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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/115/2021

ATA/1089/2021 du 19.10.2021 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 25.11.2021, rendu le 22.09.2022, ADMIS, 8C_781/2021
Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR;INTÉRÊT DIGNE DE PROTECTION
Normes : LPA.60.al1.letb
Résumé : Recours irrecevable des aspirants à la police cantonale genevoise, engagés en tant que policiers dès le 1er avril 2019 après une année de formation débutée le 1er avril 2018, qui contestent le fait de ne pas bénéficier de l’indemnité forfaitaire liée à l’assurance-maladie, à la suite de la modification de l’art. 67 LPol entrée en vigueur en juillet 2018. Ils n’ont pas la qualité pour recourir car ils ne sont pas directement touchés par la modification précitée des conditions de rémunération des policiers – supprimant ladite indemnité dès le 1er janvier 2019 – intervenue avant leur engagement en tant que policiers.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/115/2021-FPUBL ATA/1089/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 octobre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur Paul A______
M. B______
M. C______
M. D______
M. E______
M. F______
M. G______
M. H______
M. I______
M. J______
M. K______
M. L______
Mme M______
M. N______
Mme O______
M. P______
M. Q______
M. R______
M. S______
M. T______
M. U______
Mme V______
Mme W______
Mme X______
M. Y______
M. Z______
M. AA______
M. AB______
M. AC______
Mme AD______
Mme AE______
M. AF______
M. AG______
M. AH______
Mme AI______
Mme AJ______
Mme AK______
M. AL______
Mme AM______
M. AN______
M. AO______

représentés par Me Romain Jordan, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE LA POPULATION ET DE LA SANTÉ



EN FAIT

1) M. A______, M. B______, M. C______, M. D______, M. E______, M. F______, M. G______. M. H______, M. I______, M. J______, M. K______, M. L______, Mme M______, M. N______, Mme O______, M. P______, M. Q______, M. R______, M. S______, M. T______, M. U______, Mme V______, Mme W______, Mme X______, M. Y______, M. Z______, M. AA______, M. AB______, M. AC______, Mme AD______, Mme AE______, M. AF______, M. AG______, M. AH______, Mme AI______, Mme AJ______, Mme AK______, M. AL______, Mme AM______, M. AN______ et M. AO______ (ci-après : les requérants) ont été engagés le ______ 2017 en qualité d’aspirants à la police cantonale genevoise (ci-après : la police) pour suivre une formation d’une durée de douze mois à l’Académie de police de Savatan (ci-après : l’académie) dès le 1er avril 2018.

a. Selon le courrier de la commandante de la police du ______ 2017, remis en mains propres, les conditions d’engagement en qualité d’aspirant/aspirante à la police étaient réglées par ledit courrier, la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et de son règlement d’application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.10), notamment par les art. 74 à 82 RPAC. Les dispositions de la loi fédérale sur la formation professionnelle du 13 décembre 2002 (LFPr - RS 412.10), de l’ordonnance sur la formation professionnelle du 19 novembre 2003 (OFPr - RS 412.101), le règlement général sur le personnel de la police du 16 mars 2016 (RGPPol - F 1 05.07) ainsi qu’un autre règlement fédéral et des directives, s’appliquaient à la formation professionnelle de policier/policière.

Pour exercer la fonction de policier/policière, il était indispensable d’avoir suivi avec succès une école de police et obtenu le brevet fédéral de policier. La réussite de la formation, y compris du brevet fédéral, ne garantissait pas un engagement en qualité de policier/policière au sein de la police. L’aspirant/aspirante de police devait être affilié-e à une caisse-maladie reconnue par la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10). Une indemnité d’un montant brut de CHF 4'854.- par mois (classe 08, annuité 01) était prévue pendant la formation. En cas de départ avant le terme de la formation, la convention de formation annexée audit courrier faisait foi.

b. Chaque aspirant a signé le ______ 2017, la convention de formation rédigée par le centre de formation de la police du département de la sécurité et de l’économie, devenu entre-temps le département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : le département).

La convention prévoyait que, si au cours de la phase académique de la formation initiale, l’aspirant/l’aspirante démissionnait ou était renvoyé-e pour de justes motifs ou pour violation avérée, grave ou répétée des règles internes ou des prescriptions de service, les frais de sa formation pourraient être mis à sa charge en tout ou partie selon des modalités fixées dans la convention en fonction de la durée de la formation effectuée. L’aspirant/l’aspirante s’engageait à servir dans la police durant trois ans au moins à l’issue de sa formation et, en cas de non-respect de cette obligation, il s’engageait à rembourser les frais de formation y relatifs, soit CHF 30'000.- la première année, CHF 20'000.- la deuxième et CHF 10'000.- la troisième, conformément à l’art. 31 al. 1 et 2 de la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05).

2) À la suite de négociations avec les associations syndicales, dans un contexte tendu affectant la rémunération des policiers, relayé par la presse notamment fin 2016 et fin 2017 s’agissant de l’avantage – contesté – des policiers lié à l’assurance-maladie, le Conseil d’État et les syndicats de police ont abouti,
le 29 novembre 2017, à un protocole d’accord, signé le 19 décembre 2017, portant sur trois aspects : la classification des fonctions des policiers dès le 1er janvier 2018, la prise en charge relative à leur assurance-maladie de base et les débours.

La prise en charge de l’assurance-maladie de base par l’État de Genève, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle grille salariale ayant fait l’objet d’une négociation avec les organisations représentatives du personnel, était remplacée, dès le 1er janvier 2019, par le paiement d’une indemnité mensuelle, fixée à CHF 583.30 pour un policier travaillant à 100 %, aux policiers au bénéfice d’une lettre d’engagement au 1er janvier 2018 et aux « policiers » terminant au plus tard l’école de police au 31 décembre 2018. Ce point devait se concrétiser par la modification législative relative à l’art. 67 al. 1 let. b LPol.

3) Ladite modification a été adoptée le 25 mai 2018 et est entrée en vigueur le 28 juillet 2018 par l’introduction des nouveaux al. 2 à 4 à l’art. 67 LPol, sans affecter l’al. 1 de cette disposition. Leur teneur est depuis restée inchangée.

Selon l’art. 67 al. 2 LPol, la prise en charge de l’assurance-maladie, au sens de l’al. 1 let. b, est remplacée, dès le 1er janvier 2019, par le paiement d’une indemnité forfaitaire mensuelle de CHF 583.30 pour les collaborateurs qui remplissent l’une des conditions suivantes : a) policiers au bénéfice d’une lettre d’engagement au 1er janvier 2018 ; b) assistants de sécurité publique de niveau 4 au bénéfice d’une lettre d’engagement au 1er janvier 2018 ; c) policiers ayant terminé au plus tard le 31 décembre 2018 l’école de police commencée en 2017 ; d) officiers supérieurs et policiers brevetés mis au bénéfice d’une lettre d’engagement entre le 1er janvier 2018 et l’entrée en vigueur du présent alinéa.

L’indemnité prévue à l’al. 2 est réduite en cas de travail à temps partiel, proportionnellement au taux d’activité (art. 67 al. 3 LPol).

Dès le 1er janvier 2019, à défaut de remplir les conditions posées à l’al. 2, les policiers et les assistants de sécurité publique de niveau 4 ne bénéficient d’aucun droit à la prise en charge de l’assurance-maladie ni au versement d’une indemnité (art. 67 al. 4 LPol).

4) Par courrier du 24 juillet 2018, le directeur des ressources humaines de la police (ci-après : le directeur RH) a rectifié l’information, erronée, qu’il avait donnée oralement le 19 juillet 2018 aux requérants, alors aspirants, à la question de savoir s’ils bénéficieraient de la participation à l’assurance-maladie. Après vérification, au vu des al. 2 à 4 de l’art. 67 LPol, retranscrits dans ledit courrier et adoptés le 25 mai 2018, ils ne « ser[aient] vraisemblablement pas au bénéfice de l’indemnité pour l’assurance-maladie, vu que [leur] école a[vait] débuté en avril 2018 et que par conséquent, [ils] signer[aient] [leur] contrat d’engagement au plus tôt au 1er avril 2019 ».

5) Cette position a été confirmée par la police dans le cadre d’échanges entre les représentants de cette dernière et les requérants, ayant eu lieu entre fin août et décembre 2018.

Le directeur RH leur a notamment indiqué en octobre 2018 que si certes l’assurance-maladie était encore prise en charge par l’employeur le 19 décembre 2017 lors de la signature de leurs conventions de formation, tel n’était plus le cas depuis le 25 mai 2018, date de l’adoption de l’art. 67 al. 2 à 4 LPol, lequel exposait clairement les conditions d’octroi du paiement de l’indemnité forfaitaire mensuelle. Par ailleurs, deux contrats distincts avaient été signés. Le premier couvrait leur intégration à l’école de police et le deuxième, sous forme d’acte administratif, débutait lors de leur prise de fonction à la police, soit dès l’obtention de leur brevet fédéral de policier. Cela signifiait que les conditions d’engagement correspondaient aux conditions contractuelles en vigueur.

6) Par courrier du 20 mars 2019, remis en mains propres, les requérants ayant terminé avec succès l’école de police, ont été individuellement informés de leur engagement respectif, dès le 1er avril 2019, en tant que policier-policière 1 à titre d’épreuve pendant deux ans, prolongeable à trois ans au maximum, en classe 15.

7) Par arrêt du 27 août 2019 (ATA/1282/2019 – cause A/495/2019), confirmé par le Tribunal fédéral (arrêt 8C_682/2019 du 2 septembre 2020), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a déclaré irrecevable le recours interjeté le 1er février 2019 par les aspirants, pour déni de justice et concluant, sur le fond, à l’octroi de « l’indemnité litigieuse au titre de la compensation du coût induit par l’assurance-maladie ».

a. Selon la chambre administrative, ils n’avaient pas la qualité pour recourir faute d’intérêt digne de protection déjà au moment du dépôt du recours. En effet, leur requête ne les concernait pas dans la situation qui était la leur au moment du refus de rendre une décision ni au moment du dépôt du recours, mais uniquement dans celle, future et hypothétique, où ils seraient policiers. Ils avaient uniquement requis du département des garanties pour la prise en charge de leurs primes d’assurance-maladie au moment où ils termineraient et réussiraient leur formation et s’ils étaient ensuite engagés comme policiers par l’État de Genève. En outre, une décision formatrice incluant la question de la rétribution avait, en cours de procédure, été rendue pour chacune des personnes concernées lors de son engagement en qualité de policier/policière et ne faisait pas l’objet du litige. Ce même raisonnement s’appliquait même si le refus d’entrer en matière sur leur requête du 17 décembre 2018 devait être considéré comme étant une décision (consid. 2d).

b. Le Tribunal fédéral a confirmé l’arrêt cantonal, les intéressés ne disposant d’aucun intérêt actuel et pratique à recourir, ni d’un droit à obtenir une décision en constatation. Ils avaient été informés du fait que la réussite de la formation de policier ne garantissait pas un engagement en cette qualité au sein de la police. Ils n’étaient donc pas directement touchés par la modification des conditions de rémunération des policiers engagés par la police. Ils ne pouvaient pas se prévaloir de droits acquis dans ce contexte. L’art. 67 LPol, dans sa teneur depuis
le 28 juillet 2018, ne donnait pas lieu à des incertitudes particulières sur la situation juridique des intéressés. Le texte légal définissait clairement les personnes qui bénéficiaient de la prise en charge de l’indemnité litigieuse : les « aspirants de la volée 2018 » ne figuraient pas parmi les bénéficiaires de l’indemnité litigieuse et leur situation juridique n’appelait pas de clarification. Le nouvel art. 67 LPol était entré en vigueur avant les requêtes des aspirants au directeur RH, de sorte que le résultat de la procédure n’aurait pas pu produire d’effets rétroactifs à cet égard (consd. 6.3).

8) À la demande des requérants du 19 octobre 2020 et par courrier du 7 décembre 2020 comportant l’indication de la voie et du délai de recours, le Conseiller d’État en charge du département leur a à nouveau indiqué qu’ils ne bénéficiaient pas de l’indemnité d’assurance-maladie. Il leur rappelait la décision susmentionnée de la chambre administrative et le passage de l’arrêt du Tribunal fédéral précité, selon lequel l’art. 67 LPol « défini[ssait] clairement les personnes qui bénéfici[ai]ent de la prise en charge de l’indemnité litigieuse », ce qui n’était pas leur cas et que leur situation juridique « n’appe[lait] pas de clarification ».

9) Le 8 janvier 2021, les requérants ont saisi la chambre administrative en concluant à l’annulation de cette décision et à sa réforme en ce sens que le droit à l’indemnité litigieuse « au titre de compensation du coût induit par
l’assurance-maladie » leur soit reconnu.

Ils se plaignaient de la violation des principes de la bonne foi, de la proportionnalité, de l’interdiction de l’arbitraire et de celui dit « pacta sunt servanda ». La modification légale entrée en vigueur en juillet 2018 l’avait été après la signature de leurs « contrats d’engagement » le 19 décembre 2017, de sorte que la présence d’un droit acquis ne pouvait leur être niée. Ils pouvaient se fier au site internet « devenez.ch » pour considérer que le « contrat » avait « valablement intégré une prise en charge de l’assurance-maladie par l’employeur », même si celle-ci n’y était pas expressément prévue. Ils avaient ainsi « pris leurs dispositions » en fonction de cet élément et devaient bénéficier du régime transitoire mis en place par l’art. 67 al. 2 LPol dont les conséquences sur une carrière ne pouvaient être minimisées. Ils avaient compté, dans leur choix de formation, avec l’indemnité litigieuse et ce en sus de leur engagement à servir dans la police pendant trois ans sous peine de devoir rembourser une partie des frais de formation conformément à l’art. 31 al. 2 LPol. La thèse de deux contrats successifs n’était ainsi pas soutenable. En outre, lors de la signature du protocole d’accord, la situation des recourants était similaire à celle des aspirants de la volée « 2/17 » qui avaient pu bénéficier du régime transitoire. Il n’y avait par ailleurs aucune différence à faire entre la formation et l’entrée formelle en fonction comme policier, car il s’agissait dès le début d’un engagement sur une durée minimale de trois ans avec de lourdes conséquences financières en cas de fin des rapports de service. Ils avaient dès lors un intérêt concret et actuel à voir clarifiées les « conditions de rémunération consécutivement à un changement de loi ».

Ils invoquaient aussi une inégalité de traitement, la distinction effectuée entre la situation des aspirants des écoles de police ayant débuté leur formation en 2018 et celle des policiers au bénéfice d’une lettre d’engagement au 1er janvier 2018 ne reposant sur aucun motif raisonnable. Les exigences de l’art. 31
al. 2 LPol s’appliquaient par ailleurs dans les deux cas. Ils avaient conclu un contrat d’engagement à l’école de police pour douze mois dès le 1er avril 2018, soit avant la modification législative.

10) Le département a conclu au rejet du recours dans la mesure où il était recevable. Les recourants n’étaient pas concernés par le protocole d’accord du 19 décembre 2017 car ils n’étaient pas au bénéfice d’une lettre d’engagement au 1er janvier 2018 et n’avaient pas terminé l’école de police au 31 décembre 2018.

11) Les recourants ont maintenu leur position dans leur réplique du 3 mai 2021.

Ils exerçaient « tous comme policiers et [avaient] ainsi embrassé cette carrière dans la continuité des engagements de l’autorité intimée ». Lors de l’audience de comparution personnelle du 19 juin 2019 dans la cause A/495/2019, dont ils produisaient le procès-verbal, une représentante du département avait indiqué que sur les quarante-et-un recourants, tous à l’exception d’une personne, exerçaient alors comme policiers, cette dernière se représentant aux examens finaux, et qu’aucune de ces quarante-et-une personnes n’avait contesté son acte d’engagement. Ils prétendaient que l’arrêt du Tribunal fédéral précité était sans pertinence car il n’abordait pas le fond.

12) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La question de la qualité pour recourir des recourants, en particulier leur intérêt digne de protection à contester le courrier litigieux du 7 décembre 2020, pose in casu à nouveau problème.

a. Conformément à l’art. 60 al. 1 LPA, ont notamment qualité pour recourir : les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a) ; toute personne qui est touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’Etat ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (let. b).

Selon la jurisprudence, un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation ou la modification de la décision attaquée
(ATF
138 II 42 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_865/2019 du 14 avril 2020 consid. 3.2 ; ATA/619/2020 du 23 juin 2020). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1). En outre, le recourant doit être touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, et l’intérêt invoqué – qui n’est pas nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un intérêt de fait – doit se trouver, avec l’objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d’être pris en considération (ATF 144 I 43 consid. 2.2). Ces exigences ont été posées de manière à empêcher l’action populaire proscrite en droit suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_61/2019 du 21 janvier 2019 consid. 3.1). Il faut donc que le recourant ait un intérêt pratique à l’admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 143 II 578 consid. 3.2.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_417/2018 du 13 décembre 2018 consid. 2 ; ATA/636/2020 du 30 juin 2020). Un intérêt purement théorique à la solution d'un problème est de même insuffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1).

b. En l’espèce, les recourants sont devenus, quasiment tous, dès le 1er avril 2019, policiers/policières à titre d’épreuve pendant deux ans, à la suite de leur engagement par courrier du 20 mars 2019, similaire à celui produit en pièce n° 109 de l’autorité intimée. Ce courrier d’engagement les a affectés à la fonction de policier/policière avec le grade de gendarme en tous cas pendant deux ans et a fixé leur traitement, en classe 15 annuité 0, à un montant annuel brut de CHF 85'008.- (soit CHF 6'539.10 brut par mois). Il constitue ainsi l’acte créateur des rapports de service des recourants avec la police.

En dépit de l’avis des recourants, il existe bien deux actes réglant leur relation juridique avec la police, à savoir d’abord celui du 19 décembre 2017 valant pendant la période de leur formation entre avril 2018 et mars 2019, puis celui du 20 mars 2019 par lequel ils sont engagés, dès le 1er avril 2019, comme policier/ère au sein de la police. D’ailleurs, cela ressort clairement du courrier d’engagement du 19 décembre 2017. D’une part, la fréquentation avec succès d’une école de police et l’obtention du brevet fédéral de policier sont des conditions nécessaires pour être engagé au sein de la police. D’autre part, la réussite de la formation ne garantit pas un engagement en qualité de policier/ère. En effet, le fait de s’inscrire et de suivre l’école de police ne signifie pas nécessairement que tous les aspirants réussiront les examens, ceux-ci devant au préalable être effectués, ni qu’ils pourront tous prétendre à un poste de policier/ère. L’obligation de rembourser une partie des frais de formation dans certains cas n’y change rien, ce d’autant plus qu’elle concerne une autre question. Elle est donc sans influence sur les conditions salariales d’engagement en tant que policier/ère. Celles-ci se définissent, comme l’indique à raison l’autorité intimée, suivant les règles en vigueur au moment dudit engagement, les attentes salariales des aspirants n’étant pas déterminantes. Au surplus, l’information erronée transmise lors de la présentation du 19 juillet 2018 a été rapidement corrigée par courrier du 24 juillet 2018.

Dans ces circonstances et comme l’a déjà souligné le Tribunal fédéral dans l’arrêt susmentionné concernant les mêmes recourants, ces derniers ne sont pas directement touchés par la modification des conditions de rémunération des policiers, intervenue à l’art. 67 LPol et entrée en vigueur en juillet 2018. Ils n’étaient alors pas encore engagés comme policiers. Le fait qu’ils aient choisi d’exercer ce métier, en s’inscrivant à l’école de police, n’y change rien, ce d’autant plus que l'État est libre de revoir en tout temps sa politique en matière de salaire et d'emploi et que même les personnes déjà à son service doivent compter avec le fait que les dispositions réglant leur statut puissent faire l'objet ultérieurement de modifications (ATF 143 I 65 consid. 6.2 et les références citées). Cela vaut a fortiori pour les personnes qui aspirent à entrer dans la fonction publique genevoise. Les recourants ne sont ainsi pas directement touchés par le refus d’une indemnité inexistante au moment de leur engagement en tant que policier/ère.

Par conséquent, faute d’intérêt digne de protection, les recourants n’ont pas la qualité pour recourir contre le courrier du Conseiller d’État du 7 décembre 2020. Leur recours sera donc déclaré irrecevable.

3) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 3’000.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 8 janvier 2021 par M. A______, M. B______, M. C______, M. D______, M. E______, M. F______, M. G______. M. H______, M. I______, M. J______, M. K______, M. L______, Mme M______, M. N______, Mme O______, M. P______, M. Q______, M. R______, M. S______, M. T______, M. U______, Mme V______, Mme W______, Mme X______, M. Y______, M. Z______, M. AA______, M. AB______, M. AC______, Mme AD______, Mme AE______, M. AF______, M. AG______, M. AH______, Mme AI______, Mme AJ______, Mme AK______, M. AL______, Mme AM______, M. AN______ et M. AO______ contre le courrier du département de la sécurité, de la population et de la santé du 7 décembre 2020 ;

met un émolument de CHF 3’000.- à la charge solidaire de M. A______, M. B______, M. C______, M. D______, M. E______, M. F______, M. G______. M. H______, M. I______, M. J______, M. K______, M. L______, Mme M______, M. N______, Mme O______, M. P______, M. Q______, M. R______, M. S______, M. T______, M. U______, Mme V______, Mme W______, Mme X______, M. Y______, M. Z______, M. AA______, M. AB______, M. AC______, Mme AD______, Mme AE______, M. AF______, M. AG______, M. AH______, Mme AI______, Mme AJ______, Mme AK______, M. AL______, Mme AM______, M. AN______ et M. AO______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat des recourants, ainsi qu'au département de la sécurité, de la population et de la santé.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, MM. Verniory et Mascotto, Mme Tombesi, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :