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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/402/2020

ATA/1061/2020 du 27.10.2020 ( AMENAG ) , ADMIS

Descripteurs : DROIT FONCIER RURAL;CAPACITÉ D'ESTER EN JUSTICE;QUALITÉ POUR RECOURIR;EXÉCUTEUR TESTAMENTAIRE;IMMEUBLE AGRICOLE;EXPLOITATION AGRICOLE;BÂTIMENT D'HABITATION(EXPLOITATION AGRICOLE);BAIL À FERME;VALEUR DE RENDEMENT;PROCÉDURE D'ESTIMATION
Normes : LPA.8.al1; LPA.60.al1; CC.518; LDFR.1.al1; LDFR.2.al1; LDFR.7; OTerm.3; LaLDFR.3A; CC.620; OTerm.6; LDFR.2.al2.leta; LDFR.8.leta; LBFA.31.al2.letf; LIPP.50.letc; LDFR.10; ODFR.2
Résumé : Avant le partage successoral, le patrimoine de la défunte doit être estimé selon les circonstances prévalant au moment de son décès. S'agissant in casu d'une entreprise agricole, l'habitation doit être considérée comme le logement du chef d'exploitation et estimée, à ce titre, à la valeur de rendement agricole, à l'exception de la surface supérieure à la place normalement nécessaire à l'exploitation. Le droit fiscal renvoie expressément à la LDFR et ses dispositions d'application pour l'estimation des immeubles agricoles, et non l'inverse. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/402/2020-AMENAG ATA/1061/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 octobre 2020

 

dans la cause

 

Hoirie de feu Mme A______
agissant par Me E______, exécutrice testamentaire

contre

COMMISSION FONCIÈRE AGRICOLE



EN FAIT

1) Épouse de feu M. A______, agriculteur né le ______ 1924 et décédé en 2007, Mme A______, née le ______ 1927, était notamment propriétaire des parcelles no 1______ de la commune de B______, ainsi que
nos 2______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______.

Elle est décédée le ______ 2018. Selon son testament public du 10 décembre 2013 et son testament olographe du 20 octobre 2015, feu Mme A______ a institué pour seule héritière, Mme D______, et nommé pour exécutrice testamentaire Me E______.

2) Le 26 juin 2019, le notaire mandaté par la succession de feu Mme A______ a adressé à la commission foncière agricole (ci-après : CFA) une requête d'expertise de la valeur de rendement – charge maximale. Celle-ci portait sur les parcelles susmentionnées, représentant une surface totale de 236'942 m2. La plupart se trouvaient en zone agricole et deux (les parcelles nos 1______ et 7______) en zone bois et forêts. Globalement, elles étaient affectées aux cultures et aux vignes. Seule la parcelle n° 3______ visée comportait sept bâtiments, dont une habitation, une ferme, des couverts et un hangar. M. F______ bénéficiait d'un bail à ferme sur ces parcelles.

Étaient jointes les pièces suivantes :

-          une attestation du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) du 19 décembre 2018, certifiant que feu Mme A______ avait désigné Me E______ aux fonctions d'exécutrice testamentaire ;

-          divers extrait du Registre foncier (ci-après : RF) concernant les parcelles susmentionnées avec indication notamment de leur surface, des droits de gage immobilier les concernant, de leur zone, des bâtiments et des servitudes (en particulier, un droit d'habitation en faveur de feu Mme A______ sur la parcelle n° 3______, pour le bâtiment n° 9______ comprenant une habitation à un seul logement) ;

-          un tableau de mise à jour du registre des vignes 2019, exploitées par M. F______, sur les parcelles nos 10______, 4______, 5______, 11______ et 12______ de la commune de C______, pour une surface totale de 147.81 ares ;

-          un rapport du collège d'experts de la CFA du 18 juin 2008, établi à la demande de feu Mme A______ dans le cadre de la succession de son défunt époux. Ledit document visait à estimer la valeur de rendement des domaines et bien-fonds agricoles en question, laquelle a été déterminée à CHF 390'077.- avec une charge maximale de CHF 524'580.-, comprenant une estimation de CHF 5'783.- pour la place habitable disponible en plus de la place normalement nécessaire. Les bâtiments de la parcelle n° 3______ comprenaient une crèmerie, deux hangars, une habitation, un petit garage, un poulailler, une ferme, une porcherie et un couvert passage. La ferme (bâtiment n° 13______) ne comprenait pas d'habitation, correspondant uniquement au bâtiment n° 9______ ;

-          une copie d'un bail à ferme conclu entre feu Mme et M. A______, d'une part, et M. F______, d'autre part, portant sur l'exploitation des parcelles de champs (nos 6______, 1______, 3______, 5______, 8______ et 183) et de vignes (nos 5______, 4______ et 10______), ainsi que l'utilisation du hangar et des installations de stockage, à partir du 1er janvier 1998. Ledit document n'était signé par aucune des parties. En outre, dans le cadre de la reprise à ferme du domaine de feu M. A______, M. F______ s'engageait à racheter le capital fermier de ce dernier, à savoir les avances de culture de CHF 15'755.- et le parc de machines estimé à CHF 72'800.-.

3) a. Le 10 octobre 2019 a eu lieu l'expertise des biens sur place par deux experts de la CFA et un représentant de l'administration fiscale cantonale (ci-après :
AFC-GE).

b. Il ressort du rapport y relatif du 20 novembre 2019, une valeur de rendement totale de CHF 1'085'476.-, comprenant une valeur de rendement non agricole des logements autres que celui du chef d'exploitation de CHF 784'700.-, et une charge maximale de CHF 1'190'747.-.

Les parcelles no 1______ de la commune de B______, ainsi que nos 2______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______, représentaient une surface totale de 247'543 m2, dont 10'473 m2 en vignes et 1'646 m2 en forêt. D'après le détail de l'estimation de la valeur de rendement, le bâtiment n° 9______ de la parcelle n° 3______ comportait deux habitations non agricoles pour lesquelles la valeur de rendement était estimée à CHF 784'700.- selon le Guide pour l'estimation de la valeur de rendement agricole du 31 janvier 2018 (ci-après : Guide 2018). La valeur de rendement du logement de feu Mme A______ était estimée à CHF 464'200.- et celle du logement à louer à CHF 320'500.-. Les questionnaires détermination de la valeur locative 2018 de feu Mme A______ indiquaient que le bâtiment n° 9______ comprenait son appartement de sept pièces et 187 m2, dont l'aménagement était considéré comme « très modeste », pour une valeur locative de CHF 37'544.-, et un appartement vide de cinq pièces et 100 m2, dont l'aménagement était considéré comme « simple », pour une valeur locative de CHF 21'601.-.

Selon les notes des experts concernant l'estimation, plusieurs points avaient été relevés, dont le fait que « dans l'immeuble n° 9______, au 1er étage du logement de feu Mme A______, une pièce sans aucune fenêtre [avait] été considérée comme non habitable et, de ce fait, d'entente avec le représentant de l'AFC-GE, pas valorisée ».

4) Par décision du 10 décembre 2019, la CFA, se fondant sur le rapport précité, a retenu que la valeur de rendement des parcelles n1______ de la commune B______, ainsi que nos 10______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______ était de CHF 1'085'476.- et la charge maximale de CHF 1'190'747.-, arrêté les frais d'expertise à CHF 2'149.95 et fixé un émolument à CHF 380.-.

5) Par acte du 31 janvier 2020, la succession de feu Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, en concluant à son annulation, à ce qu'il soit considéré que le domaine de C______/B______ de feu Mme A______ ne contient qu'un seul logement affecté à une exploitation agricole et ordonné un complément d'enquête à la CFA en vue de fixer à nouveau la valeur de rendement.

La CFA avait estimé que le bien-fonds de feu Mme A______ contenait deux logements non agricoles, alors qu'au vu de la configuration de la propriété en question, ne pouvait être pris en considération qu'un seul logement, la ferme ne constituant qu'une seule unité. La CFA avait également considéré à tort que le logement n'était pas agricole. Les défunts époux A______ avaient toujours souhaité que leur propriété soit destinée à l'exploitation des terres, ce qui ressortait des dernières volontés de feue Mme A______. Le logement n'était toujours pas habité en raison de la procédure civile pendante devant le Tribunal fédéral, laquelle empêchait la désignation claire d'un héritier et la possibilité pour l'exécutrice testamentaire de remettre le domaine à un autre agriculteur.

À l'appui de ses écritures, elle a notamment produit copie d'un arrêt ACJC/592/2017 de la chambre civile de la Cour de justice du 5 décembre 2017 (dans la cause A/15374/2010), annulant, à la demande de feu Mme A______, le pacte successoral du 12 août 2003, par lequel son défunt époux et elle avaient institué d'autres personnes comme héritiers.

6) Dans ses écritures responsives, la CFA a conclu à la confirmation de sa décision querellée.

La loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991 (LDFR - RS 211.412.11) était applicable à la parcelle n° 3______, d'une surface de 10'601 m2 et sise en zone agricole.

La décision querellée avait été prononcée sur la base du questionnaire de détermination de valeur locative destiné aux propriétaires d'appartements et de villas. Le premier logement (de cinq pièces), sis route du G______ ______ à C______, bâtiment n° 9______, situé sur la parcelle n° 3______ était vide et considéré comme un logement à louer. Le deuxième logement (de sept pièces), sis à la même adresse, était celui de feu Mme A______. Tous deux remplissaient les conditions de l'art. 2 al. 1 de la loi fédérale sur les résidences secondaires du 20 mars 2015 (LRS - RS 702) et étaient bien distincts au vu de leur composition respective.

La recourante n'était ni exploitante à titre personnel ni propriétaire exploitant de la surface agricole litigieuse. Elle ne générait donc aucun revenu professionnel principal de cette exploitation agricole. Le fait que les défunts époux A______ eussent toujours souhaité que leur propriété fût destinée à l'exploitation des terres n'y changeait rien et n'était pas pertinent. Les logements litigieux ne pouvaient donc être considérés comme des habitations agricoles et devaient être estimés selon les règles usuelles non agricoles, soit selon le loyer réalisable dans la région.

7) Le 15 mai 2020, la recourante a répliqué en persistant dans ses conclusions.

Il ne pouvait être déduit de la LDFR et de ses normes d'application que durant une phase de liquidation et de partage de la succession, l'hoirie – propriétaire du bien – qui n'était pas elle-même un exploitant – car elle aurait dû par hypothèse s'appuyer sur un fermier durant cette période – ne pouvait prétendre à une valeur locative agricole au sens de l'art. 2 de l'ordonnance sur le droit foncier rural du 4 octobre 1993 (ODFR - RS 211.412.110) pour ce logement. Aucune disposition de la loi ne le disait. Au surplus, le Guide 2018 interprétait la notion de logement du chef d'exploitation comme un logement qui n'était pas nécessairement occupé par le chef d'exploitation au moment de l'estimation. Cela laissait clairement penser qu'une telle phase transitoire ne pouvait pas donner lieu à une modification de la valeur de référence.

L'argumentation de la CFA reposait principalement sur des directives fiscales, alors que la notion de logement du chef d'exploitation, telle qu'elle devait être comprise et appliquée par cette instance dans ses décisions concernant la valeur de rendement d'une exploitation agricole, ne pouvait découler de l'interprétation qu'en donnait la Conférence suisse des impôts dans un contexte fiscal.

L'art. 64 al. 1 let. a LDFR visait clairement à l'encouragement à la propriété foncière rurale et plus spécifiquement au maintien des exploitations en place. Si, dans le cadre d'une telle acquisition, le prix du logement du chef d'exploitation devait être estimé à une valeur non agricole, cette acquisition dans l'intérêt d'un maintien de l'affermage pourrait être rendue plus difficile car plus onéreuse pour le tiers acquéreur. Cela démontrait le principe selon lequel le logement devait continuer à être évalué à une valeur agricole même s'il n'était pas occupé personnellement par le propriétaire exploitant, aux fins de favoriser une transmission à un prix accessible, et valait même dans un cadre plus large encore que la phase de liquidation et le partage d'une succession. L'estimation effectuée en 2008 se fondait, pour la valeur du logement de feu Mme A______, sur une valeur agricole, en dépit du fait que l'exploitation des terres était confiée à un fermier depuis plusieurs années déjà. Désormais, c'étaient les membres de l'hoirie qui détenaient en main commune les immeubles agricoles, dans l'attente du partage de la succession, et l'exploitation de l'entreprise était toujours confiée à un fermier. Le partage de la succession étant suspendu à une décision de justice, il n'était alors pas envisageable de modifier la manière dont le logement était évalué jusqu'ici, sur la base de la valeur locative agricole. Aucune modification durable n'était intervenue et elle ne savait pas encore si le propriétaire exploiterait personnellement les terres. Cette solution était d'autant plus justifiée que selon les vœux de feu Mme A______, l'exploitation resterait affectée à des fins agricoles.

8) Le 15 juin 2020, la recourante a complété sa réplique en produisant un chargé de pièces complémentaire, soit :

-          quatre photographies datant du 25 mai 2020, montrant un long couloir avec une porte donnant sur l'extérieur à chacune des extrémités, desservant plusieurs pièces de part et d'autre. La ferme était ainsi accessible dans toutes ses pièces facilement ; aucun mur, ni aucune séparation ne la scindait en deux logements ;

-          des ordonnances du Tribunal fédéral des 13 décembre 2018 et 4 mars 2019 dans la cause 5A_98/2018, concernant la suspension de la procédure de recours contre l'arrêt ACJC/1592/2017, en raison du décès de feu Mme A______ et dans l'attente de la production du certificat d'héritier de Mme D______. Cette procédure civile avait été diligentée initialement par feu Mme A______ afin d'invalider une disposition du pacte successoral du 12 août 2003 qu'elle avait passé avec son défunt époux, et instituant notamment Mme et M. H______ comme héritiers ;

-          un courrier du 20 janvier 2020 de Me E______ à M. F______, réclamant le paiement de CHF 14'024.-, correspondant aux arriérés dus pour les quatre dernières années d'affermage, conformément au bail à ferme le liant à la succession de feu Mme A______.

9) Le 16 juin 2020, la recourante a encore remis une copie du testament public de feu Mme A______ du 10 décembre 2013, indiquant notamment, « afin de respecter les volontés de feu [son] époux, qui souhaitait que l'œuvre de [leur] vie perdure et que [leur] patrimoine continue à être exploité sous forme agricole », imposer à Mme D______, « la charge de maintenir le bail à ferme existant en faveur de M. F______ pour les terrains agricoles et viticoles, dont les conditions pourront être revues en conformité avec la loi régissant les baux à ferme aussi longtemps qu'il le souhaitera et de proposer en priorité à M. I______ [ ] de reprendre la bail si M. F______ devait y renoncer. Elle devrait faire reprendre ces obligations à tout acquéreur, si elle ne pouvait pas conserver le domaine ».

10) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 88 al. 1 LDFR ; art. 13 de la loi d’application de la loi fédérale sur le droit foncier rural du 16 décembre 1993 - LaLDFR - M 1 10).

2) a. A capacité d’ester toute partie qui à teneur du droit public ou du droit privé peut agir personnellement ou par un mandataire de son choix (art. 8 al. 1 LPA).

La capacité d'ester en justice implique la faculté de mener soi-même le procès ou de désigner soi-même un mandataire qualifié pour le faire. Elle appartient à toute personne qui a la capacité d'être partie, c'est-à-dire à toute personne qui a la faculté de figurer comme partie dans un procès (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 39 n. 139 ad art. 8 LPA).

L'exécuteur testamentaire a la charge de l'administration de la succession jusqu'à son partage. Pour accomplir sa mission, il a le droit d'agir en justice en qualité de partie dans les procédures qui concernent l'actif comme le passif de la succession. Si l'exécuteur testamentaire ne fait pas valoir son propre droit matériel, il agit néanmoins en son propre nom pour sauvegarder les droits successoraux conformément à sa mission. Il s'agit d'un cas où un tiers (l'exécuteur testamentaire) peut conduire un procès en son propre nom et en tant que partie, à la place de ceux (les héritiers) qui sont, quant au fond, le sujet actif ou passif du droit contesté. Si l'exécuteur testamentaire agit en son propre nom, il doit néanmoins se référer à son habilitation légale, fondée sur l'existence d'un patrimoine spécial qu'il doit administrer. Les pouvoir de l'exécuteur testamentaire ne sont pas limités à la nature de la procédure, ni circonscrits au droit privé. Il a en effet la légitimation en droit public, par exemple pour s'opposer à la perception d'une contribution résultant d'un changement d'affectation, à un projet de construction, recourir contre un refus de mise en zone ou contre la mise sous protection d'un bâtiment ainsi que pour requérir l'octroi d'un permis de construire. Il peut également agir en matière fiscale, de contentieux d'assurance ou encore en procédure pénale (Grégoire PILLER, in Pascal PICHONNAZ/Bénédict FOEX/Denis PIOTET, Commentaire romand - Code civil II, 2016, p. 500 nos 117 ss ad art. 518 CC ; ATF 116 II 131 consid. 3a et les références citées).

b. Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b).

c. In casu, l'hoirie agit dans la présente procédure par l'intermédiaire de son exécutrice testamentaire, laquelle a été désignée par la défunte dans son testament public du 10 décembre 2013. Cette qualité a été confirmée par le TPAE selon son attestation du 19 décembre 2018.

En outre, l'hoirie, instigatrice de la procédure par-devant l'intimée et agissant par son exécutrice testamentaire, est directement concernée par la décision querellée, celle-ci portant sur l'estimation à la valeur de rendement de la propriété de la défunte.

Dès lors, la recourante dispose tant de la capacité d'ester, que de la qualité pour recourir dans le cadre de la présente procédure.

3) Le litige porte sur la décision de l'intimée du 10 décembre 2019, fixant la valeur de rendement des parcelles no 1______ de B______, ainsi que nos 10______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de C______, à CHF 1'085'476.- et la charge maximale à CHF 1'190'747.-, considérant notamment que le bien-fonds de la défunte comprenait deux logements non agricoles.

4) Les parties s'accordent sur l'application de la LDFR à la parcelle n° 3______ de C______ sur laquelle se trouve le bâtiment n° 9______. En revanche, leurs approches divergent quant au mode d'estimation de la ferme dans laquelle se trouvent les locaux d'habitation en question.

Tandis que l'intimée considère qu'il s'agit de deux logements distincts, la recourante fait valoir qu'il n'y en a qu'un seul agricole.

5) a. La LDFR a pour but d'encourager la propriété foncière rurale et en particulier de maintenir des entreprises familiales comme fondement d'une population paysanne forte et d'une agriculture productive, orientée vers une exploitation durable du sol, ainsi que d'améliorer les structures (let. a) ; de renforcer la position de l'exploitant à titre personnel, y compris celle du fermier, en cas d'acquisition d'entreprises et d'immeubles agricoles (let. b) ; de lutter contre les prix surfaits des terrains agricoles (let. c ; art. 1 al. 1 LDFR).

b. Selon son art. 2 al. 1, la LDFR s'applique aux immeubles agricoles isolés ou aux immeubles agricoles faisant partie d'une entreprise agricole qui sont situés en dehors d'une zone à bâtir au sens de l'art. 15 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700 ; let. a ; arrêt du Tribunal fédéral 5A.22/2003 du 11 mars 2004) et dont l'utilisation agricole est licite (let. b).

Elle tend, dans cette mesure, à exclure du marché foncier tous ceux qui cherchent à acquérir les entreprises et les immeubles agricoles principalement à titre de placement de capitaux ou dans un but de spéculation (arrêt du Tribunal fédéral 5A.20/2004 du 2 novembre 2004 et les références citées ; ATA/290/2009 du 16 juin 2009).

c. Par entreprise agricole, on entend une unité composée d'immeubles, de bâtiments et d'installations agricoles qui sert de base à la production agricole et qui exige, dans les conditions d'exploitation usuelles dans le pays, au moins une unité de main-d'œuvre standard (UMOS) ; le Conseil fédéral fixe, conformément au droit agraire, les facteurs et les valeurs servant au calcul de l'unité de main-d'œuvre standard (al. 1) ; aux mêmes conditions, les entreprises d'horticulture productrice sont assimilées à des entreprises agricoles (al. 2) ; pour apprécier s'il s'agit d'une entreprise agricole, on prendra en considération les immeubles assujettis à la LDFR (art. 2 ; al. 3) ; doivent, en outre, être pris en considération : les conditions locales (let. a) ; la possibilité de construire des bâtiments manquants nécessaires à l'exploitation ou de transformer, rénover ou remplacer ceux qui existent, lorsque l'exploitation permet de supporter les dépenses correspondantes (let. b) ; les immeubles pris à ferme pour une certaine durée (let. c ; al. 4) ; une entreprise mixte est une entreprise agricole lorsqu'elle a un caractère agricole prépondérant (al. 5 ; art. 7 LDFR).

L'UMOS sert à mesurer la taille d'une exploitation au moyen de facteurs standardisés basés sur des données d'économie du travail (art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur la terminologie agricole et la reconnaissance des formes d'exploitation du 7 décembre 1998 - Oterm - RS 910.91). Le nombre d'UMOS par hectare de surface agricole utile est fixé à 0,022, à l'exception des cultures spéciales (dont la vigne, art. 15 OTerm) pour lesquelles le nombre d'UMOS est plus élevé (art. 3 al. 2 OTerm). Selon l'art. 3A LaLDFR, les entreprises agricoles d'une taille égale ou supérieure à 0,6 UMOS sont soumises aux dispositions sur les entreprises agricoles. 

L'entreprise agricole ou, dans l'ancien droit successoral paysan, l'exploitation agricole, ne dépend pas de l'activité exercée par le propriétaire. Le Tribunal fédéral a ainsi pu mettre en évidence, en 1963 (ATF 89 II 18), que la qualité d'exploitation agricole, au sens de l'ancien art. 620 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), ne dépend pas de la profession exercée par le de cujus. Le terme d'exploitation figurant dans la loi vise non l'activité professionnelle mais la condition matérielle de son exercice, c'est-à-dire l'entreprise au sens objectif, comprenant l'ensemble des installations. Cet avis était également partagé par la doctrine.

Ceci permet de mettre en évidence une divergence avec le concept d'exploitation au sens de l'art. 6 OTerm. En effet, cette norme exige pour reconnaître une exploitation que l'entreprise agricole soit autonome sur les plans juridique, économique, organisationnel et financier et qu'elle soit indépendante d'autres exploitations. Or, le défaut de pouvoir de l'exploitant de prendre des décisions concernant la gestion de son exploitation indépendamment des exploitants d'autres entreprises agricoles permet de lui dénier cette autonomie. Puisque cette capacité est également partie prenante de la définition d'exploitant à titre personnel au sens de l'art. 9 LDFR, on peut dire que le défaut d'exploitant fait obstacle à l'exploitation agricole mais non pas à l'entreprise agricole (Yves DONZALLAZ, Traité de droit agraire suisse : droit public et droit privé, 2006, tome II, n. 2466 s. p. 330).

Une entreprise agricole comprend normalement une maison d'habitation, qui en constitue une partie intégrante. Même si elle est située en zone à bâtir, il s'agit, conformément à l'art. 2 al. 2 let. a LDFR, d'un immeuble agricole en tant que partie intégrante d'une entreprise (Eduard HOFER, in Christoph BANDLI et al., Le droit foncier rural, Commentaire de la LDFR, 1998, n. 25 s. ad art. 7 LDFR).

d. Selon l'art. 8 LDFR, les dispositions sur les immeubles agricoles isolés s’appliquent à l’entreprise agricole lorsque celle-ci :

-            est licitement affermée par parcelles, en tout ou en majeure partie, depuis plus de six ans, dans la mesure où l’affermage n’a pas un caractère temporaire ni ne se fonde sur des raisons tenant à la personne du bailleur au sens de l’art. 31 al. 2 let. e et f de la loi fédérale sur le bail à ferme agricole du 4 octobre 1985 (LBFA - RS 221.213.2 ; let. a) ;

-            n’est plus digne d’être maintenue, quelle que soit sa grandeur, en raison d’une structure d’exploitation défavorable (let. b).

L'art. 31 al. 2 let. f LBFA prévoit que l’autorisation (d'affermage par parcelles) n’est accordée que si le bailleur n’est plus en mesure d’exploiter
lui-même tout le domaine pour des raisons telles que maladie grave ou âge avancé.

En insérant l'art. 8 let. a LDFR, le législateur a entendu procéder à une certaine sélection des entreprises agricoles. Spécialement, il a voulu favoriser le lien entre elles et leurs exploitants. Il a ainsi jugé plus judicieux au terme du délai de six ans de les faire bénéficier du régime prévalant pour les immeubles agricoles, au motif qu'il s'agissait de favoriser leur exploitation par les fermiers, respectivement leur acquisition par ces derniers.

En outre, on ne peut ignorer le fait que la norme ait abouti, en quelque sorte, à institutionnaliser le régime qui prévaut fort souvent en cas de décès de l'exploitant à titre personnel dès lors qu'aucun descendant n'entend reprendre l'entreprise. En effet, dans une telle situation, il n'est pas rare que les locaux d'habitation soient utilisés par le conjoint survivant ou les autres proches du de cujus, alors que les immeubles sont affermés à des agriculteurs de la région. Ce n'est souvent qu'au décès du dernier des conjoints que le partage a lieu. À ce moment, l'intégration des parcelles à plusieurs autres exploitations des environs favorise souvent leur aliénation (Yves DONZALLAZ, op. cit., n. 2854 s. p. 456 s. ; cf. également Eduard HOFER, op. cit., n. 4 ss ad art. 8 LDFR p. 194 s.).

e. La notion d'entreprise agricole revêt une importance juridique dans la LDFR puisque cette loi vise notamment à les protéger (art. 1 al. 1 let. a LDFR). Ainsi, par exemple, les entreprises agricoles doivent être maintenues en ce sens qu'elles ne peuvent pas être partagées matériellement (art. 58 ss LDFR) et que leur acquisition est soumise à une autorisation (art. 61 ss LDFR) ; elles sont aussi le préalable nécessaire à l'exercice de certains droits, tel le droit d'emption des parents (art. 25 LDFR) ou de préemption du fermier (art. 47 LDFR). Selon la jurisprudence, il faut dégager le sens de la notion d'entreprise de façon plus détaillée dans chaque contexte de fait (ATF 129 III 693 consid. 5.2).  

Le contexte est aussi important pour déterminer le moment auquel il faut se placer quant à l'appréciation de l'existence d'une entreprise agricole (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1085/2013 du 21 mai 2015 consid. 5.1 et les références citées). 

6) a. Aux termes de l'art. 50 let. c LIPP, qui fixe les principes d'estimation des immeubles relativement à l'impôt sur la fortune, les immeubles servant à l'exploitation agricole sont évalués à leur valeur de rendement calculée selon le droit fédéral, soit conformément à l'art. 10 LDFR (ATA/661/2015 du 23 juin 2015).

b. D'après cette disposition, la valeur de rendement équivaut au capital dont l’intérêt, calculé au taux moyen applicable aux hypothèques de premier rang, correspond au revenu d’une entreprise ou d’un immeuble agricole exploité selon les usages du pays. Le revenu et le taux sont fixés d’après une moyenne pluriannuelle (période de calcul ; al. 1). Le Conseil fédéral règle le mode et la période de calcul, ainsi que les modalités de l’estimation (al. 2). Les surfaces, bâtiments et installations, ainsi que les parties de ceux-ci qui ne sont pas utilisés à des fins agricoles (parties non agricoles) sont pris en compte dans l’estimation à la valeur de rendement découlant de leur usage non agricole (al. 3).

c. L'art. 2 al. 1 ODFR précise que les dispositions pour l’estimation de la valeur de rendement agricole figurent à l’annexe. Les principes suivants s’appliquent :

-       en ce qui concerne les entreprises agricoles, le sol, les bâtiments d’exploitation, les bâtiments alpestres, le logement du chef d’exploitation et les chambres des salariés nécessaires pour l’activité agricole sont estimés conformément aux dispositions agricoles du guide d’estimation ; les constructions ou parties de constructions qui servent à des activités accessoires proches de l’agriculture sont estimées sur la base des résultats d’exploitation conformément à la description dans le guide d’estimation ; les logements en sus du logement du chef d’exploitation et les bâtiments destinés aux activités accessoires non agricoles sont estimés selon les dispositions non agricoles (let. a) ;

-       en ce qui concerne les immeubles agricoles, le sol, les bâtiments d’exploitation et les bâtiments alpestres sont estimés conformément aux dispositions du guide d’estimation ; les logements, éléments du bâti et autres bâtiments destinés à des activités accessoires non agricoles doivent être estimés selon les dispositions non agricoles (let. b).

Les dispositions et les taux figurant à l'annexe lient les organes d'estimation (art. 2 al. 2 ODFR).

L'estimation doit tenir compte des jouissances, droits, charges et servitudes attachés aux immeubles et aux entreprises agricoles (art. 2 al. 3 ODFR).

Les modalités d'estimation ne sont pas comprises dans l'ordonnance, mais dans le Guide 2018 qui constitue une annexe à l'ordonnance. Seul le Guide 2018 lie directement ceux qui sont chargés de son application. Le Guide 2018 est un décret de nature technique qui s'adresse uniquement aux spécialistes, à savoir les estimateurs (Eduard HOFER, in Christoph BANDLI et al., op. cit. n. 2 ad art. 10, p. 227). Ce document, non publié au Recueil systématique des lois fédérales, a pourtant force obligatoire en ce qui concerne les règles et indications numériques qu'il contient (Yves DONZALLAZ, Commentaire de la LDFR, 1993, n. 148 ad art. 10 p. 66).

d. D'après le Guide 2018, lorsqu’une entreprise agricole compte plus d’un logement, le logement du chef d’exploitation sera déterminé selon les critères suivants : le logement est durablement occupé par la famille du chef d’exploitation ; le logement est proche du centre de l’exploitation ; le logement est celui qui compte le plus d’unités de locaux ; le logement est situé au
rez-de-chaussée du bâtiment. Est considéré comme logement du chef d’exploitation, le logement qui remplit le plus grand nombre des critères
ci-dessus. Il ne doit pas nécessairement être occupé par le chef d’exploitation au moment de l’estimation (n° 4.2 p. 47). Les logements autres que celui du chef d’exploitation (surface supérieure à la place normalement nécessaire à l’exploitation) sont estimés à la valeur capitalisée du loyer réalisable à long terme. Si l’exploitation n’est pas une entreprise agricole, tous les logements sont estimés de cette manière (n° 4.6 p. 54).

7) a. En l'espèce, dans ses écritures responsives, l'intimée a relevé que la décision querellée avait été prononcée sur la base du rapport du collège d'experts du 20 novembre 2019, lui-même fondé sur le questionnaire de détermination de la valeur locative 2018 de la défunte, pour considérer que le domaine en question comprenait deux logements non agricoles. La configuration de la propriété ne permettait pas de retenir l'existence d'un seul logement. En outre, la recourante n'étant ni exploitante à titre personnel ni propriétaire exploitant de la surface agricole litigieuse, les logements litigieux ne pouvaient être considérés comme des habitations agricoles. Ils devaient donc être estimés selon les règles usuelles non agricoles, soit le loyer réalisable dans la région.

b. À titre liminaire, il apparaît que le partage successoral n'a pas été effectué. Il s'agit donc de déterminer si le patrimoine de la défunte comporte ou non une entreprise agricole.

Tout d'abord, il ressort du rapport d'expertise du 20 novembre 2019 que les parcelles no 1______ de la commune de B______, ainsi que nos 2______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______, représentent une surface totale de 247'543 m2, dont 10'473 m2 en vignes et 1'646 m2 en forêt. De plus, la parcelle n° 3______ précitée comporte plusieurs bâtiments, qualifiés globalement d'ateliers, de remises carrossables et d'entrepôts, dont des habitations (bâtiment n° 9______). L'usage agricole desdits bâtiments et immeubles est admis. Compte tenu de ces éléments, soit en particulier sa surface, ses types de cultures, ses bâtiments et sa destination agricole, au regard des bases légales applicables, le domaine en question constitue manifestement une entreprise agricole au sens des art. 7 al. 1 LDFR et
3A LaLDFR.

À cela s'ajoute que les défunts propriétaires des parcelles susmentionnées les exploitaient eux-mêmes en tant qu'agriculteurs, avant de les remettre en affermage à M. F______, à tout le moins en 1998 – élément non contesté. Ils étaient alors âgés respectivement de 74 ans et 71 ans. Ils n'ont conservé que leur logement, sis dans le bâtiment n° 9______, dans lequel feu Mme A______ a résidé jusqu'à son décès en 2018, à l'âge de 91 ans. Il en résulte que les défunts propriétaires n'ont résidé dans la ferme que durant une vingtaine d'années tout au plus, sans exploiter eux-mêmes le domaine, et ce pour des raisons d'âge évidentes. Ces circonstances ressortissent clairement au cas prévu par le législateur comme exception à l'art. 8 let. a LDFR par renvoi à l'art. 31 al. 2 let. f LBFA.

Ainsi, malgré son affermage en majeure partie en faveur de M. F______ depuis à tout le moins 1998, soit plus de six ans, cette entreprise agricole reste soumise aux conditions qui lui sont relatives au sens de la LDFR.

c. Cette perspective implique qu'à ce titre, elle comprend un logement pour le chef d'exploitation, lequel n'est pas nécessairement habité par celui-ci. La parcelle n° 3______ est le seul immeuble composant l'entreprise agricole sur lequel sont érigés des bâtiments agricoles, ne comprenant qu'un bâtiment d'habitation (bâtiment n° 9______). Il s'ensuit qu'en tant qu'habitation de son entreprise agricole, le logement de feu Mme A______ doit être estimé selon les modalités visant le logement du chef d'exploitation. À cet égard, peu importe que la défunte n'était plus l'exploitante à titre personnel de l'entreprise agricole. Conformément au Guide 2018, il convient donc de déterminer les unités de locaux appartenant au chef d'exploitation, celles supplémentaires devant être estimées sur la base du loyer effectivement réalisable dans la région.

À cet égard, contrairement à l'approche de l'intimée, c'est bien le droit fiscal qui renvoie expressément à la LDFR et ses dispositions d'application pour l'estimation des immeubles agricoles, et non l'inverse. Seules celles-ci permettent donc de déterminer de quelle manière doit être estimé le bâtiment n° 9______. Par conséquent, l'intimée ne saurait se fonder sur des formulaires de détermination de la valeur locative 2018 des logements du bâtiment n° 9______, pour lesquels aucune indication n'est fournie quant à la manière dont ils ont été établis, alors que feu Mme A______ est décédée le 1er décembre 2018. À cela s'ajoute que rien n'explique pour quelles raisons le collège d'experts de la CFA s'est écarté de son rapport du 18 juin 2008, retenant – à juste titre – une seule habitation avec une estimation complémentaire pour la place disponible en plus de la place normalement nécessaire, alors que les conditions étaient identiques. En effet, tel qu'indiqué précédemment, à défaut de partage successoral, la situation devait être examinée sous l'angle de celle prévalant pour feu Mme A______ au moment de son décès. Cette solution apparaît d'autant plus justifiée que l'identité des héritiers demeure incertaine à ce jour en raison de la procédure civile pendante par-devant le Tribunal fédéral, qu'elle correspond aux buts de la LDFR, concrétisés par la volonté de feu Mme A______, exprimée dans son testament public du 10 décembre 2013, que son « patrimoine continue à être exploité sous forme agricole », ainsi que le maintien du bail à ferme en faveur de M. F______.

d. Au vu de ce qui précède, c'est à tort que l'intimée a considéré que l'habitation du bâtiment n° 9______ de la parcelle n° 3______ de la commune de C______ représentait deux appartements distincts devant être estimés selon les dispositions non agricoles, soit à la valeur capitalisée du loyer réalisable selon les usages locaux. Dans la mesure où la propriété de la défunte constitue une entreprise agricole, l'estimation de l'habitation du bâtiment n° 9______ doit être effectuée, en l'état, selon les dispositions relatives au logement du chef d'exploitation prévoyant que celui-ci est estimé à la valeur de rendement agricole, à l'exception de la surface supérieure à la place normalement nécessaire à l'exploitation, estimée à la valeur capitalisée du loyer réalisable à long terme.

8) Partant, le recours sera admis et la décision querellée annulée. La cause sera renvoyée à l'intimée pour nouvelle estimation et décision sur la valeur de rendement des parcelles no 1______ de la commune de B______, ainsi que nos 2______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______, au sens des considérants qui précèdent concernant en particulier le bâtiment n° 9______ de la parcelle n° 3______ de C______.

9) Malgré l'issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge de l'intimée (art. 87 al. 1, 2ème phr. LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'État de Genève, sera allouée à la recourante, qui l'a sollicitée et est représentée par son exécutrice testamentaire (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 janvier 2020 par l'Hoirie de feu Mme A______ contre la décision de la commission foncière agricole du 10 décembre 2019 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision de la commission foncière agricole du 10 décembre 2019 ;

renvoie la cause à la commission foncière agricole pour nouvelle décision sur la valeur de rendement des parcelles no 1______ de la commune de B______, ainsi que nos 2______, 3______, 4______, 5______, 6______, 7______ et 8______ de la commune de C______ au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à l'Hoirie de feu Mme A______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à la charge de l'État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me E______, exécutrice testamentaire de la recourante, à la commission foncière agricole, à l'office fédéral de la justice, ainsi qu'à l'office fédéral de l'agriculture (OFAG).

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :