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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1540/2023

ATA/621/2024 du 21.05.2024 sur JTAPI/1291/2023 ( DOMPU ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1540/2023-DOMPU ATA/621/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mai 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Olivier FAIVRE, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 novembre 2023 (JTAPI/1291/2023)


EN FAIT

A. a. A______ est propriétaire de l'immeuble B______ (ci-après : l'immeuble).

B. a. Par décision du 29 mars 2023, la Ville de Genève (ci-après : la ville), soit pour elle son service de la police municipale, lui a infligé une amende administrative de CHF 400.- au motif que le mercredi 22 mars 2023 à 7h47 un dépôt illicite de déchets contrevenant aux dispositions légales sur la gestion des déchets avait été constaté devant son immeuble.

C. a. Par acte du 1er mai 2023, A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation. Subsidiairement, il devait être ordonné au service de la police municipale de produire l'ensemble des documents utiles.

En mentionnant comme motif de l'amende un « dépôt illicite de déchets », ainsi que des dispositions légales « imprécises », le service de police municipale de la ville n'avait pas suffisamment motivé sa décision, sachant qu'il n'habitait pas dans cet immeuble. Son droit d'être entendu avait été violé.

b. Le 10 juillet 2023, la ville a conclu au rejet du recours.

L'amende était fondée sur un constat d'infraction opéré le mercredi 22 mars 2023 à 7h47, selon lequel six cartons avaient été déposés à destination de la voirie par le concierge à même le trottoir devant l'immeuble du recourant alors que ces déchets auraient dû être placés dans un conteneur devant lui-même être sorti pour la levée. Lors du constat, l'agent de la ville était en contact avec le concierge, lequel avait reconnu les faits.

Elle produisait des pièces dont le constat d'infraction et des photographies de l'infraction.

Il ressort en particulier du constat d’infraction que le concierge de l'immeuble avait reconnu être le responsable de l'infraction.

c. Le 16 août 2023, A______ a persisté dans ses conclusions.

Le concierge connaissait parfaitement les exigences de son métier et, de manière totalement incompréhensible, il lui avait été reproché d'avoir entreposé certains objets en dehors d'un conteneur. Il n'entendait pas se prononcer sur le bien-fondé des reproches adressés au concierge, car il était resté totalement étranger à ce contentieux. Il invitait le TAPI à ordonner l'audition du concierge.

La décision était arbitraire du fait qu'elle le sanctionnait alors que le véritable responsable échappait à toute sanction. Ne sachant toujours pas en quoi son concierge avait pu ignorer les exigences élémentaires de son poste, la décision violait enfin son droit d'être entendu.

d. Par jugement du 16 novembre 2023, le TAPI a refusé d’entendre le concierge et rejeté le recours.

La décision litigieuse était claire. Elle mentionnait les bases légales applicables et énonçait le motif pour lequel la ville avait infligé l'amende. Quoi qu'il en soit, A______, qui avait été en mesure d'agir en temps utile et de comprendre la portée de la décision, ainsi que cela découlait de ses écritures, n'avait subi aucun préjudice. Il avait aussi eu l'occasion de prendre connaissance des arguments développés le 10 juillet 2023 par la ville et d'y répliquer, de sorte qu'une éventuelle violation de son droit d'être entendu sous l'angle d'une absence de motivation aurait amplement été réparée dans le cadre de la procédure devant lui.

Les explications et photographies fournies par l'autorité intimée dans sa réponse au recours démontraient clairement que le 22 mars 2023 des déchets de type papier-carton se trouvaient devant l'immeuble, à même le trottoir, alors qu'ils auraient dû être mis dans un conteneur, comme le prévoyait la loi. Il ressortait du constat d'infraction que le concierge de l'immeuble avait reconnu être le responsable de ce dépôt. Partant, contrairement à ce que laissait entendre le recourant, l'infraction visée par la décision litigieuse était effectivement réalisée.

A______ ne pouvait valablement tirer argument du fait que les manquements du concierge, à qui il avait délégué la gestion des déchets de son immeuble, ne pourraient pas lui être opposés ni du fait qu'il n'aurait commis aucune faute. En effet, il indiquait que son concierge connaissait parfaitement les exigences de son métier, soutenant implicitement qu’il l’avait bien instruit. Il fallait admettre que l’instruction donnée était défaillante puisque, par ses agissements, le concierge avait violé la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20). Il devait ainsi en être déduit que A______ n’avait fautivement pas correctement instruit son auxiliaire.

Le montant de l’amende, non contesté, restait mesuré et, compte tenu du pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité en la matière, ne prêtait pas le flanc à la critique.

D. a. Par acte posté le 8 janvier 2024, A_____ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation. Préalablement, l’audition de « Monsieur C______ », soit vraisemblablement C______, concierge de l’immeuble, devait être ordonnée.

Il était propriétaire de l’immeuble et ainsi possible responsable du concierge. Il habitait cependant ailleurs. Le dépôt des déchets n’était pas de son fait. Le concierge n’avait pas signé le constat d’infraction. Son audition permettrait de comprendre son comportement, sachant qu’il connaissait parfaitement son métier et les obligations légales y afférentes. Elle permettrait également d’établir qu’il l’avait correctement choisi, instruit et surveillé et était partant exempt de tout reproche. Si le concierge avait immédiatement reconnu les faits, on ne comprenait pas pourquoi il n’avait pas été sanctionné.

Le concierge avait apparemment été contacté par téléphone. Sa reconnaissance des faits n’avait pas été retranscrite et il n’avait pas signé le constat d’infraction. Son droit d’être entendu avait été violé.

L’infraction avait un caractère pénal, et une faute propre devait pouvoir lui être imputée. La faute du concierge ne pouvait lui être imputée. La décision attaquée était contraire à la loi.

Le défaut d’instruction du concierge avait été retenu de manière arbitraire par le TAPI. Il ne ressortait aucunement du dossier.

Le prononcé de l’amende violait également le principe de proportionnalité.

b. Le 5 février 2024, la ville a conclu au rejet du recours, se référant au jugement attaqué.

c. Le 8 mars 2024, le recourant a renoncé à répliquer.

d. Le 12 mars 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant conteste que le dépôt de cartons sur la voie publique incriminé lui soit imputable.

2.1 La loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20) règle la gestion de l’ensemble des déchets résultant d’activités déployées sur le territoire du canton ou éliminés à Genève, à l’exclusion des déchets radioactifs (art. 1). Elle interdit d’éliminer ou de déposer des déchets hors des installations publiques ou privées autorisées par le département ou des emplacements aménagés à cet effet et désignés par voie de règlement (art. 10 al. 1). Elle charge les communes de la collecte, du transport et de l’élimination des déchets ménagers (art. 12 al. 1) ainsi que de l’organisation de des collectes sélectives des autres déchets ménagers valorisables ou nuisibles pour l’environnement, selon les besoins et aux emplacements appropriés, et veillent à leur élimination (art. 12 al. 3). Les communes peuvent édicter des règlements particuliers (art. 12 al. 4). La collecte, le transport et l’élimination des déchets, à l’exception des déchets ménagers, sont à la charge des particuliers (art. 16 al. 1). Ceux-ci veillent à ce que les filières d’élimination les plus respectueuses de l’environnement soient utilisées en conformité avec la législation fédérale et cantonale et à ce que les autorisations adéquates de mouvement ou d’élimination des déchets soient délivrées (art. 16 al. 3). Les propriétaires d’immeubles sont tenus, à la demande des autorités communales, de mettre à disposition des occupants de ceux-ci les conteneurs nécessaires au tri et au dépôt des déchets, selon un modèle agréé par les communes et le département (art. 17 al. 1). Le règlement fixe les modalités d’usage des conteneurs en fonction du tri et de la collecte sélective des déchets (art. 17 al. 2).

2.2 Selon le règlement d'application de la loi sur la gestion des déchets du 28 juillet 1999 (RGD - L 1 20.01), les déchets ménagers se composent de déchets organiques, de déchets incinérables, de déchets encombrants, d'autres déchets collectables séparément, de déchets spéciaux et autres déchets soumis à contrôle (art. 15 al. 1 let. a). Tout immeuble destiné à l’habitation ou au travail doit être pourvu de locaux ou emplacements réservés à la remise de conteneurs. Ces locaux ou emplacements doivent être facilement et gratuitement accessibles et, en principe, être dimensionnés de manière à permettre un tri et une collecte sélective des déchets ménagers (art. 18 al. 1). Les propriétaires des immeubles sont tenus de fournir en nombre suffisant les conteneurs et de maintenir les emplacements, les locaux et le mobilier dans un parfait état de propreté et d’hygiène. Ils affichent les informations relatives aux levées organisées par les communes (art. 18 al. 2).

2.3 Selon l’art. 43 al. 1 LGD, est passible d’une amende administrative de CHF 200.- à CHF 400'000.- tout contrevenant (a) à la LGD ; (b) aux règlements et arrêtés édictés en vertu de la LGD ; (c) aux ordres donnés par l’autorité compétente dans les limites de la LGD et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci. Les amendes peuvent être infligées tant à des personnes morales qu'à des personnes physiques (al. 2). Le délai de prescription est de sept ans (al. 3). Les contraventions sont constatées par les agents de la force publique et tous autres agents ayant mandat de veiller à l’observation de la loi (art. 44 al. 1 LGD). Les règlements communaux peuvent prévoir les sanctions et les mesures prévues dans la loi (art. 17 al. 2 RGD).

2.4 Le règlement de la ville sur la gestion des déchets du 25 janvier 2024 (LC  21 911) règle la collecte des déchets ménagers (art. 22 s.), dispose qu’il est interdit d’éliminer ou de déposer des déchets sur le territoire de la Ville de Genève hors des emplacements et installations aménagés à cet effet et en dehors des horaires définis par le service en charge de la collecte des déchets (art. 32 al. 1) et reprend en substance la disposition de la LGD concernant les amendes administratives (art. 33).

2.5 Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/159/2021 du 9 février 2021 consid. 7b).

En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/440/2019 du 16 avril 2019 consid. 5c et les références citées).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence. Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès ou d’abus. Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/440/2019 précité consid. 5c et les références citées).

L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/440/2019 précité consid. 5c et les références citées).

2.6 Selon l'art. 7 par. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international.

Le principe de la légalité est consacré par l'art. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), qui prévoit qu'une peine ou une mesure ne peuvent être prononcées qu'en raison d'un acte expressément réprimé par la loi. La norme pénale doit être formulée de manière suffisamment précise pour que les citoyens puissent s'y conformer et identifier les conséquences d'un comportement donné avec un degré de certitude correspondant aux circonstances (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2 ; 141 IV 179 consid. 1.3.3 ; 138 IV 13 consid. 4.1).

L'exigence de précision de la base légale ne doit cependant pas être comprise d'une manière absolue. Le législateur ne peut pas renoncer à utiliser des définitions générales ou plus ou moins vagues, dont l'interprétation et l'application sont laissées à la pratique. Le degré de précision requis ne peut pas être déterminé de manière abstraite. Il dépend, entre autres, de la multiplicité des situations à régler, de la complexité ou de la prévisibilité de la décision à prendre dans le cas particulier, du destinataire de la norme, ou de la gravité de l'atteinte aux droits constitutionnels. Il dépend aussi de l'appréciation que l'on peut faire, objectivement, lorsque se présente un cas concret d'application (ATF 147 IV 274 consid. 2.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_315/2022 du 29 septembre 2022 consid. 1.1).

Ce principe est violé lorsqu'une personne est poursuivie pénalement en raison d'un comportement qui n'est pas incriminé par une loi valable, ou lorsque l'application du droit pénal à un acte déterminé procède d'une interprétation de la norme pénale excédant ce qui est admissible au regard des principes généraux du droit pénal (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2).

2.7 Selon l'art. 11 CP, un crime ou un délit peut aussi être commis par le fait d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir (al. 1). Reste passif en violation d'une obligation d'agir celui qui n'empêche pas la mise en danger ou la lésion d'un bien juridique protégé par la loi pénale bien qu'il y soit tenu à raison de sa situation juridique. La loi énumère plusieurs sources pouvant fonder une position de garant, à savoir la loi, un contrat, une communauté de risques librement consentie ou la création d'un risque (art. 11 al. 2 CP).

N'importe quelle obligation juridique ne suffit cependant pas. Il doit s'agir d'une obligation juridique qualifiée (message du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse, FF 1999, p. 1808 ; Ursula CASSANI, in Commentaire romand, Code pénal I, n° 21 et 25 ad art. 11 CP). Il faut que l'auteur se soit trouvé dans une situation qui l'obligeait à ce point à protéger un bien déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection) ou à empêcher la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient exposés (devoir de surveillance), que son omission peut être assimilée au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (ATF 136 IV 188 consid. 6.2 ; 134 IV 255 consid. 4.2.1).

Pour déterminer si un délit d'omission improprement dit est réalisé, il y a tout d'abord lieu d'examiner si la personne à laquelle l'infraction est imputée se trouvait dans une situation de garant (ATF 108 IV 5 consid. 1a et b). Ce n'est que si tel était bien le cas que l'on peut établir l'étendue du devoir de diligence qui découle de cette position de garant (ATF 110 IV 70 consid. 2) et quels actes concrets l'intéressé était tenu d'accomplir en raison de ce devoir de diligence.

