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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1063/2021

ATA/668/2021 du 29.06.2021 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1063/2021-AIDSO ATA/668/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 juin 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______
représentés par Me Enis Daci, avocat

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES



EN FAIT

1) Par décision du 20 septembre 2019, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a rejeté la demande d'aide sociale formée par Madame et Monsieur A______ (ci-après : les époux) au motif que leur fortune, au montant de CHF 16'349.-, était supérieure aux normes légales applicables.

2) Selon décision sur opposition du 26 octobre 2020, le SPC a retenu que la fortune des époux était, à compter du 1er juillet 2019, inférieure à CHF 8'000.-, retenant à ce titre le montant de CHF 2'838.80 au 30 juin 2019.

En conséquence, des prestations sociales, d'un montant mensuel de CHF 400.-, leur étaient allouées à compter du 1er juillet 2019. Ce montant serait identique à compter du 1er janvier 2020 et tenait compte de dépenses annuelles reconnues à hauteur de CHF 37'680.- et d'un revenu déterminant de CHF 32'889.-, d'où une aide sociale annuelle de CHF 4'791.-.

3) Les époux ont formé recours contre cette décision par acte expédié à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 27 novembre 2020.

Cette instance s'est toutefois, par arrêt ATAS/26/2021 du 13 janvier 2021, déclarée incompétente à raison de la matière pour trancher ce recours et a transmis la cause à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

4) Les époux ont conclu à l'annulation de la décision du 26 octobre 2020 et à ce qu'il soit dit que l'arriéré de prestations d'aide sociale, de CHF 6'400.- pour la période du 1er juillet 2019 au 31 octobre 2020, de même que les prestations courantes de CHF 400.-, n'étaient pas suffisants compte tenu de leur situation personnelle et financière. La cause devait être renvoyée au SPC pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Ils demandaient préalablement la production de l'intégralité de leur dossier au SPC et qu'un délai de trente jours leur soit accordé pour compléter leur recours une fois ledit dossier produit.

En l'absence dudit dossier, les époux ne pouvaient se prononcer en toute connaissance de cause sur le calcul effectué par le SPC.

Le SPC avait, par courrier du 25 septembre 2018, requis des époux le remboursement des prestations complémentaires versées du 1er septembre 2011 au 31 août 2018, soit un montant de CHF 135'721.-, des subsides d'assurance maladie pour cette même période, au montant de CHF 75'232.- et des frais médicaux en CHF 1'568.-.

Le SPC avait par ailleurs déposé une plainte pénale à leur encontre le 12 avril 2019, soutenant notamment qu'ils n'avaient pas leur domicile effectif en Suisse de 2010 à 2015, de sorte qu'ils avaient perçu indûment des prestations. Cette plainte avait été classée par ordonnance du Ministère public (ci-après: MP) du 2 novembre 2020, considérant que les époux avaient bien vécu à Genève au cours de cette période. Ladite ordonnance retenait notamment que la consommation énergétique entre le 24 septembre 2009 et le 21 septembre 2016 correspondait, selon les Services industriels de Genève (SIG), à une consommation normale pour six personnes, ce qui attestait de la présence dans le logement des époux, de même que de leur fils, de leur belle-sœur « et deux petits-enfants ». Les relevés bancaires des époux démontraient des retraits mensuels.

Il était ainsi patent que le SPC s'était trompé quant à la situation des époux.

5) Le SPC a conclu, le 15 avril 2021, au rejet du recours.

Le montant de l'aide sociale, de CHF 400.- par mois, avait été calculé sur la base de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) et du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01). Un tableau récapitulatif était reproduit.

La procédure pénale évoquée par les époux était sans rapport avec la présente procédure.

Leur dossier intégral était joint en annexe au recours, hormis les pièces liées aux frais médicaux.

6) Les époux n'ont pas répliqué dans le délai qui leur a été imparti pour ce faire.

7) Les parties ont été informées, le 31 mai 2021, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 52 LIASI).

2) Le présent litige porte sur la question de savoir si l'intimé, selon décision sur opposition du 26 octobre 2020, était fondé à octroyer le montant mensuel de CHF 400.- aux recourants, à compter du 1er juillet 2019, à titre de prestations financières de l'aide sociale. Les recourants soutiennent que ledit montant est insuffisant et ne tiendrait pas compte de leur situation financière et personnelle.

3) a. Aux termes de l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. L'art. 39 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) contient une garantie similaire.

b. En droit genevois, la LIASI et le RIASI concrétisent ces dispositions constitutionnelles, en ayant pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI). Les prestations de l'aide sociale individuelle sont l'accompagnement social, des prestations financières et l'insertion professionnelle (art. 2 LIASI). La personne majeure qui n'est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont il a la charge a droit à des prestations d'aide financière. Celles-ci ne sont pas remboursables sous réserve notamment de leur perception indue (art. 8 al. 1 et 2 LIASI). Elles sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI).

c. À teneur de l'art. 11 al. 1 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière prévues par cette loi, les personnes qui : ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (let. a), ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) et répondent aux autres conditions de la loi (let. c). Il s'agit de l'aide financière ordinaire. Les trois conditions à remplir sont cumulatives.

d. Les prestations d'aide financière sont accordées aux personnes dont le revenu mensuel déterminant n'atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d'État (art. 21 al. 1 LIASI). L'art. 1 al. 1 let. a RIASI prévoit ainsi que les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d'aide financière sont de CHF 4'000.- pour une personne seule majeure.

Sont prises en compte la fortune et les déductions sur la fortune prévues aux art. 6 et 7 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU – J 4 06 ; art. 23 al. 1 LIASI). Ne sont en revanche pas prises en compte les déductions que constituent les dettes chirographaires et hypothécaires (art. 23 al. 4 let. a LIASI)

e. Le demandeur doit fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 7 et 32 al. 1 LIASI). La LIASI impose ainsi un devoir de collaboration et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/365/2020 du 16 avril 2020 consid. 4a ; ATA/1446/2019 du 1er octobre 2019 consid. 5a).

Le document intitulé « mon engagement en demandant une aide financière à l'hospice » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a).

f. Enfin, les prestations d'aide financière peuvent être refusées si le bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (art. 35 al. 1 let. a LIASI) ou s'il refuse de donner les informations requises (art. 7 et 32 de la présente loi), donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (art. 35 al. 1 let. d LIASI).

4) En l'espèce, les recourants se limitent à contester le montant mensuel de l'aide sociale tel que fixé par le SPC, sans à tout le moins expliquer quels éléments de leur situation financière ou personnelle le SPC n'aurait à tort pas pris en compte.

Ils ont eu accès, devant la chambre de céans, à l'intégralité des éléments sur lesquels le SPC s'est fondé pour rendre la décision querellée, soit un dossier comptant plus de deux cents pièces, dûment numérotées. Ils n'ont pas fait usage de leur droit à la réplique qui précisément aurait été l'occasion de motiver leur argumentation, conformément à ce qu'ils demandaient au terme de leur acte de recours.

Ils ne peuvent dans ces conditions faire le grief au SPC de ne pas avoir correctement établi les faits pertinents pour parvenir au montant de CHF 400.- par mois, étant relevé qu'ils ne remettent nullement en cause le mode de calcul du SPC, pas plus que les montants retenus au titre de revenus et de charges.

Dans ces conditions, c'est vainement que pour seule justification ils font référence à une situation familiale ressortant de l'ordonnance de classement du 2 novembre 2020, établie sur la base d'informations données au MP en amont, étant relevé que l'enquête pénale en lien avec les infractions dénoncées par le SPC concernait la période de 2010 à 2015, selon les propres affirmations des recourants.

Dans la mesure où celui qui prétend à l'aide sociale doit fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière et que les recourants n'ont en rien collaboré devant la chambre de céans pour justifier leur point de vue, contrairement à leur obligation prévue à l’art. 22 LPA, c'est vainement qu'ils formulent vaguement un reproche au SPC de ne pas avoir tenu compte des éléments pertinents pour fixer le montant mensuel de l'aide sociale à CHF 400.-.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA cum art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 novembre 2020 par Madame et Monsieur A______ contre la décision du service des prestations complémentaires du 26 octobre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Enis Daci, avocat des recourants ainsi qu'au service des prestations complémentaires.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :