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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4164/2023

ATA/864/2024 du 23.07.2024 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4164/2023-FPUBL ATA/864/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 juillet 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Romain JORDAN, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE intimée

 



EN FAIT

A. a. A______ a été engagée en 2012 en qualité de spécialiste en ressources humaines (ci-après : RH) auprès de la Ville de Genève (ci-après : ville). Elle a exercé différentes fonctions au sein des RH. Le 31 janvier 2018, elle a été nommée responsable RH du département B______, devenu C______. Il s’agit d’une position de cadre supérieure.

Ce service apporte l’assistance nécessaire à l’organe exécutif de la ville. Le cahier des charges de A______ prévoyait qu’elle avait pour mission générale de conseiller la direction du C______ dans la mise en œuvre de la politique RH, de conseiller et soutenir la gestion des RH, d’initier et piloter des projets RH, de coordonner et contrôler l’activité RH au regard du respect des statuts, règlements et directives et de soutenir les services dans leur adaptation des outils, moyens et procédures.

b. À compter du 21 février 2022, elle s’est retrouvée en arrêt de travail pour cause de maladie.

c. A______ ne s’est pas présentée à tous les rendez-vous du médecin‑conseil, notamment ceux des 17 mai et 13 juin 2023. La ville l’a informée dès le 30 janvier 2023 que son droit au traitement prendrait fin le 29 février 2024. L’intéressée n’a pas répondu aux courriers de l’assurance-invalidité, mise en œuvre le 30 janvier 2023 par la ville au titre d’une intervention précoce.

d. En juillet 2023, des discussions relatives à un départ à l’amiable ont eu lieu entre le conseil de l’intéressée et la ville. Les parties divergent sur la teneur de celles-ci.

Selon le conseil de A______, un accord avait été trouvé le 29 septembre 2023 avec le D______ du C______ (ci-après : C______) par lequel un terme était mis, d’un commun accord, au contrat de celle-ci au 30 septembre 2023 et une indemnité de neuf mois de salaire lui serait versée.

Selon la ville, aucun accord dans ce sens n’avait été trouvé entre le C______ ou son D______ et l’employée.

e. A______ n’ayant pas envoyé au service idoine de la ville le certificat d’incapacité de travail relatif au mois d’octobre 2023, celui-ci lui a adressé – comme cela avait déjà été nécessaire par le passé – un rappel le 13 octobre 2023.

A______ n’a pas répondu à ce courriel, de sorte que la collaboratrice en charge de son dossier l’a mise en demeure, le 20 octobre 2023, de produire le certificat médical en question, faute de quoi son traitement serait suspendu. L’intéressée n’a pas non plus répondu à cette mise en demeure.

f. Par décision du 30 octobre 2023, la ville a suspendu avec effet au 1er octobre 2023 le traitement de A______, son absence étant considérée comme injustifiée.

g. A______ a pris un nouvel emploi de responsable RH au sein du département E______ de F______(ci-après : F______) dès le 1er octobre 2023.

h. À la fin des vacances scolaires d’automne 2023, elle a croisé par hasard l’D______ du C______ dans un centre commercial. Selon ce dernier, il lui avait demandé, se référant à des rumeurs selon lesquelles elle allait travailler pour les F______, quand elle allait commencer cette nouvelle activité, ce à quoi elle lui avait répondu que ce serait à compter du 1er janvier 2024. A______ soutient ne pas avoir donné d’indications relatives à son nouvel emploi.

i. Informé lors de sa séance du 1er novembre 2023 de cette conversation, des rumeurs selon lesquelles l’employée avait trouvé un nouvel emploi et des indications ressortant du site Internet du département E______ de F______ sur lequel le nom et le numéro de téléphone de A______ figuraient déjà, le Conseil administratif (ci-après : CA) a demandé au contrôle financier interne de la ville (ci-après : CFI) de clarifier la situation.

j. Le 1er novembre 2023, le directeur du CFI a interpellé G______ des RH de F______ afin de s’enquérir d’un engagement de A______ par F______. Il a alors appris qu’elle travaillait depuis le 1er octobre 2023 pour ceux-ci.

k. Le lendemain, le CA a informé l’intéressée de son intention de la licencier avec effet immédiat.

Il a fait état de l’absence de certificat médical pour le mois d’octobre 2023, des rumeurs circulant au sujet de son engagement récent par F______, de la rencontre fortuite la semaine précédente avec un cadre supérieur auquel elle avait dit qu’elle entrerait en fonction auprès de F______ le 1er janvier 2024 et de la confirmation écrite de G______des RH de F______ de son entrée en fonction le 1er octobre 2023 auprès de cet employeur, le courriel y relatif étant annexé. Ces faits étaient susceptibles de constituer des manquements graves à ses devoirs, en particulier au regard de la fonction qu’elle occupait. Elle était, à titre de mesures provisionnelles, suspendue avec effet immédiat. Un délai au 6 novembre 2023 lui était imparti pour se déterminer.

l. Par courrier du 3 novembre 2023, le conseil de l’employée a indiqué qu’un accord de départ au 30 septembre 2023 avec paiement d’une indemnité de neuf mois de salaire avait été trouvé. Le C______ et son D______ avaient été prévenus de son nouvel emploi à F______.

m. Le jour même, le J______ a contesté ces propos.

n. Le conseil de A______ a maintenu sa version des faits.

o. Le J______ a répondu, toujours par courriel le même jour, qu’il avait été clair que la compétence pour valider une quelconque convention de départ – dont le contenu allégué état contesté – revenait au CA.

p. Par courrier du même jour, le conseil de l’employée a sollicité une copie du dossier constitué en marge de l’envoi du 2 novembre 2023 et précisé qu’il se déterminerait dans un délai de dix jours dès réception du dossier.

q. Cette requête a été rejetée le lendemain, 7 novembre 2023, l’intéressée s’étant déjà déterminée et le courrier du 2 novembre 2023 comportant déjà les éléments à la base de celui-ci.

r. L’avocat de l’employée a maintenu sa demande par courriel envoyé en fin de la même journée. Sa cliente venait d’être licenciée par F______. Elle souhaitait être entendue par le CA et demandait quelle était l’implication du J______ dans la présente procédure.

s. Le 8 novembre 2023, le CA a licencié A______ avec effet immédiat pour justes motifs, avec effet au 2 novembre 2023, reprenant en substance les éléments exposés dans son courrier du 2 novembre 2023.

Ce courrier a été également envoyé par courriel le même jour à 16h14.

t. Par courriel du 8 novembre 2023, à 18h00, le conseil de A______ a sollicité la récusation du J______.

u. Par courriels des 29 et 30 novembre 2023, relevant qu'elle ne faisait plus partie de l'effectif de la ville depuis le 2 novembre 2023, A______ a demandé à celle-ci une attestation destinée à la caisse de chômage. Les attestations délivrées font état d’une « sortie » de la ville le 2 novembre 2023.

B. a. Par acte expédié le 11 décembre 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre son licenciement, dont elle a demandé l’annulation. Elle a conclu, principalement, à ce que l’accord trouvé entre les parties déploie ses effets à compter du 29 septembre 2023 et qu’il soit dit et constaté que son contrat de travail avait pris fin à cette date. Préalablement, elle a demandé la production par la ville de son dossier, la tenue d’une audience de comparution personnelle et l’audition du H______, du J______ et de l’D______ de celui-ci.

Elle avait été en incapacité de travail jusqu’au 30 septembre 2023. Un accord avait été trouvé sur son départ à cette date. Depuis juillet 2023, des échanges étaient intervenus en vue de conclure une convention de départ. La ville savait qu’elle n’allait pas reprendre son poste. Celle-ci n’avait pas réagi au courriel de son conseil du 29 septembre 2023 indiquant qu’un accord avait été trouvé pour un départ à l’amiable fin septembre 2023. Si tel n’avait pas été le cas, la ville n’aurait pas attendu quatre semaines pour réagir. En résiliant le contrat alors qu’un accord y avait mis un terme, la ville avait agi contrairement au principe de la bonne foi. Il n’existait aucun motif de résiliation, et la ville avait commis un abus de son pouvoir d’appréciation en prononçant la fin des rapports de travail.

b. La ville a conclu au rejet du recours. Elle a produit le dossier de la recourante.

En été 2023, le conseil de la recourante avait pris langue avec le H______, alléguant qu’elle avait été victime d’atteinte à sa personnalité, mais qu’elle souhaitait « tourner la page » et négocier une convention de départ. Le H______ en avait parlé au D______, qui lui avait indiqué que le conseil de la recourante pouvait prendre contact avec lui afin de discuter des termes d’une éventuelle convention de départ, à soumettre au CA. Des échanges informels s’en étaient suivis entre le D______ et l’avocat de la recourante. Ce dernier n’avait jamais répondu clairement aux questions relatives aux perspectives professionnelles de sa cliente, qui demeurait en arrêt maladie. Le vendredi après-midi 29 septembre 2023, le conseil de l’employée avait appelé le J______, indiquant que sa cliente sollicitait le versement d’une indemnité de départ de neuf mois de salaire. La date de la fin des rapports de travail n’était pas évoquée.

Le J______ avait répondu que tout accord devait être validé par le CA. Des rumeurs avaient circulé selon lesquelles la recourante aurait trouvé un nouvel emploi, sans que l’on sache lequel ni à partir de quelle date. Le CA ne validerait pas une indemnité de départ si l’intéressée avait retrouvé un emploi. Lors des pourparlers, il avait été question de convenir du versement d’une éventuelle indemnité en deux fois, une première partie étant versée au moment de la signature de l’accord, l’autre après un délai à convenir et pour autant que l’intéressée n’ait alors pas retrouvé d’emploi. Le conseil de la recourante avait indiqué que celle-ci était « sur quelque chose de solide », sans mentionner l’identité du futur employeur ni la date d’entrée en emploi, et ne s’était pas positionné quant au versement d’une éventuelle indemnité en deux fois. À la fin de l’entretien que le J______ avait eu avec le conseil de la recourante, ce dernier avait demandé s’il consentait à ce que son D______ poursuive les discussions avec lui en vue d’un projet de convention à soumettre au CA, ce à quoi il ne s’était pas opposé.

Immédiatement après cet entretien, le conseil de la recourante avait adressé à D______ du C______ un courriel prétendant faussement qu’un accord avait été trouvé avec le J______ prévoyant un départ le 30 septembre 2023 et une indemnité de neuf mois de salaire. Constatant que le conseil de la recourante n’avait pas réservé de copie de son courriel du 29 septembre 2023 au J______, son D______ lui en avait parlé le 9 octobre 2023, apprenant à cette occasion de la bouche du J______ que le contenu du courriel ne reflétait pas la réalité. Il n’avait ainsi établi aucun projet de convention.

Peu avant les vacances scolaires d’octobre 2023, des rumeurs avaient commencé à circuler au sujet de l’activité professionnelle de la recourante. Celle-ci apparaissait dans l’organigramme du département de E______ de F______, daté du 4 octobre 2023, et son nom et son numéro de téléphone figuraient sur les pages internet dudit département. À la fin des vacances scolaires, le D______ avait fortuitement croisé la recourante dans un centre commercial. Elle lui avait indiqué, en réponse à sa demande quand elle entrerait en fonction au sein de F______, qu’elle commencerait le 1er janvier 2024.

