la veille de l’examen, alors que mon objectif était simplement de comprendre sa méthode de correction et d’analyser les erreurs de mes camarades afin de bien travailler le jour de l’examen ».
g. Le 11 juin 2024, l’étudiant s’est présenté à l’examen écrit de fin de semestre. Il a obtenu la note de « 1.5 ».
h. Le 13 juin 2024, il a sollicité de C______ la rectification de sa note de séminaire. Les 15 erreurs de « catégorie 0.5 » induisaient une note de 4.5 et non 3.5.
i. Le relevé de notes du 28 juin 2024 mentionne six résultats obtenus entre les sessions d’examen de février 2023 et juin 2024 dont les disciplines « Droit A/AR 1 », seule suffisante avec la note de 4.0, octroyant quatre crédits à l’étudiant et « traduction, révision et post édition FR/AR », la note finale étant de 2 (combinaison des notes de 3.5 au travail de séminaire et 1.5 à l’examen écrit).
j. Le 12 juillet 2024, A______ a fait opposition à l’évaluation de sa note de séminaire dans le cours « traduction, révision et post édition FR/AR » (ci‑après : l’évaluation).
Il estimait avoir bien travaillé et mériter plus que la note de 3.5. Il contestait l’application du barème que l’enseignant lui avait transmis. L’obligation d’anonymisation n’avait pas été respectée, l’utilisation du mode de révision sur Word laissant apparaître son nom. Cette problématique lui avait fait perdre du temps durant l’examen et avait impacté sa concentration.
L’étudiant avait été hospitalisé en urgence le 16 juillet 2024 au sein du service de chirurgie viscérale. Il avait été en incapacité de travail totale pour maladie jusqu’au 4 août 2024.
k. Le 26 septembre 2024, dans le cadre de l’instruction de l’opposition, D______ et C______ ont détaillé par écrit leur notation.
L’analyse, une seconde fois, de la copie de l’étudiant ne modifiait pas les notes. La nature et la gravité des fautes de sens et d’expression relevées dans les deux copies indiquaient clairement que les rendus de l’étudiant étaient très loin d’atteindre le niveau minimum requis en arabe pour réussir la traduction. L’importance était donnée à la correction de l’erreur et non la comptabilisation des points. Il n’y avait pas eu rupture de l’anonymat, aucun nom d’utilisateur ne s’affichant sur les révisions proposées par les étudiants.
Étaient joints, en annexe, notamment l’analyse de la correction du travail de séminaire comprenant des commentaires détaillés de la traduction. Le document se terminait par la mention que « En conclusion, la traduction [était] bourrée de fautes de grammaire graves, y compris des constructions alambiquées, des expressions non idiomatiques, des calques, etc, qui rend[aient] le texte en arabe presque incompréhensible et illisible pour un arabophone qui ne li[sait] pas le français, et certainement loin du niveau exigé pour une Ma[îtrise] en traduction. La correction du travail de séminaire a[vait] été relue par la jurée qui a[vait] estimé qu’au vu du nombre de fautes graves, la note devait être baissée. Pour ne pas décourager l’étudiant, la note [était] confirmée ».
l. Parallèlement, A______ a passé l’examen, constitué uniquement de l’écrit, en seconde tentative, à la session d’août/septembre 2024. Il a obtenu la note de 2.75.
Il n’a pas contesté le résultat.
m. Par décision du 17 octobre 2024, la doyenne de la faculté a rejeté l’opposition du 12 juillet 2024.
La note finale de 2.0 était la moyenne entre l’examen passé en juin 2024 auquel il avait obtenu la note de 1.5, valant 70%, et le travail de séminaire évalué à 3.5, comptant pour 30%. La note souhaitée de 4.5 pour le travail de séminaire ne lui permettrait pas non plus d’obtenir la moyenne exigée.
Le collège des professeurs, sur la base du travail réalisé par la commission d’opposition, avait examiné avec attention si la correction du travail de séminaire et de l’examen de traduction avait été effectuée dans le respect de l’égalité de traitement et si son allégation de « biais appréciatif » était fondée. Sur la base du rapport détaillé du jury de l’examen, il avait considéré que tel n’était pas le cas. Par ailleurs, entendu par la commission d’opposition, le jury avait confirmé que la quantité d’erreurs grammaticales et syntaxiques graves ainsi que de maladresses dans sa copie était trop importante pour estimer que l’expression était maîtrisée et que les compétences étaient acquises. Après analyse des réponses du jury, le collège des professeurs avait constaté que le jury avait appliqué de manière satisfaisante la grille d’évaluation de l’unité d’arabe sans violer le principe d’égalité. L’autoévaluation de l’étudiant ne se fondait sur aucun élément probant qui l’autoriserait à remettre en cause l’appréciation de sa copie par le jury. La copie avait été anonymisée dans la mesure du possible.
n. À la rentrée académique 2024/2025 A______ s’est immatriculé, au titre d’étudiant régulier, en maîtrise en traduction.
o. Le 21 novembre 2024, l’étudiant a sollicité un congé pour les semestres d’automne et de printemps de l’année académique 2024/2025.
B. a. Par acte du 20 novembre 2024, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition du 17 octobre 2024. Il a conclu à son annulation, à l’annulation de la note de 3.5 du travail de séminaire du 20 mai 2024 et, cela fait, à ce qu’il soit dit qu’il avait obtenu 5.5 audit travail, ainsi qu’à l’annulation puis la réévaluation de la note de 1.5, ainsi qu’à l’annulation de la note finale de 2 et sa correction en conformité avec le 5.5 du travail de séminaire. Subsidiairement, la cause devait être envoyée à l’autorité inférieure.
La FTI avait commis une erreur de calcul dans l’évaluation de son travail de séminaire. La note de 5.5 était attribuée si le candidat comptabilisait moins de 8 points négatifs. Or, il avait obtenu un total de 7.5 points négatifs. Les faits avaient été donc constatés de façon inexacte.
L’examen de juin 2024 du cours n’avait pas été anonymisé, ce que la décision querellée ne contestait pas. Elle évoquait un supposé problème d’ordre technique. Or la « Conférence Universitaire des Associations d'Etudiant.e.x.s, association faîtière et syndicat des étudiant.e.x.s » (ci-après : la CUAE) avait confirmé la possibilité d’anonymiser un tel examen. L’autre cours dispensé par le même professeur l’avait d’ailleurs été.
Le défaut d’anonymisation avait eu des conséquences, compte tenu de son conflit avec C______. L’art. 18A de la loi sur l'université du 13 juin 2008 (LU - C 1 30) avait été violé, à l’instar des principes d’égalité de traitement et de l’interdiction de l’arbitraire, lors des évaluations tant du travail de séminaire que de l’examen écrit.
b. L’université a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Les évaluations réussies et travaux pratiques effectués en qualité d’auditeur ne donnaient pas droit à l’obtention de crédits ECTS. L’intéressé n’avait donc pas d’intérêt à recourir puisqu’une note insuffisante dans le cadre du programme B______ était sans incidence sur l’ensemble des droits dont disposait l’étudiant dans le cadre de sa poursuite d’études au sein de la maîtrise universitaire en traduction auprès de la FTI. Par ailleurs, c’était à tort que la FTI avait mentionné la voie de l’opposition. Enfin la note de 2.75 obtenue en seconde tentative, à la session d’août 2024, à laquelle l’étudiant ne s’était pas opposé, remplaçait en tous les cas la note finale de 3.25 obtenue en juin 2024.
c. Dans sa réplique, le recourant a relevé que l’autorité intimée avait déposé sa réponse hors délai. Celle-ci avait ainsi eu plus de temps pour faire valoir ses arguments et observations. Le principe d’égalité des armes avait été violé. Il avait qualité pour recourir dès lors qu’il obtiendrait des crédits en cas de succès à ses examens comme l’attestait notamment le relevé de notes du 28 juin 2024. Il relevait toutefois « avec effarement » que la note à son examen écrit du cours « Traduction, révision et post-édition » de la session de juin 2024 était de 3.25 et non de 1.5 tel qu’évoqué par l’autorité intimée. Combinée à la note réelle qu’il aurait dû obtenir pour son travail de séminaire de 5.5, la moyenne pondérée était de 3.925 soit 4.0. Il modifiait ses conclusions en conséquence : la note de 1.5 devait être annulée et, cela fait, il devait être constaté qu’il avait obtenu 3.25.
d. Dans une duplique spontanée, l’université a contesté que son écriture devait être écartée pour un jour de retard.
L’étudiant avait effectivement obtenu 3.25 à l’examen de juin 2024. Le relevé de notes serait rectifié, la note finale, combinée avec le travail de séminaire, étant de 3.25 au lieu de 2.0. Elle regrettait l’erreur de transmission initiale commise par les enseignants et la tardiveté de ce constat et priait l’étudiant de bien vouloir l’en excuser.
e. En réponse à l’interpellation de la juge déléguée, quant aux motifs pour lesquels sur le relevé de notes rectifié du 26 février 2025 n’apparaissaient plus les quatre crédits acquis par l’étudiant selon le relevé de juin 2024, l’université a précisé que lors de la première émission du relevé de notes, aucun crédit n’aurait dû apparaître. De même, les voies de droit avaient été supprimées, les cours suivis en tant qu’auditeur au programme B______ n’étant pas sujets à opposition. Le suivi des cours dans le programme passerelle permettait aux participants de se familiariser avec des matières qui se trouveraient par la suite dans un programme d’études, s’ils s’immatriculaient à l’université. La réussite de ces enseignements était constatée lors de leur passation en qualité d’auditeur. Ils pouvaient ensuite faire l’objet de demande d’équivalence auprès des hautes écoles dans le cadre d’une immatriculation/admission effectivement en leur sein et conformément à leur réglementation. S’il n’était pas réussi en qualité d’auditeur, l’étudiant n’en subissait aucun préjudice. En tous les cas, à teneur du nouveau relevé de notes émis pour la session de juin 2024 en qualité d’auditeur, la note de « traduction, révision et post édition » avait été remplacée par 2.75, obtenue en seconde tentative à la session d’août/septembre 2024, toujours en qualité d’auditeur du programme B______.
f. Dans une ultime écriture, l’étudiant a relevé ne pas être un auditeur libre ordinaire au sens du statut de l'université adopté le 16 mars 2011, approuvé par le Conseil d’État le 27 juillet 2011 (ci-après : le statut). En sa qualité de bénéficiaire du programme B______ il pouvait bénéficier de « crédit ECTS virtuel » ce que confirmait le programme académique B______ et, par téléphone, sa permanence. L’autorité intimée avait par ailleurs confirmé, le 6 mars 2025, que « si la réussite de ces enseignements était constatée lors de leur passation en qualité d’auditeur, ces derniers pouvaient faire l’objet de demande d’équivalence auprès de hautes écoles ». Il disposait ainsi d’un intérêt juridique à recourir. La chambre administrative devait interpeller ladite permanence.
g. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
h. Les arguments des parties et le contenu des pièces seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.
1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA ‑ E 5 10 ; art. 43 al. 2 LU ; art. 36 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE).
L’autorité intimée a soulevé plusieurs problématiques, contestant la recevabilité du recours. Ces questions souffriront de demeurer indécises, y compris celle de savoir si la note de la session d’août 2024 a remplacé celle de juin 2024, dès lors qu’en tous les cas le recours doit être rejeté pour les motifs qui suivent.
2. Il ne sera pas donné suite à la demande du recourant d’écarter de la procédure les écritures de l’autorité intimée datées du 20 janvier 2025, mais déposées le lendemain, soit un jour après le délai accordé par la juge déléguée, car il ne s’agit que d’un délai d’ordre et que le dépassement n’est que d’un jour (ATA/386/2011 du 21 juin 2011 consid. 2).
3. Le recourant conteste la note obtenue lors de la session d’examens de juin 2024 au cours « traduction, révision et post-édition FR/AR ».
Il n’est pas contesté que la note est composée de deux évaluations, à hauteur de 70% pour l’examen écrit, et de 30% pour la note de séminaire.
Initialement fixée à 1.5, l’université a reconnu l’erreur dans la transmission de la note de l’examen écrit et l’a rectifiée à hauteur de 3.25, acquiesçant aux dernières conclusions du recourant sur ce point. La note finale, combinaison de la note de séminaire et de l’examen écrit, a ainsi été modifiée, passant de 2.0 dans le relevé de notes du 28 juin 2024 à 3.25 dans celui établi le 26 février 2025.
Seule reste litigieuse l’évaluation du séminaire pour lequel l’étudiant a obtenu 3.5.
4. Le recourant allègue que les faits auraient été constatés de façon inexacte et incomplète. La faculté aurait commis une erreur de calcul dans l’évaluation de son travail de séminaire. Selon la correction, ledit travail présentait 7.5 erreurs de « type 0.5 », ce qui devrait lui valoir la note de 5.5 selon la grille d’évaluation.
4.1 Inscrit en tant qu’auditeur du programme B______ au cours de traduction, révision et post édition lors du semestre d’automne 2023/2024, la passation, la correction et la notation de l’évaluation contestée est régie, en sus de la LU et du statut, par le règlement d’études des maîtrises universitaires en traduction et du certificat complémentaire en traduction de la FTI du 19 septembre 2022 (ci‑après : RE) ainsi que par le plan d’études des maîtrises universitaires en traduction de la FTI applicable à l’année académique 2023/2024 (ci-après : PE).
4.2 Les connaissances des étudiants sont évaluées par des notes allant de 0 à 6. La notation s’effectue au quart de point. La note suffisante est 4 (art. 18 al. 3 RE).
4.3 À teneur du PE, le cours de traduction, révision et post édition est évalué par un examen écrit d’une durée de trois heures. Les étudiants disposent de la possibilité d’effectuer un travail de séminaire représentant 30% de la note finale du cours. Si le résultat obtenu au travail de séminaire est inférieur à 4, seul l’examen écrit est pris en compte lors de la session de rattrapage (100% de la note finale).
4.4 En l’espèce, dans le document explicatif du 26 septembre 2024 à l’attention de la commission des oppositions, la professeure et le chargé d’enseignement ont détaillé les raisons de la note de 3.5 du séminaire de l’étudiant. Ils ont notamment relevé que l’évaluation avait été menée de façon impartiale, en appliquant la grille d’évaluation de référence de l’unité arabe, que la relecture de la jurée avait confirmé l’évaluation établie et les notes accordées, que les mêmes critères objectifs avaient été appliqués pour tous les étudiants et dans toutes les copies et que l’analyse, une seconde fois, de la copie de l’étudiant ne donnait pas lieu à une modification des notes. Ils ont insisté sur le fait que « la nature et la gravité (plutôt que le simple décompte) des fautes de sens et d’expression » relevées dans les deux copies indiquaient clairement que les rendus de l’étudiant étaient très loin d’atteindre le niveau minimum requis en arabe pour réussir la traduction.
Ils ont de même détaillé la démarche « formative sur la base de la typologie d’erreur décrite dans la grille » suivie tout au long du semestre et ont insisté sur le fait que cette approche était clairement communiquée au début de l’année et suivie durant tout le semestre. La méthode était d’ailleurs utilisée tant dans le travail de séminaire que pour l’examen écrit. Ils rappelaient que les copies étaient corrigées de sorte que l’importance était donnée à la correction de l’erreur et non à la comptabilisation des points.
Les deux examinateurs ont surtout joint en annexe une analyse de la correction du travail de séminaire détaillant les fautes. Ainsi, à titre d’exemple, la première des 20 remarques porte sur la traduction du titre. La professeure relève deux fautes : « le fait de commencer par un verbe (donnant au titre l’allure d’un début de paragraphe), et la mauvaise traduction de l’expression " tomber dans l’oubli "». Elle précise « qu’en appliquant la grille, [elle] compte deux fautes ».
Au vu de ce document explicatif et de la copie d’examen corrigée, il serait erroné de ne retenir que 7.5 fautes. Les examinateurs détaillent à tout le moins 22.5 fautes, représentant selon la grille la note de 3.5. Ceci correspond aux corrections, en rouge, du travail de séminaire : si l’annotation « -0,5 » figure effectivement à côté de certaines corrections, d’autres ne font mention d’aucun point. Ainsi, le seul cumul des mentions « -0,5 » ne tient pas compte de la totalité des fautes commises.
Le grief de constatation inexacte et incomplète des faits pertinents est infondé.
5. Le recourant se plaint d’une violation de l’art. 18A LU. Comme l’avait confirmé la CUAE, il n’était pas impossible d’anonymiser l’examen écrit, notamment en passant par la plateforme Moodle. Le cours « traduction argumentée FR/AR », du même enseignant l’était. Cette anonymisation était d’autant plus importante, compte tenu de son conflit avec C______.
5.1 L’université fixe des modalités d’examens qui garantissent un traitement équitable des étudiantes et étudiants. Dans la mesure du possible, l’évaluation des examens écrits est anonymisée (art. 18A LU).
5.2 En l’espèce, l’université a détaillé les motifs pour lesquels les deux cours étaient traités différemment. L’examen de « traduction, révision et post édition » comprenait, en plus du texte à traduire, une partie « révision » pour laquelle les étudiants devaient saisir des modifications dans un texte existant. Ainsi, s’ils utilisaient la fonction « suivi des modifications » il pouvait arriver que leur nom soit visible.
In casu, le recourant n’a pas utilisé ladite fonction, ce qu’il ne conteste pas. Ainsi, à l’ouverture de son fichier Word de ses examens tant « traduction argumentée » que « traduction, révision et post édition », seul son numéro d’immatriculation s’affichait. Son nom n’était en conséquence pas visible pour l’enseignant.
L’université a relevé qu’« après un certain temps de travail, la machine va vérifier la licence du logiciel utilisé et sauvegarde automatiquement le résultat de cette recherche ; le nom de l’étudiant s’affiche alors dans les propriétés du document ». En conséquence, il n’est pas certain que l’information du nom du recourant ait été totalement absente des propriétés du document. Même à considérer que le nom ait pu être vu, il n’est pas démontré qu’un examinateur aurait été le consulter. Si certes, le courriel du 10 juin 2024 du chargé d’enseignement évoque une tension entre ce dernier et le recourant, elle n’a pas pu avoir de conséquences sur la notation du travail de séminaire, déjà effectuée. Elle aurait tout au plus pu avoir une incidence sur l’évaluation de l’examen écrit du lendemain des échanges, étant toutefois rappelé, d’une part, qu’il n’est plus contesté que ladite note est insuffisante et, d’autre part, que cet examen a fait l’objet d’une correction détaillée par deux examinateurs, lesquels ont justifié leur notation.
Ainsi, même si l’université admet que la solution technique choisie pour assurer l’anonymisation des copies n’est pas encore entièrement stable quand bien même elle donne entière satisfaction pour la majorité des copies et a indiqué que pour la session d’examens, en janvier 2025, de nouvelles manipulations avaient été proposées aux étudiants pour éviter ces problèmes, le recourant n’a pas subi de conséquences du système actuel.
En tous les cas, l’art. 18A LU est tempéré par l’utilisation du terme « dans la mesure du possible ». La disposition légale n’a en conséquence pas été violée.
6. Le recourant se plaint d’une violation des principes d’égalité de traitement et de l’interdiction de l’arbitraire.
6.1 Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. ‑ RS 101) lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 145 I 73 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_449/2022 du 3 février 2023 consid. 2.2.1 ; 1C_695/2021 du 4 novembre 2022 consid. 3.1.2).
6.2 Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable (ATF 142 V 512 consid. 4.2). De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 I 170 consid. 7.3).
6.3 En matière d'examens, le pouvoir de l'autorité de recours est extrêmement restreint, sauf pour les griefs de nature formelle, qu'elle peut revoir avec un plein pouvoir d'examen. En effet, selon la jurisprudence, l'évaluation des résultats d'examens entre tout particulièrement dans la sphère des décisions pour lesquelles l'administration ou les examinatrices et examinateurs disposent d'un très large pouvoir d'appréciation et ne peut faire l'objet que d'un contrôle judiciaire limité (ATA/438/2020 du 30 avril 2020 consid. 7 ; ATA/354/2019 du 2 avril 2019 consid. 5a). Cette retenue est en conformité avec la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui admet que l'autorité judiciaire précédente fasse preuve d'une certaine retenue (« gewisse Zurückhaltung »), voire d'une retenue particulière (« besondere Zurückhaltung »), lorsqu'elle est amenée à vérifier le bien-fondé d'une note d'examen (ATF 136 I 229 consid. 5.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_54/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.6 ; 2C_632/2013 du 8 juillet 2014 consid. 3.2 ; 2D_6/2013 du 19 juin 2013 consid. 3.2.2).
6.4 La chambre administrative ne revoit l'évaluation des résultats d'un examen qu'avec une retenue particulière, dès lors qu'une telle évaluation repose non seulement sur des connaissances spécifiques mais également sur une composante subjective propre aux personnes expertes ou examinatrices, ainsi que sur une comparaison des candidates et candidats. En principe, elle n'annule donc le prononcé attaqué que si l'autorité intimée s'est laissée guider par des motifs sans rapport avec l'examen ou d'une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/354/2019 précité consid. 5b).
6.5 En l’espèce, le recourant se plaint d’une violation du principe de l’égalité de traitement au motif que les candidats à l’examen du cours « traduction révision et post‑édition FR/AR » auraient subi un défaut d’anonymisation ce qui les aurait désavantagés en comparaison de ceux participant au cours « traduction argumentée FR/AR ».
Or, le recourant ne conteste pas que tous les étudiants, dans chacune des disciplines, ont été soumis aux mêmes conditions d’examens. Le grief est en conséquence infondé. Pour le surplus, conformément au considérant qui précède, il existe des éléments objectifs liés à la matière à examiner, justifiant que le suivi des corrections soit utilisé uniquement dans l’un des deux cours. L’intéressé, qui n’a d’ailleurs pas fait usage du suivi des modifications, ne peut se plaindre d’une violation de l’égalité de traitement, ce d’autant moins qu’elle aurait porté sur l’examen écrit, qui n’est plus litigieux au vu des conclusions prises par l’intéressé dans sa réplique et satisfaites par l’université qui n’a pas contesté qu’il avait obtenu 3.25 en lieu et place de 1.5 à l’examen écrit de juin 2024.
Par ailleurs, aucun élément du dossier ne tend à démontrer que la décision serait insoutenable, en contradiction avec la situation de fait ou violerait gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, étant encore rappelé que le chargé d’enseignement suppléant n’a pas siégé dans la commission des oppositions de la FTI contrairement à ce soutient le recourant.
En tous points infondé, le recours sera rejeté en tant qu’il est recevable, étant rappelé que le relevé de notes du 26 février 2025 a remplacé celui du 28 juin 2024 aux fins de tenir compte de l’erreur commise par l’université pour l’examen écrit, laquelle est toutefois sans incidence sur l’issue du litige.
7. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté le 20 novembre 2024 par A______ contre la décision de l’Université de Genève du 17 octobre 2024 ;
met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;
- par la voie du recours en matière de droit public ;
- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;
le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Me Alexandre ALIMI, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Université de Genève.
Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
J. PASTEUR
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| le président siégeant :
P. CHENAUX |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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