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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2746/2023

ATA/556/2024 du 02.05.2024 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2746/2023-EXPLOI ATA/556/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mai 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Stéphanie FONTANET, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI intimé

 



EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : A______), dont le siège se trouve à l'avenue B______ 17, à C______ (GE), est une société ayant pour but la fourniture de services d'aide et d'assistance, à domicile ou à l'extérieur, pour les enfants et les adolescents, l'organisation et l'animation d'évènements les concernant, tels que fêtes, anniversaires et baptêmes notamment. Elle a été inscrite le 16 mai 2013 au registre du commerce du canton de Genève.

b. D______, née le ______1967 et domiciliée également à l'avenue B______ 17, en est l'associée gérante. Elle est au bénéfice d'un permis d'établissement, valable jusqu'au 12 juillet 2028. Elle est également titulaire d'un certificat brésilien de fin d'études secondaires post obligatoires et de formation professionnelle d'assistante en comptabilité délivré par le collège d'État « E______ » le 30 décembre 1984.

Selon son extrait du registre des poursuites du 30 mars 2023, elle faisait l'objet d'onze poursuites pour un total de CHF 15'638.21 et de 26 actes de défaut de biens, suite à une saisie, non éteints des dernières 20 années pour un total de CHF 47'212.91. Son extrait du registre des poursuites du 28 juin 2023 est vierge.

c. Depuis sa création jusqu'au 31 août 2019, A______ avait une seule employée, soit D______. En mars 2023, la société comptait, en plus de D______, cinq employées sous contrat.

Les contrats conclus respectivement les 1er septembre 2019, 13 janvier 2020, 1er octobre 2021, 1er mars 2022 et 1er novembre 2022 entre A______, d'une part, et, séparément, F______, G______, H______, I______ et J______, d'autre part, prévoyaient un horaire respectif de 32 heures par semaine, six heures par semaine, 15h10 par mois, « 17.20 » heures par mois et cinq heures par jour.

d. Par décision du 31 août 2022, l'office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE) a prononcé l'assujettissement de A______ à la loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services du 6 octobre 1989 (LSE - RS 823.11) dans le cadre de son activité de mise à disposition de personnel dans le domaine d’aide et d’assistance à domicile pour les enfants et les adolescents.

e. Le recours formé auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre cette décision a été rejeté par arrêt du 7 mars 2023. Ce dernier n'a pas fait l'objet d'un recours.

B. a. À la suite de cet arrêt, A______ a cessé provisoirement son activité.

b. Le 21 avril 2023, elle a adressé à l'OCE une demande d'autorisation de pratiquer la location de services. Elle lui a transmis divers documents en lien avec sa requête, notamment son extrait du registre des poursuites ainsi que celui de D______ du 30 mars 2023, une attestation de la Fondation pour la formation des adultes Genève (IFAGE) selon laquelle D______ avait régulièrement suivi, de septembre 2018 à février 2019, le programme de formation préparant aux examens du certificat d'assistante en gestion du personnel, le certificat brésilien de fin d'études secondaires post obligatoires et de formation professionnelle d'assistante en comptabilité délivré par le collège d'État « E______ » ainsi qu'une attestation selon laquelle elle avait œuvré comme bénévole lors d'une fête en 2014. À la demande était encore annexé un exemple de contrat‑cadre de travail temporaire.

Selon le formulaire joint à la demande, D______ était la personne responsable de l'entreprise.

c. A______ a fourni ultérieurement, à titre de sûretés, un acte de cautionnement.

d. L'OCE a prié A______ de lui fournir des renseignements et pièces complémentaires, notamment un extrait certifié conforme de son inscription au registre du commerce, indiquant le nom et le droit de signature d'un responsable autre que D______, celle-ci ne remplissant pas la condition de bonne réputation, vu les poursuites dont elle faisait l'objet, ainsi qu'une copie d'un contrat de bail pour ses locaux commerciaux autre que celui indiquant comme adresse celle de D______, car une domiciliation « c/o » n'était pas admise.

L'OCE a également requis la modification de l'exemple du contrat-cadre de travail temporaire sur une dizaine de points.

e. A______ a exposé que son activité ne nécessitant pas un placement particulier, il se justifiait qu'elle puisse l'exercer depuis le domicile de sa gérante. En outre, les actes de défaut de biens dont celle-ci faisait l'objet concernaient uniquement le paiement de sa propre prime d’assurance-maladie, si bien que son aptitude à gérer la société ne pouvait être remise en cause.

