Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1357/2024

ATA/1097/2024 du 17.09.2024 ( TAXIS ) , REJETE

Descripteurs : TAXI;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;LIBERTÉ ÉCONOMIQUE;DROIT ACQUIS;RÉTROACTIVITÉ;CAS DE RIGUEUR;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : Cst.29.al2; LTVTC.13.al5; LTVTC.46.al13; RTVTC.57.al11
Résumé : Le recourant conteste le refus de l’autorité intimée de lui octroyer une nouvelle demande d'autorisation d’usage accru du domaine public (AUADP). Il invoque le « cas de rigueur » et la violation de la proportionnalité, de l’égalité de traitement, de la liberté économique et de la non-rétroactivité des lois. En application de la jurisprudence et de la loi (46 al. 13 LTVC), la chambre de céans ne saurait, sous peine de violer la loi, admettre en l’espèce l’existence de critères non prévus par celle-ci pour octroyer au recourant l’AUADP convoitée. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1357/2024-TAXIS ATA/1097/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 septembre 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Guy ZWAHLEN, avocat

contre

DIRECTION DE LA POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimée

_________



EN FAIT

A. a. A______, chauffeur de taxi, s’est vu accorder le 3 février 2021 par le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir, devenu depuis lors la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci‑après : PCTN) une carte professionnelle de chauffeur de taxi.

b. Le 16 octobre 2023, A______ a déposé auprès du PCTN une nouvelle demande d'autorisation d’usage accru du domaine public (ci‑après : AUADP) en application de l'art. 46 al. 13 de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 28 janvier 2022 (LTVTC - H 1 31).

Il a indiqué n'avoir pu contracter un bail à ferme pour une AUADP, et donc l'usage d'une plaque d'immatriculation, que depuis le 4 septembre 2022 en raison de la situation économique résultant du Covid-19. Il a invoqué l’existence d’un cas de rigueur lié à la période de crise sanitaire justifiant une dérogation.

c. Dans le cadre de l'exercice de son droit d'être entendu par rapport à l’intention du PCTN de rejeter sa requête, A______ a exposé que la date « butoir » du 28 janvier 2022 devait être revue à la lumière de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid‑19. Aucun intérêt public n’imposait le respect de cette date au détriment de son intérêt privé. À défaut d'obtention de l'autorisation sollicitée et d'une plaque, il ne pourrait plus exercer sa profession, ce qui le mettrait dans une situation financière extrêmement grave, n'ayant pas d'autres revenus que ceux liés à son activité de chauffeur de taxis. Peu de chauffeurs de taxis étaient concernés, de sorte qu’il n’y aurait pas non plus d’atteinte au principe d’égalité de traitement.

d. Par décision du 28 mars 2024, le PCTN a rejeté cette requête.

La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) avait examiné les modalités du régime transitoire prévus à l’art. 46 al. 13 LTVTC et avait confirmé l’exigence d’avoir été, le 28 janvier 2022, titulaire d’une AUADP pour pouvoir obtenir le renouvellement facilité de celle-ci, ce qui n'était pas le cas de A______. La crise sanitaire ne justifiait pas de déroger au régime transitoire. Enfin, le seul fait qu’un nombre limité de chauffeurs de taxis seraient concernés par une telle dérogation ne justifiait pas une violation du principe de légalité.

B. a. Par acte du 23 avril 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à l’octroi de l’AUADP sollicitée.

Après la crise liée à la pandémie, il avait été très difficile de louer une AUADP à un prix raisonnable. Ce n’était qu’après l’adoption de la loi que les prix du loyer étaient « retournés à la normale ». Il convenait ainsi de retenir l’existence d’un cas de rigueur permettant de déroger à l’exigence d’être titulaire d’une AUADP le 28 janvier 2022. La pratique du PCTN conduisait à ce que des titulaires d’AUADP et détenteurs de plaques continuent à « louer » celles-ci sous forme de contrats de travail fictifs, en exigeant des chauffeurs de taxis qu’ils paient tous les frais liés à leur véhicule et aux charges sociales. Il aurait été conforme au principe de la proportionnalité que la loi prévoie de placer en tête de liste d’attente les chauffeurs qui ne disposaient pas encore d’une AUADP.

Aucun intérêt public ne justifiait l’atteinte à sa liberté économique.

La décision querellée violait les principes de la proportionnalité, de l'égalité de traitement, de la liberté économique, et de la non-rétroactivité des lois.

b. Le PCTN a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, le recourant a relevé que le PCTN n’abordait pas sa situation, à savoir qu’il n'avait pas pu exercer sa profession de chauffeur de taxi et, de ce fait, obtenir à bail une AUADP, car il ne pouvait payer le loyer, compte tenu de la crise sanitaire.

Le but que le législateur s'était fixé lors de la révision de la LTVTC par rapport à la location des AUADP, était de mettre fin aux abus pratiqués par les loueurs d’AUADP mais il n'avait pas envisagé alors la situation spécifique, avancée par le recourant, à savoir celle liée aux conséquences pour lui de la crise du Covid-19, situation qui devait lui permettre de se voir octroyer une AUADP par dérogation fondée sur le cas de rigueur.

Il aurait été conforme au principe de la proportionnalité que la loi prévoie de placer en tête de liste d’attente les chauffeurs qui ne disposaient pas encore d’une AUADP.

La décision querellée violait le principe de l’égalité de traitement dès lors que certains chauffeurs avaient reçu deux AUADP alors que d’autres n’en avaient même pas reçu une du simple fait que les premiers étaient inscrits avant eux sur la liste d’attente. Il aurait convenu que ceux qui disposaient déjà d’une AUADP soient placés sur la liste après ceux, comme lui, qui avaient perdu leur AUADP en raison de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Dans un courrier du 8 juillet 2024 adressé à la chambre administrative, le conseil du recourant, listant plusieurs procédures dont la présente, a demandé à celle-ci de rendre un arrêt pilote et de suspendre, dans cette attente, les autres procédures.

f. Par courrier du 16 juillet 2024, la chambre administrative a répondu qu’elle n’entendait pas donner suite à cette requête.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Dans le corps de ses écritures, le recourant semble solliciter son audition et celle de Taha TAHIRI, en qualité de témoin.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l’issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_245/2020 du 12 juin 2020 consid. 3.2.1). Le droit d’être entendu ne comprend pas le droit d’être entendu oralement ni celui d’entendre des témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2).

2.2 En l’espèce, le recourant a valablement exercé son droit d'être entendu avant le prononcé de la décision querellée et a pu également exposer son point de vue et ses arguments dans son recours et sa réplique. Il n’explique pas quels éléments utiles autres que ceux déjà exposés son audition permettrait d’apporter à la solution du litige. L’audition du témoin est invoquée pour prouver que les prix de location des AUADP étaient exorbitants avant l’adoption de la loi et qu’ils dépassaient ses moyens. Or, ces éléments, même s’ils étaient établis, ne modifieraient pas l’issue du litige, comme cela sera exposé ci-dessous. Par ailleurs, les éléments qui figurent d’ores et déjà au dossier permettent à la chambre administrative de statuer en toute connaissance de cause.

Il ne sera donc pas procédé à l’audition du recourant et du témoin.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de délivrer une AUADP au recourant, en application du régime transitoire prévu par l’art. 46 al. 13 LTVTC.

3.1 La LTVTC, actuellement en vigueur depuis le 1er novembre 2022, résulte du projet de loi (ci-après : PL) n° 12'649 sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur, déposé par le Conseil d’État devant le Grand Conseil le 26 février 2020. Ce projet a été renvoyé à la commission parlementaire des transports qui a rendu deux rapports, respectivement le 16 août 2021 (ci-après : Rapport A) et le 11 janvier 2022 (ci-après : Rapport B).

3.2 Dans sa présentation du projet de loi, le département a exposé qu’en raison du numerus clausus des AUADP, le délai d’attente pour leur obtention pouvait atteindre plusieurs années, ce qui augmentait leur valeur économique et permettait à leurs titulaires de gagner de l’argent en vivant de la rente résultant de la location de leurs plaques pour un loyer dépassant parfois plus de dix fois le montant de la taxe annuelle. De nombreux chauffeurs voulant exercer la profession de taxi étaient ainsi contraints de louer une AUADP, ce qui les rendait dépendants et économiquement vulnérables. Il était apparu que 53 personnes détenaient 150 AUADP, dont une personne qui en avait dix. En l’absence d’outils permettant de contrôler les prix, le PL prévoyait de supprimer la cession des plaques, en recourant à leur location ou au bail à ferme. Ainsi, selon le PL, le détenteur d’une AUADP pouvait soit l’utiliser lui-même, soit engager un chauffeur pour l’utiliser, qui devenait contractuellement son employé, soit céder définitivement l’AUADP.

La commission parlementaire a voulu supprimer la location des plaques, qui conférait une rente de situation aux titulaires d’une AUADP, lesquels les louaient à un prix abusif. Le bail à ferme permettait la réalisation de marges excessives par rapport à l’outil de travail proposé, en tirant profit d’un avantage octroyé par l’État pour le monnayer. Il convenait de supprimer cette possibilité, une indemnisation étant introduite dans les dispositions transitoires en faveur des personnes rendant leur AUADP.

3.3 L’art. 46 al. 13 LTVTC dispose, sous l’intitulé « Attribution des autorisations restituées ou caduques », que le département peut attribuer l’AUADP à la personne physique ou morale qui en était l’utilisateur effectif au moment du dépôt de la LTVTC, s’il en est toujours l’utilisateur au moment de l’adoption de la LTVTC, en fait la requête et réalise les conditions de délivrance visées à l’art. 13 al. 5 LTVTC.

3.4 Dans son arrêt du 24 mars 2023 (ACST/15/2023), la chambre constitutionnelle de la Cour de justice a jugé que l’art. 46 al. 13 LTVTC était une disposition légale transitoire, adoptée pour permettre aux chauffeurs de taxis exerçant leur profession à travers la location de plaques ou d’un bail à ferme de continuer leur activité, malgré l’abolition de ces pratiques par l’entrée en vigueur de la LTVTC, et de leur attribuer, pour autant que les conditions légales soient remplies, une AUADP (consid. 5.3.4). Dans ce contexte, le Conseil d’État avait indiqué que l’augmentation transitoire du nombre d’AUADP pendant un an (art. 57 al. 11 du règlement d'exécution de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 21 juin 2017 - RTVTC - H 1 31 01) permettait d’atténuer les effets du passage au régime de l’interdiction de location des autorisations.

La chambre constitutionnelle a rappelé que l’AUADP octroyée aux taxis ne conférait généralement pas de droits acquis, à moins de garanties spécifiquement obtenues concernant la poursuite de l’activité de location de plaques, ce qui n’était pas le cas dans les affaires dont elle était saisie (ACST/26/2022 du 22 décembre 2022 ; ACST/27/2022 du 22 décembre 2022).

3.5 Se penchant sur la condition d’être utilisateur effectif de l’AUADP au moment du dépôt de la LTVTC, la chambre de céans a jugé que celle-ci n’était pas décisive, mais qu’était en revanche déterminant le fait d’être utilisateur effectif au moment de l’adoption de la loi le 28 janvier 2022 (ATA/779/2023 du 18 juillet 2023 consid. 5.6.2 ; ATA/886/2023 du 22 août 2023 consid. 6.6).

Dans un arrêt récent du 4 juin 2024 (2C_690/2023), le Tribunal fédéral a confirmé la compatibilité de l’art. 46 al. 13 LTVTC avec les principes de non‑rétroactivité des lois et de la proportionnalité en lien avec la liberté économique.

Dans sa jurisprudence, la chambre administrative a eu l’occasion de relever que la situation des chauffeurs de taxis liée à la crise sanitaire ne permettait pas de déroger à l’application de l’art. 46 al. 13 LTVTC. À rigueur de texte, cette disposition ne prévoyait pas la possibilité d’invoquer des motifs d’empêchement à la location d’une AUADP. Il ressortait des travaux parlementaires que l’idée du régime transitoire était de prévoir un passage en douceur pour les personnes subissant des sacrifices trop importants du fait de la nouvelle réglementation. Or, les chauffeurs de taxi qui n’étaient pas locataires d’une AUADP au moment de l’adoption de la loi ne se trouvaient pas dans la situation dans laquelle leur relation par rapport au bailleur devait être clarifiée et ils ne couraient pas le risque de perdre leur outil de travail en raison de la restitution par leur bailleur de l’AUADP (ATA/1051/2024 du 3 septembre 2024 consid. 3.6 et 3.7 ; ATA/918/2024 du 6 août 2024 consid. 2.10 ; ATA/878/2024 du 23 juillet 2024 consid. 3.9).

3.6 En l’espèce, la requête – c’est-à-dire le fait juridiquement déterminant – du recourant auprès du PCTN en vue de l’obtention d’une AUADP date du 16 octobre 2023, soit après l’entrée en vigueur de la nouvelle LTVTC. Cette demande doit donc s’examiner au regard de la nouvelle réglementation, conformément au principe général du droit intertemporel rappelé par la jurisprudence fédérale susmentionnée.

Contrairement à ce que semble penser le recourant, sa requête ne soulève pas de question sous l’angle de la rétroactivité des lois puisqu’elle a été déposée après l’entrée en vigueur de la nouvelle LTVTC. Ce grief doit être écarté.

Le recourant ne conteste pas ne pas avoir été l’utilisateur effectif d’une AUADP le 28 janvier 2022. Il ne répond ainsi pas à une des conditions permettant de bénéficier du régime transitoire de l’art. 46 al. 13 LTVTC. Il invoque un « cas de rigueur » l’ayant empêché de disposer d’une AUADP à cette date. Il conviendrait d’admettre que les chauffeurs de taxis ayant disposé d’une AUADP lors de l’entrée en vigueur de la LTVTC puissent également bénéficier du régime transitoire permettant un renouvellement facilité de celle-ci.

La chambre administrative a toutefois déjà retenu, dans sa jurisprudence, que l’art. 46 al. 13 LTVTC ne prévoyait pas la possibilité d’invoquer des motifs d’empêchement à la location d’une AUADP au moment de l’adoption de la loi, le 28 janvier 2022. Si le législateur avait voulu déroger au régime transitoire, plus particulièrement à l’exigence d’avoir été l’utilisateur effectif d’une AUADP au moment déterminant, il l’aurait clairement indiqué. Ainsi que l’a relevé l’intimé, l’art. 46 al. 13 LTVTC a été élaboré durant la période de la crise sanitaire, si bien que les conséquences économiques de cette situation sur les chauffeurs de taxis ne pouvaient être ignorées par le législateur. Par ailleurs, comme l’a jugé récemment le Tribunal fédéral, il n’apparait pas contraire au principe de la bonne foi de circonscrire le cercle des bénéficiaires d'un régime transitoire prévoyant un accès privilégié à la titularité des autorisations aux chauffeurs qui ont recouru à la location de celles-ci jusqu'au moment de l'adoption de la LTVTC, car ces chauffeurs ne pouvaient pas, avant ce moment-là, s'attendre à l'interdiction d'une telle pratique. En revanche, dès l'adoption de la loi, les chauffeurs devaient s'attendre aux modifications juridiques intervenues, même s'ils ne savaient pas de manière définitive quand une telle suppression entrerait en vigueur. Le régime permet ainsi d'éviter des abus consistant à devenir locataire d'une autorisation d'usage accru du domaine public avant l'entrée en vigueur de la loi, dans le seul but de pouvoir bénéficier de l'application de l'art. 46 al. 13 LTVTC et de court-circuiter l'ordre prévu dans la liste d'attente de ces autorisations.

Or, dans le cas présent, le recourant a loué une AUADP le 4 septembre 2022, soit à une période où il devait s’attendre à l’interdiction d’une telle pratique. Contrairement aux chauffeurs de taxi qui étaient utilisateurs effectifs au moment de l’adoption de la loi, le recourant connaissait le risque qu’il prenait de perdre son outil de travail en raison de la restitution par son bailleur de l’AUADP. En tant qu’elle distingue ces situations, la loi échappe à toute critique.

Il s’ensuit que, faute d'avoir été titulaire d’une AUADP au moment déterminant du 28 janvier 2022, le recourant ne peut bénéficier du régime transitoire instauré par l’art. 46 al. 13 LTVTC (ATA/814/2024 du 9 juillet 2024 consid. 2.6 ; ATA/619/2024 du 21 mai 2024 consid. 4).

Enfin, la loi ne prévoit pas de clause permettant de déroger aux conditions d’octroi d’une AUADP telles que définies par la loi. La chambre de céans ne saurait, sous peine de violer la loi, admettre en l’espèce l’existence de critères non prévus par celle-ci pour octroyer au recourant l’AUADP convoitée.

3.7 Le recourant invoque la violation de la proportionnalité, de l'égalité de traitement et de la liberté économique.

La chambre de céans ne voit pas de raison de s’écarter de la jurisprudence de la chambre constitutionnelle et du Tribunal fédéral qui ont tranché ces questions, incluant l’examen du respect des principes de la proportionnalité. Le fait que l'art. 46 al. 13 LTVTC prévoie la possibilité – et non pas le droit – de se voir attribuer en priorité une autorisation personnelle pour les chauffeurs qui en louaient une à leur titulaire au moment de l'adoption de la loi, condition qu'il ne remplit pas, ne signifie pas que cette disposition consacre, comme il le prétend, une violation de sa liberté économique. Comme indiqué, la jurisprudence admet que le droit cantonal puisse limiter l'utilisation du domaine public par les chauffeurs de taxi en soumettant celle-ci à autorisation. Or, le recourant reste libre d'obtenir une AUADP aux conditions prévues par la loi, en déposant une demande d'inscription sur une liste d'attente à cet effet (arrêt du Tribunal fédéral 2C_690/2023 précité consid. 7.2).

La décision querellée ne consacre pas non plus une inégalité de traitement entre chauffeurs de taxis qui ont obtenu le renouvellement facilité de leur AUADP, selon l’art. 46 al. 13 LTVTC, et obtenu une nouvelle AUADP en raison du fait qu’ils figuraient en tête de la liste d’attente. En effet, la loi n’interdit nullement d’être titulaire de plusieurs AUADP. Ainsi, les chauffeurs de taxis qui en remplissent les conditions légales, peuvent se voir délivrer plusieurs AUADP. Pour le surplus, le recourant ne soutient pas que des chauffeurs de taxis ne disposant, comme lui, pas d’une AUADP le 28 janvier 2022 auraient néanmoins bénéficié d’un renouvellement facilité de leur AUADP obtenue postérieurement à cette date. L’on ne discerne ainsi pas d’inégalité de traitement entre chauffeurs de taxis se trouvant dans la même situation que le recourant.

Au vu de ce qui précède, les critiques du recourant n’apparaissent pas fondées.

Son recours sera ainsi rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe, et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 avril 2024 par A______ contre la décision de la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 28 mars 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guy ZWAHLEN, avocat du recourant, ainsi qu'à la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Patrick CHENAUX, Michèle PERNET, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

 

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

la greffière :