Dans les conditions fixées par la loi, l'employeur est responsable, sur le plan civil, des dommages causés par ses employés à ses cocontractants (art. 101 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220) ou à des tiers (art. 55 CO). L’employeur se trouve ainsi dans une position de garant.

Pour s'exculper, il doit prouver qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances concrètes (cura in eligendo, instruendo et custodiendo) ou qu'un comportement diligent n'aurait pas empêché la survenance du dommage. Les exigences envers l'employeur sont élevées. L'admission de motifs libératoires ne doit être admise que restrictivement. La diligence requise est proportionnelle à la dangerosité du travail de l'auxiliaire. Cela étant, on ne saurait demander l'impossible. Il faut s'en tenir à ce qui est raisonnablement exigible dans la marche quotidienne d'une entreprise (ATF 110 II 456 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_326/2008 du 16 décembre 2008 consid. 5.3 ; Franz WERRO/Michel PERRITAZ, Commentaire romand, Code des obligations I, 3e éd. 2021, nos 18 ss ad art. 55 CO ; Roland BREHM, Berner Kommentar, 5e éd. 2021, nos 46 ss ad art. 55 CO)

2.8 En l’espèce, l’intimée a fondé l’amende administrative querellée sur les « art. 1 et suiv., not. art. 10, 12, 43 et 44 » LGD et « art. 1 et suiv., not. art. 5 et 17 » RGD. Le procès-verbal du constat d’infraction coche la case « papier-carton », mentionne « non utilisation du conteneur PC. Contact avec le concierge ce jour » et coche la case « reconnaissance des faits ».

C’est sur l’art. 10 LGD, qui interdit d’éliminer ou de déposer des déchets hors des installations publiques ou privées autorisées par le département ou des emplacements aménagés à cet effet et désignés par voie de règlement, que l’intimée fonde le comportement qu’elle reproche et l’amende qu’elle a infligée au recourant.

Il n’est pas contesté que les cartons ont bien été déposés dans la rue – et non dans un conteneur – non par le recourant lui-même mais par le concierge de l’immeuble, ce que ce dernier a reconnu.

Le concierge est ainsi l’auteur direct de l’infraction à l’art. 10 LGD.

Il convient de déterminer si son comportement ou un autre comportement punissable peut également être imputé au recourant.

L’art. 10 LGD ne prévoit pas de punissabilité à un autre titre, comme la qualité de propriétaire de l’immeuble. La LGD n’institue par ailleurs pas d’obligation du propriétaire de s’assurer qu’aucun dépôt sauvage n’a lieu devant son immeuble, dont la violation serait érigée en infraction par l’art. 43 LGD.

Il reste à examiner si la qualité d’employeur du recourant pouvait fonder sa responsabilité pénale compte tenu de sa position de garant.

La question du lien de causalité souffrira de demeurer indécise, vu ce qui suit.

Le TAPI a retenu que le recourant avait instruit le concierge de manière défaillante, puisque celui-ci avait violé la LGD.

Ce raisonnement ne peut être suivi, dans la mesure où il revient en pratique à exclure la preuve libératoire à chaque fois qu’une infraction est commise par l’employé. Le recourant a relevé à juste titre que le concierge avait admis sa faute, ce qui signifiait qu’il connaissait ses obligations et avait partant été correctement choisi (cura in eligendo) et instruit (cura in instruendo).

L’intimée ne soutient pas pour le surplus que le concierge serait coutumier des débarras sauvages, de sorte qu’il ne peut être reproché au recourant une carence dans son devoir de surveillance (cura in custodiendo) – s’agissant par ailleurs d’un comportement à la gravité toute relative ne menaçant pas des biens de valeur élevée.

Le recourant doit donc – sans qu’il soit nécessaire d’entendre le concierge ni d’ailleurs d’examiner le grief de violation du droit d’être entendu – être mis au bénéfice de la preuve libératoire, de sorte qu’aucune infraction ne peut lui être imputée au titre de sa position de garant.

Il sera encore observé que les références invoquées devant le TAPI par l’intimée au sujet de l’imputation par principe au mandant des actes du mandataire concernent les conséquences procédurales de l’irrespect de délais procéduraux et non pénaux de la commission d’une infraction.

Le recours sera admis et le jugement et la décision attaquée seront annulés.

3.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de l’intimée (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée au recourant, à la charge de l’intimée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 janvier 2024 par A______contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 novembre 2023 ;

au fond :

l’admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 novembre 2023 et la décision de la Ville de Genève du 29 mars 2023 ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de la Ville de Genève ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge de la Ville de Genève ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Olivier FAIVRE, avocat du recourant, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :