Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1366/2024 du 20.11.2024 ( EXPLOI ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/1996/2024-EXPLOI ATA/1366/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 19 novembre 2024 2ème section |
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dans la cause
A______ recourante
contre
DIRECTION DE LA POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimée
A. a. A______ est titulaire depuis le 24 juillet 2019 d’une autorisation d’exploiter en qualité d’exploitante l’établissement à l’enseigne « B______ » (ci-après : l’établissement), rue C______, 12__ D______, délivrée par la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN).
b. Le 30 janvier 2024, la PCTN a indiqué à A______ qu’elle projetait de prononcer la caducité de son autorisation d’exploiter l’établissement au motif que la faillite de E______ Sàrl (ci-après : E______), propriétaire du fonds de commerce de l'établissement, avait été prononcée le 24 août 2023.
c. Par un courrier du 15 février 2024, A______ a informé la PCTN qu’elle avait repris l’exploitation de l’établissement en tant qu’exploitante et propriétaire.
d. Le 20 février 2024, la PCTN lui a imparti un délai au 21 mars 2024 pour déposer une requête complète en changement de propriétaire, à défaut de quoi la caducité de l’autorisation d’exploiter du 24 juillet 2019 serait prononcée.
e. Par requête déposée le 20 mars 2024 auprès de la PCTN, A______ a adressé un formulaire G de changement de propriétaire de l’établissement en sa faveur. Incomplète, la requête lui a été retournée le 26 mars 2024.
f. Par décision du 15 mai 2024, la PCTN a constaté la caducité de l’autorisation délivrée le 24 juillet 2019 et ordonné la cessation de l’exploitation de l’établissement dès l’entrée en force de la décision, faute de quoi la fermeture serait ordonnée.
E______ n’était plus propriétaire de l’établissement. Bien qu’un délai eût été octroyé pour régulariser le changement de propriétaire, aucune requête complète en changement de propriétaire n’avait été déposée.
B. a. Par acte remis à la poste le 12 juin 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à ce qu’un délai au 30 juin 2024 lui soit accordé afin qu’elle puisse faire parvenir une requête complète en changement de propriétaire.
A______ n’avait pas renvoyé de requête en changement de propriétaire car elle n’avait toujours pas reçu l’attestation AVS qui manquait. Il n’y avait aucune mauvaise volonté de sa part mais elle était tributaire de la bonne volonté de l’administration fédérale de lui envoyer l’attestation AVS qu’elle avait commandée.
b. Le 5 juillet 2024, la PCTN a conclu au rejet du recours.
c. Invitée à faire parvenir à la chambre administrative une éventuelle réplique, A______ ne s’est pas manifestée.
d. Le 19 août 2024, les parties ont été informées que la procédure était gardée à juger.
e. Il sera revenu en tant que besoin dans la partie en droit sur les arguments et pièces produits par les parties.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. La recourante conteste la décision. Il ne s’agissait pas de mauvaise volonté de sa part mais elle n’était pas encore en possession de tous les documents nécessaires à la requête en changement de propriétaire.
2.1 La loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22) a pour but de régler les conditions d'exploitation des entreprises vouées à la restauration et/ou au débit de boissons à consommer sur place, à l’hébergement, ou encore au divertissement public (art. 1 al. 1).
2.2 L'exploitation de toute entreprise vouée à la restauration, au débit de boissons et à l'hébergement est soumise à l'obtention préalable d'une autorisation d'exploiter délivrée par le département de l’économie et de l’emploi (ci-après : le département), soit pour lui l’intimé (art. 8 al. 1 LRDBHD ; art. 3 al. 1 et 2 ainsi que 18 al. 1 let. a du règlement d’exécution de la LRDBHD du 28 octobre 2015 - RRDBHD - I 2 22.01).
2.3 Selon l’art. 39 RRDBHD, le propriétaire d'une entreprise vouée à la restauration, au débit de boissons ou à l’hébergement est la personne physique ou morale qui détient le fonds de commerce de l'entreprise, soit les installations, machines et autres équipements nécessaires à l'exercice de l'activité de celle-ci (al. 1). En cas de conclusion d'un contrat de gérance ou de bail à ferme, le propriétaire au sens de la loi est le gérant ou le fermier qui jouit des locaux et installations de l'établissement et en assume l'entière responsabilité (al. 2). Lorsque le propriétaire d'une entreprise soumise à la loi n'entend pas se charger lui-même de l'exploitation de l’établissement, il est tenu de désigner un exploitant (al. 3). La désignation de l’exploitant intervient par la contresignature de la formule officielle visée à l’art. 19, al. 1, let. b, du présent règlement (al. 4). L’exploitant désigné doit être en mesure de gérer de manière personnelle et effective l’établissement au sens de l’art. 40 al. 3 RRDBHD et être en possession d’un diplôme, ou d’un diplôme partiel lorsque celui-ci est requis pour l’exploitation de l’établissement. Le propriétaire qui désigne un exploitant servant de prête-nom s’expose notamment aux mesures et sanctions prévues à l’art. 64 LRDBHD (al. 5).
2.4 Selon l’art. 40 RRDBHD, l’exploitant d'une entreprise vouée à la restauration, au débit de boissons ou à l’hébergement est la personne physique responsable de l’entreprise qui exerce effectivement et à titre personnel toutes les tâches relevant de la gestion de celle-ci au sens de l’al. 3 (al. 1). Il est tenu de gérer l’entreprise de façon personnelle et effective. Cette obligation est réalisée aux conditions cumulatives suivantes : (a) il assume la majorité des tâches administratives liées au personnel de l’établissement (engagement, gestion des salaires, des horaires, des remplacements, etc.) et à la bonne marche des affaires (commandes de marchandises, fixation des prix, composition des menus, contrôle de la caisse, inventaire, etc.) ; (b) il assure une présence de 15 heures hebdomadaires au moins au sein de l'établissement concerné, lesquelles doivent inclure les heures d’exploitation durant lesquelles les risques de survenance de troubles à l’ordre public sont accrus (al. 3). Il doit désigner une personne qui soit en mesure de le remplacer immédiatement, lors de toute absence de l’établissement, même fortuite (al. 6). Celui-ci doit être instruit et informé des obligations résultant de la loi et du présent règlement et être en mesure de renseigner les autorités de contrôle sur la situation de l'établissement; il doit notamment être en mesure de leur présenter toutes les autorisations en vigueur, conformément à l’art. 47 RRDBHD (al. 7).
2.5 Une autorisation doit être requise lors de chaque création, changement de catégorie ou de lieu, agrandissement et transformation, changement d'exploitant ou de propriétaire de l’entreprise, ou modification des conditions de l'autorisation antérieure (art. 8 al 2 LRDBHD).
2.6 Selon l’art. 39 RRDBHD, tout changement de propriétaire doit être immédiatement communiqué par écrit au PCTN. L’annonce doit être faite tant par le repreneur que par l’ancien propriétaire de l’établissement. Une formule d’annonce est disponible sur le site Internet du service ainsi qu'à ses guichets (al. 6). Le changement de propriétaire entraîne la nécessité de requérir une nouvelle autorisation d’exploiter, conformément à l’art. 18 al. 1 let. a 2e phrase RRDBHD. Lorsque la requête complète est déposée avant l’échéance du délai légal mentionné à l’art. 13 al. 4 LRDBHD, la continuité de l’exploitation peut être assurée aux conditions précisées à l’art. 37 al. 6 RRDBHD (al. 7).
2.7 Selon l’art. 14 LRDBHD, l'autorisation d'exploiter est révoquée par le département lorsque les conditions de sa délivrance ne sont plus remplies, ainsi qu'en cas de non‑paiement de la taxe annuelle prévue par la loi.
2.8 En l’espèce, la recourante soutient qu'elle a repris l’établissement en qualité d’exploitante et de propriétaire.
Il lui appartenait donc d’annoncer ce changement à l’intimée, en application de l’art. 39 RRDBHD.
Ce n'est qu'à la suite de l'interpellation du 30 janvier 2024 par l'intimée que la recourante a annoncé le changement de propriétaire en mars 2024. Par la suite, l'intimée a accordé un délai à la recourante pour déposer une requête complète et son attention a été attirée sur les conséquences en cas de manquement à cette obligation.
Or, la requête adressée par la recourante à la PCTN était incomplète.
C’est ainsi de manière conforme à la loi que l'intimée a constaté qu'aucune demande valable de changement de propriétaire et exploitant ne lui était parvenue dans les délais et constaté la caducité de l’autorisation délivrée le 24 juillet 2019.
Mal fondé, le recours sera rejeté.
3. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 12 juin 2024 par A______ contre la décision de la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 15 mai 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.
Au nom de la chambre administrative :
la greffière :
B. SPECKER
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| le président siégeant :
C. MASCOTTO |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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