Informé lors de sa première séance après les vacances scolaires de ces éléments, le CA avait demandé au contrôle financier de la ville (ci-après : CFI) d’éclaircir les faits. Le directeur du CFI avait alors appris d’un adjoint de la direction RH de F______ que la recourante avait commencé son emploi auprès de F______ le 1er octobre 2024. Il avait confirmé à son interlocuteur que la recourante était toujours employée par la Ville.

c. Dans sa réplique, la recourante a insisté sur le fait qu’il était clair, lors des pourparlers, qu’elle n’entendait pas réintégrer son poste. Elle a contesté les propos et l’attitude attribués à son mandataire. Les parties étaient convenues des éléments qu’elles entendaient soumettre pour approbation au CA. Elle n’était restée employée de la ville que parce que celle-ci avait choisi de suspendre l’élaboration de la convention.

L’intimée savait dès le 4 octobre 2024 qu’elle travaillait pour F______. Celle-ci avait feint, à dessein, de ne pas le savoir afin de justifier le licenciement. Elle avait été fondée à croire que la date de son départ était acquise. L’objet des négociations portait sur l’indemnité de départ. Le D______ n’avait pas immédiatement réagi au courriel de son mandataire du 29 septembre 2023. Ce silence était « suspect ». Elle ne contestait pas la compétence du CA pour valider toute convention. En revanche, le J______ ne pouvait s’exempter de sa responsabilité « en matière de négociations pré-conventionnelles ».

Enfin, son employeur avait conscience qu’elle ne réintégrerait pas son emploi, dès lors qu’elle avait refusé la mise en place d’une tentative de médiation ou le recours au groupe de confiance et n’avait pas perçu son salaire en octobre 2023. Ces éléments constituaient un indice univoque de son souhait de rompre le contrat. L’intimée savait depuis le 4 octobre 2023 qu’elle travaillait pour F______. C’était uniquement dans le but de justifier un licenciement immédiat que la ville avait initié les démarches pour la « débusquer ».

d. Dans une écriture spontanée, la ville a indiqué avoir appris, à la lecture de l’ATA/1______/2024 du 29 janvier 2024, qui concernait une décision rendue sur effet suspensif concernant F______ et la recourante, que cette dernière avait déposé sa candidature à F______ en mai 2023 en indiquant qu’elle était disponible dès le 1er octobre 2023 et avait indiqué à F______, le 15 août 2023, qu’elle avait démissionné de son précédent emploi avec effet au 29 septembre 2023. La recourante ne pouvait donc prétendre que ce n’était qu’à la suite de l’entretien de son conseil le 29 septembre 2023 avec le J______, qu’elle avait, convaincue que son contrat prenait fin au 30 septembre 2023, accepté la proposition de F______.

La date du 4 octobre 2023 figurant sur l’organigramme de F______ ne signifiait pas que la ville en avait connaissance à cette date. Consulté le 15 mars 2024, ledit organigramme comportait toujours la même date. La recourante n’avait jamais informé la ville du nouvel emploi qu’elle avait en vue, ni de la date à laquelle elle allait le commencer. Si elle en avait informé la ville, celle-ci n’aurait jamais entamé des négociations prévoyant une indemnité de départ. C’était le silence relatif à ses projets professionnels ainsi que le refus de prévoir le versement en deux fois d’une éventuelle indemnité qui avaient conduit au fait qu’aucun projet de convention n’avait été soumis au CA.

e. Se déterminant sur cet écrit, la recourante a insisté pour que les actes d’instruction sollicités aient lieu. Le seul point litigieux était le contenu des échanges qui avaient eu lieu, dont dépendait la question de savoir si un accord au sujet de la fin des rapports de service au 30 septembre 2023 était intervenu.

f. a Lors de l’audience de comparution personnelle des parties, qui s’est tenue le 13 mai 2024 devant la chambre administrative, la recourante a déclaré qu’elle n’avait pas discuté directement avec les représentants de la ville au sujet de la convention de départ. Son avocat avait eu des contacts avec le H______, le J______ et son D______. Il la tenait ensuite au courant.

Elle avait informé son avocat du fait qu’elle était engagée à compter du 1er octobre 2023 auprès de F______. L'objet essentiel des négociations ne portait pas sur l'indemnité, mais sur le fait qu’elle puisse quitter la ville le 30 septembre 2023 au plus tard. Si elle avait refusé d'entrer en fonction auprès de F______ au 1er octobre 2023, il y aurait eu de fortes chances qu’elle ne soit pas engagée. Son avocat l’avait assurée qu'il ferait en sorte qu’elle soit libérée au 30 septembre 2023.

Elle était « évidemment » disposée à renoncer à toute indemnité. Sa priorité était de sortir de cette situation ubuesque, à savoir qu’elle devait négocier un départ alors que plus personne ne souhaitait qu’elle reste dans son poste. La relation de confiance était entamée. Compte tenu des divergences rencontrées avec le J______, elle ne souhaitait pas indiquer qui était son nouvel employeur, craignant une interférence de sa part auprès de F______.

Ce n'était que fin août 2023 qu’elle avait reçu une attestation écrite d'engagement de F______. Elle ne savait pas exactement ce qui avait été dit lors des négociations. Il était vrai que tant qu’elle n'avait pas signé son contrat, elle ne souhaitait pas trop s'avancer. La période précédente avait été particulièrement difficile et elle craignait que des « comportements de mauvaise foi » puissent nuire à la possibilité qui se présentait de rebondir professionnellement. Cette crainte l’avait conduite à « ne pas être complètement transparente » avec la ville au mois de septembre 2023.

Elle ne pouvait pas démissionner au 30 septembre 2023 car il aurait fallu attendre l'échéance des trois mois avant de pouvoir commencer dans une nouvelle activité. Compte tenu des négociations en cours, l'idée était qu’elle soit libérée de manière conventionnelle au 30 septembre 2023.

Elle confirmait avoir assisté à une séance avec l'équipe de F______ le 16 septembre 2023. Elle avait signé son contrat auprès de F______ le 2 octobre 2023, après avoir donné suite à toutes les demandes administratives.

Le 15 août 2023, elle avait reçu une attestation d'engagement de F______. Toutefois à sa connaissance une autre candidature, interne, était toujours dans la course. Elle n'avait donc pas de certitude de son engagement.

Elle avait fait confiance à son conseil. Il lui avait dit qu'un accord avait été trouvé avec le J______ ; elle restait uniquement dans l'attente de la convention.

Elle n'avait pas répondu aux courriels relatifs aux certificats médicaux que lui demandait la ville pour le mois d'octobre 2023 car elle estimait ne plus être employée par elle. Par ailleurs, elle était accaparée par ses nouvelles fonctions et ses responsabilités familiales.

Lors de la rencontre fortuite au centre commercial à la fin des vacances scolaires d'octobre 2023, le D______ lui avait d'emblée posé la question de savoir si elle se plaisait à F______. Elle sentait qu'il y avait un enjeu dans ses questions et s’était montrée évasive. Elle lui avait rappelé qu’elle attendait toujours la convention négociée par son avocat. Il lui avait indiqué que le J______ refusait de la signer. Il avait voulu lui montrer un SMS allant dans ce sens. Elle lui avait répondu qu'il fallait voir avec son avocat.

Sans la convention, elle ne serait jamais partie à fin septembre 2023. Le fait d'avoir demandé à un collaborateur du C______ d'aller glaner des informations auprès de F______ était déloyal. Il s'agissait d'un comportement abusif.

f.b La représentante de la ville a contesté les allégations de la recourante, en particulier celles ayant trait au comportement déloyal et abusif et au fait que le conseil de la recourante aurait informé la ville de son engagement au 1er octobre 2023.

Dans la 2ème partie du mois de septembre 2023, des rumeurs avaient commencé à circuler au sujet du fait que la recourante avait retrouvé un travail. Cela étant, ni la date de l'entrée en fonction ni la fonction ni encore l'employeur n'étaient connus. C'était ainsi que le 29 septembre 2023, le J______ avait informé Me JORDAN qu'il avait des réserves quant au fait que le CA valide une convention de départ prévoyant une indemnité de neuf mois.

Me JORDAN avait uniquement répondu que sa cliente était « sur quelque chose de solide » sans donner plus de précisions.

Elle confirmait qu'à sa connaissance aucune date de fin des rapports de service n'avait été articulée durant les négociations avec Me JORDAN. Celles-ci n'avaient pas abouti concernant la date de la fin des rapports de service ni d'ailleurs de l'indemnité. Sans précisions concernant la situation professionnelle de la recourante et l'acceptation d'un versement de l'indemnité en deux fois, la convention avait peu de chance d'être validée par le CA.

Lors de la rencontre à la I______, le D______ avait demandé à la recourante si elle avait été engagée à F______, ce à quoi elle avait répondu par l'affirmative précisant qu'elle entrait en fonction le 1er janvier 2024.

f.c La recourante a contesté avoir dit qu’elle entrerait en fonction le 1er janvier 2024.

f.d À l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des actes d'instruction complémentaires sollicités.

g. Il sera revenu ci-après, en tant que de besoin, sur les pièces au dossier.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 104 du statut du personnel de la ville du 29 juin 2010 - LC 21 151 - SPVG).

2.             En matière de rapports de service, l’employeur public dispose d’un large pouvoir d’appréciation, notamment face à des manquements aux devoirs de service commis par les membres de son personnel, de sorte que la chambre administrative ne peut intervenir qu’en cas de violation du droit, y compris d’abus ou d’excès du pouvoir d’appréciation, ou de constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. a et b LPA).

3.             La recourante sollicite l'apport de son dossier, son audition ainsi que celle du H______, du J______ et de l’D______ de celui-ci.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

3.2 En l’espèce, il n’est pas allégué que le H______ aurait participé aux discussions entre les parties. La recourante soutient uniquement que son conseil aurait pris contact avec le H______ pour savoir si une éventuelle convention de départ pouvait être discutée et que celui-ci l'avait renvoyé au C______. Partant, même si le H______ venait confirmer ces allégations, cela ne serait pas susceptible d'influer sur le sort du litige. Comme cela sera exposé ci-après, l'audition du J______ et de son D______ ne sont pas non plus de nature à modifier l'issue du litige. En effet, même si ces auditions conduisaient à retenir que le J______ ou son D______ s'étaient mis d'accord avec le conseil de la recourante au sujet des modalités de départ de celle-ci, une convention entre les parties à cet effet aurait, pour valablement engager l'intimée et déployer ses effets, dû être adoptée par le CA, ce qui n'a pas été le cas. L'audition de deux hauts fonctionnaires ne modifierait ainsi pas l'issue du litige, comme cela sera exposé ci‑après. Par ailleurs, la recourante a été entendue et l'intimée a produit son dossier, de sorte qu'il a été fait droit aux chefs de conclusions y relatifs. La chambre de céans dispose pour le surplus d'un dossier complet qui lui permet de statuer en connaissance de cause.

Il ne sera donc pas procédé à d'autres actes d'instruction.

4.             Est litigieuse la question de savoir si les parties avaient trouvé un accord mettant fin aux rapports de service de la recourante au 30 septembre 2023.

4.1 Les rapports de service des membres du personnel de la ville sont régis par le SPVG, les dispositions d'exécution ainsi que, le cas échéant, les clauses du contrat de travail (art. 3 al. 1 SPVG). En cas de lacune, les dispositions pertinentes du CO sont applicables à titre de droit public supplétif (art. 3 al. 2 SPVG).

4.2 Le CA exerce les fonctions d’employeur, notamment en ce qui concerne l’engagement et la résiliation des rapports de service (art. 4 al. 4 SPVG). Il peut, par règlement, déléguer ses compétences d’employeur sauf sans les cas où le présent statut prévoit expressément qu’il lui appartient de statuer (art. 4 al. 5 SPVG).

Selon l’art. 4 du règlement d’application du statut (REGAP - LC 21 152.0), le secrétaire général ou la secrétaire générale de la Ville de Genève a l’autorité sur l’ensemble des membres du personnel de la Ville de Genève. Il ou elle dépend directement du Conseil administratif qui est son supérieur hiérarchique.

Toute proposition portant sur des problèmes relatifs au personnel est traitée d’entente entre les départements et la direction des ressources humaines, respectivement du service juridique, dans le cadre de leurs compétences respectives, qui se chargent de présenter le dossier au Conseil administratif, avec leur préavis (art. 8 al. 3 du règlement du CA du 1er mai 2001 – LC 21 121).

La résiliation des rapports de service fait l’objet d’une décision motivée du CA (art. 30 al. 2, 32 al. 2, 34 al. 1, 95 al. 1 SPVG).

4.3 Une convention par laquelle l'employeur public et l'employé mettent fin d'un commun accord aux rapports de travail est un contrat de droit administratif (arrêts 8C_176/2022 du 22 septembre 2022 consid. 5.1 ; 8C_283/2010 du 20 mai 2010 consid. 2), qui doit fondamentalement être interprété selon les mêmes règles qu'un contrat de droit privé (ATF 144 V 84 consid. 6.2.1 ; 139 V 82 consid. 3.1.2).

Lorsqu'il s'agit d'interpréter un contrat de droit administratif, le juge doit, comme pour un contrat de droit privé, rechercher d'abord la réelle et commune intention des parties au moment de la conclusion du contrat (interprétation subjective; ATF 148 V 70 consid. 5.1.1 ; 144 V 84 consid. 6.2.1). S'il ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (principe de la confiance ; ATF 148 V 70 consid. 5.1.1 ; 144 V 84 consid. 6.2.1 ; 144 III 93 consid. 5.2.3).

Dans l'interprétation de contrats de droit administratif, il y a lieu de présumer que l'administration n'est pas prête à convenir de quelque chose qui serait en contradiction avec l'intérêt public qu'elle doit préserver ou avec la législation topique (ATF 144 V 84 consid. 6.2.1 ; 135 V 237 consid. 3.6 ; 122 I 328 consid. 4e).

4.4 L’art. 5 al. 3 Cst. oblige les organes de l’État et les particuliers à agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. L’art. 9 Cst. confère à toute personne le droit d’être traitée par les organes de l’État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi. Le principe de la bonne foi exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. L’administration doit s’abstenir de tout comportement propre à tromper l’administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; 137 II 182 consid. 3.6.2). Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration, étant précisé qu’un renseignement ou une décision erronés de l’administration peut, selon les circonstances, intervenir tacitement ou par actes concluants (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; 143 V 341 consid. 5.2.1).

4.5 En l’espèce, les parties s’accordent sur le fait que des discussions ont eu lieu en été 2023 au sujet d’une convention de départ concernant la recourante.

Elles divergent en revanche sur l’existence d’un accord quant à une telle convention. La recourante ne conteste pas que seul le CA était habilité à valider une éventuelle convention de départ. Au demeurant, en sa qualité de responsable RH départementale à la direction du C______, elle connaissait ou devait parfaitement connaître la réglementation applicable en la matière, à savoir que seul le CA est habilité à mettre fin aux rapports de service. Or, elle ne soutient pas ni ne rend vraisemblable qu’elle aurait reçu de celui-ci une quelconque assurance relative au fait que l’exécutif acceptait de mettre un terme à son contrat au 30 septembre 2023 et était disposé à lui verser une indemnité de neuf mois de salaire. Son conseil fait, à cet égard, uniquement référence à un entretien téléphonique qu’il avait eu, le 29 septembre 2023, avec le J______ et non avec le CA.

La recourante ne peut ainsi se prévaloir d’assurances qu’elle ou son représentant aurait reçues de la part du CA, seul organe qui pouvait engager la ville au sujet d’une convention relative à la fin de ses rapports de service. Partant, en l'absence d'un accord valable entre les parties, les rapports de service de la recourante n'ont pas pris fin le 30 septembre 2023.

Par ailleurs, la recourante ne peut non plus déduire des pourparlers qui ont eu lieu une quelconque responsabilité précontractuelle de la ville. D’une part, une telle responsabilité pourrait, tout au plus, lui permettre – si les conditions en étaient remplies, ce qui n'est pas établi – de prétendre à une indemnisation pour le dommage subi, question qui ne fait cependant pas l’objet du litige. D’autre part, la construction même d’une responsabilité précontractuelle ne saurait trouver application in casu, l’exécutif de la ville n’ayant pris, comme évoqué ci-dessus, aucun engagement visant à laisser entendre qu’il allait rendre, lors de sa séance de la première semaine d’octobre 2023, une décision par laquelle il libérerait la recourante, qui plus est avec effet rétroactif au 30 septembre 2023, et lui allouerait une indemnité de départ de neuf mois.

La recourante fait grand cas du courriel de son conseil du 29 septembre 2023 indiquant au D______ que « Faisant suite à l’entretien téléphonique de ce jour avec M. J______, un accord est trouvé prévoyant un départ au 30.09 avec une indemnité globale de neuf mois. Je reste à votre disposition pour ˝ mettre en musique˝  cet accord ». Il ressort de ce courriel même que le prétendu accord n’était pas encore rédigé, d’une part. D’autre part et comme déjà observé, un tel accord ne pouvait être valable que s’il était validé par le CA. La prérogative de mettre fin aux rapports de service appartenant exclusivement à ce dernier, faute d’accord formel de celui-ci, il n’existait pas de convention liant l’intimée.

En outre, l’absence de réponse au courriel susmentionné, envoyé le vendredi 29 septembre 2023 en fin de journée, ne pouvait, de bonne foi, être interprétée comme un acquiescement du CA à mettre fin aux rapports de service avec effet au lendemain, samedi 30 septembre 2023.

Par ailleurs, l’intimée a exposé, sans être contredite, que le CA ne validait jamais une convention de départ prévoyant une indemnité de départ lorsque l’employé avait retrouvé un emploi ; c’était la raison pour laquelle l’indemnité, lorsqu’elle était convenue, était versée en deux fois, à savoir lors de la conclusion de la convention et quelques mois plus tard, à condition que la personne concernée soit toujours sans emploi. En tant que responsable RH rattachée à la direction du C______, la recourante devait connaître cette règle, étant rappelé comme relevé ci-avant qu'elle n'a pas contesté les explications données à ce sujet par l'autorité intimée dans la procédure. Il apparaît, au demeurant, dans l'intérêt, notamment financier, de la ville et, par voie de conséquence, de l'intérêt public à préserver les finances de celle-ci, à prévoir qu'une indemnité de départ soit versée en deux fois, le second versement étant conditionné au fait que l'ancien employé n'ait alors toujours pas retrouvé un nouvel emploi. Ainsi, même à admettre – ce qui n’est pas établi – que J______ aurait indiqué au conseil de la recourante le 29 septembre 2023 être disposé à soumettre au CA une proposition de convention de départ au 30 septembre 2023 avec une indemnité de départ de neuf mois, la recourante ne pouvait, de bonne foi, partir de l'idée que le CA allait valider une telle proposition.

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater qu’aucun accord valable n’est intervenu entre la recourante et l’autorité intimée prévoyant la fin des rapports de service de l’employée au 30 septembre 2023.

5.             Se pose ainsi la question de savoir si le licenciement avec effet immédiat de la recourante était justifié.

5.1 Selon l’art. 30 SPVG, quelle que soit la nature et la durée de l’engagement, l’employeur et les membres du personnel peuvent en tout temps mettre fin immédiatement aux rapports de service pour juste motif lorsque les règles de la bonne foi ne permettent plus d’exiger de la partie qui donne le congé leur continuation (al. 1). La résiliation par l’employeur (licenciement) fait l’objet d’une décision motivée du CA (al. 2).

La procédure de licenciement est régie par les art. 96 ss SPVG ainsi que par la LPA (art. 37 SPVG). L'art. 99 al. 3 SPVG stipule que, dans les cas de licenciements fondés sur les art. 30, 32 et 34, la personne intéressée peut demander à être entendue oralement par une délégation du CA et a le droit de se faire assister.

5.2 Selon l’art. 82 SPVG, les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la ville et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice. L’art. 83 SPVG prévoit que les membres du personnel doivent par leur attitude entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieurs et leurs subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a) et justifier et renforcer la considération et la confiance dont le personnel de la ville doit être l’objet (let. c). Dans l’exécution du travail, les membres du personnel doivent notamment : a) remplir leurs devoirs de fonction consciencieusement et avec diligence ; b) respecter leur horaire de travail, e) veiller à mettre à jour leurs connaissances professionnelles dans toute la mesure nécessaire à l’exécution de leur travail et f) se conformer aux règlements et directives les concernant (art. 84 SPVG).

5.3 L'art. 105 SPVG traite des conséquences d’un licenciement contraire au droit. Selon son al. 1, si la chambre administrative retient qu’un licenciement est contraire au droit, elle peut proposer au CA la réintégration de la personne intéressée. D’un commun accord, les parties peuvent convenir d’un transfert de la personne intéressée dans un poste similaire. Selon l'al. 2, en cas de refus du CA, la chambre administrative alloue à la personne intéressée une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à trois mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut.

En lieu et place de la réintégration, la personne intéressée peut demander le versement d’une indemnité. La chambre administrative alloue à la personne intéressée une indemnité dont le montant se calcule comme suit : a) en cas de licenciement immédiat sans juste motif (art. 30 SPVG), l’indemnité s’élève au montant que la personne intéressée aurait gagné si les rapports de service avaient pris fin à l’échéance du délai de congé ou de la durée déterminée fixée dans le contrat, sous imputation des revenus que la personne intéressée a réalisés pendant cette période ou auxquels elle a intentionnellement renoncé ; s’y ajoute un montant supplémentaire qui ne peut être inférieur à trois mois et supérieur à douze mois du dernier traitement brut, b) dans les autres cas, y compris en cas de licenciement abusif, l’indemnité s’élève à un montant qui ne peut être inférieur à trois mois et supérieur à douze mois du dernier traitement brut (art. 105 al. 3 SPVG).

5.4 L'art. 106 SPVG qui traite des conséquences d’un licenciement abusif ou sans juste motif prévoit qu'en dérogation avec l’art. 105, lorsque le licenciement contraire au droit est également abusif au sens de l’art. 336 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) ou des art. 3 ou 10 de la loi sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) ou sans juste motif au sens de l’art. 30 SPVG, la chambre administrative annule le licenciement et ordonne la réintégration de la personne intéressée

5.5 La résiliation immédiate pour justes motifs est une mesure exceptionnelle. Conformément aux principes dégagés par la jurisprudence en droit privé, mais qui peuvent être appliqués par analogie au droit de la fonction publique (ATF 143 II 443 consid. 7.3), elle doit être admise de manière restrictive. Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat (ATF 142 III 579 consid. 4.2 et les arrêts cités).

Par manquement du travailleur, on entend en règle générale la violation d'une obligation découlant du contrat de travail, mais d'autres incidents peuvent également justifier une résiliation immédiate (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1 ; 130 III 28 consid. 4.1). Ce qui est déterminant, c'est que les faits invoqués à l'appui du congé immédiat aient entraîné la perte du rapport de confiance, qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1). Les justes motifs de renvoi avec effet immédiat d'un titulaire de fonction publique peuvent procéder de toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service ; de toute nature, ils peuvent relever d'évènements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait pas éviter ou, au contraire, d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables. Les conditions justifiant une résiliation ne se déterminent pas de façon abstraite ou générale, mais dépendent concrètement de la position et des responsabilités de l'intéressé, de la nature et de la durée des rapports de travail ainsi que du genre et de l'importance du manquement (ATF 142 III 579 consid. 4.2 ; 137 III 303 consid. 2.1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_800/2016 du 12 décembre 2017 consid. 3.4 ; 4A_112/2017 du 30 août 2017 consid. 3.2 et les références citées).

5.6 5.6.1 En l’espèce, la recourante était en arrêt maladie depuis le 21 février 2022. Il ressort du dossier qu’à la suite de sa consultation du 17 février 2023, le médecin‑conseil de la ville a constaté une amélioration progressive et prévu une réévaluation à trois mois. Au vu de l’absence prolongée de l’employée, l’intimée a requis le 30 janvier 2023 l’intervention précoce de l’assurance-invalidité. La recourante n’ayant pas donné suite au courrier de ladite assurance, celle-ci a classé la procédure. L’intéressée tardait régulièrement à produire les certificats médicaux. Elle ne s’est pas non plus présentée au rendez-vous fixé le 17 mai 2023 par le médecin-conseil, ni au rendez-vous suivant fixé au 13 juin 2023. Un nouveau rendez-vous était ainsi fixé au 6 septembre 2023 auquel elle s’est finalement présentée. Selon le rapport du médecin-conseil du 12 septembre 2023, une opération était envisagée à la suite d’un accident non professionnel survenu le 16 mai 2023. L’arrêt-maladie de longue durée était « en amélioration ». L’état de santé devait être réévalué trois mois plus tard. Par courriel du 19 septembre 2023, répondant à une relance de la ville au sujet des certificats médicaux accidents d’août et septembre 2023, toujours pas produits, la recourante a indiqué qu’elle devait revoir le chirurgien orthopédiste la semaine d’après et produirait les certificats médicaux, le traitement étant toujours en cours.

Ayant encore affirmé à son employeur le 19 septembre 2023 qu'elle était toujours en traitement médical en lien avec ses arrêts maladie et accident, la recourante a ainsi laissé entendre que sa capacité de travail était entravée et que la prise d'un nouvel emploi n'était pas imminente. Dans ces circonstances, il lui appartenait d'autant plus de s'assurer qu'elle disposait d'un accord validé par le CA, seul organe qui y était habilité, et qui la libérait, dix jours après avoir soutenu être toujours en incapacité de travail, de ses rapports de service en vue de la prise d'un nouvel emploi.

Lors de son audition par la chambre administrative, elle a indiqué qu’elle avait reçu en août 2023 déjà, une attestation écrite d'engagement de F______. Tant qu’elle n'avait pas signé son contrat avec son nouvel employeur, elle n’avait pas souhaité faire état de l’avancement de sa postulation auprès de F______. Elle a expliqué qu’elle craignait que des « comportements de mauvaise foi » puissent nuire à la possibilité qui se présentait de rebondir professionnellement ; cette crainte l’avait conduite à « ne pas être complètement transparente avec la Ville au mois de septembre 2023 ».

Compte tenu de sa position de cadre supérieure, qui plus est active auprès des RH de son employeur, la recourante ne pouvait ignorer que faute de l’accord valable de l’intimée à une fin prématurée des rapports de service, elle demeurait liée par ceux‑ci.

La recourante en avait d’ailleurs pleinement conscience, dès lors que dans ses courriels des 29 et 30 novembre 2023 adressés à deux collaboratrices administratives de l’intimée, elle a indiqué que la CA ayant validé la décision de résiliation immédiate de ses rapports de service le 2 novembre 2023, elle ne faisait plus partie des effectifs de la ville depuis cette date. Lorsque l’intimée lui a adressé, le 5 décembre 2023, l’attestation exigée par l’assurance-chômage qui fait état de la « sortie » de l’employée le 2 novembre 2023, la recourante n’a pas demandé de modification de ce courrier, notamment de la date de départ de la ville ; au contraire, elle-même la considérait comme étant le 2 novembre 2023.

Or, elle a commencé un nouvel emploi le 1er octobre 2023. Il ne fait aucun doute qu’un tel manque de loyauté et une violation aussi crasse de ses obligations de travail justifie un licenciement avec effet immédiat.

5.6.2 Reste à déterminer si l’autorité intimée a respecté les règles applicables à un licenciement avec effet immédiat.

À aucun moment, la recourante ne lui a communiqué qu’elle avait un nouvel emploi. Il ressort d’un courriel du 13 octobre 2023 d’une collaboratrice administrative de la direction du C______ à la recourante qu’à cette date, les certificats médicaux accidents d’août à octobre 2023 et le certificat médical maladie d’octobre 2023 n’étaient toujours pas produits. Non seulement, la recourante n’a pas répondu à ce courriel, ce qui a décidé la ville de suspendre le versement de son traitement, mais elle a également, ce faisant, laissé croire à son employeur qu’elle était toujours en arrêt de travail pour des motifs de santé.

La recourante soutient que l’intimée savait dès le 4 octobre 2023 qu’elle était employée de F______. Elle fonde cette allégation sur le fait que cette date figure sur l’organigramme du département E______. Ce seul élément ne suffit pas pour en déduire que l’intimée en a pris connaissance le jour même. La ville a fait état de rumeurs qui avaient commencé à circuler dans ses services à la période des vacances scolaires 2023 selon lesquelles la recourante avait trouvé un nouvel emploi auprès de F______. Si les parties divergent sur le contenu de la conversation que D______ du C______ et la recourante ont eu lors de leur rencontre fortuite dans un centre commercial à la fin des vacances scolaires d’octobre 2023, elles s’accordent sur le fait que l’échange portait sur l’éventuelle activité professionnelle de la recourante auprès de F______. Lors de l’audience, la recourante a expliqué qu’elle s’était montrée évasive et avait rappelé à D______ du C______ qu’elle attendait toujours la convention négociée par son avocat. Compte tenu de ces circonstances, il ne peut être reproché à la ville d’avoir cherché à clarifier directement auprès de F______ si la recourante était ou allait être engagée par ceux-ci. Dès réception du courriel du 1er novembre 2023 de G______ des RH de F______ confirmant l’engagement dès le 1er octobre 2023 de la recourante, le CA, sous la signature du H______, et le J______ ont interpellé la recourante, le 2 novembre 2023, au sujet des informations recueillies, attirant son attention sur le fait qu’elles étaient susceptibles de conduire à une résiliation avec effet immédiat des rapports de service ; un délai au 6 novembre 2023 lui était imparti pour se déterminer. L’échange de courriel du 1er novembre 2023 était annexé à ce courrier.

Son conseil s’est déterminé par courriel du 3 novembre 2023 soutenant qu’un accord de départ avait été trouvé et invitant le J______ à « rapporter son courrier ». Ce dernier a, le jour même, accusé réception de ce courriel et répondu qu’il ne s’agissait pas de « son » courrier, mais de celui du CA et a contesté la teneur des discussions alléguée par le conseil de la recourante. Par courriel du 6 novembre 2023 au J______, le conseil de la recourante a fait valoir que ce dernier lui avait dit qu’il n’allait pas « bloquer » l’accord et qu’il ne voyait pas pourquoi l’avocat avait été renvoyé à lui pour « valider le tout ». Le J______ avait validé le principe d’un départ et de l’indemnité y relative. Reprocher à sa mandante d’avoir abandonné son poste et mettre en péril son nouvel emploi auprès de F______ était choquant. Il « attendai[t] donc l’annulation du pli en cause dans le délai escompté », de manière à ce que F______ ne licencient pas sa mandante. Le J______, dans un courriel également du même jour, a contesté les propos que lui prêtait l’avocat et relevé qu’ils étaient bien différents de ceux figurant dans le courriel du 29 septembre 2023. Il rappelait qu’il n’avait pas la compétence d’approuver ou valider une convention de départ. Dans un nouveau courriel, toujours du 6 novembre 2023, la recourante a demandé à recevoir copie « du dossier constitué en marge » du courrier du 2 novembre 2023, notamment le récit de sa rencontre fortuite avec un cadre supérieur. Elle se déterminerait ensuite.

Le 7 novembre 2023, l’autorité intimée a refusé la prolongation de délai, exposant que les éléments à la base de son courrier du 2 novembre 2023 étaient annexés à celui-ci et que la recourante avait pu se déterminer sur la rencontre fortuite avec D______ du C______ à la fin des vacances scolaires d’automne 2023. À réception de ce courriel, la recourante en a contesté le contenu, indiqué qu’elle venait d’être licenciée par F______, qu’elle souhaitait être entendue par le CA et a demandé quelle était l’implication du J______ dans la présente procédure.

La recourante ne conteste pas le refus de prolongation du délai imparti au 6 novembre 2023 pour se déterminer. Ce refus était justifié, dès lors qu'elle s’était déjà déterminée et que la demande de prolongation était fondée sur le souhait d’obtenir des éléments dont elle disposait déjà. Vu que la recourante n’a pas, dans le délai imparti pour se déterminer, requis son audition, l’autorité intimée n’était pas tenue de procéder à son audition. Le CA a licencié la recourante le 8 novembre 2023 avec effet immédiat.

Au vu de ce qui précède, le licenciement avec effet immédiat de la recourante ne viole ni la loi ni ne consacre un abus du pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

6.             Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne peut se voir allouer d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

Le présent litige n’a, a priori, pas de valeur litigieuse, au sens des art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 décembre 2023 par A______contre la décision de la Ville de Genève du 8 novembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat de la recourante, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Philippe KNUPFER, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :