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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/945/2022

ATA/278/2023 du 21.03.2023 sur JTAPI/1176/2022 ( PE ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/945/2022-PE ATA/278/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mars 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Mes Lucile Bonaz et Pierre Gabus, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 (JTAPI/1176/2022)


EN FAIT

A. a. Monsieur F______ A______, né le ______ 1985, est ressortissant érythréen.

Il s’est marié au Soudan, de façon non-officielle, à Madame B______, née le ______1992, de nationalité érythréenne également.

Tous deux sont les parents d’C______, née le ______2012, D______ née le ______2015 et Mathios, né le 12 décembre 2019, portant tous le nom de famille F______.

M. A______, son épouse et C______ sont arrivés en Suisse le 1er août 2014.

b. M. A______ a déposé une demande d’asile, laquelle a été rejetée par décision du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) du 20 septembre 2016. Il a néanmoins été admis provisoirement en Suisse.

Ses allégations quant à une prétendue détention n’étaient pas vraisemblables et celles concernant son départ illégal d’Erythrée ne pouvaient être considérées comme vraisemblables.

Il avait produit uniquement une copie en mauvais état de sa carte d'identité érythréenne. Un départ légal d'Érythrée n'était en principe possible qu'avec un passeport valide et un visa de sortie. Depuis plusieurs années, ces visas étaient établis par les autorités érythréennes à de rares personnes considérées comme loyales, dans des conditions très restrictives et moyennant le paiement d'une forte somme d'argent. Les enfants à partir de 11 ans, les hommes ayant moins de 54 ans et les femmes ayant moins de 47 ans n'avaient en principe pas le droit de se faire délivrer un visa.

Il ressort de son audition devant le SEM, le 19 février 2016, qu’il avait obtenu sa carte d’identité en se rendant à E______ avec sa tante paternelle. Pour obtenir une telle carte d’identité, il fallait que quelqu’un témoigne de son origine érythréenne. Sa tante paternelle avait dit « c’est le fils de mon frère ». On lui avait demandé pourquoi il n’avait pas obtenu une carte identité au Soudan, où il disait être né. Il a répondu « Quand j’avais l’âge pour avoir une carte identité, je n’avais personne, ni père, ni mère. Je suis allé en Érythrée avec ma tante paternelle. Après quelque temps, j’ai obtenu ma carte d’identité ». Il avait perdu sa carte d’identité en Libye. Elle se trouvait dans « la moitié de ses affaires », dans une voiture autre que celle dans laquelle il voyageait.

c. M. A______ s’est vu délivrer par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) un permis F (admission provisoire) pour étrangers le 22 septembre 2016, renouvelé pour la dernière fois jusqu’au 20 août 2022.

d. Le SEM a contrôlé, le 25 octobre 2018, son admission provisoire et a constaté qu’il n’envisageait pas « pour l’instant » de la lever. M. A______ restait donc au bénéfice d’une admission provisoire en Suisse.

B. a. Le 29 novembre 2019, M. A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande de transformation de son permis F en autorisation de séjour (permis B) pour lui-même, ainsi que pour son épouse et leurs deux filles.

De septembre 2014 à octobre 2018, il avait exercé des activités auprès de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) à raison de cinq après-midi par semaine. Depuis le 1er janvier 2019, il travaillait pour G______, à H______, au bénéfice d’un contrat à durée indéterminée. Sa famille se sentait bien intégrée à Genève, ses deux filles fréquentaient l’école I______ et tous parlaient couramment le français. Ils n’avaient pas de dettes et n’étaient pas connus des services de police.

Étaient notamment jointes à cette requête, une attestation de l’hospice du 28 août 2019, selon laquelle M. A______ et sa famille n’étaient plus aidés financièrement depuis le 1er mai 2019, une attestation de la participation de M. A______ à un cours de français écrit A1 à B1 du 10 avril au 28 juin 2018 et une attestation de scolarité de ses deux filles.

b. Par courrier du 17 décembre 2019, l’OCPM a fait remarquer à M. A______ et Mme B______ qu’ils n’avaient déposé aucun passeport ou pièce de légitimation originale reconnue en cours de validité. Or, l’OCPM était en droit d’attendre d’une personne admise provisoirement, sans qualité de réfugiée, qu’elle entreprenne des démarches pour se faire établir un passeport attestant de son identité, le permis F ne constituant pas une preuve formelle de l’identité de son titulaire. Ils étaient invités à déposer dans les meilleurs délais leurs passeports originaux en cours de validité auprès du SEM. Ils devaient transmettre à l’OCPM une attestation de niveau A1 (CECR) à l’oral de français.

Faute d’avoir reçu ces documents, l’OCPM leur a imparti, par courrier du 26 août 2020, un délai au 15 octobre 2020 pour les lui transmettre.

Par courriel du 26 octobre 2020, M. A______ a transmis à l’OCPM le résultat de ses tests de français FIDE, au niveau B1 à l’oral.

En réponse, l’OCPM lui a rappelé qu’il était toujours dans l’attente des passeports nationaux, demande réitérée le 23 juillet 2021, au terme de laquelle l’OCPM a aussi requis des renseignements sur la situation familiale.

c. À cet égard, il ressort d’une transaction partielle N°ACTPI/1______/2021 du ______2021, que le juge conciliateur du Tribunal de première instance à Genève a laissé l’autorité parentale conjointe à M. A______ et Mme B______, sur leurs trois enfants, en a attribué la garde à Mme B______ et réservé à M. A______ un droit de visite s’exerçant, sauf accord contraire des parties, un week-end sur deux, ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires.

d. Par courrier du 2 septembre 2021, l’OCPM a indiqué à M. A______ avoir pris bonne note de la séparation du couple. Par conséquent, leurs situations, s’agissant de l’octroi d’un permis de séjour, étaient traitées séparément.

M. A______ ne l’avait toujours pas renseigné sur les démarches entreprises dans le but d’obtenir un passeport national valable. Sans réponse de sa part dans un délai de 30 jours, il se prononcerait en l’état du dossier.

C. a. Le 30 novembre 2021, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM.

b. Faisant usage de son droit d’être entendu le 24 janvier 2022, M. A______ a relevé que la production d’un passeport national valable ne faisait pas partie des conditions nécessaires à l’octroi d’une autorisation de séjour. Une copie des pièces de légitimation suffisait.

La copie de sa pièce d’identité remise au SEM permettait d’attester son identité, dès lors qu’il y était indiqué son nom, son prénom, son sexe, sa date de naissance, son lieu de naissance, son adresse ainsi que sa profession, outre le tampon officiel du gouvernement ainsi qu’un numéro de carte d’identité. Il avait perdu sa pièce d’identité originale, valable pour une durée indéterminée, au cours du voyage effectué par la mer jusqu’en Europe.

Il avait donc bien collaboré à l'établissement des faits déterminants.

Un préavis négatif à l’attention du SEM se justifiait d’autant moins qu’il remplissait toutes les conditions exigées pour l’octroi d’un permis B. Il était parfaitement intégré en Suisse et un retour dans son pays d’origine n’était pas exigible. Il séjournait en Suisse depuis maintenant plus de 7 ans et son revenu mensuel auprès de G______ s’élevait à CHF 4'450.-. Ses enfants étaient domiciliés et scolarisés en Suisse.

c. Par décision du 21 février 2022, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête de M. A______ du 29 novembre 2019 et de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM.

M. A______ résidait en Suisse depuis 2014, avait une activité professionnelle stable, était indépendant de l’hospice, ne faisait pas l’objet de poursuites, ni n’avait jamais été condamné pénalement. Toutefois, dans la mesure où il n’avait pas apporté la preuve qu’il était dans l’incapacité d’obtenir un passeport national valable, il ne remplissait pas les critères prévus aux art. 84 al. 5 let. b (sic) de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

D. a. Par acte du 24 mars 2022, M. A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu’une autorisation de séjour lui soit délivrée et au renvoi de son dossier à l’OCPM pour que celui-ci le soumette au SEM avec un préavis positif. Il sollicitait préalablement son audition.

Depuis l’indépendance en 1993, le régime érythréen avait supprimé la plupart des libertés individuelles. La situation des droits de l’homme dans le pays était très préoccupante. En raison de la violence qui y régnait (des rafles menées par les autorités gouvernementales contre les civils et du fait qu’il n’avait pas effectué son service national), il avait décidé de fuir son pays une première fois en 2008, puis en 2009 pour le Soudan, d’où il était venu en Suisse le 1er août 2014.

Il était parfaitement intégré en Suisse. Il parlait couramment le français et bénéficiait d’une attestation de niveau B1.

Aucune base légale n’exigeait la production d’un passeport national valable comme pièce de légitimation, notamment les art. 84 al. 5 LEI et 31 al. 1 OASA. Il avait fourni une pièce de légitimation valable, délivrée par un État reconnu par la Suisse, attestant de son identité.

Il ne s’était pas annoncé auprès de l’Ambassade d’Erythrée en Suisse pour plusieurs motifs. En effet, il craignait pour sa sécurité et celle de sa famille, notamment sa tante paternelle restée au pays. Il avait quitté l’Erythrée sans être au bénéfice d’un visa de sortie. Si les autorités érythréennes l'apprenaient, il s’exposerait, de même que sa famille, à des représailles de la part du gouvernement. Les autorités compétentes ne lui auraient sans doute pas délivré de passeport, vu les conditions strictes requises, à savoir la preuve de paiement de l’impôt sur le revenu de 2 % et la signature d’une lettre d’excuses destinée au gouvernement. Or, il était fermement opposé au régime actuel. Dès lors, l’absence de démarches de sa part était justifiée et ne constituait pas un défaut de collaboration.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Après le dépôt d’une réplique et d’une duplique, le TAPI a, par jugement du 7 novembre 2022, rejeté le recours.

L'audition de M. A______ n'était pas nécessaire. Une confirmation orale d’une impossibilité d’obtenir un passeport érythréen valable en raison de conditions trop strictes et d’une mise en danger de sa famille ne changerait rien au fait qu'il s'agissait uniquement de ses allégations. En l’absence de démarches concrètes, il était difficile d’admettre que son audition permettrait d’éclaircir sensiblement sa situation.

À teneur de la décision litigieuse, sous réserve de la question de la preuve de son identité, l'autorité intimée ne contestait pas que M. A______ satisfaisait à l'ensemble des autres conditions légales lui permettant d’obtenir une autorisation de séjour au sens des art. 84 al. 5 et 58 al. 1 LEI, ainsi que 31 OASA. Il était présent en Suisse depuis près de 8 ans, travaillait, était entièrement autonome sur le plan financier, n'avait aucune dette, n’avait jamais troublé l'ordre, ni la sécurité publiques et maîtrisait correctement le français.

L’admission provisoire de M. A______ s’était inscrite dans le cadre du droit de l’asile où l’évaluation de la vraisemblance de son identité s'appréciait selon des critères propres. Elle lui avait été accordée car son renvoi de Suisse s’avérait impossible au regard des circonstances particulières de sa situation. C’était pour ces motifs que l’OCPM avait renouvelé son permis F pour étrangers depuis 2017, nonobstant le fait que son dossier ne contenait toujours qu'une copie de mauvaise qualité de sa carte d'identité.

En revanche, lors de la délivrance d'un permis de séjour en application de l'art. 84 al. 5 LEI, les conditions légales relatives notamment à l'établissement de l'identité s'appliquaient. Les autorités étaient alors légitimées à exiger que la personne fasse ce qui pouvait être raisonnablement exigé d'elle pour établir cette identité.

Les conditions posées par les autorités érythréennes pour la délivrance de documents d'identité, en particulier la présentation d'excuses par le « Regret Form », ou le paiement rétroactif d'un impôt pour les personnes résidant hors d'Erythrée, n’étaient pas disproportionnées. M. A______ pouvait donc valablement se voir opposer par l’OCPM l'obligation de requérir des documents d'identité officiels auprès de la représentation de son pays en Suisse.

Par conséquent, en refusant d’octroyer une autorisation de séjour au recourant, l’OCPM n’avait pas excédé, ni abusé de son pouvoir d’appréciation.

E. a. M. A______ a formé recours contre ce jugement par acte déposé à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 7 décembre 2022. Il a conclu préalablement à l’audition des parties, en application des art. 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). Au fond, il a conclu à l’annulation du jugement du TAPI, ainsi que de la décision de l’OCPM du 21 février 2022 et, cela fait, à l’octroi d’une autorisation de séjour, subsidiairement au renvoi de la cause à l’OCPM, pour soumission de son dossier au SEM avec un préavis positif.

Il serait en mesure d’expliquer les motifs de sa fuite d’Érythrée, puis du Soudan et les difficultés l’empêchant de requérir des documents d’identité officiels. Un représentant de l’OCPM pourrait s’exprimer sur les motifs poussant cette autorité à requérir des documents d’identité officiels en dépit des difficultés manifestes qu’il rencontrait pour les obtenir.

Le TAPI avait violé le droit et avait versé dans le formalisme excessif.

L’exigence de la production d’un passeport national valable, dans le cadre de la délivrance d’une autorisation de séjour pour un étranger admis provisoirement en Suisse, ne découlait d’aucune base légale, notamment ni de l’art. 84 al. 5 LEI, ni de l’art. 31 al. 2 OASA. Les directives du SEM, qui n’avaient pas force obligatoire, n’exigeaient qu’une pièce de légitimation valable et reconnue, sans donner de quelconque définition. Il n’existait pas de liste exhaustive dans la loi de ce qui pouvait être reconnu comme tel au stade d’une demande d’autorisation de séjour. L’octroi d’une autorisation de séjour ne pouvait alors pas être conditionné à la production d’un tel document.

Il citait un arrêt vaudois aux termes duquel était posé le principe selon lequel l’étranger n’était pas impérativement tenu d’entreprendre des démarches auprès de son ambassade, mais qu’il pouvait suivre la procédure visant à faire constater l’impossibilité subjective ou objective d’obtenir un document d’identité.

Le document d’identité, dont la copie avait été déposée au SEM, portait, en bas de page, le tampon officiel du gouvernement érythréen ainsi qu’un numéro. Sa teneur n’avait à aucun moment été remise en cause par les autorités suisses. Aucun doute n’avait jamais été soulevé quant à son identité ou à son origine, notamment aux termes de la décision du SEM du 20 septembre 2016 refusant sa demande d’asile. Les démarches en vue de l’obtention d’un passeport national valable constituaient un obstacle insurmontable, soit une impossibilité objective et subjective. Elles l’exposeraient, en cas de retour même futur dans son pays, au risque d’être enrôlé de force dans l’armée, de subir des actes de maltraitance physique, voire d’être placé en détention pour une longue durée.

b. L’OCPM a conclu, le 9 janvier 2023, au rejet du recours.

M. A______ admettait qu’il avait la possibilité d’obtenir obtenir un passeport de la part des autorités érythréennes, ce qui l’exposerait toutefois à un risque d’enrôlement dans l’armée, voire de mauvais traitements en cas de retour dans son pays. L’OCPM ne saisissait pas les raisons qui le pousseraient à retourner dans le pays qu’il avait fui.

c. Dans sa réplique du 13 février 2023, M. A______ a relevé que les circonstances du cas d’espèce avaient déjà donné lieu à plusieurs arrêts du Tribunal fédéral devant conduire à l’admission de son recours. Ce dernier avait notamment retenu que le maintien du statut précaire de l’admission provisoire par rapport à l’autorisation de séjour pouvait constituer une atteinte au droit à la protection de la vie privée au sens de l’art. 8 CEDH. Il rappelait qu’il était parfaitement intégré en Suisse et comptait y demeurer de manière durable et permanente, de sorte qu’il devait bénéficier de la protection de cette disposition. La doctrine critiquait fortement la position adoptée par les autorités suisses consistant à subordonner l’octroi d’une autorisation de séjour à la délivrance d’un passeport. Pour les ressortissants érythréens, les conséquences en étaient dévastatrices, vu l’obligation de s’acquitter d’une taxe de la diaspora et de signer une lettre par laquelle il reconnaissait avoir trahi son pays en le quittant, avoir commis des crimes et accepter toutes les sanctions qui pourraient en découler, soit exactement sa situation.

d. Les parties ont été informées, le 14 février 2023, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant sollicite son audition, de même que celle d’un représentant de l’OCPM.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 L'art. 6 § 1 CEDH donne à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Il n'exige pas nécessairement la tenue d'une audience dans toutes les procédures.

2.3 Selon la jurisprudence, un droit comme tel à des débats publics oraux n'existe, en vertu des garanties constitutionnelles de procédure, que pour les causes bénéficiant de la protection de l'art. 6 § 1 CEDH ou lorsque les règles de procédure le prévoient ou encore lorsque sa nécessité découle des exigences du droit à la preuve. Les procédures de droit des étrangers ne bénéficient pas de la protection de l'art. 6 § 1 CEDH, faute de porter sur des droits ou des obligations de caractère civil ou sur une accusation en matière pénale au sens de la disposition conventionnelle précitée (ATF 137 I 128 consid. 4.4.2 ; 128 I 288 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.2).

2.4 En l'espèce, le recourant a eu l'occasion d'exposer ses arguments et de produire des pièces, tant devant l'OCPM que le TAPI et la chambre de céans. Son audition n’est pas à même d’apporter d’éclairage supplémentaire à ses allégations, telles que figurant déjà à la procédure. La position de l’OCPM est connue, de sorte que l’audition de l’un de ses représentants apparaît inutile.

2.5 Dans ces circonstances, il n'apparaît pas que l’audition des parties, au demeurant non obligatoire, soit susceptible d'apporter des éléments conduisant à une issue différente du litige.

La chambre de céans ne donnera partant pas suite à ces demandes.

3.             Est litigieuse la question de savoir si l’OCPM a, à juste titre, refusé de considérer que le recourant remplissait les conditions pour convertir son admission provisoire en autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de LEI et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

3.2 Selon l’art. 89 LEI, durant son séjour en Suisse, l’étranger doit être muni d’une pièce de légitimation valable et reconnue au sens de l’art. 13 al. 1. Selon l’art. 90 LEI, il doit collaborer à la constatation des faits déterminants pour l’application de la LEI et notamment se procurer une pièce de légitimation (art. 89) ou collaborer avec les autorités pour en obtenir une (let. c).

3.3 L’art. 13 al. 1 LEI prévoit que tout étranger doit produire une pièce de légitimation valable lorsqu’il déclare son arrivée. Le Conseil fédéral désigne les exceptions et les pièces de légitimation reconnues.

3.4 Selon l’art. 8 al. 1 OASA, sont reconnues valables pour la déclaration d’arrivée : les pièces de légitimation délivrées par un État reconnu par la Suisse, qui établissent l’identité du titulaire, son appartenance à l’État qui l’a délivré et garantissent qu’il peut y retourner en tout temps (let. a) ; les autres pièces garantissant que le titulaire est autorisé à entrer en tout temps dans l’État qui les a établies ou sur le territoire indiqué sur la pièce (let. b) ; les autres pièces garantissant que le titulaire peut obtenir en tout temps une pièce de légitimation l’autorisant à entrer dans l’État qui l’a établie ou sur le territoire indiqué sur la pièce (let. c).

3.5 L’al. 2 de l’art. 8 OASA prévoit que la déclaration d’arrivée peut être effectuée sans pièce de légitimation étrangère valable lorsque : il est démontré que son acquisition se révèle impossible (let. a) ; l’on ne peut exiger de l’intéressé qu’il demande l’établissement ou la prolongation d’une pièce de légitimation aux autorités compétentes de son État d’origine ou de provenance (art. 89 et 90 let. c LEI)(let. b) ; l’étranger possède un passeport établi par le SEM conformément à l’art. 4 al. 1 ou 2 let. a de l’ordonnance du 14 novembre 2012 sur l’établissement de documents de voyage pour étrangers du 20 janvier 2010 (ODV – RS 143.5) (let. c) ; l’étranger ne possède pas de pièce de légitimation étrangère valable et a obtenu du SEM un titre de voyage pour réfugié conformément à l’art. 3 ODV (let. d).

3.6 Dans le cadre de la procédure d’autorisation et de déclaration d’arrivée, les autorités compétentes peuvent exiger la présentation des pièces de légitimation originales et en faire des copies. Elles peuvent ordonner le dépôt des pièces de légitimation lorsque des éléments concrets indiquent qu’elles pourraient être détruites ou rendues inutilisables (art. 8 al. 3 OASA).

4.             4.1 Aux termes de l'art. 84 al. 5 LEI – demeuré inchangé lors de la révision entrée en vigueur le 1er janvier 2019 – les demandes d'autorisation de séjour déposées par un étranger admis provisoirement et résidant en Suisse depuis plus de 5 ans sont examinées de manière approfondie en fonction de son niveau d'intégration, de sa situation familiale et de l'exigibilité d'un retour dans son pays de provenance. L'étranger admis provisoirement qui sollicite une autorisation de séjour en application de l'art. 84 al. 5 LEI n'a toutefois pas droit à la délivrance d'une telle autorisation, qui consisterait en la transformation du permis F en permis B (arrêts du Tribunal fédéral 2C_696/2018 du 27 août 2018 consid. 3.1 ; 2D_32/2017 du 10 août 2017 consid. 4 ; 2D_25/2017 du 14 juin 2017 consid. 2). Cette autorisation ne peut lui être octroyée qu'en dérogation aux conditions d'admission prévues par les art. 30 LEI et 31 al. 1 OASA).

Selon l’art. 31 al. 2 OASA, le requérant doit justifier de son identité.

4.2 En lien avec cette disposition, les Directives et commentaires I. Domaine des étrangers émises par le SEM, état au 1er mars 2023 (ci-après : directive LEI), prévoient, comme cela était déjà le cas au moment du dépôt de la demande, en son ch. 5.6.10.7, que l'étranger participant à une procédure prévue par la LEI doit être en possession d'une pièce de légitimation valable et reconnue au sens de l'art. 13 al. 1 LEI (i.e un passeport). S'il n'en possède pas, il est tenu de s'en procurer une ou de collaborer avec les autorités pour en obtenir une (art. 89 et 90 let. c LEI, en relation avec l'art. 8 OASA). Il ne peut être exigé des réfugiés reconnus (y compris les réfugiés admis provisoirement) et des requérants d'asile dont la procédure d’asile n’est pas close qu'ils prennent contact avec les autorités compétentes de leur État d'origine. Pour ces personnes, la condition de la justification de l'identité peut être considérée comme remplie si les indications fournies au cours de la procédure relevant du droit d'asile sont vraisemblables, exemptes de contradictions et qu’aucun alias n'a été utilisé. En revanche, on est en droit d'exiger de la part de requérants d'asile déboutés dont la procédure d'asile est définitivement close ou d’étrangers qui ont été admis provisoirement en Suisse qu'ils contactent les autorités compétentes de leur État d'origine ou de provenance pour se faire établir une pièce de légitimation valable et reconnue au sens de l'art. 13 al. 1 LEI. Dans de tels cas, si l'intéressé allègue se trouver dans l'impossibilité de se faire établir une pièce de légitimation, c'est à lui qu'il incombe de fournir la preuve de l'impossibilité objective d'obtenir de son pays d'origine un passeport national valable (arrêt du TAF C-1075/2013 du 21 février 2014 consid. 6.2). Au demeurant, les difficultés techniques telles que les retards accumulés par les autorités de l'État d'origine que comporterait l'établissement d'un passeport national ne permettent pas, en règle générale, d'admettre l'existence d'une impossibilité objective. S’agissant toutefois des étrangers admis provisoirement en raison du caractère illicite de l’exécution du renvoi, il y a lieu de consulter au préalable les services compétents du SEM.

4.3.1 Dans un arrêt 2C-6101/2014 du 29 décembre 2015, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a eu à se pencher sur le cas d’un recourant qui avait demandé l’établissement d’un passeport à l'ambassade érythréenne, avant de soutenir que tout contact avec sa représentation nationale en Suisse n'était pas (ou plus) acceptable. Il faisait valoir dans ce contexte qu'il était profondément réticent à devoir signer le document « Regret Form » par lequel il devrait reconnaître qu'il ne remplissait pas ses obligations étatiques. En cas de retour en Érythrée, cela entraînerait des inconvénients sociaux et économiques considérables ainsi que des conséquences pénales. Le TAF a retenu que le recourant ne pouvait pas être entendu avec cette objection, ne serait-ce que parce qu'il n'était pas exigé de lui qu'il se rende dans son pays d'origine pour obtenir un passeport, les démarches nécessaires à l'établissement d'un document de voyage érythréen pouvant également être entreprises depuis la Suisse. Indépendamment de cela, les arguments avancés à l'époque par le recourant dans le cadre de la procédure d'asile avaient été examinés par les autorités compétentes et rejetés avec force de chose jugée comme non crédibles, respectivement comme non pertinents en matière d'asile. La question d'une mise en danger concrète pertinente en matière d'asile et fondant la qualité de réfugié avait été niée et il avait été expressément constaté que l'exécution du renvoi du requérant s'avérait admissible tant au sens des dispositions du droit d'asile que du droit international public.

4.3.2 Dans l’arrêt F-6281/2016 du 17 mai 2018, le TAF a eu à connaître de la situation d’une femme, d’origine érythréenne, faisant notamment valoir que ce n'était pas l'illégalité de l'impôt de la diaspora de 2 % qui était critiquée en premier lieu, mais l'impossibilité d'obtenir des documents d’identité en raison de cette pratique controversée. Elle soutenait que l’on ne pouvait pas exiger d'elle qu'elle paie la somme d'argent faramineuse nécessaire à l'obtention de ses documents. Le TAF a retenu que la question de l'exigibilité, c'est-à-dire celle de savoir si l'obtention de documents de voyage auprès des autorités du pays d'origine pouvait être exigée des personnes concernées, ne devait pas être évaluée dans ce contexte selon des critères subjectifs, mais selon des critères objectifs. Les personnes qui, comme la recourante, avaient été admises provisoirement pour des raisons humanitaires et qui, notamment, n’étaient ni en besoin de protection ni en quête d'asile, étaient tenues de prendre contact avec les autorités de leur pays d'origine pour demander des documents de voyage. L'établissement de documents de voyage et d'identité, et donc la perception d'éventuels émoluments, relevaient de la compétence de l'État d'origine concerné. Ce point de vue devait être entièrement approuvé, car l'État d'origine disposait d'une marge de manœuvre considérable dans l'exercice de sa souveraineté en matière de passeports, qu'il convenait de respecter. Par conséquent, il ne pouvait pas incomber aux autorités suisses de remettre des documents de voyage de remplacement à des personnes étrangères qui n’étaient pas en mesure de remplir les conditions formelles pour l'établissement d'un passeport national ; dans le cas contraire, cela constituerait une atteinte inadmissible à la souveraineté de l'État tiers concerné. La souveraineté de l'État érythréen lui permettait également de fixer le montant des émoluments pour l'établissement de passeports, respectivement de déterminer dans quelle mesure des taxes étaient prévues pour les ressortissants résidant à l'étranger.

4.4 En l’espèce, c’est à juste titre et conformément aux art. 84 al. 5 LEI et 31 al. 2 OASA, ainsi qu’à la directive LEI du SEM, que l’OCPM et le TAPI ont retenu une exigence accrue de production d’un document d’identité, à savoir un passeport, document expressément mentionné au ch. 5.6.10.7 de ladite directive, dans le cadre du dépôt d’une demande d’autorisation de séjour par un étranger admis provisoirement, par rapport aux exigences du SEM au moment du dépôt d’une demande d’asile selon les conditions de l’art. 8 al. 2 OASA.

À cet égard, s’agissant de la copie d’une carte d’identité produite alors par le recourant, il sera noté qu’elle est difficilement lisible. Le recourant fait notamment grand cas de la présence d’un tampon sur ce document. La chambre administrative n’en discerne aucun qui soit déchiffrable, de sorte qu’il n’est pas même possible de connaître l’autorité qui lui aurait délivré ce document. Par ailleurs, les conditions dans lesquelles le recourant indique avoir obtenu le document original, qui n’a jamais été remis aux autorités suisses, ne sont pas à même d’établir son identité, étant rappelé qu’il lui aurait été délivré, selon ses déclarations au SEM au moment de sa demande d’asile, sur la base d’assertions de sa tante selon laquelle « c’[était] le fils de [s]on frère » et donc en l’absence même de tout acte d’origine ou de naissance. Par ailleurs, le recourant n’a pas été constant dans ses explications sur les circonstances de la perte du document original, puisqu’il a tantôt déclaré l’avoir perdu en mer au moment de son périple vers l’Europe, tantôt qu’elle aurait disparu de la « moitié de ses affaires » dans une voiture en Libye.

C’est ainsi avec raison et conformément à la loi que l’OCPM conditionne la délivrance d’une autorisation de séjour au recourant au dépôt d’un document d’identité valable, étant relevé que par ailleurs, les conditions d’une durée de séjour en Suisse de plus 5 ans et des exigences du cas de rigueur, qui s’appliquent par renvoi de l’art. 84 al. 5 LEI, sont réalisées en l’espèce.

Le recourant ne prétend pas qu’il lui serait impossible de solliciter la délivrance d’un passeport auprès de l’ambassade d’Érythrée en Suisse. Il soutient toutefois qu’il existe des obstacles insurmontables et qui ne lui seraient pas imputables l’empêchant d’entreprendre cette démarche, de sorte que l’autorité intimée devrait se contenter de la seule copie de sa carte d’identité.

L’allégation selon laquelle des représailles le viseraient, de même que sa tante restée au pays, dans la mesure où il avait quitté l’Erythrée sans être au bénéfice d’un visa de sortie, ne suffisent pas à démontrer une impossibilité objective d’obtenir un passeport. Tel est également le cas de l’exigence de la preuve de paiement de l’impôt sur le revenu de 2 %.

En revanche, la signature d’une lettre d’excuses destinée au gouvernement pourrait constituer un tel obstacle, de même que le risque d’un enrôlement de force dans l’armée ou de mauvais traitements tels qu’allégué. Si en effet le recourant ne prétend pas vouloir retourner en Erythrée à court ou long terme, il n’existe aucune garantie à teneur du dossier que le SEM ne décide pas, à un moment ou à un autre, de révoquer son admission provisoire et de prononcer son renvoi. Autrement dit, il n’existe aucune garantie qu’il ne fasse pas l’objet à l’avenir d’un renvoi en Erythrée et que partant, en particulier de par la signature du « Regret form », il ne subisse des mauvais traitements notamment à la suite d’un enrôlement militaire.

Dès lors, il n’est en l’état du dossier pas certain que l’absence de démarches de sa part pour l’obtention du passeport requis ne serait pas justifiée, de sorte qu’il ne peut être dit qu’un défaut de collaboration lui est opposable.

Ce grief sera donc admis et la cause renvoyée à l’OCPM pour instruction sur ce point, notamment par la récolte de renseignements précis et actuels auprès du SEM.

5.             Le recourant expose qu'en raison de sa longue durée de présence en Suisse et de son intégration, il aurait droit à une autorisation de séjour directement fondée sur l'art. 8 § 1 CEDH. Il invoque un droit à la transformation de l'admission provisoire en une autorisation de séjour, déduit de cette disposition.

5.1 Sous l’angle du respect de la vie privée, le Tribunal fédéral part du principe que pour les personnes séjournant légalement en Suisse avec une autorisation, après un séjour de 10 ans, les relations sociales dans ce pays sont devenues si étroites qu'il faut des raisons particulières pour y mettre fin (ATF 144 I 266 consid. 3.9).

5.2 Le Tribunal fédéral ne s'est pas encore prononcé de manière définitive sur un éventuel droit, au regard du droit de la CEDH, à la transformation du statut d'admission provisoire en une autorisation de séjour (arrêt du Tribunal fédéral 2C_689/2017 du 1er février 2018 consid. 1.2.2). Dans l’ATF 147 I 268, il a néanmoins retenu que dans la situation d’une ressortissante arrivée en Suisse en 1998, soit il y avait plus de 20 ans, où il fallait partir du principe que le caractère inexigible du renvoi ne changerait pas jusqu'à nouvel ordre et que la recourante resterait en Suisse pour une durée indéterminée dans un statut de séjour non durable, la recourante admise à titre provisoire, faisait valoir de manière défendable qu'elle avait un droit à une autorisation sur la base des dispositions de la CEDH, puisque son art. 8 § 1 CEDH (droit au respect de la vie privée) lui conférait un droit à la régularisation de sa présence en Suisse.

5.3 Dans un arrêt 2C_370/2022 du 28 juillet 2022, concernant la cause de personnes d’origine érythréenne se prévalant de l’ATF 147 I 268 précité, le Tribunal fédéral a retenu que l’un des recourants étant au bénéfice d'une admission provisoire depuis plus de 8 ans et deux autres depuis plus de 6 ans, étaient au bénéfice d'admissions provisoires depuis bien moins longtemps que la recourante dans l'affaire précitée. Par ailleurs, il ne ressortait pas de l'état de fait de l'arrêt cantonal que leur renvoi serait inexigible dans un avenir prévisible. Outre que l'ATF 147 I 268 avait laissé ouverte la question du droit à la transformation d'une admission provisoire en autorisation de séjour, les circonstances du cas d'espèce différaient sur des points essentiels et ne permettaient pas de considérer que les intéressés resteraient en Suisse pour une durée indéterminée avec un statut de séjour non durable. Les recourants ne disposaient dès lors pas d'un droit à la transformation de leurs admissions provisoires en autorisations de séjour fondé sur le droit à la vie privée garanti par l'art. 8 § 1 CEDH.

5.4 En l’espèce, il n’est pas question de juger d'une mesure mettant fin au séjour du recourant, mais d’une transformation de son admission provisoire en autorisation de séjour. Il se trouve en Suisse depuis 8 ans et demi, de sorte que la durée de 10 ans requise pour pouvoir se prévaloir de l’art. 8 CEDH fait défaut. Le recourant ne peut en conséquence tirer aucun droit direct de cette disposition, étant par ailleurs relevé que le Tribunal fédéral n’a à ce jour pas tranché de manière définitive la question d’un éventuel droit, au regard de cette disposition, à la transformation du statut d'admission provisoire en une autorisation de séjour.

Ce grief doit être écarté.

Le recours sera partiellement admis et la cause renvoyée à l’OCPM pour suite d’instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.

6.             Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure, réduite, de CHF 1'000.- sera allouée au recourant, à la charge de l’État (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 décembre 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

renvoie la cause à l’office cantonal de la population et des migrations pour complément d’instruction dans le sens des considérants et nouvelle décision ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Monsieur A______, à la charge de l’État ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Lucile Bonaz et Pierre Gabus, avocats du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen, Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.