Elle a transmis de nouveaux documents, notamment une nouvelle version du contrat-cadre de travail temporaire, modifiés conformément aux instructions de l'OCE.

f. Celui-ci a sollicité l'avis du secrétariat d'État à l'économie (ci-après : SECO) sur la candidature de D______ en tant que personne responsable de la location de services de A______.

g. Le SECO a demandé des informations complémentaires. Il souhaitait notamment savoir si D______ avait acquis des connaissances en matière de droit du travail, si elle avait passé l'examen en vue de l’obtention du certificat d'assistante en gestion du personnel et si les activités de location de services avaient lieu dans l'appartement de l'intéressée.

Il a notamment requis la production d'une attestation de la régie autorisant l'exercice d'une activité commerciale dans l'appartement de D______.

h. À la suite des déterminations du SECO, l'OCE a demandé une nouvelle fois à A______ des informations complémentaires sur la personne responsable de l'entreprise et le local concerné. Il a en particulier sollicité la production d'une attestation du bailleur autorisant l'exercice d'une activité commerciale dans l'appartement de D______ et acceptant, le cas échéant, que le nom de la société figure sur la boîte aux lettres ainsi que sur la porte d'entrée de l'immeuble et du logement. Il a également requis une nouvelle modification de l'exemple du contrat-cadre de travail temporaire sur six points.

i. Les employées de A______, à l'exclusion de D______, ont été entendues par l'OCE le 11 juillet 2023.

i.a. H______ a indiqué travailler pour A______ depuis octobre 2020 et, dans ce cadre, pour deux familles différentes.

i.b. I______ a indiqué avoir travaillé pour A______ entre avril 2022 et juillet 2022, les mercredis de 08h00 à 12h30. Elle avait cessé son activité après être tombée enceinte mais était toujours sous contrat avec la société.

i.c. G______ a exposé travailler pour A______ depuis 2020. Sa rémunération mensuelle était, pour les mois de janvier à avril 2023, de moins de CHF 1'000.- car elle ne travaillait pas beaucoup.

i.d. F______ a exposé travailler pour A______ depuis quelques années, et dans ce cadre, pour plusieurs familles.

i.e. J______ a indiqué avoir travaillé pour A______ d'août 2021 à décembre 2021, et de novembre 2022 à avril 2023.

j. Le 14 juillet 2023, A______ a transmis un contrat-cadre de travail temporaire modifié ainsi qu'une attestation du bailleur de D______, à teneur de laquelle ce dernier autorisait la domiciliation de l'activité en lien avec D______ à l'avenue B______ 17, dans la mesure où le logement n'était pas le lieu de travail des employées, et autorisait l'ajout de « A______ » sur la boîte aux lettres.

Elle a notamment exposé que D______ était titulaire d'un certificat de fin d'études secondaires post obligatoires et de formation professionnelle d'assistante en comptabilité et que l'intéressée était son associée-gérante depuis sa création en 2013, si bien qu'elle disposait d'une expérience de plusieurs années dans le domaine de la location de services. Elle n'avait pas passé les examens du certificat d'assistante en gestion du personnel. L'activité exercée dans l'appartement sis avenue B______ 17 était purement administrative.

k. Après avoir reçu de l'OCE les informations et pièces complémentaires fournies préalablement par A______, le SECO s'est opposé à ce que la candidature de D______ soit retenue.

Celle-ci ne disposait pas des qualifications nécessaires. Elle n'avait produit qu'un seul certificat de travail pour une mission de quelques heures et n'était pas en mesure de démontrer qu'elle avait acquis de l'expérience, notamment en matière de rédaction de contrats de travail et d'assurances sociales. Enfin, A______ devait disposer d'un local commercial adéquat.

l. L'OCE a informé A______ que les « contrats transmis » étaient désormais agréés. Il a requis la production de renseignements et documents complémentaires, notamment et à nouveau une copie d'un contrat de bail pour ses locaux commerciaux autre que celui indiquant comme adresse celle de D______ ainsi qu'une attestation du bailleur certifiant que la société avait un accès permanent et exclusif à son bureau dans les nouveaux locaux et que ledit bureau était un espace individuel pouvant être fermé.

Il a rappelé qu'une nouvelle adresse devait être attribuée à la société et qu'un nouveau responsable devait être désigné, D______ ne disposant pas d'une expérience professionnelle suffisante en matière de droit du travail.

m. Le 11 août 2023, A______ a transmis un formulaire de demande modifié sur la question des renseignements relatifs aux locaux commerciaux.

Elle a exposé que l'appartement de D______ possédait un bureau qui pouvait être fermé. Elle pouvait transmettre des photos l'attestant. En outre, il n'était pas question qu'elle nomme un nouveau responsable. Son dossier était complet et elle devait se voir octroyer l'autorisation sollicitée.

Elle a prié l'OCE de rendre une décision sur sa demande d'autorisation de pratiquer la location de services.

n. Par décision du 23 août 2023, l'OCE a refusé, d'une part, la candidature de D______ en tant que personne responsable de la location de services au sein de A______ et, d'autre part, l'appartement occupé par D______, sis avenue B______ 17, comme local commercial approprié.

D______ n'avait ni les qualifications ni l'expérience pour assurer une activité de location de services et ne jouissait pas d'une bonne réputation, vu les nombreuses poursuites dont elle faisait l'objet. Elle ne possédait qu'une formation dispensée à l'étranger et n'avait pas passé les examens du certificat d'assistante en gestion du personnel. Elle avait seulement prouvé une activité de bénévole de trois heures lors d'une fête.

A______ ne disposait pas d'un local commercial approprié dès lors qu'elle était domiciliée à l'adresse privée de D______, ce qui rendait impossible le respect des dispositions relatives à la protection des données.

o. Par courrier adressé à l'OCE, A______ a relevé que ce dernier avait à plusieurs reprises sollicité l'avis du SECO sans l'en informer. Elle l'a prié de lui remettre l'intégralité de son dossier, y compris les échanges intervenus entre lui et le SECO.

p. L'OCE a remis à A______ une copie de son dossier le 30 août 2023, lequel comportait notamment la correspondance avec le SECO.

C. a. Par acte remis à la poste le 4 septembre 2023, A______ a interjeté recours contre la décision de l'OCE auprès de la chambre administrative, concluant à son annulation et à ce que l'OCE soit enjoint à statuer sur sa demande d'autorisation. Subsidiairement, elle a conclu à ce qu'il soit constaté qu'elle remplissait toutes les conditions pour se voir accorder une autorisation de pratiquer la location de services.

La décision querellée était incidente et lui causait un préjudice irréparable. L'OCE avait commis un déni de justice en refusant de statuer sur sa demande d'autorisation. Il avait également violé son droit d'être entendue en sollicitant l'avis du SECO sans l'avertir et en rendant sa décision sans qu'elle puisse s'exprimer sur cet avis. D______ disposait d'une formation équivalente à un apprentissage et d'une expérience de plusieurs années, au moins trois, dans la gestion d'entreprise et en conduite du personnel. Son appartement constituait un local commercial approprié où la confidentialité des entretiens était garantie.

b. L'OCE a conclu au rejet du recours et persisté dans les termes de sa décision.

c. Dans sa réplique, A______ a relevé que l'OCE était tenu, avant de rendre sa décision, de lui transmettre l'avis du SECO, puisqu'il s'était appuyé sur cet avis.

D______ avait toujours été à la tête de la société, qu'elle avait fondée en 2013 et toujours gérée. Depuis 2019, elle avait développé l'activité entrepreneuriale et avait engagé jusqu'à six employées, dont le point de contact était D______. Elle s'était dans ce contexte occupée des tâches administratives liées à la gestion de l'entreprise et du personnel. Elle n'avait pas l'obligation de passer l'examen du certificat d'assistante en gestion du personnel.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. La chambre administrative examine d’office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/79/2024 du 23 janvier 2024 consid. 1 et l'arrêt cité).

1.1 Le recours a été interjeté dans un délai de dix jours dès la notification de la décision attaquée. Ainsi, que celle-ci soit finale ou incidente, question qui sera examinée ci-après, il a été interjeté en temps utile (art. 62 al. 1 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10) et devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

1.2 La recourante soutient que la décision querellée serait incidente.

1.3 Selon l'art. 57 LPA, sont notamment susceptibles de recours les décisions finales (let. a) et les décisions incidentes si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. c).

Constitue une décision finale celle qui met un point final à la procédure, qu’il s’agisse d’une décision sur le fond ou d’une décision qui clôt l’affaire en raison d’un motif tiré des règles de la procédure (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 256 n. 2.2.4.2 ; ATA/341/2024 du 5 mars 2024 consid. 2.1.3 et l'arrêt cité). Est en revanche une décision incidente celle qui est prise pendant le cours de la procédure et ne représente qu’une étape vers la décision finale (ATA/341/2024 précité consid. 2.1.3 et l'arrêt cité) ; elle peut avoir pour objet une question formelle ou matérielle, jugée préalablement à la décision finale (ATF 139 V 42 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_567/2016 et 2C_568/2016 du 10 août 2017 consid. 1.3).

1.4 En l'espèce, par décision du 23 août 2023, l'intimé a refusé, d'une part, la candidature de D______ en tant que personne responsable de la location de services au sein de la société recourante et, d'autre part, l'appartement occupé par l'intéressée comme local commercial approprié. Le dispositif de la décision ne contient pas d'autres mentions.

L'intimé a ainsi considéré que certaines des conditions cumulatives permettant la délivrance d'une autorisation de pratiquer la location de services au sens de la LSE, conditions qui seront exposées ci-après, n'étaient pas réalisées. Ce faisant, et contrairement à ce que prétend la recourante, il a – implicitement à tout le moins – refusé de délivrer l'autorisation sollicitée et a par conséquent mis fin à la procédure, quand bien même cela ne ressortirait pas expressément du dispositif de la décision. Ce constat s'impose d'autant plus que la société a expressément manifesté son intention de ne pas compléter ni modifier son dossier, puisqu'elle a notamment indiqué que ce dernier était complet et qu'elle ne nommerait pas de nouveau responsable.

La décision querellée doit donc être considérée comme finale, et non pas incidente. La recevabilité du recours n'est par conséquent ni soumise à l'existence d'un préjudice irréparable ni à la condition que l'admission du recours puisse conduire immédiatement à une décision finale qui permettrait d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. Ces conditions ne seront donc pas analysées.

Pour le reste, le recours est recevable, si bien qu'il convient d'entrer en matière sur le fond.

2.             Dans un premier grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner avec les griefs au fond, la recourante se plaint d'un déni de justice, dans la mesure où l'intimé n'aurait rendu qu'une décision incidente sur sa demande d'autorisation.

2.1 L’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) garantit à toute personne, dans le cadre d’une procédure administrative ou judiciaire, le droit à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable. La personne qui présente une requête à l’autorité est fondée à exiger que celle-ci se prononce sans retard injustifié, c’est-à-dire dans un délai convenable eu égard à la nature de l’affaire et à l’ensemble des circonstances (ATF 131 V 407 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2017 du 14 juillet 2017 ; ATA/488/2020 du 19 mai 2020 consid. 10a). L'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas sa décision dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATA/488/2020 précité consid. 10a).

2.2 La demande d’autorisation de pratiquer la location de services doit être déposée par écrit auprès de l’autorité désignée par le canton (art. 40 al. 1 LSE), soit l'OCE à Genève (art. 2 de la loi sur le service de l’emploi et la location de services du 18 septembre 1992 - LSELS - J 2 0 ; art. 1 al. 1 du règlement d’exécution de la loi sur le service de l’emploi et la location de services du 14 décembre 1992 -
RSELS - J 2 05.01). Les autorités qui délivrent les autorisations rendent une décision dans les 40 jours à compter de la réception des dossiers complets (art. 40 al. 4 LSE).

2.3 En l'espèce, il a été vu ci-dessus que, contrairement à ce que prétend la recourante, l'intimé a rendu une décision finale sur sa demande d'autorisation de pratiquer la location de services. Ce reproche apparaît ainsi infondé.

Pour ce qui a trait à la durée de la procédure, la décision querellée a été rendue le 23 août 2023, soit quatre mois après le dépôt de la demande le 21 avril 2023. Le dossier considéré complet a néanmoins été transmis à l'intimé au plus tôt le 14 juillet 2023, à la suite des demandes de compléments formulées par l'intimé, si bien que le délai prévu par l'art. 40 al. 4 LSE a été respecté.

Il sied encore de préciser que les compléments requis par l'intimé, à qui il ne saurait être reproché d'avoir instruit les faits, ont inévitablement eu pour conséquence d'allonger la procédure. Ces demandes, nécessaires, expliquent ainsi en grande partie à tout le moins la raison pour laquelle la décision querellée a été rendue quatre mois après le dépôt de la demande d'autorisation. L'intimé a donc statué dans un délai raisonnable eu égard à la nature de l’affaire et à l’ensemble des circonstances. Par conséquent, il ne saurait lui être fait grief d'avoir tardé à statuer.

Ce grief sera donc écarté.

3.             Dans un second grief d'ordre formel, la recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue. Elle soutient que l'intimé aurait dû lui communiquer les positions du SECO avant de rendre sa décision. Il s'était appuyé sur ces dernières, si bien qu'elle avait été empêchée de s'exprimer sur des éléments décisifs. Elle ignorait en outre que l'intimé avait demandé l'avis du SECO.

3.1 Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2022 du 28 novembre 2022 consid. 3 et les références citées).

Le droit d’être entendu sert non seulement à établir correctement les faits, mais constitue également un droit indissociable de la personnalité garantissant à un particulier de participer à la prise d’une décision qui touche sa position juridique (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; 132 V 368 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_79/2021 du 9 septembre 2021 consid. 2.1). L’étendue du droit de s’exprimer ne peut pas être déterminée de manière générale, mais doit être définie au regard des intérêts concrètement en jeu ; l’idée maîtresse est qu’il faut permettre à une partie de pouvoir mettre en évidence son point de vue de manière efficace (ATF 144 I 11 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités).

3.2 Dans une procédure initiée par un administré, celui-ci est censé motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents ; il n'a donc pas un droit à être encore entendu par l'autorité avant que celle-ci ne prenne sa décision, afin de pouvoir présenter des observations complémentaires. Reste réservée l'hypothèse où l'autorité entendrait fonder sa décision sur des éléments auxquels l'intéressé ne pouvait s'attendre (ATA/249/2024 du 27 février 2024 consid. 3.1 et l'arrêt cité ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 519 s., n. 1530).

3.3 En tant que garantie générale de procédure, le droit d’être entendu permet au justiciable de consulter le dossier avant le prononcé d’une décision. En effet, la possibilité de faire valoir ses arguments dans une procédure suppose la connaissance préalable des éléments dont l’autorité dispose (ATF 126 I 7 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_66/2013 du 7 mai 2013 consid. 3.2.2). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le droit de consulter le dossier ne s’étend en revanche pas aux préavis établis par une autorité d’instruction à l’attention de l’autorité décisionnelle (ATF 131 II 13 consid. 4.2 ; 117 Ia 90 consid. 5b). Ce genre de document n’a en effet pas de conséquence juridique directe sur la situation de l’intéressé et est considéré comme un acte interne à l’administration, destiné à faciliter la tâche de l’organe de décision, qui doit se former une opinion sur l’affaire à traiter (ATF 125 II 473 consid. 4a ; 116 Ib 260 consid. 1d).

3.4 L’autorité n’a pas à attirer spécialement l’attention des parties sur les faits décisifs qui leur sont connus et qui fonderont la décision, ni sur l’argumentation juridique future de cette décision ou sur son appréciation juridique des faits allégués (ATA/321/2024 du 5 mars 2024 consid. 4.5 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2015, p. 269-270).

3.5 En l'espèce, la société a initié la présente procédure en requérant la délivrance d'une autorisation de pratiquer la location de services. Elle n'avait donc, sur le principe déjà, pas un droit à être entendue par l'intimé avant que celui-ci ne rende sa décision. Les déterminations du SECO ne sauraient constituer des éléments auxquels elle ne pouvait s'attendre, puisque ce dernier a exprimé son avis sur la base des pièces et informations transmises (à l'intimé), initialement et après plusieurs échanges de vues, par la société elle‑même, dont celle‑ci avait ainsi connaissance. Elle n'indique d'ailleurs pas quels seraient les éléments ressortant de l'avis du SECO auxquels elles ne pouvaient s'attendre.

Il sera au demeurant relevé qu'elle s'est néanmoins déterminée à plusieurs reprises avant le prononcé de ladite décision, à la suite des nombreux échanges qu'elle a eus avec l'intimé, celui-ci exposant à chaque fois ce qu'il attendait d'elle et les raisons motivant ses attentes. Celles-ci faisant d'ailleurs suite aux déterminations du SECO, que l'intimé a suivies et reprises, il convient aussi de considérer que la l’intéressée s'est exprimée sur lesdites déterminations. Par conséquent, elle a pu faire valoir efficacement son point de vue, en connaissance de cause, et sur tous les éléments pertinents ayant fondé la décision attaquée, y compris ceux ressortant des déterminations précitées. Par surabondance, en reconnaissant avoir contesté les « exigences » posées par l'intimé, elle reconnaît implicitement avoir contesté également la position du SECO à son égard et donc avoir pu s'exprimer à son sujet.

Enfin, contrairement à ce qu'elle prétend, elle ne disposait pas d'un droit à consulter l'avis du SECO avant que l'intimé ne rende la décision litigieuse. En effet, ce document constitue un préavis, qui plus est non contraignant, établi par une autorité d'instruction, soit le SECO, à l'attention de l'autorité décisionnelle, soit l'intimé. Un tel document est soustrait, conformément à la jurisprudence précitée, au droit de consultation du dossier.

Le droit d'être entendue de la recourante n'a donc pas été violé.

4.             L'objet du litige consiste à déterminer si c'est à bon droit que l'intimé a refusé d'octroyer à la recourante une autorisation de pratiquer la location de services.

4.1 Selon son art. 1, la LSE vise à régir le placement privé de personnel et la location de services (let. a), assurer un service public de l'emploi qui contribue à créer et à maintenir un marché du travail équilibré (let. b) et protéger les travailleurs qui recourent au placement privé, au service public de l'emploi ou à la location de services (let. c).

La LSE est complétée par l'ordonnance sur le service de l’emploi et la location de services du 16 janvier 1991 (ordonnance sur le service de l’emploi,
OSE - RS 823.111). En outre, le SECO a élaboré des directives et commentaires relatifs à la LSE et à ses ordonnances d'application de 2003 (OSE et TE-LSE ;
ci-après : directives LSE). Ces directives constituent des ordonnances administratives interprétatives (ATA/242/2020 du 3 mars 2020 consid. 5b et les arrêts cités). L’ordonnance administrative ne lie pas le juge, mais celui-ci la prendra en considération, surtout si elle concerne des questions d’ordre technique ; il s’en écartera cependant s’il considère que l’interprétation qu’elle donne n’est pas conforme à la loi ou à des principes généraux (ATA/665/2023 du 20 juin 2023 consid. 9.3 et l'arrêt cité).

4.2 Les employeurs (bailleurs de services) qui font commerce de céder à des tiers (entreprises locataires de services) les services de travailleurs doivent avoir obtenu une autorisation de l'office cantonal du travail (art. 12 al. 1 LSE). L’autorisation est délivrée pour une durée illimitée et donne droit d’exercer la location de services dans l’ensemble de la Suisse (art. 15 al. 1 LSE).

4.3 Conformément à l'art. 13 al. 1 LSE, l'autorisation est accordée lorsque l'entreprise est inscrite au registre suisse du commerce (let. a), dispose d'un local commercial approprié (let. b) et n'exerce pas d'autre activité professionnelle pouvant nuire aux intérêts des travailleurs ou des entreprises locataires de services (let. c).

L'art. 13 al. 1 let. b LSE exige que l'entreprise dispose d'un local commercial approprié, donc d'un bureau. Cela doit permettre d'éviter que des entretiens de caractère confidentiel aient lieu dans des pièces d'habitation, des auberges, des locaux de vente. En effet, cela rendrait difficile l'exercice d'une activité de placement conforme aux règles de la profession et nuirait à la considération dont jouit le placement privé (FF 1985 III 524, p. 571).

Les exigences posées en matière de locaux sont minimes ; une salle de séjour peut, dans des circonstances spéciales, suffire pour autant que celle salle soit exclusivement réservée à cette activité. L'autorité peut exiger du demandeur une attestation du loueur confirmant qu'il est autorisé à exercer cette activité dans l'appartement. Une grande liberté est laissée aux cantons dans l'appréciation des cas d'espèce.

La loi sur la protection des données exige, à son art. 7, que les données personnelles soient protégées contre tout traitement non autorisé par des mesures organisationnelles et techniques appropriées (directives LSE, p. 25). L’obligation pour l’entreprise d'exercer son activité dans un local commercial approprié est également utile à la protection des travailleurs. Elle assure un rangement sûr des documents concernant les travailleurs et donc la protection des données personnelles (Examen de la situation actuelle dans le domaine de la location de services, rapport du 18 décembre 2008 SECO, p. 55).

4.4 L'art. 13 al. 2 LSE précise que les personnes responsables de la gestion doivent être de nationalité suisse ou posséder un permis d’établissement (let. a), assurer une location de services satisfaisant aux règles de la profession (let. b) et jouir d’une bonne réputation (let. c). Le Conseil fédéral règle les détails (art. 13 al. 4 LSE).

Selon l'art. 33 OSE, les personnes titulaires d’un certificat de fin d’apprentissage ou d’une formation équivalente et pouvant se prévaloir d’une expérience professionnelle de plusieurs années sont considérées comme possédant les compétences professionnelles nécessaires pour diriger une entreprise de location de services si elles possèdent notamment une formation reconnue de placeur ou de bailleur de services (let. a) ou une expérience professionnelle de plusieurs années dans les domaines du placement, de la location de services, du conseil en personnel, en organisation ou en entreprise ou de la gestion du personnel (let. b).

Les conditions auxquelles doit répondre la personne responsable sont en principe les mêmes que pour le placement. L'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour savoir si la personne responsable remplit les conditions requises. Cette question ne sera toutefois pas examinée aussi strictement pour une entreprise unipersonnelle que pour les autres entreprises (directives LSE, p. 76).

Plusieurs années d'expérience au sens de l'art. 33 let. b OSE signifient au moins trois ans. L'adverbe « notamment » permet une certaine souplesse dans les cas particuliers lorsqu'un demandeur ne remplit pas tout à fait ni la let. a ni la let. b, mais paraît tout de même qualifié au vu de l'ensemble des éléments pour recevoir une autorisation. Il convient toutefois d'user avec la plus grande réserve de cette possibilité. Dans la pratique, des exceptions sont envisageables en faveur des demandeurs qui ont, par exemple, accompli les modules sur le conseil et le placement, le droit du travail et des contrats et le droit des assurances sociales du cursus préparant au brevet fédéral de conseiller en personnel, ou qui ont dirigé une entreprise comptant au moins cinq employés et se sont ainsi familiarisés avec la conduite du personnel. Ce n'est pas parce qu'une personne remplit l'une des possibilités d'exception qu'elle remplit pour autant les conditions personnelles exigées à l'art. 9 let. a et b OSE. La question doit être tranchée dans chaque cas particulier en appréciant l'ensemble des faits (directives LSE, p. 27).

La bonne réputation implique en particulier l'absence de condamnations préalables, poursuites, faillites et dettes fiscales. Ces éléments ne sont pertinents que s'ils remettent en question l'aptitude à gérer une entreprise de placement, c'est-à-dire s’ils ont une relation avec l'activité de placement. Sont en revanche pertinents les condamnations ou problèmes financiers en relation avec de précédentes activités, en particulier si elles ont nui à des travailleurs (directives LSE, p. 28).

4.5 Au plan cantonal genevois, l'art. 3 LSELS prévoit qu'une autorisation est nécessaire pour effectuer du placement privé ou de la location de services selon les prescriptions de la LSE (al. 1). L’autorisation est délivrée par l’autorité compétente, soit l'OCE, pour une durée illimitée (al. 2).

L’autorisation prévue à l'art. 3 LSELS est délivrée si les conditions prévues par les prescriptions fédérales et cantonales sont remplies (art. 2 al. 1 RSELS).

4.6 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d'office (art. 19 LPA). Ce principe n'est pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 ; ATA/1200/2023 du 7 novembre 2023 consid. 2.2 et l'arrêt cité).

5.             En l'espèce, il n'est désormais plus contesté que la société exerce une activité de location de services (ATA/228/2023 du 7 mars 2023 entré en force). Elle doit donc obtenir une autorisation pour continuer – reprendre dans son cas – son activité.

L'intimé a refusé de délivrer l'autorisation au motif notamment que la responsable de gestion, D______, ne remplissait pas les conditions prévues à l'art. 13 al. 2 let. b LSE cum 33 OSE, à savoir qu'elle ne possédait ni les qualifications ni l'expérience pour assurer une activité de location de services.

La recourante soutient au contraire que D______ disposerait, par son expérience, des compétences professionnelles nécessaires pour diriger une entreprise de location de services. L'intéressée avait obtenu, au Brésil, un certificat de fin d'études secondaires post obligatoires et de formation professionnelle d'assistante en comptabilité, équivalent à un apprentissage. En outre, elle avait régulièrement suivi les cours menant à l'examen du certificat d'assistante en gestion du personnel, lesquels portaient sur le droit du travail, les salaires et assurances sociales ainsi que sur des matières liées aux ressources humaines. Enfin, l'intimé avait ignoré l'expérience de plusieurs années de D______ en tant que gérante de la société. Elle était à sa tête depuis 2013 et, dès 2019, avait développé ses activités et engagé des employées, leur nombre s'élevant à six en mars 2023. D______ s'était occupée des tâches administratives liées à la gestion de son personnel.

Il ressort des pièces versées au dossier que D______ est titulaire d'un certificat brésilien de fin d'études secondaires post obligatoires et de formation professionnelle d'assistante en comptabilité délivré par le collège d'État « E______ ». Elle a obtenu ce diplôme le 30 décembre 1984, à 17 ans.

Il n'est pas contesté que l'intéressée n'est pas titulaire d'un certificat de fin d'apprentissage suisse. Elle ne fournit toutefois aucune information suffisante pour démontrer que la formation professionnelle d'assistante en comptabilité qu'elle a suivie au Brésil puisse être considérée comme une formation équivalente. En particulier, elle n'indique pas en quoi cette formation a concrètement consisté ni combien de temps elle a duré. En outre, il lui était loisible de se renseigner auprès du Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI) pour connaître si et, le cas échéant, la façon dont sa formation serait reconnue en Suisse, via la plateforme d'information figurant sous www.reconnaissance.swiss (page consultée le 9 avril 2024) et au moyen d'un formulaire mis à disposition des utilisateurs (disponible à l'adresse https://www.recognition.swiss/fr/guide/
a73cd0f6-856d-414f-bd85-3a2049dff44c/final, page consultée le 9 avril 2024), ce qu'elle n'allègue pas avoir fait. Dans la mesure où elle a obtenu son diplôme à l'étranger et à un âge relativement précoce en comparaison avec un apprenti en Suisse, il lui appartenait d'apporter les éléments permettant de déterminer si ledit certificat pouvait être considéré comme équivalent à un certificat de fin d'apprentissage obtenu en Suisse.

Une telle équivalence n'était de loin pas évidente, vu ce qui précède mais aussi compte tenu des différences de formation, d'expérience pratique acquise dans le cadre d'une formation et de législation qui peuvent être observées entre deux États différents, en l'occurrence la Suisse et le Brésil. Faute d'avoir satisfait à cette incombance, elle doit supporter l'absence de preuve. La formation professionnelle d'assistante en comptabilité qu'elle a obtenue au Brésil ne saurait ainsi être considérée comme une formation équivalente au sens de l'art. 33 OSE.

En outre, il apparaît que D______ ne dispose pas de l'expérience professionnelle requise pour diriger une entreprise de location de services. Il n'est en effet pas contesté qu'elle ne possède pas une formation reconnue de placeuse ou de bailleresse de services. La question de savoir si elle dispose d'une expérience professionnelle de plusieurs années dans les domaines de la location de services est débattue par les parties et mérite quelques précisions, à l'aune des directives LSE notamment.

En premier lieu, D______ n'a pas effectué les modules sur le conseil et le placement, le droit du travail et des contrats et le droit des assurances sociales du cursus préparant au brevet fédéral de conseiller en personnel et ne s'est pas présentée aux examens du certificat d'assistante en gestion du personnel proposé par l’IFAGE. Le fait qu'elle ait suivi le programme de formation préparant à cet examen ne signifie pas encore, comme le relève à juste titre l'intimé, qu'elle aurait assimilé la matière étudiée. Seule la réussite de l'examen aurait en effet permis de le rendre suffisamment vraisemblable. En second lieu, les directives LSE admettent de façon restrictive qu'un requérant puisse être considéré comme ayant l'expérience professionnelle suffisante lorsqu'il a dirigé une entreprise comptant au moins cinq employés, et ce pendant trois ans au moins. Or, depuis sa création et jusqu'au 31 août 2019, la recourante n'avait qu'une seule employée, soit D______. Jusqu'à octobre 2020, elle ne comptait que deux employées, et uniquement trois jusqu'à août 2021, exception faite de D______, dans la mesure où celle-ci est également l'associée-gérante de la société, soit à la fois sa propre employée et son propre employeur. La recourante a compté jusqu'à quatre employées, mais seulement d'août 2021 à décembre 2021, et jamais cinq simultanément en activité, I______ ayant cessé son activité en juillet 2022 après être tombée enceinte et J______ n'ayant pas travaillé de janvier 2022 à octobre 2022. Elle a finalement compté cinq employées sous contrat uniquement d'octobre 2022 à mars 2023. Dès lors, et contrairement à ce que la recourante affirme, D______ ne peut se prévaloir d'une activité de gestion d'entreprise comptant au moins cinq employés pendant trois ans au moins.

Au demeurant, il ressort des contrats conclus avec les employées précitées que le taux d'activité de trois d'entre elles était inférieur ou égal à 15% et que celui des deux autres s'élevait à 62.5% et 80%. On ne saurait dès lors considérer que l'activité déployée par les employées pour la société était si importante que D______ aurait acquis une expérience notable dans la conduite du personnel et le droit du travail. À cet égard, les nombreuses modifications du contrat‑cadre de travail temporaire requises par l'intimé ne plaident pas en faveur d'une solution contraire, quand bien même les contrats modifiés par la société ont finalement été agréés par l'intimé, à la suite seulement de ces modifications. À cela s'ajoute encore que la durée de l'activité exercée par D______ depuis le 1er septembre 2019, soit depuis que la société a engagé sa première employée, jusqu'à mars 2023, doit être relativisée, dans la mesure où l'activité a été exercée sans droit, sous peine de récompenser la violation de la loi. Il sera enfin précisé que D______ ne démontre qu'une seule expérience professionnelle en dehors de son activité exercée au sein de la recourante, soit une activité de bénévole lors d'une fête en 2014, laquelle est insuffisante pour répondre aux critères légaux.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que D______ ne remplit aucune des exceptions permettant de retenir qu'elle serait qualifiée pour recevoir une autorisation. Elle n'est donc pas en mesure d'assurer une location de services satisfaisant aux règles de la profession au sens de l'art. 13 al. 2 let. b LSE. La société ne répond ainsi pas à l'une des conditions cumulatives nécessaires à l'octroi de l'autorisation requise, si bien que l'intimé n'a, par son refus, ni excédé, ni abusé de son large pouvoir d'appréciation. Une telle issue rend superflu l'examen des autres conditions posées par la LSE et des autres griefs de fond soulevés par la recourante.

Le grief sera donc écarté et le recours, mal fondé, sera rejeté.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 750.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 septembre 2023 par A______ contre la décision de l'office cantonal de l'emploi du 23 août 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 750.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Stéphanie FONTANET, avocate de la recourante, ainsi qu'à l'office cantonal de l'emploi.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. CARDINAUX

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :